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25/01/2022 | FRANCE | N°20VE00311

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 25 janvier 2022, 20VE00311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une

carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour et, enfin, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1906167 du 25 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans, et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2020 et régularisée le 12 janvier 2021, M. B..., représenté par Me Walther, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 novembre 2019 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

2°) d'annuler dans cette mesure l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros de jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des articles

L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Walther renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit en considérant qu'il ne pouvait utilement invoquer l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le cadre d'une demande de titre de séjour portant la mention " salarié ", alors que sa demande portait sur un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

- l'arrêté attaqué a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de celle portant refus de séjour.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Danielian a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien né le 2 janvier 1988 à Tataouine (Tunisie), a sollicité, le 28 mai 2018, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté en date du 11 mars 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Il fait appel du jugement du 25 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil, après avoir prononcé l'annulation de la décision prononçant l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titre de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". L'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissant de l'autre Etat tous titre de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ". L'article 3 du même accord stipule que " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétences, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié" ".

3. S'il résulte des stipulations de l'accord franco-tunisien précité que ces dernières régissent de manière intégrale la situation des ressortissants tunisiens au regard de leur droit au travail, et par suite, la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié de telle sorte que les dispositions de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la régularisation exceptionnelle par le travail ne trouvent pas à s'appliquer, il n'en va toutefois pas de même des dispositions du même article afférentes à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le cadre d'une admission exceptionnelle au séjour pour laquelle les stipulations de l'accord

franco-tunisien du 17 mars 1988 ne prévoient pas de dispositions spécifiques applicables à ces ressortissants. Ainsi, et conformément à l'application qui en a été faite par les premiers juges, les dispositions de l'article L. 313-14 sont applicables aux ressortissants tunisiens s'agissant de la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

4. D'une part, si M. B... soutient résider en France depuis mars 2008, les pièces versées au dossier ne permettent pas d'attester d'une résidence habituelle depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, notamment s'agissant de l'année 2012 pour laquelle il se borne à produire un avis d'impôt sur le revenu de 2011, qui n'est pas de nature à justifier d'une quelconque présence en France, a fortiori continue au titre de cette année et des résultats d'analyses médicales en date du 21 décembre. N'établissant ainsi pas avoir été présent en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, il n'est pas fondé à soutenir que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour aurait dû être soumise par le préfet de la Seine-Saint-Denis à la commission du titre de séjour en application de l'article L. 313-14 précité.

5. D'autre part, M. B... fait valoir qu'il justifie, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, de plusieurs motifs exceptionnels de nature à permettre de faire droit à sa demande de délivrance, à titre exceptionnel, d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il indique en ce sens démontrer sa présence continue en France depuis mars 2008, être parfaitement intégré dans la société, maîtriser la langue française, n'avoir jamais commis de trouble à l'ordre public et s'acquitter de ses obligations fiscales. Cependant, contrairement à ce qu'il soutient, l'intéressé n'établit pas, par les seules pièces qu'il produit, ainsi qu'il résulte du point 4., le caractère habituel et continu de sa résidence en France. En outre, M. B..., qui est célibataire et sans charge de famille, ne produit aucun élément relatif aux liens qu'il a pu tisser en France depuis 2008. Si son père réside sur le territoire national, il n'apporte aucun élément de nature à établir la nécessité de rester auprès de lui. Il n'est, par ailleurs, pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel résident ses huit frères et sœurs où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans. Dans ces conditions, le requérant ne peut être regardé comme justifiant de circonstances humanitaires ou d'un motif exceptionnel d'admission au séjour au titre de la vie privée et familiale au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la décision portant l'obligation de quitter le territoire français :

6. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence, de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et présentées au titre des frais de l'instance doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

2

N° 20VE00311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00311
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Isabelle DANIELIAN
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : WALTHER

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-25;20ve00311 ?
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