La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2021 | FRANCE | N°21VE02665

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 17 décembre 2021, 21VE02665


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 25 mai 2021 du préfet de l'Essonne portant transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2104652 du 13 août 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire enregistrés le 18 septembre 2021 et le 2 novembre 2021, sous le n° 21VE02665, M. D..., représenté par Me Fauveau Iva

novic, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 25 mai 2021 du préfet de l'Essonne portant transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2104652 du 13 août 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire enregistrés le 18 septembre 2021 et le 2 novembre 2021, sous le n° 21VE02665, M. D..., représenté par Me Fauveau Ivanovic, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 25 mai 2021 ;

2°) d'enjoindre au préfet d'enregistrer sa demande d'asile en procédure normale dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat en applications des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le délai de saisine des autorités italiennes, prévu à l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013, est dépassé.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2021, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures en première instance.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2021

II. Par une requête et un mémoire enregistrés le 25 septembre et le 2 novembre 2021, sous le n° 21VE02689, M. D..., représenté par Me Fauveau Ivanovic, avocat, demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Versailles du 13 août 2021 ;

2°) de mettre à la charge de de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son avocat en applications des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conséquences de l'exécution du jugement seront difficilement réparables ;

- il y a un moyen sérieux énoncé dans la requête tenant à la méconnaissance du délai de saisine des autorités italiennes.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2021, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures en première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme B....

1. M. D..., ressortissant ivoirien né le 12 janvier 1999, a déposé une demande d'asile en France le 8 janvier 2021. La consultation du fichier " Eurodac " a révélé le même jour que ses empreintes avaient été relevées en Italie le 2 décembre 2020 sous le numéro IT 2 AG056PE. Une demande de prise en charge a été adressée aux autorités italiennes le 9 mars 2021, évoquant le b du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement (UE) n°604/2013 mais se référant au paragraphe 2 de l'article 21 du même règlement et faisant état d'une absence de procédure antérieure de demande de protection internationale. Cette requête a fait l'objet d'un accord implicite et un message en demandant confirmation et évoquant une requête de prise en charge acceptée en vertu de l'article 22-7 du règlement (UE) n°604/2013 a été adressée aux autorités italiennes. Par un arrêté du 25 mai 2021, le préfet de l'Essonne a décidé le transfert de M. D... aux autorités italiennes en mentionnant une demande de prise en charge en application de l'article 13-1 du règlement (UE) n°604/2013 et une acceptation implicite en application de l'article 22-7 du même règlement. Par un jugement du 13 août 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal de Versailles a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par les présentes requêtes, M. D... fait appel de ce jugement et demande à ce qu'il soit sursis à son exécution.

Sur la requête n° 21VE02665 :

2. Aux termes, d'une part, de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, dont l'applicabilité à la situation de M. D... est invoquée par les deux parties : " L'Etat membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre Etat membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date d'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre Etat membre aux fins de prise en charge du demandeur. Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif (" hit ") Eurodac (...), la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif (...). Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéa, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'Etat membre auprès duquel la demande a été introduite (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 du même règlement : " (...) 7. L'absence de réponse à l'expiration du délai de deux mois mentionné au paragraphe 1 et du délai d'un mois prévu au paragraphe 6 équivaut à l'acceptation de la requête et entraîne l'obligation de prendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ".

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 42 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Les délais prévus dans le présent règlement sont calculés de la façon suivante : a) si un délai exprimé en jours, en semaines ou en mois est à compter à partir du moment où survient un évènement ou s'effectue un acte, le jour au cours duquel survient cet évènement ou se situe cet acte n'est pas compté dans le délai ; b) un délai exprimé en semaines ou en mois prend fin à l'expiration du jour qui, dans la dernière semaine ou dans le dernier mois, porte la même dénomination ou le même chiffre que le jour au cours duquel est survenu l' évènement ou a été effectué l'acte à partir duquel le délai est à compter. Si, dans un délai exprimé en mois, le jour déterminé pour son expiration fait défaut dans le dernier mois, le délai prend fin à l'expiration du dernier jour de ce mois ; (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est vu délivrer une attestation de dépôt de demande d'asile le 8 janvier 2021 et qu'une consultation du fichier Eurodac le même jour a révélé que ses empreintes avaient été relevées précédemment en Italie. Il ressort également des pièces du dossier que les autorités italiennes ont été saisies d'une demande de prise en charge le 9 mars 2021. Au regard des règles de calcul exposées au b de l'article 42 du même règlement, le délai de saisine des autorités italiennes prévu à l'article 21 précité expirait toutefois le 8 mars 2021, soit deux mois après l'évènement que constitue le " hit " Eurodac survenu le 8 janvier 2021. Il suit de là que la saisine de ces autorités était tardive et que la France est responsable de l'examen de la demande d'asile de M. D..., en application de l'article 21 précité. M. D... est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande et à demander, pour ce motif, l'annulation de l'arrêté de transfert du 25 mai 2021.

5. Une annulation prononcée en raison du non-respect du délai de deux mois imposé par l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 implique nécessairement que la France soit responsable de l'examen de la demande d'asile et que soient prises les mesures qui en découlent. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne d'enregistrer la demande d'asile de M. D..., dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur la requête n° 21VE02689 :

6. Le présent arrêt statue sur la requête de M. D... dirigée contre le jugement attaqué. Par suite, la requête susvisée tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement est privée d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les frais liés aux litiges :

7. M. D... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale le 16 octobre 2021, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, la somme globale de 1500 euros, à verser au conseil du requérant sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21VE02689 de M. D....

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Essonne du 25 mai 2011 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne d'enregistrer la demande d'asile de M. D... dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera au conseil de M. D... la somme globale de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : le surplus des conclusions de la requête n° 21VE02665 est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Albertini, président de chambre,

- M. Mauny, président-assesseur,

- Mme Moulin-Zys, rapporteure,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.

Le rapporteur,

O. C... Le président,

P.-L. ALBERTINI

La greffière,

F. PETIT-GALLANDLa République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N°s 21VE02665, 21VE02689 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02665
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : FAUVEAU IVANOVIC;FAUVEAU IVANOVIC;FAUVEAU IVANOVIC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-12-17;21ve02665 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award