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14/10/2021 | FRANCE | N°18VE04202

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 14 octobre 2021, 18VE04202


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le société ESTB a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'office public de l'habitat (OPH) d'Aulnay-sous-Bois à lui verser la somme de 47 262,92 euros TTC au titre du solde du marché conclu le 22 mai 2013 pour la réhabilitation et l'amélioration de neuf logements et de mettre à la charge de l'OPH le versement de la somme de 7 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1711509 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Mont

reuil a condamné l'OPH d'Aulnay-sous-Bois à verser la somme de 47 262,92 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le société ESTB a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner l'office public de l'habitat (OPH) d'Aulnay-sous-Bois à lui verser la somme de 47 262,92 euros TTC au titre du solde du marché conclu le 22 mai 2013 pour la réhabilitation et l'amélioration de neuf logements et de mettre à la charge de l'OPH le versement de la somme de 7 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1711509 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a condamné l'OPH d'Aulnay-sous-Bois à verser la somme de 47 262,92 euros à la société ESTB et a mis la somme de 2 000 euros à la charge de l'OPH au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 décembre 2018, l'OPH d'Aulnay-sous-Bois, représenté par Me Cayla-Destrem, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société ESTB devant le tribunal administratif de Montreuil ;

3°) de mettre à la charge de la société ESTB le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la société ESTB ne lui a pas adressé de mémoire en réclamation dans le délai prévu à l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux (CCAG-Travaux), dès lors que le courrier du 5 mai 2017 ne présente pas le caractère d'un mémoire en réclamation en l'absence de réclamation chiffrée, de pièces justificatives et des raisons détaillées et précises de la contestation du décompte général ;

- la somme de 47 262,92 euros correspondant aux pénalités et retenues relatives au remboursement de deux particuliers, à l'absence de déménagement du garde meuble et aux ordres de services n°193, 703, 1072 et 568, est fondée.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG-Travaux) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Camenen,

- et les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat conclu le 22 mai 2013, l'office public de l'habitat (OPH) d'Aulnay-sous-Bois a confié à la société ESTB l'exécution d'un marché de réhabilitation et d'amélioration de neuf logements, pour un montant de 528 593,10 euros HT, soit 565 594,62 euros TTC. Après réception des travaux, prononcée le 1er décembre 2014, la société ESTB a adressé son projet de décompte final au maître d'œuvre et au maître d'ouvrage. Par une lettre du 24 avril 2017, reçue le 27 avril 2017, l'OPH a notifié le décompte général du marché à la société ESTB faisant apparaître des pénalités et des retenues d'un montant total de 47 927,77 euros TTC et un solde de 8 348,85 euros. Par une lettre du 5 mai 2017, la société ESTB a refusé de signer ce décompte général estimant injustifiées les pénalités et retenues appliquées par l'OPH. La seule somme de 8 348,85 euros a été versée à la société ESTB le 14 juin 2017. La société ayant vu sa réclamation rejetée a saisi le tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement du 18 octobre 2018, a condamné l'OPH d'Aulnay-sous-Bois à lui verser la somme de 47 262,92 euros TTC au titre du règlement du marché. L'OPH d'Aulnay-sous-Bois relève appel de ce jugement. Par voie d'appel incident, la société ESTB demande à la cour de condamner l'OPH d'Aulnay-sous-Bois à lui verser les intérêts moratoires capitalisés sur la somme de 47 262,92 euros ainsi que l'indemnité pour frais de recouvrement.

Sur l'appel principal de l'OPH d'Aulnay-sous-Bois :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mémoire en réclamation :

2. En vertu de l'article 13.4 du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de travaux (CCAG Travaux) applicable au marché litigieux, en cas de contestation sur le montant des sommes dues au titre du décompte du marché, ce désaccord est réglé dans les conditions mentionnées à l'article 50. Aux termes de l'article 50.1.1 de ce CCAG : " (...) Dans son mémoire en réclamation, le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants. (...) Si la réclamation porte sur le décompte général du marché, ce mémoire est transmis dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que, dans son courrier du 5 mai 2017, la société ESTB a refusé de signer le décompte général du marché du 24 avril 2017 et a précisé les motifs de son refus en indiquant que les pénalités et retenues appliquées par l'OPH, dont le détail était donné dans le décompte joint en annexe, n'étaient pas justifiées, à l'exception d'une retenue de 664,85 euros au titre du " remplacement de la pompe eau chaude sanitaire " qu'elle a acceptée. Deux courriers antérieurs de la société ESTB relatifs aux retards du bureau de contrôle, qui étaient restés sans réponse, ont également été joints à ce courrier du 5 mai 2017. Ce courrier et le décompte annoté joint en annexe permettaient à l'OPH de connaître précisément la nature, l'étendue et les raisons de la contestation dont il a été saisi. Il doit être regardé comme un mémoire en réclamation au sens des stipulations précitées de l'article 50.1.1 du CCAG Travaux. Ainsi, l'OPH d'Aulnay-sous-Bois n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mémoire en réclamation de la société ESTB.

En ce qui concerne le bien-fondé des pénalités de retard et des retenues :

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le décompte général notifié par l'OPH d'Aulnay-sous-Bois fait application de pénalités de retard d'un montant de 20 000 euros. L'OPH indique que les pénalités de retard applicables à la société ESTB s'élevaient à la somme de 84 000 euros, soit 56 jours calendaires de retard, mais qu'il a été décidé d'en limiter le montant à la somme de 20 000 euros à la suite d'une réunion qu'il a tenue avec l'entreprise. Toutefois, aucun élément ne permet d'établir l'existence d'un accord entre les parties concernant l'application de ces pénalités de retard limitées à la somme de 20 000 euros. En outre, le courrier du 13 juin 2014 produit par l'OPH ne suffit nullement à justifier l'existence et l'importance d'un retard de la société ESTB. Enfin, cette dernière soutient sans être contestée que le retard dans l'exécution des travaux n'est imputable qu'au bureau de contrôle. Dans ces conditions, l'OPH n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du bien-fondé des pénalités de retard appliquées à la société ESTB.

5. En second lieu, il résulte du décompte général du 24 avril 2017 que l'OPH d'Aulnay-sous-Bois a appliqué des retenues correspondant au remboursement de deux particuliers à hauteur de 4 478,95 et 6 265,02 euros et à l'absence de déménagement du garde meuble à hauteur de 4 686,24 euros. Il a également appliqué des retenues pour l'installation d'une antenne hertzienne à hauteur de 2 142,80 euros, pour la création d'une colonne téléphone partie commune à hauteur de 2 739 euros, pour la création d'une colonne téléphone logements à hauteur de 5 318,50 euros et pour le branchement d'une ligne de téléphone à hauteur de 1 632,41 euros. Toutefois, d'une part, l'OPH n'apporte aucune précision complémentaire concernant la nature de ces retenues permettant de contredire l'affirmation de la société ESTB selon laquelle les opérations objets de ces retenues incombent à d'autres entreprises. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction que les prestations faisant l'objet de ces retenues font partie des obligations contractuelles de la société ESTB. D'autre part, l'OPH d'Aulnay-sous-Bois ne produit aucun élément permettant de justifier le montant de ces retenues. Dans ces conditions, celles-ci ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur montant.

6. Il résulte de ce qui précède que l'OPH d'Aulnay-sous-Bois n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil l'a condamné à verser la somme de 47 262,92 euros à la société ESTB.

Sur les conclusions incidentes de la société ESTB :

7. En premier lieu, la société ESTB sollicite, pour la première fois en appel, le versement, à compter du 5 mai 2017, d'intérêts moratoires contractuels capitalisés sur la somme de 47 262,92 euros correspondant au solde du marché. Toutefois, le paiement du solde devant être effectué dans un délai de 35 jours conformément aux stipulations de l'article 3.2.4.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) applicable au marché et le défaut de paiement dans ce délai faisant courir de plein droit les intérêts moratoires au taux légal conformément aux stipulations de l'article 3.2.4.2 de ce CCAP, la société ESTB est seulement fondée à demander l'application des intérêts moratoires contractuels au taux légal à compter du 19 juin 2017, soit 35 jours après la réception du mémoire en réclamation du 5 mai 2017 par l'administration. Par ailleurs, la capitalisation des intérêts a été demandée le 12 avril 2019, date à laquelle il était dû au moins une année d'intérêts. Ainsi, les intérêts moratoires doivent être capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure.

8. En second lieu, la société ESTB est également fondée à demander, pour la première fois en appel, le versement de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 euros alors prévue par l'article 9 du décret du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société ESTB, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'OPH d'Aulnay-sous-Bois demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de l'OPH d'Aulnay-sous-Bois une somme de 2 000 euros à verser à la société ESTB sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'OPH d'Aulnay-sous-Bois est rejetée.

Article 2 : L'OPH d'Aulnay-sous-Bois est condamné à verser à la société ESTB les intérêts moratoires au taux légal sur la somme de 47 262,92 euros à compter du 19 juin 2017, ces intérêts étant capitalisés à la date du 12 avril 2019 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : L'OPH d'Aulnay-sous-Bois versera la somme de 2 000 euros à la société ESTB au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société ESTB est rejeté.

N° 18VE04202 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE04202
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme SAUVAGEOT
Avocat(s) : CAYLA-DESTREM

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-10-14;18ve04202 ?
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