Vu les autres pièces des dossiers, y compris celles visées par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 10 novembre 2020.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... ;
- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt du 10 novembre 2020, la cour, après avoir annulé à la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 4 juin 2019, en tant qu'il concernait la décision de refus de titre de séjour de M. C..., et rejeté les conclusions de la demande de première instance de ce dernier tendant à l'annulation de cette décision, a, avant de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il concernait l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, transmis au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, une questions portant sur l'assimilation des périodes d'incarcération à des périodes de résidence habituelle en France au sens du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard du fait que la personne incarcérée ne peut plus être regardée comme résidant en France de son propre gré, et, subsidiairement, une question portant sur les modalités de prise en compte d'une période d'emprisonnement sur la continuité du séjour en France, eu égard notamment à la gravité des faits à l'origine de la condamnation, et à la durée de la peine.
2. Par un avis n° 446427 du 8 avril 2021, le Conseil d'Etat a répondu aux questions posées par la cour.
3. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu protéger de l'éloignement les étrangers qui sont en France depuis l'enfance, à raison de leur âge d'entrée et de leur établissement sur le territoire. Dans ce cadre, les éventuelles périodes d'incarcération en France, si elles ne peuvent être prises en compte dans le calcul d'une durée de résidence, ne sont pas de nature à remettre en cause la continuité de la résidence habituelle en France depuis au plus l'âge de treize ans, alors même qu'elles emportent, pour une partie de la période de présence sur le territoire, une obligation de résidence, pour l'intéressé, ne résultant pas d'un choix délibéré de sa part.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France en 2003, alors qu'il était âgé de moins de treize ans. S'il a été incarcéré entre le 2 juin 2011 et le 30 décembre 2014 puis condamné en 2013 à 6 ans d'emprisonnement par la Cour d'assise des mineurs de la Seine-Saint-Denis pour s'être rendu coupable de viols en réunion, complicité de viols en réunion, vols commis avec violence et en réunion et si, bénéficiaire d'une libération conditionnelle puis placé en semi-liberté, il a à nouveau été condamné en 2015 à un mois de prison pour avoir conduit un véhicule sans permis, ces périodes d'incarcération ne sont pas de nature à remettre en cause la continuité de sa résidence habituelle en France, au sens et pour l'application des dispositions précitées. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne pouvait, sans méconnaitre les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui faire obligation de quitter le territoire français.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé sa décision datée du 13 décembre 2018, par laquelle il a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Ces conclusions de sa a requête doivent par suite être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B..., avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à ce titre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 800 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 4 juin 2019 en tant qu'il concernait la décision datée du 13 décembre 2018 par laquelle la préfet de la Seine-Saint-Denis a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Me B..., avocat de M. C..., une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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N° 19VE02432