Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Etablissements Millet a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine (CASGBS) à lui verser, à titre principal, la somme de 95 311,96 euros et, à titre subsidiaire, la somme de 67 416,42 euros, assortie, en toute hypothèse, des intérêts légaux à compter du 18 février 2015, au titre du règlement du marché concernant le lot n° 7 " menuiseries intérieures " des travaux de construction d'un bâtiment culturel sur la commune de Croissy-sur-Seine (Yvelines) et de mettre à la charge de la CASGBS la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1606934 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Versailles a condamné la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine à verser la somme de 188,66 euros à la société ETS Millet et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 18 décembre 2018 et le 6 mai 2019, la société Etablissements Millet, représentée par Me A..., avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine (CASGBS) à lui verser les sommes suivantes :
- 1 000 euros à titre de remboursement des pénalités de retard,
- 1 196,44 euros au titre de l'actualisation du surcoût lié à l'allongement du chantier,
- 2 149,31 euros au titre des intérêts moratoires,
- 37 774,25 euros au titre des indemnités pour frais d'exploitation supplémentaires de chantier,
- 6 122,64 euros au titre du remboursement des dépenses communes (compte prorata),
- 47 069,32 euros à titre d'indemnité pour absence de contribution aux frais généraux ou subsidiairement 19 173,78 euros à titre d'indemnité pour le surcoût des frais généraux avec intérêts légaux à compter de la réception du mémoire en réclamation, soit à compter du 18 février 2015 ;
3°) de mettre à la charge de la CASGBS le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les pénalités appliquées pour absences aux réunions de chantier ne sont pas justifiées ; une mise en demeure était obligatoire avant l'infliction de la pénalité dès lors que l'article 4.4 du CCAP ne prévoit pas l'absence de mise en demeure préalable ; l'article 4.3 du CCAP sur les pénalités pour retard dans l'exécution des travaux prévoit expressément l'absence de mise en demeure ; les absences aux réunions de chantier étaient autorisées puisque l'article 4.4 du CCAP prévoit que les absences peuvent ne pas faire l'objet de pénalités si elles sont excusées par le maître d'ouvrage ; les absences sanctionnées portent sur des réunions de chantier qui ne la concernaient pas ; ses absences n'ont pas eu pour effet " d'entraver la bonne marche du chantier " selon les termes de l'article 4.4 du CCAP et ne pouvaient donc pas donner lieu à pénalités ; il appartient à la CASGBS d'apporter la preuve qu'elle l'a convoquée aux réunions en question ce qu'elle ne fait pas ; le maître d'oeuvre avait permis aux sociétés non concernées d'être absente aux réunions inutiles (compte-rendu n° 79 du 22 mai 2012) ; s'agissant de la réunion du 18 novembre 2010, la CASGBS n'établit ni la réalité de cette réunion, ni son bien-fondé ni qu'elle l'aurait convoquée ; s'agissant de la réunion du 4 janvier 2011, la CASGBS n'établit ni la réalité de cette réunion, ni son bien-fondé ni qu'elle l'aurait convoquée alors qu'il y a bien eu une réunion de chantier le 5 janvier 2011 à laquelle elle n'a pas été convoquée ; s'agissant de la réunion n° 10 du 12 janvier 2011, elle a été décidée lors de la réunion du 5 janvier 2011 à laquelle elle n'a pas été conviée et elle n'a donc pas été convoquée ; s'agissant des réunions n° 30 du 1er juin 2011, du 2 novembre 2011, n° 56 du 7 décembre 2011, n° 61 du 18 janvier 2012, n° 68 du 29 février 2012, n° 72 du 4 avril 2012 et celle du 22 mai 2012, elles ne la concernaient pas ce qui explique sans doute qu'elle n'ait jamais été convoquée ; en tout état cause, son absence à ces réunions n'a eu aucune conséquence puisqu'elle a exécuté les travaux dans les délais impartis ;
- elle est fondée à demander l'actualisation des prix du marché ; l'article 6 de l'acte d'engagement prévoit que " les prix sont fermes et actualisables " ; conformément à l'article 2.1 du CCAP relatif aux pièces constitutives du marché, l'acte d'engagement est situé avant le CCAP dans l'ordre de priorité ; l'article 2.2 du CCAP relatif aux pièces générales qui prévoit qu' " en cas de contradiction entre plusieurs documents, il sera retenu celui qui présentera la solution la plus avantageuse pour le maître d'ouvrage " est nul car il contrevient à la bonne foi dans les relations contractuelles ; au demeurant, à supposer même qu'elle soit licite, cette stipulation ne s'applique qu'à l'article 2.2 du CCAP relatif aux pièces générales mais pas à l'article 2.1 du CCAP qui concerne notamment l'acte d'engagement et le CCAP ;
- elle est fondée à obtenir la somme totale de 3 681,87 euros au titre des intérêts moratoires ; l'article 3 de l'acte d'engagement prévoit que " le délai maximal de paiement sur lequel l'acheteur s'engage est de 40 jours " ; selon l'article 98 du code des marchés publics, le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans aucune formalité le bénéfice d'intérêts moratoires ; l'avance forfaitaire a été payée avec 27 jours de retard, la situation n° 2 avec 8 jours de retard, la situation n° 3 avec 13 jours de retard, la situation n° 4 avec 33 jours de retard, la situation n° 5 avec 16 jours de retard, la situation n° 6 avec 30 jours de retard, la situation n° 7 avec 32 jours de retard, la situation n° 8 avec 33 jours de retard, la situation n° 10 avec 39 jours de retard et la situation n° 11 avec 3 jours de retard ;
- elle est fondée à demander la somme 37 774,25 euros en raison de l'allongement du délai de réalisation des travaux et le bouleversement économique du marché ; le maître d'ouvrage a introduit un référé préventif devant le tribunal administratif de Versailles le 12 novembre 2010 alors que l'exécution du marché avait débuté le 20 octobre précédant, interdisant de ce fait le début des travaux ; cette action a eu pour effet de reporter la phase préparatoire de plus de 4 mois et donc de retarder de plusieurs mois la phase de réalisation du gros oeuvre et par suite de tous les intervenants ; les travaux n'ont pu commencer qu'au mois de février 2011 ; les travaux de la société ECB, en charge du gros oeuvre, ont connu un retard substantiel ; le maître d'ouvrage a tardivement transmis à l'OPC l'agrément et l'acceptation des conditions de paiement des sous-traitants ce qui a retardé l'intervention effective des sous-traitants ; le maître d'ouvrage a commis une faute dans son obligation de surveillance et de contrôle des travaux en s'abstenant d'intervenir face aux retards pris dans l'exécution d'une partie des travaux ; l'allongement de la durée des travaux de 55 % constitue un bouleversement de l'économie du marché ; la CASGBS lui a demandé des travaux supplémentaires par un ordre de service n° 1 (fourniture et pose d'un meuble évier pour un montant de 1 296,76 euros HT), par un ordre de service n° 2 (modification des bancs pour un montant de 459 euros HT) ainsi que par deux avenants (avenant n° 1 du 9 août 2013 pour un montant de 34 481,46 euros HT et avenant n° 2 du 26 septembre 2013 d'un montant de 5 598,04 euros HT) ; le montant total des travaux supplémentaires - 44 896,82 euros représente 11,25 % du montant originel du marché ; le bouleversement de la durée d'exécution des travaux, le bouleversement économique du marché et les fautes commises par le maître d'ouvrage dans la surveillance des travaux l'ont contrainte à dépêcher son chargé d'affaires à assister à plus de 40 réunions de chantier et d'OPC d'une durée de cinq heures chacune postérieurement à la date de réception initialement prévue ; elle est donc fondée à être indemnisée du coûts du temps passé sur le chantier, des frais kilométriques ainsi que du temps de trajet ;
- elle est fondée à demander la somme de 6 122,64 euros au titre des dépenses communes supplémentaires gérées par le compte prorata postérieurement au 20 juin 2012 ;
- elle est fondée à demander la somme de 47 069,32 euros au titre de l'indemnité de contribution aux frais généraux ; dès lors qu'elle fonctionne selon la méthode dite de comptabilisation du résultat à l'achèvement, le chiffre d'affaires lié à l'exécution du marché en litige n'a pu être inclus que dans le bilan 2013 ; l'absence de contribution aux frais généraux de 2012 lui a été préjudiciable ; subsidiairement, elle devrait se voir accorder la somme de 19 173,78 euros correspondant au coût des 11 mois de retard en termes de frais généraux calculés sur la base du prix et de la durée du marché (1 743 euros de frais généraux x 11).
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code monétaire et financier ;
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié ;
- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour la société ETS Millets et de Me C..., pour la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 septembre 2010, la société Etablissements Millet s'est vu attribuer le lot n° 7 " menuiseries intérieures " d'un marché public de travaux de construction d'un bâtiment culturel par la communauté de communes de la Boucle de la Seine (CCBS) d'un montant global et forfaitaire de 398 814 euros HT hors options. La réception des travaux a été fixée au 29 mai 2013. A la suite de la mise en demeure adressée par la société Millet le 4 avril 2014, la CCBS lui a adressé le décompte général et définitif du marché le 22 janvier 2015. La société requérante a contesté ce décompte dans un mémoire en réclamation reçu par le maître d'ouvrage le 18 février 2015 et a saisi le comité consultatif interdépartemental de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics de Versailles qui a rendu un avis le 10 juin 2016. Par le jugement du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Versailles a condamné la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine (CASGBS) venant aux droits de la CCBS, à verser la somme de 188,66 euros à la société Millet et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La société Millet demande l'annulation de ce jugement et la condamnation de la CASGBS à lui verser une somme totale de 95 311,96 euros correspondant au solde du lot dont elle était titulaire.
Sur les pénalités pour absence à des réunions de chantier :
2. Aux termes de l'article 4.4 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché : " Absence à un rendez-vous de chantier. Si le conducteur de travaux ne peut assister à la réunion, il doit se faire remplacer par une personne de compétence et de responsabilité équivalente, pouvant prendre toute décision à sa place, afin de ne pas entraver la bonne marche du chantier. Dans le cas contraire, il sera appliqué à l'entreprise une pénalité de 100 € HT (cent euros hors taxe) par absence non excusée à un rendez-vous et 50 € HT (cinquante euros hors taxe) pour chaque retard. ".
3. Il résulte de l'instruction que la CASGBS a infligé à la société une pénalité de 1 000 euros en raison de son absence non excusée à dix réunions de chantier. La société Millet ne conteste pas ces absences mais soutient que ces pénalités sont inapplicables, qu'elles auraient dû être précédées d'une mise en demeure, qu'elles ne sont pas justifiées dès lors que sa présence n'était pas nécessaire étant donné l'avancement des travaux, que le maître d'oeuvre l'avait dispensé d'y assister et qu'elle n'a pas été régulièrement convoquée.
4. Toutefois, le montant des pénalités en litige et la nature du manquement justifiant leur application ont été fixés avec une précision suffisante par les stipulations précitées de l'article 4.4 du CCAP. En outre, il ne résulte pas de ces stipulations que l'application de pénalités pour absence à un rendez-vous de chantier doive être précédée d'une mise en demeure, le seul constat de l'absence de l'entreprise permettant d'infliger ces pénalités. A cet égard, la circonstance que l'article 4.3 du CCAP précise que les pénalités pour retard dans l'exécution des travaux peuvent être appliquées sans mise en demeure préalable ne permet pas de déduire qu'une mise en demeure serait nécessaire pour l'application de la pénalité en cas d'absence à une réunion de chantier.
5. En outre, il résulte des mentions figurant dans les comptes rendus de chantier qui font d'ailleurs état d'une augmentation progressive du montant de la pénalité en litige et il n'est pas sérieusement contesté que la société Millet a été convoquée à l'ensemble des réunions où son absence a été constatée, y compris à celle du 5 janvier 2011 alors même que le décompte des pénalités mentionne par erreur la date du 4 janvier 2011. L'existence de la réunion de chantier du 18 novembre 2010 à laquelle la société Millet a été régulièrement convoquée est suffisamment établie par le compte rendu produit en défense. La société Millet, convoquée le 7 janvier 2011, a disposé d'un délai suffisant pour être présente ou être excusée lors de la réunion du 12 janvier 2011. Par ailleurs, la société requérante n'établit pas, comme elle l'allègue, que le maître d'oeuvre l'aurait dispensée d'assister à ces réunions et il ne lui appartenait pas, au demeurant, de juger de la pertinence et de l'opportunité de sa présence à ces réunions de chantier, alors même que le chantier n'étant pas encore hors d'air/hors d'eau, son intervention n'était pas envisageable. Enfin, les circonstances que son absence à ces réunions de chantier n'aurait pas entravé la bonne marche du chantier et que la société Millet a effectué ses travaux dans les délais impartis est sans incidence sur l'application de ces pénalités. Dans ces conditions, la société Millet n'est pas fondée à demander la décharge de ces pénalités de retard.
Sur l'actualisation des prix :
6. Aux termes de l'article 6 de l'acte d'engagement du marché : " Le marché est réglé par un prix global et forfaitaire indiqué ci-après et prend compte l'ensemble des dispositions prévues au CCAP et au CCTP. Les prix devront être mentionnés en euros. Les modalités de variation des prix sont fixées au CCAP. Les prix sont fermes et actualisables ".
7. Aux termes de l'article 2 du CCAP relatif aux pièces constitutives du marché : " 2.1. Pièces constitutives dossier de consultation / Pièces propres à chaque lot : - Acte d'engagement et ses annexes (un par lot) / - Décomposition du prix global et forfaitaire indice A pour les lots 3/4/7/9/16 (un par lot) / - Cahier des clauses techniques particulières indice A pour les lots 3/4/7/9/16 (un par lot). / Pièces communes aux vingt lots : A/ Pièces écrites / - Règlement de consultation / - Cahier des clauses administratives particulières (...) 2.2 Pièces générales : Les documents applicables sont ceux en vigueur au premier jour au premier jour du mois d'établissement des prix tels que ce mois est défini au 3.6.1 : (...) Cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés publics de travaux approuvé par le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 et l'ensemble des textes qui l'ont modifié (...) En dérogation à l'article 3.12 du CCAG, en cas de contradiction entre plusieurs documents, il sera retenu celui qui présentera la solution la plus avantageuse pour le maître d'ouvrage. ". Aux termes de l'article 3.6 du même cahier : " Variation dans les prix : " Les prix sont réputés fermes, non révisables et non actualisables. (...) 3.6.3 Modalités d'actualisation des prix fermes mais actualisables : Sans objet. (...) ".
8. Il résulte de ces stipulations que l'acte d'engagement mentionne que les prix sont fermes et actualisables alors que le CCAP précise à plusieurs reprises que les prix ne sont pas actualisables. Il résulte de la lecture de l'ensemble de ces stipulations et notamment de l'acte d'engagement qui, malgré sa mention erronée de prix actualisables, renvoie expressément au CCAP pour ce qui concerne la variation des prix, que le prix du marché en litige n'est pas actualisable. Contrairement à ce que soutient la société Millet, l'article 2.1 du CCAP liste les documents propres à chaque lot et commun à l'ensemble des lots mais ne fixe pas d'ordre de priorité entre ces documents et notamment entre l'acte d'engagement et le CCAP. En outre, si la société requérante se prévaut de ce que le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux mentionne un ordre de priorité des pièces contractuelles aux termes desquelles en cas de contradiction entre les stipulations des pièces contractuelles, l'acte d'engagement prévaut sur le CCAP, l'article 2.2 du CCAP du marché en litige prévoit que par dérogation à l'article 3.12 du CCAG Travaux, en cas de contradiction entre plusieurs documents, il sera retenu celui qui présentera la solution la plus avantageuse pour le maître d'ouvrage. Cette dérogation ne peut être regardée comme limitée aux documents énumérés non limitativement par cet article 2.2 du CCAP et ne concernant pas ceux figurant à l'article 2.1 qui ne fixe aucun ordre de priorité entre les pièces constitutives. Si la société Millet soutient que cette clause serait illicite car elle méconnaîtrait le principe de loyauté des relations contractuelles, il ne résulte pas de l'instruction que la requérante aurait émis de réserve sur le bien-fondé de cette clause lors de la conclusion du contrat, que son consentement aurait été vicié, qu'une telle clause méconnaîtrait des normes supérieures et serait entachée d'un vice d'une gravité telle qu'elle devrait être écartée. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à demander que l'application de cette clause soit écartée au motif qu'elle méconnaîtrait le principe de loyauté des relations contractuelles. Dans ces conditions, la société Millet n'est pas fondée à demander une somme de 1 196,44 euros au titre de l'actualisation des prix du marché.
Sur les intérêts moratoires :
9. La société Millet se borne à demander le versement de la somme de 2 149,31 euros au titre des intérêts moratoires compte tenu du paiement de l'avance forfaitaire et des situations intermédiaires n° 2 à 8, 10 et 11 effectué par la CASGBS au-delà du délai de 40 jours prévu par les stipulations de l'article 3 de l'acte d'engagement.
10. Contrairement à ce que fait valoir la CASGBS, la société Millet apporte, par la production de nouvelles pièces en appel, des justifications suffisantes des retards de paiement dont l'exécution de son marché a fait l'objet. Les accusés de réception de ses situations intermédiaires, ses relevés bancaires et les bordereaux d'encaissement qu'elle produit permettent d'établir que l'avance forfaitaire et les situations n° 2 à 8, 10 et 11 ont été payées avec respectivement 27, 8, 13, 33, 16, 30, 32, 33, 39 et 3 jours de retard. Le taux d'intérêt dont elle demande l'application n'étant pas contesté en défense, elle est fondée à ce titre à demander la condamnation de la CASGBS à lui verser la somme totale la somme totale de 2 149,31 euros qu'elle réclame au titre des intérêts moratoires du marché, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les créances de la société Millet provenant de l'exécution du marché litigieux ont fait l'objet en cours d'exécution du marché d'une cession sur le fondement de l'article L. 313-23 du monétaire et financier.
11. Il résulte de ce qui précède que la société Millet est fondée à demander la somme totale de 2 149,31 euros au titre d'intérêts moratoires dus pour les retards de paiement.
En ce qui concerne l'allongement de la durée des travaux et le bouleversement économique du contrat :
12. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
13. D'une part, la société Millet soutient que la responsabilité du maître d'ouvrage est engagée à raison de l'allongement de la durée des travaux dès lors que ce dernier a engagé un référé préventif devant le tribunal administratif de Versailles quelques jours après le début des travaux qui a eu pour effet de faire obstacle au commencement des travaux. Toutefois, il résulte de l'instruction que les opérations liées à ce référé se sont déroulées au moins pour partie durant la phase préparatoire. En outre, à supposer même que ces opérations aient pu décaler le commencement des travaux du titulaire du lot " gros oeuvre ", la société Millet n'établit pas, notamment par les éléments de planning figurant dans le compte rendu de chantier n° 12 ou les informations concernant l'installation de chantier, la 1ère réunion d'expertise ou la création des voiries de chantier et la mise en place des bungalows figurant dans les comptes rendus n° 9, 10, 14, 15 et 16, que cela aurait eu pour effet d'allonger la durée de ses propres travaux. Aucun élément ne permet d'établir que l'administration aurait dû ajourner les travaux. Par ailleurs, s'il résulte de l'instruction que les travaux de l'entreprise en charge du gros oeuvre a connu des retards importants, la société Millet n'apporte aucun élément précis de nature à établir que le maître d'ouvrage aurait commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, en particulier en s'abstenant de lui appliquer des pénalités de retard avant mai 2012. Si son courrier du 22 mars 2013 adressé au titulaire de la mission ordonnancement, pilotage et coordination indique qu'à cette date, le chantier n'est toujours pas apte à recevoir des ouvrages menuisés en bois, il ne permet pas d'établir l'existence d'une faute du maître d'ouvrage. De la même façon, la société Millet n'établit pas que les retards dans l'exécution de ce marché sont la conséquence de manquements ou d'insuffisances dans la conception et la rédaction des documents contractuels. Enfin, la société requérante n'établit pas davantage que le maître d'ouvrage aurait tardé à communiquer des informations essentielles, en ce qui concerne notamment l'estimation d'occupation du bâtiment ou les dates de validation des sous-traitants, et que cette omission serait la cause du retard dans le déroulement des travaux.
14. D'autre part, ni l'allongement de la durée d'exécution du marché ni la circonstance que le maître d'ouvrage a commandé, par deux ordres de service et deux avenants, des travaux supplémentaires d'un montant total de 44 896,82 euros, ne constituent une sujétion imprévue ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat ouvrant droit à indemnisation pour le cocontractant.
15. Il résulte de ce qui précède que la société Millet n'est pas fondée à demander la condamnation de la CASGBS à lui verser la somme de 37 774,25 euros au titre des frais d'exploitation supplémentaire de chantier, la somme totale de 6 122,64 euros correspondant à trois factures émises par l'entreprise chargée de la gestion du compte prorata postérieures à la date initiale de fin des travaux, ni une somme quelconque au titre de l'absence de contribution au frais généraux relatif au chiffre d'affaires reporté ou au titre du surcoût de frais généraux sur la période excédant celle contractuellement prévue.
16. Il résulte de tout ce qui précède que la société Millet est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a limité le montant de la condamnation de la CASGBS à lui verser la somme de 188,66 euros au titre des intérêts moratoires sur ses situations intermédiaires.
Sur les frais liés à l'instance :
17. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 188,66 euros que la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine a été condamnée à verser à la société Etablissements Millet par le jugement n° 1606934 du 18 octobre 2018 du tribunal administratif de Versailles est portée à 2 149,31 euros.
Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1606934 du 18 octobre 2018 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Etablissements Millet est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Saint-Germain Boucles de Seine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 18VE04203