Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :
- par la demande enregistrée sous le n° 1601161, d'annuler le contrat d'engagement à durée déterminée conclu le 10 décembre 2015 et de condamner le centre d'accueil et de soins hospitaliers (CASH) de Nanterre à lui verser la somme de 44 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des fautes commises dans la gestion de ses contrats ;
- par la demande enregistrée sous le n° 1608378, d'annuler la décision implicite du directeur du CASH de Nanterre de ne pas renouveler son contrat d'engagement à durée déterminée conclu le 30 juin 2016, pour la période allant du 1er juillet 2016 au 7 septembre 2016 ;
- par la demande enregistrée sous le n° 1608581, d'annuler la décision expresse du directeur du CASH de Nanterre du 5 septembre 2016 refusant de renouveler son contrat d'engagement à durée déterminée conclu le 30 juin 2016, pour la période allant du 1er juillet 2016 au 7 septembre 2016 ;
- par la demande enregistrée sous le n° 1700271, de condamner le CASH de Nanterre à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.
Par un jugement n°s 1608378, 1608581, 1700271 du 8 octobre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a :
- annulé la décision implicite confirmée expressément le 5 septembre 2016 par laquelle le directeur du CASH de Nanterre a refusé de renouveler le dernier contrat d'engagement à durée déterminée conclu avec Mme D... (article 1er) ;
- enjoint au directeur du CASH de Nanterre de statuer à nouveau sur l'éventualité d'un renouvellement du dernier contrat d'engagement de Mme D..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement (article 2) ;
- condamné le CASH de Nanterre à verser à Mme D... une indemnité d'un montant de 5 000 euros (article 3) ;
- mis à la charge du CASH de Nanterre la somme de 1 500 euros à verser à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4) ;
- rejeté le surplus des conclusions de la demande de Mme D... (article 5) ;
- rejeté les conclusions du CASH de Nanterre présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 31 mai 2019, Mme D..., représentée par Me E..., avocat, demande à la Cour :
1°) de condamner le CASH de Nanterre à lui verser la somme de 80 000 euros, sauf à parfaire, représentant le préjudice qu'elle a subi du fait de l'ensemble des fautes commises par l'établissement ;
2°) d'enjoindre au CASH de Nanterre de lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais de procès non compris dans les dépens, mis à sa charge par l'ordonnance n° 1605634 du 23 juin 2016 rendu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, majorée du taux d'intérêt légal à compter du 23 juin 2016, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en ce qu'il a de contraire à la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge du CASH de Nanterre la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les irrégularités entachant les refus de non-renouvellement des 10 décembre 2015 et 30 mai 2016 constituent des fautes de nature à engager la responsabilité du CASH ;
- l'ordonnance n° 1605634 du 23 juin 2016 en tant qu'elle a mis à la charge du CASH de Nanterre la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative n'a pas été exécutée ;
- il appartient au juge administratif d'assurer l'exécution de cette ordonnance en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative ;
- le CASH a commis deux fautes en violant volontairement son droit à un recours juridictionnel effectif, et en gérant sa situation administrative de manière erronée, le CASH n'ayant, délibérément, pas exécuté les décisions de justice ou les demandes de communication de son dossier administratif ;
- le préjudice moral résultant du refus illégal de renouveler son contrat pris le 5 septembre 2016 et des autres fautes invoquées doit être porté à la somme totale de 80 000 euros, sauf à parfaire.
......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Illouz, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., pour Mme D... et de Me A... pour le CASH de Nanterre.
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte de l'instruction que Mme D... a été recrutée par le CASH de Nanterre en qualité d'agent des services hospitaliers contractuel pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires, du 9 septembre 2010 au 12 juin 2014. Elle a ensuite signé deux contrats à durée déterminée, pour faire temporairement face à des vacances d'emploi qui ne pouvaient pas être immédiatement pourvus, couvrant respectivement les périodes du 13 juin 2014 au 12 juin 2015 et du 13 juin 2015 au 12 décembre 2015. Elle a transmis un certificat de déclaration de grossesse au CASH le 7 septembre 2015. L'établissement lui a alors accordé, le 9 septembre 2015, un congé maternité à compter du 16 septembre 2015 au 11 décembre 2015. Le directeur du CASH de Nanterre a informé Mme D..., par décision du 16 septembre 2015, notifiée le 25 septembre suivant, que son contrat ne sera pas renouvelé. Mme D... a demandé la communication de son dossier individuel le 29 septembre 2015 et a formé un recours en référé-suspension contre cette décision devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 14 octobre 2015, assorti d'une requête au fond. Alors que l'audience du référé était prévue le 28 octobre 2015 à 11 heures, le CASH de Nanterre a convoqué Mme D... le même jour à 9h30 pour qu'elle puisse consulter son dossier individuel. Par une ordonnance n° 1508987 du 29 octobre 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu l'exécution de la décision du 16 septembre 2015, enjoint au directeur du CASH de Nanterre de proposer à Mme D... un nouveau contrat de travail à compter du 12 décembre 2015, dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'ordonnance, et a mis à la charge de l'établissement la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le 5 novembre 2015, après l'expiration du délai de 15 jours imparti au CASH de Nanterre, Mme D... lui a demandé d'exécuter cette ordonnance. La directrice du CASH de Nanterre a signé un nouveau contrat le 10 décembre 2015, prenant fin le 12 juin 2016. L'établissement ne lui a versé les frais de procès non compris dans les dépens que le 6 avril 2016. Par une décision prise le 22 décembre 2015, la directrice du CASH de Nanterre a placé Mme D... en position de congé maternité du 31 décembre 2015 au 12 juin 2016. Mme D... a formé un recours administratif contre cette décision en tant qu'elle ne lui octroie pas, selon elle, la totalité du congé de maternité auquel elle a droit pour son quatrième enfant. Le directeur du CASH de Nanterre a, par décision prise le 30 mai 2016, prolongé son congé jusqu'au 30 juin 2016 et l'a informée qu'à cette date, son contrat de ne serait pas renouvelé. Le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, par une ordonnance n° 1605634 du 23 juin 2016, suspendu l'exécution de la décision du 30 mai 2016, enjoint au directeur du CASH de Nanterre de réexaminer la demande de renouvellement du contrat de travail de Mme D..., dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'ordonnance, et a mis à la charge de l'établissement la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Un nouveau contrat a été signé par le CASH le 30 juin 2016 et par Mme D... le 15 juillet 2016, arrivant à échéance le 7 septembre 2016. Il ne résulte pas de l'instruction que le CASH de Nanterre aurait réglé les frais de procès non compris dans les dépens mis à sa charge par l'ordonnance du 23 juin 2016. Par une décision du 5 septembre 2016, notifiée le 7 septembre suivant à Mme D..., le directeur du CASH de Nanterre l'a informée que son contrat ne serait pas renouvelé. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, le 28 mars 2019, annulé la décision implicite confirmée expressément le 5 septembre 2016 par laquelle le directeur du CASH de Nanterre a refusé de renouveler le dernier contrat d'engagement à durée déterminée conclu avec Mme D... (article 1er), a enjoint au directeur du centre de statuer à nouveau sur l'éventualité d'un renouvellement du dernier contrat d'engagement de Mme D..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement (article 2), a condamné le CASH de Nanterre à verser à Mme D... une indemnité d'un montant de 5 000 euros (article 3), a mis à la charge du CASH la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme D.... Mme D... fait appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions indemnitaires.
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au CASH de Nanterre de lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais de procès non compris dans les dépens fixée par l'ordonnance n° 1605634 du 23 juin 2016 :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 523-1 du code de justice administrative : " Les décisions rendues en application des articles L. 521-1, L. 521-3, L. 521-4 et L. 522-3 sont rendues en dernier ressort ". Aux termes de l'article L. 911-4 du même code : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution ". Aux termes de l'article R. 921-2 du même code : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel ".
3. L'ordonnance n° 1605634 prise par le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 23 juin 2016 et ordonnant, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision du directeur du CASH de Nanterre du 30 mai 2016 et mettant à la charge de l'établissement la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rendue en dernier ressort et n'est pas donc pas susceptible et n'a d'ailleurs pas fait l'objet d'un appel devant la Cour. La demande d'exécution de cette ordonnance, prise par le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ne relève pas de la compétence de la Cour, mais de celle du juge des référés de ce tribunal. Il y a donc lieu, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, de transmettre cette demande d'exécution au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Sur les conclusions indemnitaires :
4. En premier lieu, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, l'illégalité de la décision de non-renouvellement du 5 septembre 2015 constitue une faute de nature à engager la responsabilité du CASH de Nanterre.
5. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu l'exécution des décisions des 10 décembre 2015 et 30 mai 2016 portant refus de renouvellement du contrat de travail de Mme D..., au motif tiré, notamment, de ce que ces décisions n'ont pas été prises en considération du service. Cette illégalité, que le CASH de Nanterre ne conteste pas, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement, quand bien même il a finalement, sur injonction du juge des référés, renouvelé le contrat de Mme D....
6. En troisième lieu, ainsi que le soutient Mme D..., la mauvaise gestion de sa situation administrative telle que décrite au point 1 du présent arrêt, caractérisée notamment, d'abord par une mise à disposition tardive et le jour même de l'audience du juge des référés de son dossier personnel, soit le 28 octobre 2015, ensuite par un retard du CASH à exécuter les astreintes prononcées à son encontre et, enfin, par un défaut persistant du règlement de la somme de 1 500 euros fixée par l'ordonnance n° 1605634 du 23 juin 2016, révèle une faute de l'établissement de nature à engager sa responsabilité.
7. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme D... à raison de ces fautes en le fixant à la somme de 15 000 euros.
8. En quatrième lieu, Mme D... soutient que le CASH de Nanterre a méconnu son droit à un recours juridictionnel effectif en faisant échec à toute possibilité d'action en référé-suspension contre la décision du 5 septembre 2015, notifié le 7 septembre suivant, l'informant du non-renouvellement de son contrat qui prenait fin le 7 septembre. Il résulte en effet de l'instruction que par l'ordonnance n° 1608570 du 14 septembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, saisi le 9 septembre 2016 d'une demande de suspension de l'exécution de la décision de non-renouvellement du 5 septembre 2016, après avoir rappelé que le juge des référés ne peut plus suspendre, après le terme d'un contrat à durée déterminée, la décision de ne pas renouveler ce contrat, ni imposer le maintien provisoire de relations contractuelles au-delà de la date d'échéance de ce contrat, a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande en référé de Mme D.... Cependant, Mme D... disposait toujours de la faculté de demander au juge du fond l'annulation de cette décision de non-renouvellement, ce qu'elle a fait du reste avec succès par sa demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 9 septembre 2016 sous le n° 1608581, ainsi que la réparation intégrale du préjudice en résultant pour elle, ce qu'elle a entrepris par la demande enregistrée le 11 janvier 2017 sous le n° 1700271 et à l'issue de laquelle, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné le CASH, à raison de cette illégalité, à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi et des troubles dans ses conditions d'existence. Il en résulte que les garanties d'annulation et indemnitaires dont a bénéficié l'intéressée permettent de remédier aux conséquences de l'exécution de la décision de non-renouvellement. Ainsi, le comportement du CASH de Nanterre, aussi regrettable soit-il, ne méconnaît pas le droit de Mme D... à un recours juridictionnel effectif. Les conclusions indemnitaires présentées à raison de la violation de ce droit, doivent, par conséquence être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... est seulement fondée à demander que la condamnation du CASH de Nanterre prononcée par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise soit portée à la somme totale de 15 000 euros.
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CASH de Nanterre la somme de 2 000 euros à verser à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La demande d'exécution de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1605634 du 23 juin 2016 est transmise à ce tribunal.
Article 2 : La somme que le CASH de Nanterre est condamné à verser à Mme D... est portée à 15 000 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 28 mars 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le CASH de Nanterre versera à Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
N° 19VE01966 3