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16/04/2021 | FRANCE | N°19VE03545

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 16 avril 2021, 19VE03545


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1905052 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2019, M.

B..., représenté par Me Taj, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1905052 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2019, M. B..., représenté par Me Taj, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Il soutient que :

- l'arrêté pris dans son ensemble est entaché d'incompétence ;

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée et souffre d'un défaut d'examen particulier ;

- elle méconnaît les articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la directive n° 2004/38/CE ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit et en fait et souffre d'un défaut d'examen particulier ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également les articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la directive n° 2004/38/CE ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant indien né en 1988, a sollicité le 19 septembre 2018 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne. Par un arrêté du 18 avril 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'arrêté pris dans son ensemble :

2. M. B... reprend en cause d'appel, en des termes identiques, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige. Ce moyen doit être écarté, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 2 du jugement attaqué.

Sur la décision portant refus de séjour :

3. Tout d'abord, M. B... reprend en cause appel, en des termes identiques, les moyens soulevés en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier. S'il soutient que le préfet n'a pas examiné sa situation au regard des justificatifs de ses ressources et de celles de son épouse, il ne justifie pas avoir produit devant le préfet de tels justificatifs à l'appui de sa demande. En outre, s'il soutient que l'arrêté ne mentionne pas d'élément de fait permettant d'apprécier l'absence d'atteinte aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort au contraire des termes de l'arrêté que le préfet, qui n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation de l'intéressé, a pris en compte les éléments de vie privée et familiale que M. B... faisait valoir et qu'il a considéré, par ailleurs, que ce dernier n'établissait pas être exposé à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, ces moyens doivent être écartés pour ces motifs et par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 3 du jugement attaqué.

4. Ensuite, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la directive n° 2004/38/CE susvisée du 29 avril 2004, qui ont été transposées en droit interne par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007, et dont les dispositions sont reprises notamment aux articles L. 121-1 et suivants et L. 511-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En outre, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui transpose les dispositions évoquées au point précédent de la directive du 29 avril 2004 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : (...) / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) / 4° S'il est un (...) conjoint, (...) qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...) ". L'article L. 121-3 du même code dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois (...) ". Aux termes de l'article R. 121-4 du même code : " (...) Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné à l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que le conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne résidant en France peut bénéficier d'une carte de séjour en qualité de membre de famille, à condition que ce ressortissant exerce une activité professionnelle ou dispose, pour lui et les membres de sa famille, de ressources suffisantes, ces deux conditions relatives à l'activité professionnelle et aux ressources étant alternatives et non cumulatives. Il résulte également de ces dispositions combinées que le ressortissant d'un Etat tiers ne dispose d'un droit au séjour en France en qualité de conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne que dans la mesure où son conjoint remplit lui-même les conditions fixées au 1° ou au 2° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont alternatives et non cumulatives. Pour l'application des dispositions du 2° de cet article, le ressortissant d'un Etat tiers, conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne, ne peut se voir délivrer un titre de séjour que si ledit conjoint dispose de ressources suffisantes afin de subvenir aux besoins de sa famille et ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale.

7. M. B... soutient qu'il justifie d'un emploi et que son épouse, bénéficiaire d'une pension d'invalidité versée par les autorités néerlandaises, et titulaire d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'agent d'entretien, dispose de ressources suffisantes pour qu'il prétende à la délivrance d'une carte de séjour en qualité de conjoint d'un citoyen de l'Union européenne. S'il produit trois documents informant son épouse du versement, sur un compte néerlandais, d'une allocation d'invalidité pour les mois de mai, juin et juillet 2017, et une attestation d'invalidité délivrée par les autorités néerlandaises, ainsi que deux relevés de compte français de son épouse faisant chacun apparaître, sans autre précision, un versement d'une somme de 1 000 euros environ, ces pièces ne permettent pas d'établir, à elles seules, en l'absence, notamment, de toute attestation mentionnant les droits de l'intéressée à recevoir une pension d'invalidité et la période couverte par ces droits, que l'épouse de M. B... recevait de façon régulière, à la date de l'arrêté en litige, une telle pension. En outre, la circonstance qu'il produit un contrat à durée indéterminée conclu par son épouse pour exercer le métier d'agent d'entretien est sans incidence sur la légalité de la décision dès lors que ce contrat a été conclu à une date postérieure à la date de cette décision et ne saurait, par suite, être pris en compte dans l'appréciation du caractère suffisant des ressources de celle-ci. Par suite, M. B..., qui ne démontre ni que son épouse, ni lui-même disposaient, à la date de l'arrêté en litige, de ressources suffisantes au sens des dispositions précitées, n'établit pas remplir les conditions du 4° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour méconnaîtrait les dispositions précitées des articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Pour justifier de son intégration et de l'ancienneté de ses liens personnels et familiaux sur le territoire français, M. B... se prévaut de son mariage avec une ressortissante néerlandaise en janvier 2018, avec laquelle il entretient une relation depuis qu'il est entré en France en 2015, de liens professionnels et amicaux noués sur le territoire français et de son respect des valeurs républicaines. Toutefois, M. B..., n'établit pas, avant la date de son mariage, très récent à la date de l'arrêté en litige, l'ancienneté et la stabilité de la communauté de vie avec son épouse, par la production de quelques échanges sms en 2016 et 2017 non authentifiés et de quelques photos du couple. De plus, il ne justifie pas de son intégration professionnelle par la seule production de deux contrats à durée indéterminée conclus en octobre 2018 et en février 2019 avec deux sociétés différentes et de quatre fiches de paie couvrant la fin de l'année 2018 et le mois de février 2019. En outre, M. B... n'établit pas la réalité des liens professionnels et amicaux qu'il soutient avoir noués sur le territoire français. Enfin, M. B... ne démontre pas que sa présence serait indispensable en France aux côtés de son épouse, ressortissante néerlandaise, en soutenant, par des propos contradictoires, qu'il doit s'occuper d'elle en raison de l'incapacité de celle-ci à travailler alors qu'il allègue par ailleurs qu'elle a été embauchée en qualité d'agent d'entretien et produit une pièce en ce sens. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, cette décision ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Tout d'abord, M. B... reprend en appel, en des termes identiques, le moyen tiré du défaut de motivation, en droit et en fait de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Toutefois, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, cette mesure n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte lorsqu'elle est prise, comme c'est le cas en l'espèce, sur le fondement des dispositions, visées, du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen sera écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 11 du jugement attaqué.

11. Ensuite, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions des L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la directive n° 2004/38/CE susvisée du 29 avril 2004 est inopérant et doit, pour ce motif, être écarté.

13. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de destination :

14. Il ressort de l'ensemble de ce qui vient d'être dit que la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français ne sont pas illégales. Par suite, M. B... n'est pas fondé à exciper, au soutien de sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

N° 19VE03545 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03545
Date de la décision : 16/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : TAJ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-16;19ve03545 ?
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