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02/03/2021 | FRANCE | N°19VE02516

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 02 mars 2021, 19VE02516


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et, d'autre part, à titre principal, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans le délai d'un mois à compter de la notific

ation du jugement à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et, d'autre part, à titre principal, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1813475 du 14 juin 2019, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 et 16 juillet 2019, M. A..., représenté par Me Hagege, avocat, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation, sous la même condition de délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une erreur de fait au regard de sa situation professionnelle, personnelle et de ses conditions de ressources ;

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, l'emploi qu'il exerce comme apiculteur relevant de la qualification d'agent technique agricole au sens de l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard de la durée de son intégration personnelle et professionnelle en France ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, modifié ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 18 juin 1973 à Dakar (Sénégal), déclare être entré en France en 2010. En 2018, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 21 novembre 2018, le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par la requête susvisée, M. A... fait appel du jugement du 14 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2018.

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions administratives individuelles défavorables qui constituent une mesure de police doivent être motivées et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. L'arrêté en litige précise, d'une part, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'accord franco-sénégalais du

23 septembre 2006 modifié qui en constituent le fondement et, d'autre part, les éléments de fait propres à la situation professionnelle et personnelle de M. A.... Si le requérant fait grief à la décision attaquée de ne mentionner ni la naissance de son second enfant, ni le concubinage dont il se prévaut, ces éléments sont postérieurs à l'édiction de cette décision et donc sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas, avant d'édicter la décision en litige, procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

5. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord

franco-sénégalais susvisé : " (...) Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : / - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels. (...) ". L'annexe IV à cet accord indique au titre des métiers ouverts aux ressortissants sénégalais la profession d'agent technique agricole.

6. Les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.

7. En supposant même, ainsi que le soutient M. A..., que le métier d'apiculteur puisse être assimilé à celui d'agent technique agricole au sens des stipulations de l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais précité, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que cette circonstance serait à elle-seule insuffisante à caractériser une erreur manifeste d'appréciation dans l'application qui a été faite par le préfet du Val-d'Oise de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par le requérant. Par ailleurs, si l'intéressé soutient résider habituellement en France depuis l'année 2010, les rares contrats de mission qu'il produit au titre de cette période ne suffisent pas à démontrer la continuité de son séjour en France depuis cette date, alors au demeurant qu'il ne justifie pas de l'existence du visa d'entrée dont il se prévaut. Il ressort, en outre, des pièces du dossier que M. A... n'a reconnu l'enfant née de sa relation avec une compatriote, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " valable du 24 juillet 2018 au 23 juillet 2019, que postérieurement à l'arrêté en litige et qu'il reconnaît ne vivre maritalement avec cette dernière que depuis le mois de mai 2019. Si le requérant soutient également que son fils, également de nationalité sénégalaise, est titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale " et poursuit ses études en France, il a déclaré, dans la fiche de renseignements qu'il a signée le 30 mai 2018, être célibataire et disposer d'attaches familiales au Sénégal où résident ses parents. Enfin, si l'intéressé produit une demande d'autorisation de travail pour exercer le métier d'apiculteur, les autres documents versés au dossier font état d'une activité seulement ponctuelle et à temps très partiel exercée par l'intéressé dans ce domaine. A cet égard, les revenus de la personne dont M. A... partagerait la vie sont sans incidence sur l'appréciation du caractère effectif et stable de l'insertion professionnelle de l'intéressé. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'admission au séjour en France de M. A... répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tant au regard du titre salarié que du titre vie privée et familiale doit être écarté.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés au point 7., la décision en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. A... n'étant pas entachée d'illégalité, l'intéressé n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français à raison de l'illégalité de cette première décision.

11. En deuxième lieu, la décision en litige qui vise notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qui fait mention de ce que M. A... n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, est suffisamment motivée.

12. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas, avant d'édicter la décision en litige, procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

13. En quatrième lieu, au vu des motifs retenus au point 7. du présent arrêt, et dès lors que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine de M. A... dont est également originaire la mère de son enfant, la décision faisant au requérant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'erreur d'appréciation et ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays à destination il pourrait être reconduit d'office à raison de l'illégalité de cette première décision.

15. En deuxième lieu, la décision en litige, qui vise notamment les articles L. 513-2 et L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qui fait mention de ce qu'elle ne contrevient pas à ces stipulations, est suffisamment motivée.

16. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas, avant d'édicter la décision en litige, procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

17. En quatrième lieu, M. A... n'allègue pas encourir des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation et, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 13. de l'arrêt, elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et présentées au titre des frais de l'instance doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

2

N° 19VE02516


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02516
Date de la décision : 02/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SELARLU HAGEGE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-03-02;19ve02516 ?
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