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25/02/2021 | FRANCE | N°20VE00128

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 25 février 2021, 20VE00128


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1810961 du 9 janvier 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :


Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me Pierot, avocat,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1810961 du 9 janvier 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me Pierot, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, pendant cet examen, dans le délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour au titre de l'asile est insuffisamment motivée et se trouve entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît aussi les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante ivoirienne, née le 2 septembre 1985, a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande a toutefois été rejetée par une décision du 30 novembre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile par une décision du 7 septembre 2018 notifiée le 5 octobre 2018. C'est dans ces conditions que, par un arrêté du 23 octobre 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 9 janvier 2019, dont Mme B... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de séjour au titre de l'asile :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. L'arrêté en litige vise les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier celles de l'article L. 511-1-I-6°, dont le préfet a fait application. La décision précise que Mme B... a fait l'objet d'une décision de rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 novembre 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, par une décision du 7 septembre 2018, notifiée le 5 octobre 2018. En outre, le préfet a fait état, dans l'arrêté en litige, d'un examen de la situation personnelle et familiale de l'intéressée, et a mentionné que celle-ci n'établissait pas être exposée à des peines ou traitements inhumains en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, la décision en litige, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de Mme B..., comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. Mme B... se prévaut de sa relation avec un compatriote, avec qui elle vit en concubinage, et de la naissance en France, en mai 2019, d'une fille issue de cette union. Elle soutient également avoir trouvé un équilibre de vie sur le territoire français, ayant fui les risques de mariage forcé auxquels elle était exposée dans son pays d'origine. Toutefois, la requérante, qui ne produit aucune pièce relative à l'ancienneté et à la stabilité des liens familiaux qu'elle décrit et aux conditions de son séjour en France, n'apporte ainsi aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations. En outre, la naissance de sa fille, non établie par les pièces du dossier, constitue une circonstance postérieure à la décision en litige, et, par suite, sans incidence sur la légalité de celle-ci. Dans ces conditions, la décision en litige ne peut être regardée comme ayant porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

6. En troisième lieu, le moyen tiré de l'erreur de fait est dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé et doit, pour ce motif, être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme B... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de séjour.

8. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté en litige ni d'aucune pièce du dossier que le préfet, qui n'était pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressée, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B.... Le moyen tiré du défaut d'examen doit donc être écarté.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant, qu'elles aient pour objet de régler leur situation personnelle ou pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

11. Ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, l'enfant auquel Mme B... aurait donné naissance en mai 2019, n'était pas né à la date de la décision en litige. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B..., qui n'établit ni même n'allègue que le père de l'enfant, ressortissant de la même nationalité, résiderait en situation régulière sur le territoire français, serait dans l'impossibilité de reconstituer la cellule familiale dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit, par suite, être écarté.

12. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, Mme B... ne justifiant, par aucune pièce du dossier, de la gravité des conséquences qu'entraînerait la mesure sur sa situation personnelle, la décision en litige n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

13. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme B... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

14. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

15. Si Mme B..., dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'elle a fui son pays parce qu'elle était menacée, par un membre de sa famille, d'y être mariée de force, elle n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

2

N° 20VE00128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00128
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-02-25;20ve00128 ?
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