Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 14 avril 2014 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour motif disciplinaire et a demandé à ce même tribunal d'annuler la décision du 27 octobre 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 14 avril 2014 et d'enjoindre au ministre de refuser son licenciement.
Par un jugement n° 1405828, 1412582, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a seulement annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 27 octobre 2014 et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 mai 2017, l'association HAARP (Handicap, Autisme, Association Réunie du Parisis) venant aux droits de l'association Le colombier, représentée par Me Hisel, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1405828, 1412582 en tant qu'il annule la décision du 27 octobre 2014 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;
2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- aucun texte n'impose un quelconque délai pour la convocation du salarié devant le comité d'établissement ;
- la mention du licenciement envisagé figurait dans la première convocation et n'avait pas à figurer dans la seconde ;
- le motif et les griefs n'avaient pas à figurer dans la convocation ;
- Mme D... a eu le loisir de se faire assister et s'est vu pendant l'entretien préalable énoncer de manière très précise, les griefs retenus à son encontre dont elle avait par ailleurs connaissance depuis longue date ;
- Mme D... a eu connaissance des témoignages des parents et de ses collègues de travail s'opposant à son retour dans son service initial ayant motivé la proposition de modification de ses conditions de travail à l'occasion de la réunion du 28 octobre 2013 en présence de la DRH, d'un courrier du 21 janvier 2014, de la procédure de demande d'autorisation de licenciement et des plaintes qu'elle a elle-même déposées. C'est en toute mauvaise foi qu'elle a fait part de son étonnement devant le comité d'entreprise.
- il n'y a pas de lien entre la demande d'autorisation et les mandats exercés par la salariée ;
- le refus de changement des conditions de travail par Mme D... constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- l'arrêté du 22 août 2006 relatif à l'organisation de la direction générale du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,
- et les observations de Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., employée sous contrat à durée indéterminée par l'association Le colombier, à compter du 1er décembre 2008, en qualité de monitrice-éducatrice, était en dernier lieu affectée au foyer " La Haie vive " à Chars. Elle a été désignée déléguée syndicale le 16 avril 2010 par le syndicat CFTC, puis élue membre du comité d'établissement, le 28 mars 2013. Son mandat de déléguée syndicale a aussi été renouvelé le 16 avril 2013. Mme D... a été convoquée à un entretien préalable le 30 mai 2013, avec mise à pied conservatoire à compter du 24 mai 2013, pour des faits de maltraitance sur une résidente et compte tenu de son comportement professionnel. A la suite du refus d'autorisation de licenciement opposé par l'inspecteur du travail, Mme D... a été réintégrée dans ses fonctions et affectée au pavillon d'accueil de jour du foyer de Chars. A la suite de plusieurs arrêts de maladie, Mme D... a, par courrier du 9 octobre 2013, refusé catégoriquement sa réintégration dans ce service. Elle a de nouveau été placée en congé de maladie, jusqu'au 1er janvier 2014, puis s'est trouvée en absence injustifiée à compter du 2 janvier 2014. Elle a, au cours du mois de janvier 2014, indiqué qu'elle refusait le planning proposé, alors que son employeur l'avait mise en demeure de s'expliquer sur son absence. Le 20 janvier 2014, Mme D... a été convoquée pour un entretien préalable le 3 février 2014, en vue de son licenciement, motivé par son refus injustifié d'accepter les conditions de travail proposées pour sa reprise, et empêchant son employeur d'assurer son obligation de sécurité. A la suite de la consultation du comité d'établissement sur la mesure envisagée, le 4 février 2014, l'association Le colombier a, par courrier présenté le 21 février 2014, sollicité de l'inspection du travail l'autorisation de licencier Mme D..., pour motif disciplinaire. Par une décision du 14 avril 2014, l'inspectrice du travail de la 1ère section de l'unité territoriale du Val-d'Oise a fait droit à cette demande. Mme D... a été licenciée le 19 avril 2014. Par un courrier reçu le 13 juin 2014, elle a introduit un recours hiérarchique auprès du ministre en charge du travail, lequel a été rejeté par décision du 27 octobre 2014. L'association HAARP, venant aux droits de l'association Le colombier, demande à la Cour l'annulation du jugement n° 1405828, 1412582 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui a annulé la décision du 27 octobre 2014 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
2. Il résulte des dispositions, alors applicables, de l'article L. 2421-3 du code du travail que : " tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel ou d'un membre élu du comité d'entreprise, d'un représentant syndical au comité d'entreprise ou d'un représentant des salariés au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail est obligatoirement soumis au comité d'entreprise, qui donne un avis sur le projet de licenciement ". Et aux termes du premier alinéa de l'article R. 2421-9 du même code : " l'avis du comité d'entreprise est exprimé au scrutin secret après audition de l'intéressé ". Saisie par l'employeur d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé auquel s'appliquent ces dispositions, il appartient à l'administration de s'assurer que la procédure de consultation du comité d'entreprise a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'autorisation demandée que si le comité d'entreprise a été mis à même d'émettre son avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation.
3. Pour juger que la consultation du comité d'établissement de l'association Le colombier sur le licenciement de Mme D... avait été irrégulière, le tribunal s'est fondé sur la circonstance qu'elle n'avait pas bénéficié d'un temps suffisant pour présenter ses observations devant ce comité, dès lors que les convocations à l'entretien préalable comme à la séance du comité d'établissement ne mentionnaient pas le motif du licenciement envisagé et qu'il résultait du procès-verbal de consultation de ce comité que Mme D... avait découvert, à l'occasion de cette réunion, les témoignages des parents et ceux de ses collègues s'opposant à son retour dans son service initial. Toutefois, il ressort du procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité d'établissement du 4 février 2014 que ses membres ont fait remarquer à l'intéressée que tous les points de discordance concernant sa prise en charge des résidents ont été maintes fois invoqués, en groupe d'analyse de pratique comme en réunion d'équipe, et qu'elle n'a jamais semblé s'être remise en cause, ne voulant pas entendre et admettre des points de vue différents du sien. De même, de nombreux incidents d'ordre relationnels évoqués lors de la réunion existaient déjà entre elle et une salariée, contre qui elle a porté plainte, plainte qui a entaché l'ambiance d'équipe après cela. Par ailleurs, le comité, qui comprenait Mme D... et deux représentants CGT, s'est exprimé par 1 voix contre et 2 voix favorables au licenciement. Dès lors, le comité s'est exprimé en toute connaissance de cause et l'association HAARP est bien fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif a annulé, pour un motif tiré de l'irrégularité de la consultation du comité d'établissement, la décision du ministre du 5 novembre 2014.
4. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble du litige, d'examiner l'autre moyen des demandes présentées par Mme D....
5. Par une décision du 24 mars 2014 publiée au Journal officiel de la République française du 28 mars 2014, le directeur général du travail a donné délégation à M. B... C..., attaché principal d'administration de l'Etat, adjoint au chef du bureau des recours, du soutien et de l'expertise juridiques, signataire de la décision contestée, afin de signer tous actes dans la limite des attributions du bureau des recours, du soutien et de l'expertise juridiques et au nom du ministre chargé du travail, tous actes, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets. Il ressort de l'arrêté du 22 août 2006 relatif à l'organisation de la direction générale du travail que le département du soutien et de l'appui au contrôle est composé du bureau des réseaux et des outils méthodologiques et du bureau des recours, du soutien et de l'expertise juridiques et est notamment chargé de l'instruction des recours hiérarchiques et contentieux relatifs aux licenciements des salariés protégés. Il résulte par ailleurs des dispositions du décret du 27 juillet 2005 susvisé que les directeurs d'administration centrale ont délégation pour signer les actes relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité, sans que le changement de ministre mette fin à cette délégation. Ils peuvent donner délégation notamment aux fonctionnaires de catégorie A, cette délégation ne prenant fin, sauf si elle est abrogée, qu'en même temps que les fonctions du délégant. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée ne peut qu'être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que l'association HAARP est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a annulé la décision du ministre du travail du 5 novembre 2014. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme qu'elle demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1405828, 1412582 est annulé en tant qu'il a annulé la décision du ministre du travail du 5 novembre 2014 autorisant le licenciement de Mme D....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
N° 17VE01391 2