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08/12/2020 | FRANCE | N°19VE00469

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 08 décembre 2020, 19VE00469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) MAX AUTOMOBILES a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2014.

Par un jugement n° 1606086 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, l'

EURL MAX AUTOMOBILES, représentée par Me Delpeyroux, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) MAX AUTOMOBILES a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2014.

Par un jugement n° 1606086 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2019, l'EURL MAX AUTOMOBILES, représentée par Me Delpeyroux, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge des impositions mises à sa charge ;

Elle soutient que :

- en application des dispositions de l'article 298 sexies du code général des impôts, 43 autres ventes de véhicules auraient dû être considérées comme des ventes de véhicules d'occasion, dès lors que les véhicules vendus avaient été mis en circulation plus de 6 mois avant leur revente, ce qu'a d'ailleurs relevé le service vérificateur ; ces ventes relevaient, par suite, du régime de la TVA sur la marge ; la seule circonstance que les factures de ces ventes n'ont pas été produites ne justifie pas le rejet de la demande de décharge ;

- les dénominations propres aux livraisons communautaires ne figuraient sur aucune des factures reçues de ses fournisseurs, par suite, les premiers juges ne pouvaient pas considérer qu'elle aurait dû connaître les mentions devant impérativement figurer sur des factures de livraisons intracommunautaires ;

- la circonstance que le gérant de la société avait, antérieurement, exercé des fonctions de gérant d'une autre entreprise qui a fait l'objet de plusieurs vérifications de comptabilité ayant donné lieu à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée fondées sur la remise en cause du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur marge, est insuffisante à caractériser un manquement délibéré ; l'est tout autant, la circonstance tenant à l'absence de justification de l'utilisation du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, dès lors qu'elle est postérieure aux années en litige ;

- les amendes de 5 % et de 750 euros prévues par le 1 et le 4 de l'article 1788 A du code général des impôts qui lui ont été appliquées ne peuvent être cumulées sans méconnaître le principe de proportionnalité, dès lors qu'elles sanctionnent toutes les deux un manquement à des obligations déclaratives ;

- l'application cumulée d'une pénalité de 40 %, d'une amende de 5 % pour absence d'auto-liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée, d'une amende pour défaut de déclaration d'échanges de biens et d'une amende pour défaut de présentation de la comptabilité méconnaît le principe de proportionnalité des peines, dès lors que le montant cumulé de ces amendes et pénalités représente plus de 45 % du total des droits réclamés ;

- l'avis de mise en recouvrement est irrégulier, dès lors qu'il ne comporte pas de précision sur la nature de chacune des amendes appliquées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n°2020-1404 du 18 novembre 2020 ;

- le décret n°2020-1405 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) MAX AUTOMOBILES, qui exerce une activité de négoce de véhicules de tourisme, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2014, à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié, par deux propositions de rectification du 28 novembre 2014 et du 17 juillet 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis des amendes et pénalités prévues par les dispositions des 1 et 4 de l'article 1788 A du code général des impôts et les articles 1729 et 1729 D du même code. Une décision d'admission partielle a été prise sur sa réclamation le 29 avril 2016. L'EURL MAX AUTOMOBILES relève régulièrement appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels et pénalités demeurés à sa charge.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / L'avis de mise en recouvrement mentionne également que d'autres intérêts de retard pourront être liquidés après le paiement intégral des droits. [...] ".

3. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 16 octobre 2015 se réfère aux propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 17 juillet 2015 et mentionne, pour chaque période de rappel de taxe sur la valeur ajoutée, les montants en droits simples, majorations et pénalités ainsi que pour chaque période, plusieurs montants au titre des amendes mises à la charge de la requérante. La seule circonstance que l'avis de mise en recouvrement ne comporte aucune indication sur la nature de chacune des amendes est sans incidence sur sa régularité, dès lors que les propositions de rectification auxquelles il se réfère précisaient les motifs de droit et de fait justifiant l'application de ces différentes sanctions. L'EURL MAX AUTOMOBILES était, par suite, en mesure d'identifier sans ambiguïté les amendes litigieuses et pouvait utilement les contester. Par suite, le moyen, soulevé pour la première fois en appel, tiré de ce que, faute d'information sur la nature des amendes infligées, l'avis de mise en recouvrement était irrégulier, doit être écarté.

Sur le bien-fondé des rappels en litige :

4. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. [...] ". Il est constant que l'EURL MAX AUTOMOBILES n'a produit aucune observation dans le délai qui lui était ouvert pour répondre aux propositions de rectification des 28 novembre 2014 et 17 juillet 2015. Dans ces conditions, elle ne peut obtenir la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration.

5. Aux termes de l'article 256 bis du code général des impôts : " I. - 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises. (...) / 2° bis Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion [...] effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des articles 312 à 325 ou 333 à 341 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006. ". Aux termes de l'article 297 A de ce même code : " I. - 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion [...] qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat. [...] ". Aux termes de l'article 297 E de ce même code : " Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures. ". Ces dispositions, issues de la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, ont pour objet de transposer l'article 26 bis de la sixième directive du 17 mai 1977, issu de l'article 1er de la septième directive du 14 février 1994. Il résulte desdites dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre Etat membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée.

6. En premier lieu, aux termes de l'article 298 sexies du code général des impôts : " I. - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de moyens de transport neufs effectuées par des personnes mentionnées au 2° du I de l'article 256 bis ou par toute autre personne non assujettie. [...] / III. - 1. Sont considérés comme moyens de transport : [...] les véhicules terrestres à moteur d'une cylindrée de plus de 48 centimètres cubes ou d'une puissance de plus de 7,2 kilowatts, destinés au transport de personnes ou de marchandises, [...] / 2. Sont considérés comme moyens de transport neufs : / [...] b. les véhicules terrestres dont la livraison est effectuée dans les six mois suivant la première mise en service ou qui ont parcouru moins de 6 000 kilomètres. [...] ".

7. Il résulte de ces dispositions que sont considérés comme des moyens de transport neufs, les véhicules terrestres livrés dans les six mois suivant leur première mise en circulation, ainsi que les véhicules qui, alors même qu'ils auraient été mis en circulation depuis plus de six mois, ont parcouru moins de 6 000 km. Il s'ensuit que ne répondent à la définition du véhicule d'occasion que les voitures livrées plus de 6 mois suivant leur première mise en service et ayant parcouru au moins 6 000 kilomètres. Par suite, à la supposer même fondée, la circonstance que 43 véhicules commercialisés par l'EURL MAX AUTOMOBILES auraient été mis en circulation plus de six mois après leur mise en service est insuffisante, à elle seule, à faire regarder ces véhicules comme des moyens de transport d'occasion justifiant l'application du régime de taxation sur la marge, prévu à l'article 297 A du code général des impôts.

8. En second lieu, il est constant qu'aucune des factures délivrées à l'EURL MAX AUTOMOBILES par ses fournisseurs situés dans d'autres Etats membres de l'Union européenne, qui n'ont au demeurant pas été produites appel ni en première instance, ne mentionnait l'application du régime dérogatoire de taxe sur la valeur ajoutée sur marge. Par suite, la société requérante ne pouvait appliquer un tel régime. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que l'administration ne pouvait lui opposer l'absence de justification de ce que ses fournisseurs avaient eux-mêmes la qualité d'assujettis revendeurs ou étaient exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée.

9. Il résulte de ce qui précède que l'EURL MAX AUTOMOBILES n'établit pas que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge ne sont pas fondés.

Sur les pénalités :

10. Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".

11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; [...] ". Aux termes de l'article 1729 D de ce même code : " Le défaut de présentation de la comptabilité selon les modalités prévues au I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales entraîne l'application d'une amende égale à 5 000 € ou, en cas de rectification et si le montant est plus élevé, d'une majoration de 10 % des droits mis à la charge du contribuable. ". Enfin aux termes de l'article 1788 A du code général des impôts : " 1. Entraîne l'application d'une amende de 750 € : / a. Le défaut de production dans les délais des déclarations prévues aux articles 289 B et 289 C. [...] / 4. Lorsqu'au titre d'une opération donnée le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est autorisé à la déduire, le défaut de mention de la taxe exigible sur la déclaration prévue au 1 de l'article 287, qui doit être déposée au titre de la période concernée, entraîne l'application d'une amende égale à 5 % de la somme déductible. [...] ".

12. En premier lieu, pour infliger la majoration de 40 % pour manquement délibéré, le service vérificateur s'est fondé sur la circonstance que l'EURL MAX AUTOMOBILES était un professionnel du commerce européen de véhicules, dès lors qu'elle se fournissait exclusivement auprès de fournisseurs établis dans d'autres Etats membres de l'Union européenne, que le gérant de la société était également gérant d'une autre société ayant la même activité et que cette dernière avait l'objet de plusieurs vérifications de comptabilité ayant conduit l'administration à lui notifier des rappels similaires. La requérante se borne à soutenir que cette dernière société a contesté les redressements qui lui ont été notifiés, sans établir, ni même alléguer, que ces redressements auraient été abandonnés ou qu'ils auraient fait l'objet d'une décharge. En tout état de cause, l'administration pouvait se fonder sur la seule circonstance tenant à ce que l'EURL MAX AUTOMOBILES était un professionnel du commerce européen de véhicules pour établir le caractère délibéré des manquements constatés. Par suite, le moyen tiré de ce que la mise en oeuvre de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ne serait pas fondée doit être écarté.

13. En second lieu, si l'EURL MAX AUTOMOBILES fait valoir que le cumul des sanctions méconnaît le principe de proportionnalité des peines, en ne précisant pas au regard de quelle norme supérieure l'application des dispositions législatives du code général des impôts a contrevenu, elle n'assortit pas ce moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, il résulte des dispositions précitées que les amendes de 750 euros par déclaration omise et de 5 % de la somme déductible au titre de la taxe sur la valeur ajoutée infligées à l'EURL MAX AUTOMOBILES, prévues respectivement au 1 et au 4 de l'article 1788 A du code général des impôts, sanctionnent deux manquements différents tenant, pour la première, au défaut de déclaration d'échange de biens entre Etats membres de l'Union européenne à raison des opérations réalisées avec ses fournisseurs, pour la seconde, à l'absence de déclaration de la TVA déductible par ses acheteurs. Ces amendes ne sanctionnent par conséquent pas les mêmes faits. Par suite, le moyen tiré du caractère disproportionné des amendes et majorations mises à la charge de l'EURL MAX AUTOMOBILES doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL MAX AUTOMOBILES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL MAX AUTOMOBILES est rejetée.

2

N° 19VE00469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00469
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Catherine BOBKO
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : SELARL DELPEYROUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-08;19ve00469 ?
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