Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi, d'enjoindre à cette même autorité de réexaminer sa situation sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et, enfin, de mettre à la charge de l'État le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1809271 du 3 décembre 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2019, M. C..., représenté par Me Bera, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 31 août 2018 ;
3° d'enjoindre à cette même autorité de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 800 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le tribunal n'a répondu que très partiellement aux moyens soulevés, notamment celui tiré de la méconnaissance des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnaît les articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant congolais né le 4 mars 1975 à Kinshasa (République démocratique du Congo), a présenté, le 7 juin 2016, une demande d'asile sur le fondement de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 31 août 2018, le préfet du Val-d'Oise, après avoir relevé le rejet de cette demande par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 9 juin 2017 notifiée le 16 juin suivant, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 5 juillet 2018, a obligé l'intéressé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... fait appel du jugement du 3 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué:
2. M. C... soutient que le premier juge n'a " répondu que très partiellement aux moyens soulevés, notamment celui tiré de la méconnaissance des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ". Toutefois et d'une part, il résulte des termes mêmes de sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil et enregistrée le 27 septembre 2018 que l'intéressé ne s'est, à aucun moment, prévalu de la méconnaissance des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, moyen qui n'est pas d'ordre public. D'autre part, si M. C... fait valoir que le premier juge n'aurait répondu que " très partiellement aux [autres] moyens soulevés ", il n'assortit pas son moyen d'appel des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil aurait omis de statuer sur l'un d'eux.
Sur la légalité de la décision attaquée :
3. En premier lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) ". Aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...). / La cour communique au préfet compétent et, à Paris, au préfet de police, lorsque ceux-ci en font la demande, copie de l'avis de réception (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'OFPRA ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la Cour.
4. D'autre part, aux termes de l'article R. 72319 du même code : " I.- La décision du directeur général de l'office est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. / (...). / III.- La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire. / IV.- La preuve de la notification de la décision du directeur général de l'office peut être apportée par tout moyen. ".
5. M. C... soutient, pour la première fois devant le juge d'appel, que, n'ayant pas reçu notification de l'arrêt rendu par la CNDA le 5 juillet 2018, le préfet du Val-d'Oise ne pouvait, par l'arrêté contesté du 31 août 2018, lui faire obligation de quitter le territoire français sans méconnaître les dispositions précitées des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, le préfet du Val-d'Oise a produit, devant la Cour, l'accusé de réception du pli de la CNDA comportant les références " 17027262 - 3ème section, 3ème chambre, NOTIFDEC (...) ", faisant état d'une distribution le 23 juillet 2018, comportant la signature de l'intéressé, et dont les mentions, non contestées par M. C..., sont cohérentes avec celles de l'arrêt en cause, notamment en ce qu'elles font référence à la date d'audience. Dès lors, la notification de la décision de la CNDA doit être regardée comme ayant été régulièrement effectuée le 23 juillet 2018, soit antérieurement à la date de l'arrêté attaqué du 31 août 2018. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut dès lors qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. C... fait valoir qu'il a placé le centre de ses intérêts privés en France où il réside de façon habituelle et ininterrompue depuis décembre 2015. Toutefois, cette présence, à la supposer même établie, n'était encore qu'assez récente à la date des décisions attaquées. Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'il vit seul en France, sans charge de famille et n'établit, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses enfants et où il a vécu, selon ses dires, au moins jusqu'à l'âge de trente-neuf ans. Il ne justifie, ni ne fait d'ailleurs état, d'aucune forme d'intégration amicale, sociale ou professionnelle sur le territoire français. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. (...) " et aux termes de l'article 3 de cette même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
9. D'une part, il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'il vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 3, fait état du rejet de la demande d'asile de l'intéressé par l'OFPRA, confirmé par la CNDA, et indique que la décision ne contrevient pas aux dispositions de cet article. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas procédé à l'examen sa situation au regard de ces dispositions.
10. D'autre part, M. C... soutient être dans l'impossibilité de vivre dans son pays d'origine du fait de son homosexualité et des risques de condamnation qu'il encoure de ce fait au regard de la législation congolaise, de l'hostilité de la population conduisant à un sentiment de peur, de contrainte et à la dissimulation, ainsi que des humiliations et menaces familiales qu'il y a subies. Toutefois, le requérant n'assortit ces allégations que de peu de précisions. Il se borne à produire un certificat médical témoignant certes de lésions constatées au niveau de la jambe droite, du thorax, de l'articulation temporo-mandibulaire et de l'épaule droite, mais ne donnant aucune indication probante sur leur origine et leur cause, et ne permettant ainsi pas d'établir si elles proviennent d'agressions subies en raison de l'orientation sexuelle du requérant. Les décisions de la CNDA citées par l'intéressé, datées de 2016 et 2017, ainsi que l'extrait de rapport de mission de l'OFPRA en République démocratique du Congo reproduit dans ses écritures, au demeurant non daté, ne démontrent pas davantage qu'il serait personnellement exposé à des risques réels pour sa vie ou à des traitement inhumains ou dégradants. D'ailleurs, ainsi qu'il a été dit, sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'OFPRA en date du 9 juin 2017, confirmée par une décision de la CNDA en date du 5 juillet 2018, et, si ces appréciations ne lient, s'agissant de la fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement, ni l'autorité préfectorale, ni le juge administratif, le requérant n'apporte pas, dans le cadre de la présente instance, d'éléments de nature à les infirmer. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées, qui n'est d'ailleurs opérant qu'à l'encontre de la seule décision fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, ne peut également qu'être écarté le moyen tiré de ce que le préfet du Val-d'Oise aurait commis une erreur manifeste d'appréciation faute d'avoir pris en compte les conséquences de sa décision en cas de retour au République démocratique du Congo.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et présentées au titre des frais de l'instance doivent être également rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
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N° 19VE03466