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06/10/2020 | FRANCE | N°18VE02221

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 06 octobre 2020, 18VE02221


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS IXCORE a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.

Par un jugement no 1507597 du 30 avril 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la requête de la SAS IXCORE.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistr

s le 29 juin et le 10 décembre 2018, la SAS IXCORE, représentée par Me C... et Me A..., avocats, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS IXCORE a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.

Par un jugement no 1507597 du 30 avril 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la requête de la SAS IXCORE.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juin et le 10 décembre 2018, la SAS IXCORE, représentée par Me C... et Me A..., avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice 2008 ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros, à lui verser, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La requérante soutient que :

- sur les abandons de créance, la situation nette réelle des deux sociétés Ixair et H2X, qui ont bénéficié des abandons de créance à caractère financier litigieux, est restée négative après ces abandons ; elle l'établit par l'expertise de la banque Athéma et celle de M. E... D... ; ils étaient ainsi déductibles de son résultat et n'ont pas revalorisé la participation qu'elle détient dans ses filiales ; le rejet par le Tribunal des méthodes de valorisation proposées par la société n'est pas fondé ; subsidiairement, les abandons de créance litigieux peuvent être qualifiés d'abandons à caractère commercial en application de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 7 février 2018 n° 398676, dès lors qu'elle fournissait des prestations de services internes d'intérêt commun à l'ensemble de ses filiales, qu'elle s'immisçait ainsi dans la gestion de ses filiales et que par suite, elle entretenait avec ces dernières des relations commerciales au sens de la décision mentionnée ;

- sur la sous-facturation des prestations de services fournies à ses filiales, la méthode forfaitaire utilisée par l'administration pour valoriser les prestations de services facturées aux filiales était imprécise et le résultat auquel elle a abouti, selon lequel les prestations de services étaient sous-facturées, n'est pas juste ; le taux moyen utilisé n'est pas discuté mais son utilisation comme clé de répartition appliquée à l'ensemble des salariés aboutit à un résultat forfaitaire qui n'est pas fidèle à la réalité ; la coïncidence entre le montant des frais directs facturés en 2005 et celui des mêmes frais estimé par l'administration en utilisant sa méthode est un hasard ; subsidiairement, s'il y avait bien sous-facturation, celle-ci constituerait une subvention au sens des dispositions de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au code général des impôts dans le cadre de l'intégration fiscale, le périmètre du groupe d'intégration fiscale étant justifié par la production des formulaires adéquats.

Vu les autres pièces du dossier, y compris celles produites sur demande du 11 août 2020, reçues le 26 août, et non communiquées.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... ;

- les conclusions de M. Met, rapporteur public ;

- et les observations de Me C..., pour la SAS IXCORE.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS IXCORE, mère intégrante du groupe du même nom, a fait l'objet en 2010 d'une vérification de sa comptabilité portant sur les exercices clos en 2008 et 2009, qui a été étendue aux exercices antérieurs dans la limite des déficits reportés, à l'issue de laquelle le service lui a proposé des rectifications s'agissant, d'une part, d'abandons de créances à caractère financier consentis à certaines de ses filiales et, d'autre part, de la rémunération des prestations de service facturées à ses filiales. La SAS IXCORE demande la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice 2008.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les abandons de créance :

2. En vertu des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts, rendues applicables en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code, le bénéfice net imposable est égal à la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice. Une société peut, sans commettre d'acte anormal de gestion, prévenir les conséquences de graves difficultés financières d'une filiale en lui consentant une aide, alors même qu'elle n'entretiendrait avec elle aucune relation commerciale. Toutefois, sauf preuve contraire, cette aide doit être réputée augmenter la valeur de la participation détenue dans le capital de la filiale. Pour apporter la preuve que la valeur de sa participation dans le capital de sa filiale n'a pas augmenté, il appartient à la société qui consent une aide financière à sa filiale d'apporter tous éléments de nature à justifier que la situation nette réelle de sa filiale est négative. L'administration fiscale est en droit, sans méconnaître l'autonomie juridique des personnes morales, de remettre en cause les écritures de la filiale ayant un effet sur la détermination de sa situation nette réelle. Si le caractère d'acte anormal de gestion de l'aide consentie à une filiale s'apprécie à la date à laquelle cet acte est intervenu, en revanche la participation détenue dans le capital de la filiale devant être évaluée à la clôture de l'exercice au cours duquel l'aide a été consentie afin de déterminer la variation de l'actif net de la société mère au cours de l'exercice, c'est à la date de cette clôture qu'il convient d'apprécier la situation nette réelle de la filiale afin de déterminer si la société mère est en droit de déduire de ses bénéfices imposables la somme correspondant à l'aide qu'elle a apportée à sa filiale.

3. Il résulte de l'instruction que la SAS IXCORE a consenti, le 15 septembre 2006, l'abandon de la créance, d'un montant de 6 000 000 euros, qu'elle détenait sur sa filiale, la société iXAir. Elle a également consenti, le 5 avril et le 30 novembre 2007, l'abandon de deux créances, de montants respectifs de 2 000 000 euros et de 7 000 000 euros, qu'elle détenait sur sa filiale, la société H2X. A l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, l'administration, ayant constaté que les situations nettes comptables des filiales iXAir et H2X étaient redevenues positives en conséquence des abandons de créances consentis, a réintégré dans les résultats de la SAS IXCORE et imposé au titre de l'année 2008 les sommes correspondant à la part non-déductible de ces abandons de créance.

4. Pour contester la réintégration dans son résultat imposable d'une quote-part de chacun des abandons de créances litigieux, la société requérante soutient que la situation nette réelle de ses deux filiales est demeurée négative malgré ces abandons de créances. Pour le démontrer, elle se prévaut d'une étude et d'un rapport réalisés, à sa demande, respectivement par une banque d'affaires et un expert-comptable, indiquant l'une comme l'autre, par utilisation de méthodes de nature économique, telles que l'évaluation de la rentabilité de l'actif, la valorisation par les flux futurs ou la valorisation liquidative, que la valeur marchande de ces deux sociétés était restée nulle postérieurement aux abandons de créance. En se prévalant de ces méthodes d'évaluation économique de la valeur globale des deux sociétés auxquelles elle a abandonné ses créances, la requérante ne critique pas sur un plan comptable, et par suite pas utilement, la détermination de la situation nette réelle de ces sociétés, ni ne fait état d'une inexacte comptabilisation de certains postes de son bilan. La société requérante ne peut ainsi être regardée comme établissant que la situation nette réelle de ses filiales était négative à la date des abandons de créances consentis.

5. Subsidiairement, la requérante soutient que les abandons de créance litigieux peuvent être qualifiés d'abandons à caractère commercial dès lors qu'elle fournit en tant que holding animatrice d'un groupe intégré des prestations de services internes d'intérêt commun à l'ensemble de ses filiales dans la gestion desquelles, par suite, elle s'immisçait et avec lesquelles elle entretenait des relations commerciales. Toutefois, elle n'établit ni même n'allègue que son chiffre d'affaires en 2006 et en 2007 était presque uniquement procuré par la rémunération des prestations de services facturées à ses filiales. Il résulte au contraire de l'instruction que la requérante, société de capital-développement dont l'actif est principalement constitué d'immobilisations financières, se rémunère sur les dividendes que lui assurent ses investissements dans les sociétés dans lesquelles elle a pris des parts depuis sa création en 2001, alors que les prestations de services rendues à ses filiales ont représenté sensiblement moins de la moitié de son chiffre d'affaires net de 2005 à 2007. Il résulte également de l'instruction que le secteur titres est prépondérant dans son activité en termes d'affectation salariale alors que la requérante désigne elle-même les activités afférentes aux secteurs titres, immobilier et prêts et avances comme constituant son activité " propre ", par opposition à celle de prestataire de services à ses filiales qui se révèle ainsi accessoire. Il suit de là que les motivations financières des abandons de créance litigieux, dont les termes mêmes des conventions indiquent qu'ils présentent un caractère financier, sont prépondérantes sur d'éventuelles motivations commerciales. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les résultats de la SAS IXCORE et imposé au titre de l'exercice clos en 2008 les sommes correspondant à la part non déductible des abandons de créances consentis à ses filiales.

En ce qui concerne les actes anormaux de gestion :

6. Il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Le fait pour une entreprise de sous-facturer les prestations de service fournies à un tiers, ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. Cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avantages est une filiale, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages consentis par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où l'entreprise apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive.

7. Il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la SAS IXCORE les sommes, qu'elle a regardées comme constitutives de minorations de recettes, correspondant à la différence entre les prix effectivement facturés aux filiales et ceux résultant du calcul qu'elle a effectué à partir des tableaux transmis par la société requérante, à concurrence de 78 057 euros en 2005, 251 663 euros en 2006 et 751 679 euros en 2008.

8. Il résulte également de l'instruction que la SAS IXCORE a conclu avec ses filiales une convention d'assistance et de prestations de services valable à compter de l'exercice clos en 2008. Ce document fixe de manière très précise les conditions dans lesquelles est déterminé le prix des prestations facturées aux filiales. Toutefois, s'agissant des exercices antérieurs, la société requérante n'ayant pas mis en place une telle convention, la détermination du prix des prestations réalisées au profit des filiales ne résultait pas de l'application d'une méthode fixe. Afin de déterminer le montant des prestations qui auraient dû être facturées à leur prix de revient, l'administration a totalisé les coûts salariaux et de déplacement comptabilisés par la requérante puis a appliqué à ce total la clé de répartition entre la masse salariale affectée à l'activité de prestation de services internes et la totalité de la masse salariale fournie par la requérante elle-même et a obtenu ainsi les coûts salariaux et de déplacement consacrés par la requérante à l'activité de prestations de services à ses filiales. En utilisant cette clé de répartition, qui résulte des tableaux que la requérante a elle-même élaborés après un travail détaillant l'affectation au secteur " prestations " type de métier par type de métier, plutôt que le ratio brut entre le temps salarial global et le temps salarial affecté au secteur prestation, l'administration a pu valablement évaluer les sommes constitutives de minorations de recettes qui ont donné lieu au constat litigieux de l'existence d'un acte anormal de gestion consenti par la requérante à ses filiales. L'administration est ainsi réputée apporter la preuve, dont la charge lui incombe, de ce que la SAS IXCORE n'a pas agi dans son propre intérêt en facturant à ses filiales des prestations à un tarif inférieur à leur prix de revient, et que les opérations ainsi effectuées ne procédaient pas d'une gestion normale.

9. Subsidiairement, aux termes de l'article 223 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 217 bis. (...) / L'abandon de créance ou la subvention directe ou indirecte consenti entre des sociétés du groupe n'est pas pris en compte pour la détermination du résultat d'ensemble. ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable : " La subvention indirecte mentionnée au sixième alinéa de l'article 223 B et au premier alinéa de l'article 223 R du code général des impôts s'entend des renonciations à recettes qui proviennent des prêts ou d'avances sans intérêt ou à un taux d'intérêt inférieur au taux du marché. Elle s'entend également de la livraison de biens ou de la prestation de services sans contrepartie ou pour un prix inférieur à leur prix de revient ou, s'agissant de biens composant l'actif immobilisé, pour un prix inférieur à leur valeur réelle. / Constituent également une subvention indirecte au sens des articles 223 B et 223 R déjà cités les excédents de charges qui proviennent des emprunts contractés, des avances reçues qui sont assortis d'un taux d'intérêt plus élevé que celui du marché. Il en est de même des achats de biens ou de services pour un prix plus élevé que leur valeur réelle. ".

10. Si la société requérante, société mère du groupe fiscalement intégré IXCORE, a en définitive apporté des précisions quant au périmètre de ce groupe fiscal, il n'en a pas été de même de la ventilation précise des subventions par filiale et par prestation, exigée par les dispositions de l'article 223 B du code général des impôts, et notamment le tableau 2058-SG-SD. Elle ne met pas ainsi la Cour en mesure de s'assurer que les filiales auxquelles elle a consenti les abandons de créance en litige font effectivement partie du groupe intégré. Il n'est ainsi pas établi que les prestations de service facturées aux filiales pour un prix inférieur à leur prix de revient constitueraient des subventions indirectes au sens des dispositions précitées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS IXCORE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS IXCORE est rejetée.

2

N° 18VE02221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02221
Date de la décision : 06/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-083 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Manon HAMEAU
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : SELARL GODET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-10-06;18ve02221 ?
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