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06/10/2020 | FRANCE | N°18VE01943

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 06 octobre 2020, 18VE01943


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) JAUNE-ROUGE-BLEU a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2011 au

30 avril 2015 pour un montant de 118 578 euros, et de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1605355 du 10 avril 2018, le Tribuna

l administratif de Versailles a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des rappels...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) JAUNE-ROUGE-BLEU a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2011 au

30 avril 2015 pour un montant de 118 578 euros, et de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1605355 du 10 avril 2018, le Tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des rappels contestés au titre de trois contrats de formation professionnelle continue prévoyant une rémunération globale de 2 889 euros, mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 10 juin 2018, 3 février et

21 juin 2019, la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU, représentée par Me Carmouze, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler l'article 3 de ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions restant en litige ou, à défaut, la réduction de ces impositions à hauteur du montant de taxe sur la valeur ajoutée afférente aux formations " adultes " ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire en soulevant,

d'eux-mêmes, un argument tiré de l'insuffisance de justificatifs ;

- les rappels ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le chef de brigade a refusé de soumettre le litige à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, alors que se posaient la question de fait du montant du chiffre d'affaires à soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée et ainsi celle de la nature des formations dispensées ;

- les rappels ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière, la proposition de rectification et la réponse aux observations du contribuable étant insuffisamment motivées, faute d'avoir précisé la définition de la notion de " formation de loisir " ;

- le service a, à tort, estimé que les recettes afférentes aux stages et cours ne relevaient de l'exonération prévue par le 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, alors que les contrats afférents à ces formations sont des contrats types identiques à ceux produits devant le tribunal administratif et ont été fournis lors du contrôle, que ces formations ne relèvent pas du " loisir " car représentant plus de 100 heures pour les adultes et 50 pour les mineurs et ayant fait l'objet d'un bilan pédagogique non remis en cause par la DIRECCTE, et que, s'agissant des jeunes, il s'agit d'actions de préformation relevant de la formation professionnelle continue ;

- le service a, à tort, remis en cause l'attestation n° 3511 et estimé que celle-ci ne lui était pas opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Huon, rapporteur public ;

- et les observations de Me Carmouze, avocat de la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU.

Une note en délibéré présentée pour la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU, par Me Carmouze, avocat, a été enregistrée le 23 septembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL JAUNE-ROUGE-BLEU exerce une activité d'école d'art sous l'enseigne " Terre et Feu " et, à ce titre, dispense des cours particuliers, des stages, de la formation professionnelle continue et des conseils aux entreprises. Elle est partiellement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de son activité de conseil et exonère de cette taxe son activité de cours et de stages à destination des particuliers ainsi que les cours donnés dans le cadre de la formation professionnelle continue (FPC). A l'issue d'une vérification de comptabilité portant en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er avril 211 au 30 avril 2015, le service a notamment remis en cause le bénéfice de l'exonération prévue au 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts en ce qui concerne le chiffre d'affaires afférent aux prestations d'enseignement en ce qu'elles constituent des cours particuliers et des stages dispensés à des adultes à titre de loisirs et des enfants et adolescents sans aucun lien avec une insertion professionnelle ou un retour à l'emploi. A l'occasion de la réponse aux observations du contribuable, le service a abandonné les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en conséquence à sa charge, afférents aux seules prestations d'enseignement financé conjointement par les organismes paritaires collecteurs agréés et les stagiaires. La SARL JAUNE-ROUGE-BLEU doit être regardée comme faisant appel du jugement du 10 avril 2018 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'après avoir prononcé la décharge, pour partie, des impositions contestées et mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il a rejeté le surplus des conclusions sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La SARL JAUNE-ROUGE-BLEU fait valoir qu'en limitant la décharge prononcée aux seuls rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux formations des adultes pour lesquelles des contrats de formation professionnelle et le résumé des projets professionnels ont été versés au dossier et en rejetant sa demande afférente aux autres formations " en l'absence de justificatif sur ce point ", alors qu'un tel argument n'a jamais été invoqué par l'administration fiscales, les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire. Toutefois, ce moyen manque en fait dès lors que l'administration en défense, faisait valoir que la requérante n'apportait pas la preuve, par les pièces produites, que l'ensemble des formations entraient dans le champ de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée. Au surplus, il appartient au juge administratif de se prononcer sur le bien-fondé des moyens dont il est saisi et, le cas échéant, d'écarter de lui-même, quelle que soit l'argumentation du défendeur, un moyen qui lui paraît infondé, au vu de l'argumentation qu'il incombe au requérant de présenter au soutien de ses prétentions. Dans ces conditions, en se fondant sur une telle circonstance de fait pour rejeter la décharge demandée, le Tribunal administratif de Versailles a apprécié le bien-fondé de cette demande au regard du texte applicable et n'a, dès lors, pas soulevé un moyen qu'il aurait dû communiquer sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

Sur les impositions en litige :

S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) " et aux termes de l'article L. 59 A du même livre : " (...) / II.- Dans les domaines mentionnés au I, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. (...) ".

4. La SARL JAUNE-BLEU-ROUGE soutient que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le chef de brigade a refusé de soumettre le litige à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, alors que se posaient la question de fait du montant du chiffre d'affaires à soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée et ainsi celle de la nature des formations dispensées. Toutefois, dès lors que le différend en cause, tout comme d'ailleurs les questions ainsi posées, ne portent en réalité que sur le principe de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des prestations assurées par la société, et qu'en matière de taxes sur la valeur ajoutée, les dispositions précitées n'attribuent compétence à la commission départementale que lorsque le désaccord entre l'administration et le redevable porte sur le montant du chiffre d'affaires réalisé et non sur le chiffre d'affaires taxable, un tel moyen est inopérant et ne peut qu'être écarté.

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. " et aux termes l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, l'année d'imposition et la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de manière à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. Par ailleurs, l'exigence de motivation de la réponse aux observations du contribuable qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié s'apprécie au regard de l'argumentation développée par celui-ci dans ses observations. Enfin, aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions ".

6. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification datée du

25 septembre 2016 indique, sous l'item " IV.A. Rappel de TVA collectée ", le motif retenu par le vérificateur pour remettre en cause le régime d'exonération sous lequel la société requérante avait placé son activité de cours et de stages à destination des particuliers au motif que cette dernière ne relèverait pas de la formation professionnelle continue telle que prévue au 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, ce secteur étant regardé comme ne regroupant que " l'ensemble des recettes réglées par les organismes de financement ". Il résulte également de l'instruction que le courrier de réponse aux observations du contribuable daté du 15 janvier 2016 se fonde sur le même motif, le service indiquant que les cours particuliers et stages en cause " n'ont aucun lien avec une insertion professionnelle ou de retour à l'emploi ", " ne répondent pas aux critères définissant la formation professionnelle continue et ne peuvent dès lors bénéficier de l'exonération de TVA ". Si, à l'occasion de ce courrier, le service a indiqué, de manière incidente, que ces cours et stages seraient alors donnés " à titre de loisir ", il n'a pas entendu modifier le motif initialement retenu, à savoir le fait qu'ils ne relèvent pas de la formation professionnelle continue. Dans ces conditions et contrairement à ce que fait valoir la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU, la seule circonstance que le service ait, dans la seule réponse aux observations du contribuable, employé le terme " loisir " sans le définir, n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation de celle-ci ou de la proposition de rectification l'ayant précédée, lesquelles comportent d'ailleurs l'ensemble des éléments de fait et de droit requis.

S'agissant du bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article 132 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États membres exonèrent les opérations suivantes : / (...) i) l'éducation de l'enfance ou de la jeunesse, l'enseignement scolaire ou universitaire, la formation ou le recyclage professionnel, ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectués par des organismes de droit public de même objet ou par d'autres organismes reconnus comme ayant des fins comparables par l'État membre concerné (...) ". En outre, en vertu de l'article 134 de la même directive, les livraisons de biens et les prestations de services sont exclues du bénéfice de cette exonération " lorsqu'elles ne sont pas indispensables à l'accomplissement des opérations exonérées ", ainsi que " lorsqu'elles sont essentiellement destinées à procurer à l'organisme des recettes supplémentaires par la réalisation d'opérations effectuées en concurrence directe avec celles d'entreprises commerciales soumises à la TVA ". Enfin, en application de l'article 131 de cette directive, cette exonération s'applique " dans les conditions que les États membres fixent en vue d'assurer [son] application correcte et simple (...) et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels ".

8. Le a du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, qui a pour objet de procéder à la transposition de ces dispositions, exonère de taxe sur la valeur ajoutée les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre " de la formation professionnelle continue, telle qu'elle est définie par les dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, assurée soit par des personnes morales de droit public, soit par des personnes de droit privé titulaires d'une attestation délivrée par l'autorité administrative compétente reconnaissant qu'elles remplissent les conditions fixées pour exercer leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue ". Il prévoit en outre qu'" un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de ces dispositions, notamment pour ce qui concerne les conditions de délivrance et de validité de l'attestation ".

9. Le I de l'article 202 A de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application de ces dispositions, prévoit que, pour obtenir l'attestation mentionnée au a du 4° du 4 de l'article 261 de ce code, les personnes de droit privé exerçant une activité de formation professionnelle continue autres que les organismes paritaires agréés souscrivent une demande adressée à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, ou à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi pour les départements d'outre-mer, dont le demandeur relève. Le II du même article précise notamment que " l'attestation ne peut être délivrée qu'à la condition que l'activité du demandeur entre dans le cadre de la formation professionnelle continue telle que définie conjointement par les articles L. 6311-1 et L. 6313-1 du code du travail (...) ". En vertu du III du même article, le service dispose d'un délai de trois mois à compter de la réception de la demande pour délivrer l'attestation, qui est réputée accordée à l'issue de ce délai à défaut de décision explicite. L'article 202 B de la même annexe dispose que " La délivrance de l'attestation entraîne l'exonération de TVA au jour de la réception de la demande. / L'attestation ne vaut que pour les opérations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue ou des missions dévolues aux organismes paritaires agréés. Elle s'applique obligatoirement à l'ensemble de ces opérations réalisées par le titulaire de l'attestation ". Enfin, aux termes de son article 202 D : " Les agents de l'administration des impôts contrôlent l'application des articles 202 A à 202 C et s'assurent notamment que les opérations qui ouvrent droit à exonération relèvent d'une activité entrant dans le cadre de la formation professionnelle continue ".

10. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'administration compétente, saisie d'une demande de délivrance de l'attestation mentionnée au a du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, y fait droit après avoir vérifié que l'organisme qui la sollicite remplit les conditions auxquelles elle est subordonnée et, notamment, celle tenant à ce que l'activité au titre de laquelle il demande l'attestation relève de la formation professionnelle continue. Il résulte en outre des dispositions précitées du II de l'article 202 A et de l'article 202 B de l'annexe II au code général des impôts que l'attestation entraîne reconnaissance du droit au bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée.

11. Si elle ne constitue, en toute hypothèse, dès lors qu'elle n'émane pas de l'administration chargée d'établir, de recouvrer et de contrôler la taxe sur la valeur ajoutée, ni une prise de position opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, ni un agrément régi par les articles 1649 nonies et 1649 nonies A du code général des impôts, l'attestation mentionnée au a du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts présente néanmoins le caractère d'une décision créatrice de droits au profit de son bénéficiaire.

12. En vertu des principes généraux régissant la procédure administrative et, depuis le 1er janvier 2016, des articles L. 242-1 et L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'administration ne peut, si elle n'a pas procédé au retrait de l'attestation pour illégalité dans les quatre mois de sa délivrance, que l'abroger et mettre fin à ses effets pour l'avenir, lorsqu'elle constate que l'une des conditions auxquelles elle est subordonnée n'est pas ou plus remplie, notamment que l'activité exercée par l'organisme n'entre pas dans le champ de la formation professionnelle continue. L'administration ne peut, en revanche, remettre en cause les effets que l'attestation a produits antérieurement, sauf dans le cas où elle a été obtenue par fraude.

13. Il en résulte que, lorsqu'elle constate à l'occasion du contrôle mentionné à l'article 202 D de l'annexe II au code général des impôts que l'activité au titre de laquelle un organisme s'est vu délivrer l'attestation prévue au a du 4° du 4 de l'article 261 du même code n'entre pas dans le champ de la formation professionnelle continue, l'administration fiscale ne peut, sauf à ce que l'attestation ait été obtenue par fraude, remettre en cause pour le passé l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée. Elle ne peut le faire qu'à raison des opérations réalisées à compter de l'abrogation de l'attestation par l'administration qui l'a délivrée, si tel a été le cas. A défaut d'abrogation, l'administration fiscale tient aussi de l'article 202 D de l'annexe II le pouvoir de remettre en cause le bénéfice de l'exonération à raison des opérations réalisées à compter de la notification à l'intéressé des résultats du contrôle. Le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ne saurait, en revanche, être remis en cause pour la période antérieure.

14. Toutefois, dès lors qu'en vertu du second alinéa de l'article 202 B de l'annexe II au code général des impôts l'attestation ne vaut que pour les opérations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle continue, il appartient à l'administration fiscale, lorsqu'elle constate, à l'occasion du contrôle, que l'organisme a appliqué l'exonération de taxe à des opérations autres que celles correspondant à l'activité au titre de laquelle il a obtenu l'attestation, de procéder, dans le délai de reprise déterminé par l'article L. 176 du livre des procédures fiscales, au rappel des droits éludés à raison de ces opérations.

15. En l'espèce, pour remettre en cause le bénéfice, par la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU de l'exonération prévue au 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, pour une partie de son activité de cours particuliers et de stages à destination d'adultes, d'adolescents et d'enfants, le service s'est fondé sur la circonstance que ces cours et stages ne répondraient pas aux critères définissant la formation professionnelle continue, en l'absence de preuve d'un lien avec une insertion professionnelle ou le retour à l'emploi et donc ne relèveraient pas de l'activité pour laquelle la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU a obtenu, le 30 septembre 2011, l'attestation prévue au a du 4° du 4 de l'article 261. Le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir, à cet égard, l'insuffisance et le caractère non probants des justificatifs produits, postérieurs à la période vérifiée. Pour contester cette remise en cause, la société requérante se borne à produire, outre les documents non probants susmentionnés, plusieurs liasses de " contrats stagiaires " conclus avec des particuliers dont le statut de " jeune " ou " adulte " n'est pas précisé et dont les mentions, notamment celle selon laquelle " est conclu un contrat de formation professionnelle à titre individuel " ou encore celle selon laquelle " l'action de formation entre dans la catégorie des actions d'ARTS PLASTIQUES prévue par l'article L. 900-2 du code du travail ", article d'ailleurs abrogé au 1er mai 2008, ne permettent pas à elles-seules, en l'absence de toute précision sur les projets professionnels individuels dans lesquels s'inséraient ces actions de formation, de s'assurer que les cours correspondants répondraient à l'objet de la formation professionnelle continue telle que définie par les articles L. 6311-1 et L. 6313-1 du code du travail, alors qu'elle admet, par ailleurs, dans ses propres écritures, que l'ensemble des contrats signés avec les " adultes " sont des " contrats-types ", identiques, et admet, pour les " jeunes ", pour lesquels elle ne produit pas de contrats, avoir réalisé des cours et stages dans le cadre de la préparation à des concours d'écoles d'art, de design et de communication ou encore au baccalauréat, à des CAP, des BEP ou des diplômes de métiers d'art, qui ne relèvent pas de la formation professionnelle continue ou encore de la préformation ou de la formation à la vie professionnelle. Ne sont pas davantage probants l'importance et l'ampleur des formations dispensées, représentant plus de 100 heures pour les adultes et 50 pour les mineurs, ou encore la circonstance, au demeurant non établie, que son " bilan pédagogique et financier retraçant l'activité de dispensateur de formation professionnelle ", n'aurait jamais été remis en cause par la DIRECCTE. Dans ces conditions, dans la mesure où le service n'a pas entendu remettre en cause le bénéfice du droit à exonération reconnu par l'attestation du 30 septembre 2011 mais a seulement constaté que l'ensemble des prestations effectuées ne s'inscrivait pas dans le cadre de l'activité pour laquelle cette attestation a été délivrée et en l'absence d'éléments précis en ce sens, c'est à bon droit qu'il a procédé aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés.

16. Il résulte de ce qui précède que la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus de ses conclusions de sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2011 au 30 avril 2015 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel elle a placé certaines de ses activités ne relevant pas de la formation professionnelle continue. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL JAUNE-ROUGE-BLEU est rejetée.

2

N° 18VE01943


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01943
Date de la décision : 06/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SELARL FISCALIS-PC

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-10-06;18ve01943 ?
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