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22/09/2020 | FRANCE | N°19VE02292

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 22 septembre 2020, 19VE02292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au Tribunal administratif de Versailles, en premier lieu, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un dél

ai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous ast...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au Tribunal administratif de Versailles, en premier lieu, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, en deuxième lieu, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard et, en troisième lieu, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1900974 du 21 mai 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juin 2019, Mme D..., représentée par

Me Ram, avocate, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an, portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de la motivation de l'arrêté contesté, d'erreurs d'appréciation s'agissant de l'appréciation de son état de santé et de l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;

- en ce qui concerne le refus de séjour, l'arrêté contesté est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- il méconnaît les dispositions des 11° et 7° de l'article L. 313-11 et de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée dès lors que son état de santé fait obstacle à son exécution immédiate et aussi par voie de conséquence de l'annulation du refus de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Deroc a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante marocaine née en 1958 à Douar Tanout (Maroc), a sollicité, le 29 mars 2018, la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 10 janvier 2019, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Elle fait appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les moyens soulevés par Mme D... et tirés de ce que le jugement serait entaché d'une erreur manifeste s'agissant de l'appréciation de la motivation de l'arrêté contesté, d'erreurs s'agissant de l'appréciation de son état de santé et des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle, relèvent du bien-fondé et sont sans incidence sur la régularité du jugement. Il suit de là que ces moyens, inopérants, doivent être écartés.

Sur les moyens dirigés contre le refus de séjour :

3. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'arrêté en litige énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Il vise notamment l'avis médical du 29 octobre 2018 émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) sur l'état de santé de Mme D... dont il reprend une partie des conclusions. Si Mme D... fait valoir, à cet égard, que le préfet aurait, à tort estimé qu'elle ne justifiait pas de sa date d'entrée sur le territoire français, alors que tel était le cas, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la motivation de la décision attaquée. Par ailleurs, le préfet n'était pas tenu de préciser les raisons pour lesquelles il a estimé que l'intéressée était susceptible de bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, cette dernière ayant été, en tout état de cause, mise en mesure de contester utilement le bien-fondé des motifs de la décision ainsi prise et le respect des règles du secret médical interdisant d'ailleurs au collège des médecins de révéler des informations sur la pathologie dont souffre Mme D... et la nature des traitements médicaux qu'elle nécessite, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

5. Il résulte des termes de l'avis du 29 octobre 2018 du collège de médecins de l'OFII que l'état de santé de Mme D... nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'elle peut néanmoins bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour contester cet avis, l'intéressée fait état de ce qu'elle est atteinte d'un cancer du sein pour lequel elle a été opérée et fait l'objet d'un suivi trimestriel et de ce qu'elle souffre de fragilité cardiaque devant être traitée et suivie. Elle soutient, d'une part, que le système de santé marocain serait beaucoup moins facilement accessible que le système français, souffrirait d'un manque de personnel médical et présenterait des difficultés d'accès à la pharmacologie, d'autre part, que l'interruption de son suivi régulier remettrait en cause l'évolution de son état de santé et qu'un tel suivi ne pourra lui être procuré au Maroc et, enfin, que son époux résidant au Maroc n'est pas en capacité physique de la soutenir. Toutefois, ces seules allégations, au demeurant non établies, ne sont pas suffisantes pour établir qu'elle ne pourrait effectivement bénéficier, au Maroc, des traitements requis par son état de santé. Si l'intéressée fait également valoir qu'elle a été victime d'un accident cardio-vasculaire cérébral le 8 avril 2019, est hospitalisée depuis et se trouve, en conséquence, dans l'impossibilité de voyager, cette circonstance, postérieure à la décision attaquée, est sans incidence sur sa légalité. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement, le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, Mme D... reprend en appel les moyens soulevés en première instance et tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, ni que le préfet, qui n'y était dès lors pas tenu, se soit prononcé sur les titres prévus par ces textes, et ce alors même qu'au cours de l'instruction de sa demande des documents afférents à sa vie privée et familiale lui auraient été demandés. Par suite, les moyens sont inopérants et doivent, pour ce motif, être écartés.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ".

8. Mme D... fait valoir qu'elle est entrée en France, en dernier lieu, le

1er août 2016, qu'elle réside chez sa fille, de nationalité française et est prise en charge par son frère et sa soeur, de nationalité française, et qu'un autre frère et une autre soeur résident en France avec leurs familles. Toutefois, elle ne justifie que d'une présence en France d'un peu plus de deux ans à la date de la décision attaquée, ne fait état d'aucune forme d'intégration sociale ou professionnelle, ne justifie pas que sa présence auprès des membres de sa famille résidant en France serait nécessaire et ne conteste pas conserver des attaches familiales dans son pays d'origine, où réside son mari âgé de soixante-cinq ans et où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de cinquante-huit ans. Il suit de là que la décision portant refus de séjour n'a pas porté au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. En cinquième lieu, dès lors qu'elle se borne à faire état de sa présence en France auprès de sa famille et de son état de santé, compte tenu des motifs de fait rappelés aux points 5. et 8., Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de séjour serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, si les premiers juges ont précisé, au point 7. de leur jugement, que la circonstance que l'intéressée ait été hospitalisée, le 8 avril 2019, à l'hôpital Bicêtre où elle a été placée en réanimation en raison d'un accident vasculaire cérébral, serait de nature à faire obstacle à l'exécution immédiate de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de la requérante, cette circonstance, postérieure à la décision contestée, est en tout état de cause sans incidence sur sa légalité.

11. En deuxième lieu, le refus de titre de séjour opposé à Mme D... n'étant pas entaché d'illégalité, la décision portant obligation de quitter le territoire, qui se fonde sur ce refus, ne saurait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de ce refus.

12. En troisième lieu, pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés aux points 5., 8. et 9., le moyen tiré de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. La décision obligeant Mme D... à quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, la décision fixant le pays de destination, qui se fonde sur cette obligation, ne saurait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de cette obligation.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

4

N° 19VE02292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02292
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : RAM

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-09-22;19ve02292 ?
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