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07/07/2020 | FRANCE | N°19VE02546

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 07 juillet 2020, 19VE02546


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n°1904684 du 2 juillet 2019, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1

5 juillet 2019 et 11 juin 2020, M. A..., représenté par Me D..., avocate, demande à la Cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n°1904684 du 2 juillet 2019, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 juillet 2019 et 11 juin 2020, M. A..., représenté par Me D..., avocate, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à défaut de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée de plusieurs vices de procédure tenant à ce qu'il n'est pas établi que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) s'est réuni alors que l'administration doit pouvoir justifier, par la production de tout justificatif, et notamment les relevés de délibération, de la réalité de cette délibération collégiale ; l'avis émis est incomplet puisque les cases ne sont pas cochées conformément à l'annexe C de l'arrêté du 27 décembre 2016 ; le collège des médecins de l'OFII n'est composé que d'un médecin psychiatrique alors qu'il est atteint d'une pathologie psychiatrique ; il est obsolète dès lors que, pour fonder sa décision en date du 3 avril 2019, le préfet retient l'avis du collège des médecins de l'OFII en date du 22 décembre 2017 ; il a été rendu plus de trois mois après la transmission du certificat médical contrairement à ce que prévoient les dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée à raison de l'avis du collège des médecins de l'OFII ;

- elle a été pris en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance de l'article

L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles

R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...,

- et les observations de Me D..., avocat, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 19 septembre 1987, fait appel du jugement du 2 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le préfet de la

Seine-Saint-Denis a refusé le renouvellement de son titre de séjour, a annulé le récépissé de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions attaquées :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire :

2. Par un arrêté n°2018-2385 du 1er octobre 2018, régulièrement publié le

2 octobre 2018 suivant au bulletin d'informations administratives de la préfecture de la

Seine-Saint-Denis, le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé que la délégation de signature consentie à Mme I... C... serait exercée, en cas d'absence ou d'empêchement de celle-ci, par Mme H... J..., cheffe du bureau de l'éloignement et du contentieux, pour l'ensemble des attributions relevant de son bureau. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées manque en fait.

Sur la légalité du refus de renouvellement du titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". En application de l'article L. 211-5 du même code, la motivation " doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. La décision refusant le renouvellement de son titre de séjour à M. A... mentionne les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, vise notamment les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rappelle les motifs de l'avis émis le 22 décembre 2017 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et indique qu' " au vu de ces éléments, M. A... F... ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-11-11° précité ". Elle expose ainsi, de façon suffisamment précise, les raisons pour lesquelles le préfet de la

Seine-Saint-Denis a estimé que la carte de séjour sollicitée par l'intéressé ne pouvait lui être délivrée sur le fondement de ces dispositions. Elle fait également état de la situation personnelle et familiale de l'intéressé pour estimer que la décision litigieuse ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard du but poursuivi. En outre, elle expose que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou tout autre pays où il est effectivement admissible. Cette décision, dont la rédaction n'est ni stéréotypée et qui n'avait pas à apporter plus de précisions, comporte donc l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose en outre : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Selon l'article R. 313-23 de ce code : " (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. (...) ".

6. Par ailleurs, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

7. M. A... soutient que la décision de refus de titre est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas prouvé que les docteurs composant le collège des médecins de l'OFII se soient effectivement réunis et aient rendu leur avis de manière collégiale. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'avis émis par ce collège, le 22 décembre 2017, sur l'état de santé de M. A... porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant " et cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire, laquelle n'est pas rapportée par le requérant.

8. Par ailleurs, si l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 22 décembre 2017 ne mentionne pas, au stade de l'élaboration du rapport, si des examens complémentaires ont été, ou non, effectués et si la justification de l'identité a été, ou non, réalisée, et au stade de l'élaboration du rapport, si la convocation pour examen a été, ou non, réalisée, si des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et si la justification de l'identité a été, ou non, réalisée, ces rubriques ne doivent être renseignées par les membres du collège que dans la mesure où ce dernier a effectivement décidé de recourir à l'une ou l'autre de ces investigations complémentaires et ses membres ont coché, à cet effet, les cases prévues dans le formulaire de notification de l'avis indiquant la tenue de ces investigations. Dans la mesure où il ressort de l'avis du collège des médecins de l'OFII que ces derniers n'ont pas indiqué avoir souhaité réaliser des examens complémentaires ou s'assurer de l'identité de M. A..., il n'y avait pas lieu pour eux de remplir les mentions, inapplicables en l'espèce, tenant à la réalisation effective ou non de ces investigations.

9. En outre, aucune disposition de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prescrit que les trois médecins du collège doivent détenir une spécialité correspondant à la pathologie du requérant. Ainsi, la circonstance que le collège des médecins n'aurait compris qu'un seul psychiatre n'est pas de nature à entacher cet avis d'irrégularité.

10. Si M. A... soutient de plus que le délai qui s'est écoulé entre l'avis du collège de médecins de l'OFII du 22 septembre 2017 et l'arrêté du 3 avril 2019 est excessif et entache d'un vice de procédure la décision en litige, ni les dispositions précitées, qui ont pour objet de permettre au préfet, auquel il incombe de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen de la demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus du 11° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de disposer d'une information complète sur l'état de santé d'un étranger malade, ni aucune autre ne restreignent la validité de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII à une durée quelconque sous peine de caducité ou de nullité. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait fait état d'éléments nouveaux, relatifs notamment à son état de santé, qui auraient pu justifier un nouvel examen de son dossier par le collège de médecins de l'OFII. Par suite, la circonstance que l'arrêté litigieux se fonde sur un avis datant de plus de quinze mois est sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour.

11. Enfin, si les dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que l'avis du collège de médecins est rendu dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux adéquats, le respect de ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité. La circonstance, à la supposer établie, que l'avis du collège des médecins de l'OFII ait été rendu plus de trois mois après la transmission par le requérant de son certificat médical, n'a pas privé l'intéressé d'une garantie et n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision prise.

12. Il résulte de ce qui précède que les vices de procédures invoqués doivent être écartés.

13. En troisième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, pour refuser au requérant le renouvellement du titre de séjour sollicité, se serait cru à tort lié par l'avis du collège de médecins de l'OFII. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté.

14. En quatrième lieu, pour contredire l'avis du collège de médecins de l'OFII,

M. A... produit un premier certificat médical établi par le Dr Brechier, médecin psychiatre du centre d'accueil, de soins et d'orientation de la Plaine Saint-Denis, le 15 octobre 2013, qui indique que M. A... présente les symptômes d'un stress post traumatique à la suite d'événements qu'il a subis dans son pays. En outre, M. A... produit un second certificat médical établi pas ce même médecin, le 19 avril 2019, soit postérieurement à la décision attaquée, qui indique qu'il est suivi auprès de ce praticien, pour la seconde fois, depuis 2016, et qu'il présente un " syndrome de stress-post-traumatique en relation avec les violences subis dans son pays pendant la période de crise en 2011 avec le décès de ses deux parents et les menaces à son beau-frère " et fait également état du fait que " l'état de M. A... reste trop fragile et que tout ce qui peut rappeler les évènements tragiques qu'il a vécu risque de le faire de nouveau décompenser avec alors des risques suicidaires ". Toutefois, si ces certificats médicaux, dont le plus récent atteste de ce que qu'actuellement l'état psychiatre de M. A... est stabilisé, qu'il travaille régulièrement et a pu fonder une famille, tendent à confirmer que l'état de santé de M. A... " nécessite une prise en charge médicale ", ainsi que l'a relevé le collège des médecins de l'Office, le requérant n'établit pas que le défaut de prise en charge " devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ". Enfin, M. A... n'établit pas, par la seule production d'un article de presse en date du 26 juillet 2017 qu'un traitement approprié à la prise en charge de la pathologie qu'il présente ferait défaut dans le pays dont il a la nationalité. Au surplus, et sans que cela ne soit contesté, le collège des médecins de l'Office n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour lui de bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'un traitement approprié dès lors qu'il a estimé que le défaut de prise en charge médicale " ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ". Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à l'intéressé de renouveler le titre de séjour qu'il sollicitait.

15. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

16. M. A..., entré irrégulièrement en France le 25 novembre 2012, se prévaut, pour faire valoir l'intensité de ses liens privés et familiaux sur le territoire français, de son emploi en qualité d'agent de sécurité depuis 2016 en versant aux débats divers bulletins de salaires, datant de décembre 2016 à août 2017, puis de octobre 2017 à août 2018, et de la circonstance qu'il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis le 1er septembre 2018, ainsi que du fait, dont d'ailleurs il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été porté à la connaissance de l'administration, qu'il est pacsé avec une compatriote depuis le 27 juin 2018 avec laquelle il a eu deux enfants nés, en France, le 14 octobre 2016 et le 4 septembre 2018. Toutefois, il ressort des pièces versées au dossier que le requérant était âgé de vingt-cinq ans lors de son arrivée en France et qu'il n'établit pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine. En outre, alors même que, M. A... soutient que, postérieurement à la décision attaquée, sa compagne Mme E... B... et leurs deux enfants mineurs ont obtenu le bénéfice de sa protection subsidiaire, ce qui ferait obstacle à la reconstitution de la cellule familiale dans leur pays d'origine, cette circonstance, si elle peut conduire M. A... à former, s'il s'y croit fondé, une nouvelle demande de titre de séjour à la lumière de ses changements de situation, est sans incidence sur le caractère récent de l'établissement en France de la cellule familiale de M. A... à la date de la décision en litige. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'a pas été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

17. En sixième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

18. Ainsi qu'il vient d'être dit, la circonstance que les enfants mineurs de M. A... ne peuvent gagner avec lui la Côte-d'Ivoire pour y reconstituer la cellule familiale est postérieure à la décision en litige. Dans ces conditions, M. A..., qui ne fait pas état d'autres éléments de nature à caractériser une atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants à la date de la décision attaquée, n'est pas fondé à soutenir que cette dernière méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

19. En septième et dernier lieu, pour les mêmes motifs de fait que ceux développés précédemment, la décision litigieuse n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

20. En premier lieu, il résulte des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation de quitter le territoire français dont est assortie la décision de refus de titre de séjour opposée à M. A... n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte. La décision de refus de titre de séjour opposée au requérant mentionnant, avec une précision suffisante, les considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement, et l'arrêté visant notamment l'article L. 511-1-I de ce code, la décision portant obligation pour M. A... de quitter le territoire français est, par voie de conséquence, suffisamment motivée.

21. En second lieu, pour les mêmes motifs de fait que ceux précédemment exposés, le moyen tiré de ce que la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis obligeant M. A... à quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

22. En premier lieu, la motivation de la décision distincte fixant le délai de départ volontaire se confond avec celle de l'obligation de quitter le territoire français, laquelle comporte ainsi qu'il est dit précédemment les considérations de droit et de fait et est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le délai de départ volontaire doit être écarté.

23. En second lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. / L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ".

24. M. A... soutient que la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations tel que le prévoient les dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, le législateur ayant entendu déterminer à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français, les dispositions précitées ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre de la décision fixant le délai de départ volontaire.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

25. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

26. Si M. A... soutient que la décision fixant le pays de destination porte atteinte aux stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il encourt un risque certain pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine où il a vécu des événements traumatisants, il ne produit aucune pièce devant la Cour susceptible d'étayer les craintes qu'il exprime en cas de retour dans son pays d'origine. Il s'ensuit que le préfet de la Seine-Saint-Denis, en décidant l'éloignement de M. A... vers son pays d'origine ou tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissible, n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

27. Il résulte de tout ce qui précède que M. A..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

N° 19VE02546 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02546
Date de la décision : 07/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yann LIVENAIS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SULLI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-07;19ve02546 ?
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