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16/06/2020 | FRANCE | N°19VE04121

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 16 juin 2020, 19VE04121


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 12 août 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être éloignée à l'issue de ce délai et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence, ou à défaut de réexaminer sa demande, dans un délai d'un moi

s à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1906894 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 12 août 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être éloignée à l'issue de ce délai et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence, ou à défaut de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1906894 du 21 novembre 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2019, Mme A... B..., représentée par Me Cujas, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1906894 du 21 novembre 2019 du Tribunal administratif de Versailles ;

2° d'annuler l'arrêté en date du 12 août 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de renouvellement de son certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être éloignée à l'issue de ce délai ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un certificat de résidence, ou à défaut de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle souffre de plusieurs pathologies chroniques pour lesquelles elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié en Algérie dès lors qu'il n'y est pas disponible ;

- elle n'aurait pas les moyens financiers pour accéder aux traitements appropriés en Algérie.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante algérienne née le 28 août 1950, est entrée en France le 21 janvier 2017. Elle a obtenu le 21 janvier 2018 un certificat de résidence d'une durée d'un an pour soins, dont elle a demandé le renouvellement le 14 décembre 2018. Par un arrêté en date du 12 août 2019, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'expiration de ce délai. Mme B... a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de la décision de refus de séjour et de la mesure d'éloignement. Par un jugement n° 1906894 du 21 novembre 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Mme B... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. D'une part, il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. D'autre part, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... souffre, notamment, d'une pathologie cardiaque, d'un diabète de type 2 mal équilibré et source de complications rétiniennes, d'une insuffisance rénale et d'une anémie chronique. Elle nécessite donc une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ainsi que l'a estimé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) dans son avis rendu le 6 juin 2019. Alors que ce même avis mentionne que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, Mme B... pourrait y bénéficier d'un traitement approprié, la requérante le conteste en soutenant d'une part, qu'elle ne pourrait avoir accès au Xultophy, traitement dont elle bénéficie en France pour soigner son diabète, non plus qu'au Kardégic prescrit dans le cadre de sa pathologie cardiaque. Toutefois, si la requérante soutient qu'elle ne pourrait avoir accès au Kardégic dans le dosage qui lui est prescrit, qui ne serait pas disponible dans son pays d'origine, ses affirmations reposent sur une mention manuscrite, apposée sur une ordonnance par une pharmacie en Algérie, mention relayée par une attestation rédigée par son fils médecin généraliste en France. Ces documents, qui en outre ne permettent pas d'établir que Mme B... ne pourrait avoir accès au traitement qui lui est nécessaire par la combinaison de Kardégic pris sous d'autres dosages, ne sont pas suffisamment probants pour établir l'indisponibilité du traitement lui-même en Algérie. S'agissant, par ailleurs, du médicament Xultophy, si un certificat médical établi le 9 septembre 2019, indique que Mme B... est actuellement traitée avec ce médicament avec une amélioration de son équilibre de diabète et que ce traitement " ne semble pas disponible en Algérie ", affirmation corroborée par une attestation établie par la direction générale de la pharmacie et des équipements de santé du ministère de la santé algérien, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette forme d'insuline lui serait indispensable, ni que Mme B... ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement antidiabétique équivalent qui lui permettrait d'équilibrer son diabète.

6. Mme B... conteste également l'accessibilité de son traitement en Algérie. Elle soutient ainsi que sa pathologie rétinienne nécessite quatre séances mensuelles de photocoagulation au laser, qui peuvent être réalisées en Algérie, mais auxquelles elle ne pourrait avoir accès compte tenu de leur coût dès lors qu'il représente la moitié de la pension de retraite de son mari à la charge duquel elle vit. Toutefois, outre que le prix d'une séance de photocoagulation n'est établi que par une unique ordonnance rédigée par une clinique d'ophtalmologie algérienne, Mme B... n'établit pas, ni même n'allègue que les soins médicaux nécessités par son état de santé ne pourraient, même partiellement, être pris en charge par le système de couverture maladie existant en Algérie pour les non-salariés. Dans ces conditions, elle n'établit pas qu'elle ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie.

7. Il résulte dès lors de ce qui précède, qu'en refusant de renouveler le certificat de résidence algérien délivré à Mme B... pour raison de santé, le préfet de l'Essonne n'a pas méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation. Mme B... n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions d'appel à fin d'annulation, d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

N° 19VE04121 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04121
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme LE GARS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : CUJAS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-16;19ve04121 ?
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