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09/06/2020 | FRANCE | N°17VE01354

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 juin 2020, 17VE01354


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Garches à lui verser la somme de 56 000 euros en réparation de divers préjudices subis dans le cadre de l'exercice de ses fonctions à la commune de Garches, ainsi que la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi, en sa qualité d'usager, du fait des conditions dans lesquelles elle exploite le service de transport de personnes.

Par un jugement n° 1408873 du 28 février 2017, le Tribunal administr

atif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Garches à lui verser la somme de 56 000 euros en réparation de divers préjudices subis dans le cadre de l'exercice de ses fonctions à la commune de Garches, ainsi que la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi, en sa qualité d'usager, du fait des conditions dans lesquelles elle exploite le service de transport de personnes.

Par un jugement n° 1408873 du 28 février 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2017, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de condamner la commune de Garches à lui verser :

- la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des horaires et jours de conduite imposés par son employeur ;

- la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi du fait des refus de formations opposés par son employeur ;

- la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du retrait par son employeur de la décision de nomination au poste de gardien ;

- la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi en sa qualité d'usager des transports publics de la commune ;

3° de mettre à la charge de la commune de Garches la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- la commune n'a pas respecté les dispositions du décret du 25 août 2000, dès lors qu'il a été contraint, à de nombreuses reprises, de travailler plus de six jours d'affilée sans aucun congé ; ce faisant, la commune a méconnu les dispositions de décret relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport public urbain de voyageurs et celles du règlement communautaire relatif au temps de conduite et de repos à respecter pour les conducteurs ; il a subi un préjudice familial et un préjudice moral tenant à la privation de repos et au risque encouru par sa conduite évalué à 50 000 euros ;

- la commune a méconnu son droit à la formation professionnelle en lui refusant à plusieurs reprises, sans consulter la commission administrative paritaire, l'accès à une formation ; il a subi un préjudice professionnel évalué à 3 000 euros ;

- la commune a illégalement annulé sa mutation en qualité de gardien du centre culturel ; il a subi un préjudice évalué à 3 000 euros ;

- la commune ne respecte pas les prescriptions du décret du 16 aout 1985 relatif aux transports urbains de personnes ; ce manquement lui cause un préjudice en sa qualité d'usager des transports publics estimé à 10 000 euros.

Vu le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;

- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le règlement CE n° 561-2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

- le code général des collectivités territoriales,

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président,

- et les conclusions de Mme Aventino-Martin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par la commune de Garches en 2006 en qualité d'agent technique contractuel, puis d'adjoint technique contractuel avant d'être titularisé dans le grade d'adjoint technique de 1ère classe à compter du 1er février 2010. Affecté au garage municipal, il avait pour mission d'assurer le transport des élus, des agents et de certains habitants de la commune. Alors qu'il était placé en disponibilité pour convenances personnelles depuis le 1er décembre 2013, M. A... a, par lettre du 15 mai 2014 notifiée à la commune de Garches le 21 mai 2014, demandé au maire l'indemnisation de certains préjudices qu'il estime avoir subis. Une décision de rejet est née du silence gardé sur cette demande. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

2. Il appartient au demandeur qui engage une action en responsabilité à l'encontre de l'administration d'apporter tous éléments de nature à établir devant le juge l'existence d'une faute et la réalité du préjudice subi. Il incombe alors, en principe, au juge de statuer au vu des pièces du dossier, le cas échéant après avoir demandé aux parties les éléments complémentaires qu'il juge nécessaires à son appréciation.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne le non-respect des règles relatives au temps de travail :

3. En premier lieu, l'article 1er du décret du 12 juillet 2001 dispose que : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail applicables aux agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant sont déterminées dans les conditions prévues par le décret du 25 août 2000 (...) ". Aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 25 août 2000 : " I.- L'organisation du travail doit respecter les garanties minimales ci-après définies. / La durée hebdomadaire du travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder ni quarante-huit heures au cours d'une même semaine, ni quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives et le repos hebdomadaire, comprenant en principe le dimanche, ne peut être inférieur à trente-cinq heures. / La durée quotidienne du travail ne peut excéder dix heures. / Les agents bénéficient d'un repos minimum quotidien de onze heures. / L'amplitude maximale de la journée de travail est fixée à douze heures. / Le travail de nuit comprend au moins la période comprise entre 22 heures et 5 heures ou une autre période de sept heures consécutives comprise entre 22 heures et 7 heures. / Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. ". Ces dispositions imposent aux employeurs territoriaux de respecter une durée maximale de travail de quarante-huit heures au cours d'une même semaine ou de quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives.

4. M. A... soutient, en se fondant sur les disques chronodactygraphes qu'il produit, qu'à plusieurs reprises, il aurait travaillé plus de six jours d'affilée sans congé. Il invoque à ce titre avoir subi un préjudice familial, tenant à l'absence de congés hebdomadaires, et un préjudice moral, tenant à la privation de repos et à l'inquiétude que lui causaient alors les atteintes portées à sa sécurité. Toutefois, ni les dispositions précitées ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'interdit à un employeur territorial de faire travailler ses agents plus de six jours d'affilée sans congé. En outre, il ne résulte pas de l'instruction, et n'est même pas allégué par le requérant, que la commune de Garches aurait imposé à ce dernier de travailler plus de quarante-huit heures au cours d'une même semaine ou de quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives. Il s'ensuit qu'aucun manquement de la commune n'est établie sur le fondement du décret du 25 août 2000.

5. En second lieu, M. A... invoque une violation par la commune de Garches de l'article 8 du règlement n° 561-2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas de la fiche de poste de l'intéressé très peu explicite, que M. A... se trouverait dans le champ d'application du règlement, tel que défini à son article 2 et qui prévoit que : " 1. Le présent règlement s'applique au transport routier: a) de marchandises par des véhicules, y compris des véhicules à remorque ou à semi-remorque, dont la masse maximale autorisée dépasse 3,5 tonnes; ou b) de voyageurs par des véhicules qui sont construits ou aménagés de façon permanente pour pouvoir assurer le transport de plus de neuf personnes, conducteur compris, et qui sont destinés à cet usage. ". Il s'ensuit qu'aucun manquement de la commune ne peut être établi sur le fondement du règlement précité.

En ce qui concerne le non-respect du droit du requérant à la formation professionnelle :

6. Aux termes du 2ème alinéa de l'article 2 de la loi du 12 juillet 1984 : " Sans préjudice de l'application des dispositions relatives au droit individuel à la formation prévues à l'article 2-1, les agents territoriaux bénéficient des autres actions de formation mentionnées à l'article 1er, dans les conditions prévues par la présente loi et sous réserve des nécessités du service. L'autorité territoriale ne peut opposer deux refus successifs à un fonctionnaire demandant à bénéficier de ces actions de formation qu'après avis de la commission administrative paritaire. ".

7. S'il est constant que M. A... a émis des souhaits de formation au permis poids lourds et au certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (CACES) lors de son entretien d'évaluation en 2009, 2010, 2011 et 2012, il n'établit pas avoir présenté de demande d'inscription qui lui aurait été refusée. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que ces formations seraient nécessaires à l'exercice de ses fonctions. Enfin, la commune de Garches établit que M. A... a bénéficié d'une formation d'intégration des agents de catégorie C en 2010 et une préparation au concours d'agent de maîtrise en 2013. Dans ces conditions, aucune faute de la commune de Garches ne peut être retenue sur le terrain des dispositions précitées la loi du 12 juillet 1984.

En ce qui concerne le refus d'affectation du requérant sur le poste de gardien du centre culturel municipal :

8 Le 3 juillet 2013, le maire de Garches a accepté la candidature présentée par M. A... pour exercer les fonctions de gardien du centre culturel et l'a informé de la date à laquelle il pourrait occuper son poste ainsi que des modalités d'organisation du travail. Il résulte des éléments versés aux débats que l'intéressé ayant critiqué certaines de ces modalités, le maire a finalement décidé le 9 juillet suivant de revenir sur sa décision et de maintenir M. A... affecté au garage municipal. Si M. A... soutient que cette décision du maire de revenir sur son acceptation de sa candidature l'a privé de la jouissance d'un logement de fonction d'une surface et d'un " standing " supérieur à ceux qu'il était en mesure d'offrir à sa famille, aucun lien direct avec un préjudice indemnisable ne peut être établi dès lors que M. A... a lui-même refusé les modalités d'organisation du poste.

En ce qui concerne le préjudice subi en qualité d'usager des transports publics de la commune :

9. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, M. A... ne justifie d'aucun préjudice personnel, actuel, direct et certain résultant de sa qualité d'usager des transports publics de la commune qu'il revendique. Il ne peut dès lors demander aucune indemnisation à ce titre.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

12. La commune de Garches n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. A... tendant à ce que soit mise à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Garches en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Garches au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 17VE01354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01354
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Absence ou existence du préjudice - Absence.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère certain du préjudice - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: Mme AVENTINO-MARTIN
Avocat(s) : SCP DELAGE BEDON ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-09;17ve01354 ?
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