La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/02/2020 | FRANCE | N°17VE03022

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 13 février 2020, 17VE03022


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA L'Auxiliaire a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de lui accorder la réduction, à hauteur de 294 928 euros en droits, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1601340 du 8 juin 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 octobre 2017, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES P

UBLICS demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rétablir le supplément d'imposition...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA L'Auxiliaire a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de lui accorder la réduction, à hauteur de 294 928 euros en droits, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1601340 du 8 juin 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 octobre 2017, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rétablir le supplément d'imposition en litige à la charge de la SA L'Auxiliaire.

Le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne tranche pas la question de savoir à quelle date doit être apprécié le critère de prépondérance immobilière de la SA La Valdaine dont les titres ont fait l'objet d'une provision pour dépréciation par la requérante ;

- les dispositions du a sexies-0 bis du I de l'article 219 du code général des impôts ne fixant pas de date particulière d'appréciation de ce critère, hormis le cas particulier d'une cession de titres, il convient de faire application des règles de droit commun régissant la déductibilité des provisions, telles que prévues au 5° du 1 de l'article 39 du même code, pour retenir la date de clôture de l'exercice de la société qui détient ces titres.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'avis contentieux n° 432053 du 22 novembre 2019 du Conseil d'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SA L'Auxiliaire, qui exerce une activité d'assurance mutuelle dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, est associée, à hauteur de 99,97 % du capital, de la SA La Valdaine, laquelle constituait, au 31 décembre 2007, une société à prépondérance immobilière non cotée, au sens des dispositions du a sexies-0 bis du I de l'article 219 du code général des impôts. La SA L'Auxiliaire a primitivement comptabilisé et déduit de ses résultats imposables, par application de ces dispositions et de celles du 5° du 1 de l'article 39 du même code, une provision pour dépréciation des titres de participation ainsi détenus dans la SA La Valdaine, à hauteur de 7 915 000 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007, puis une dotation complémentaire de 884 783 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008. La SA L'Auxiliaire a ultérieurement fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010. A l'occasion de ce contrôle, l'administration a notamment constaté que la SA La Valdaine avait, au cours de l'exercice 2008, cédé la totalité de ses actifs immobiliers. Estimant que la prépondérance immobilière d'une société, au sens du a sexies-0 bis du I de l'article 219 du code général des impôts, devait, en l'absence de cession des titres de celle-ci au cours de l'exercice par l'entreprise détentrice, être appréciée à la date de clôture de l'exercice chez cette dernière, ainsi que l'énonçait le paragraphe n° 12 de l'instruction publiée au bulletin officiel des impôts 4 B-4-09 du 30 juillet 2009, ultérieurement repris, dans le bulletin officiel des finances publiques - impôts, au paragraphe n° 70 de la subdivision BOI-IS-BASE-20-20-10-30, le service en a déduit que la SA La Valdaine ne constituait plus une société à prépondérance immobilière à la clôture de l'exercice au 31 décembre 2008 et que les titres de celle-ci devaient désormais être qualifiés de titres de participation, au sens des dispositions distinctes du a quinquies du I de l'article 219 du code général des impôts, à l'égard desquels une provision pour dépréciation n'est pas fiscalement déductible. En conséquence, le vérificateur a rejeté la déduction de la dotation complémentaire susmentionnée de 884 783 euros initialement pratiquée par la SA L'Auxiliaire et en a réintégré le montant à ses résultats imposables au taux de droit commun au titre de l'exercice clos en 2008. Par ailleurs, l'administration a également notifié d'autres rectifications à la SA L'Auxiliaire au titre du même exercice, dont le montant total a emporté l'annulation du déficit primitivement déclaré par l'intéressée et à raison duquel celle-ci avait, à l'époque, bénéficié, par application du régime exceptionnel de report en arrière prévu par l'article 94 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, d'un remboursement anticipé de la créance d'impôt correspondante. Le supplément d'impôt sur les sociétés en résultant, au titre de l'exercice clos en 2008, a été consécutivement assigné à la SA L'Auxiliaire par avis de mise en recouvrement émis le 22 octobre 2014, pour un montant de 3 689 855 euros en droits. Après le rejet implicite de la réclamation préalable qu'elle avait présentée en ce sens à l'administration, la SA L'Auxiliaire a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de lui accorder la réduction de ce supplément, en tant seulement qu'il procédait du rejet de la déduction de la dotation complémentaire susmentionnée de 884 783 euros, soit une réduction, en droits, de 294 928 euros. Par un jugement n° 1601340 du 8 juin 2017, dont le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS relève appel, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à cette demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. En l'espèce, le jugement attaqué cite, notamment, les dispositions relatives aux provisions pour dépréciation de titres figurant au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, ainsi que celles afférentes aux régimes distincts d'imposition applicables, d'une part, aux titres de participation et, d'autre part, aux titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées, telles que respectivement prévues au a quinquies et au a sexies-0 bis du I de l'article 219 du même code. Ce jugement, qui rappelle ensuite qu'en vertu de ces dernières dispositions, le caractère immobilier prépondérant des sociétés concernées s'apprécie, pour les titres faisant l'objet d'une cession, à la date de cette cession ou à la clôture du dernier exercice précédant celle-ci, énonce également qu'aucune disposition de la loi ne précise comment s'apprécie le caractère immobilier prépondérant des sociétés en l'absence de cession de titres et, en particulier, que ce caractère devrait être apprécié, comme l'administration l'a retenu pour rectifier les résultats imposables de la SA L'Auxiliaire, à la date de clôture de l'exercice chez la société détentrice des titres. Toutefois, les motifs du jugement attaqué n'indiquent pas à quelle autre date il convient alors, pour l'application de la loi fiscale, d'apprécier ce caractère, ni davantage si la SA La Valdaine devait ou non, à la date ainsi à retenir, être qualifiée de société à prépondérance immobilière, ni enfin si la société requérante pouvait légalement prétendre à la déduction fiscale des provisions qu'elle avait constituées. Dans ces conditions, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que ce jugement est insuffisamment motivé et doit, par suite, être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SA L'Auxiliaire devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Sur les conclusions à fin de décharge :

5. Aux termes de l'article 219 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " I. (...) Le taux normal de l'impôt est fixé à 33,1/3 %. / Toutefois : / a. Le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 19 % (...). / Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2005, le taux fixé au premier alinéa est fixé à 15 %. / Pour les exercices ouverts à compter du 31 décembre 2007, le montant net des plus-values à long terme afférentes aux titres des sociétés à prépondérance immobilière définies au a sexies-0 bis cotées est imposé au taux prévu au IV. (...) / a sexies-0 bis. Le régime des plus et moins-values à long terme cesse de s'appliquer à la plus ou moins-value provenant des cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées réalisées à compter du 26 septembre 2007. Sont considérées comme des sociétés à prépondérance immobilière les sociétés dont l'actif est, à la date de la cession de ces titres ou a été à la clôture du dernier exercice précédant cette cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles, des droits portant sur des immeubles, des droits afférents à un contrat de crédit-bail conclu dans les conditions prévues au 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ou par des titres d'autres sociétés à prépondérance immobilière. Pour l'application de ces dispositions, ne sont pas pris en considération les immeubles ou les droits mentionnés à la phrase précédente lorsque ces biens ou droits sont affectés par l'entreprise à sa propre exploitation industrielle, commerciale ou agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale. / Les provisions pour dépréciation afférentes aux titres exclus du régime des plus et moins-values à long terme en application du premier alinéa cessent d'être soumises à ce même régime (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que lorsque les titres d'une société font l'objet d'une provision pour dépréciation, cette société doit être regardée comme étant à prépondérance immobilière au sens du premier alinéa du a sexies-0 bis de l'article 219 du code général des impôts, ce qui a pour effet de soustraire la provision à l'application du régime du long terme et de permettre sa déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun du I du même article, lorsque son actif est constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles, des droits portant sur des immeubles, des droits afférents à un contrat de crédit-bail conclu dans les conditions prévues au 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ou par des titres d'autres sociétés à prépondérance immobilière, soit à la clôture de son dernier exercice précédant la constitution de cette provision, soit à la date à laquelle cette dernière est constituée, c'est-à-dire à la date de clôture de l'exercice de la société qui détient ses titres.

7. En l'espèce, il est constant que la SA La Valdaine constituait, à la clôture de son exercice 2007, une société à prépondérance immobilière non cotée, au sens des dispositions précitées du a sexies-0 bis du I de l'article 219 du code général des impôts. Par suite, lorsque, à la clôture de son exercice 2008, la SA L'Auxiliaire a comptabilisé une dotation complémentaire à la provision pour dépréciation des titres détenus au sein de la SA La Valdaine, cette dernière devait être considérée comme une société à prépondérance immobilière non cotée, quand bien même elle avait cédé la totalité de ses actifs immobiliers au cours de cet exercice. Il suit de là que la dotation en cause ne relevant pas du régime du long terme, la SA L'Auxiliaire est fondée à soutenir que l'administration ne pouvait la réintégrer à son résultat imposable à l'impôt sur les sociétés pour l'année 2008.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la SA L'Auxiliaire est fondée à obtenir la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Sur les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires :

9. Les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, sont, en vertu des dispositions de l'article R. 208-1 du même code, " payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ". Dès lors qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la SA L'Auxiliaire quant au versement de ces intérêts, les conclusions de cette société tendant au bénéfice des intérêts moratoires sont irrecevables et doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SA L'Auxiliaire d'une somme de 1 500 euros en remboursement des frais qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 8 juin 2017 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La SA L'Auxiliaire est déchargée de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2008.

Article 3 : L'Etat versera à la SA L'Auxiliaire une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS, ainsi que le surplus des conclusions présentées par la SA L'Auxiliaire, sont rejetés.

2

N° 17VE03022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03022
Date de la décision : 13/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Provisions.


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: M. Fabrice MET
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SCP MERMILLON RAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-02-13;17ve03022 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award