Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à titre principal, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser la somme de 165 578,40 euros, au titre de la différence entre le traitement qu'il a perçu et celui auquel il pouvait prétendre, la somme de 50 000 euros au titre de la minoration de sa pension de retraite et la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral, du fait du refus de la commune de le titulariser, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser la somme de 176 462,72 euros au titre du préjudice résultant de la perte de chance d'être titularisé, à titre infiniment subsidiaire, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser la somme de 27 451 euros correspondant aux primes de responsabilité et de sujétions spéciales dont il a été irrégulièrement privé pendant sept ans, la somme de 10 000 euros au titre de la minoration de sa pension de retraite, la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral résultant de la non-reconnaissance de son statut de directeur de l'école municipale de musique et la même somme au titre du préjudice moral résultant de la précarité de sa situation et de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-la-Garenne la somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1411782 du 6 juin 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 août 2017, M. A... B..., représenté par Me Dadi, avocat, demande à la Cour :
1° à titre principal, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser les sommes suivantes : 165 578,40 euros au titre de son préjudice financier du fait de la différence de traitement, 50 000 euros au titre du préjudice financier du fait de la diminution de sa pension de retraite et 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;
2° à titre subsidiaire, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser la somme de 176 462,72 euros en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance d'être titularisé ;
3° à titre très subsidiaire, de condamner la commune de Villeneuve-la-Garenne à lui verser les sommes suivantes : 27 451 euros correspondant aux primes de responsabilité et de sujétions spéciales dont il a été privé pendant sept ans, 10 000 euros au titre du préjudice financier du fait de la diminution de sa pension de retraite, 5 000 euros au titre de son préjudice moral tiré de l'absence de reconnaissance de son statut et 5 000 euros au titre de son préjudice moral subi du fait de la précarité de son statut ;
4° de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-la-Garenne la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient que :
- la commune de Villeneuve-la-Garenne avait l'obligation de le titulariser en application des articles 5 de la loi du 3 janvier 2001 et 5 du décret du 28 septembre 2001 ; il disposait de la qualité d'agent non-titulaire a minima à compter du 27 avril 1988 ; depuis 1975, il exerçait à temps plein et à titre principal les fonctions de directeur de l'école de musique de la commune ;
- la commune de Villeneuve-la-Garenne a commis une faute en recrutant un agent contractuel pour un emploi permanent en méconnaissance de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ; cette faute lui a causé une perte de chance d'être titularisé et il est donc fondé à demander 80% des sommes qu'il aurait obtenues s'il avait été titularisé ;
- la commune de Villeneuve-la-Garenne a commis une faute en l'employant, de 2000 à 2007, en qualité d'adjoint d'enseignement musical temporaire alors qu'il exerçait les fonctions de directeur de l'école de musique en méconnaissance de la loi du 26 janvier 1984, du décret du 6 septembre 1991 et du principe de bonne foi dans les relations contractuelles ; son préjudice s'élève à : 27 451 euros correspondant à l'indemnité de responsabilité et à l'indemnité de sujétions spéciales qui lui ont été versées à compter de 2007, 50 000 euros au titre d'une diminution de sa retraite et 5 000 euros de préjudice moral ;
- il aurait dû bénéficier de la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée en application de l'article 15 de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 dès lors qu'il occupe à temps plein les fonctions de directeur de l'Ecole de musique depuis au moins 1988.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
- le décret n°91-855 du 2 septembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de M. Cabon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., musicien-chef de 2ème classe au sein de l'Armée de l'air a été autorisé en 1970 à cumuler son emploi avec les fonctions de professeur et directeur des cours à l'Ecole municipale de musique de Villeneuve-la-Garenne. A la suite de son admission à la retraite, il a été employé en qualité d'agent contractuel par la commune du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2010 pour diriger l'école de musique municipale. M. B... fait appel du jugement n° 1411782 du 6 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villeneuve-la-Garenne à l'indemniser des préjudices découlant de ses conditions d'emploi et de recrutement.
Sur la responsabilité de la commune :
Sur l'absence de titularisation :
2. Aux termes de l'article 4 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale : " Par dérogation à l'article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, et pour une durée maximum de cinq ans à compter de la date de publication de la présente loi, les agents non titulaires des collectivités territoriales ou des établissements publics en relevant exerçant des fonctions correspondant à celles définies par les statuts particuliers des cadres d'emplois peuvent, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, être nommés dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale, selon les modalités fixées aux articles 5 et 6 ci-dessous, sous réserve qu'ils remplissent les conditions suivantes : 1° Justifier avoir eu, pendant au moins deux mois au cours des douze mois précédant la date du 10 juillet 2000, la qualité d'agent non titulaire recruté en application de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée ; (...) ". Aux termes de l'article 5 de la même loi : " Les agents non titulaires remplissant les conditions énumérées à l'article 4 et qui ont été recrutés après le 27 janvier 1984 peuvent accéder par voie d'intégration directe au cadre d'emplois dont les fonctions correspondent à celles au titre desquelles ils ont été recrutés et qu'ils ont exercées pendant la durée prévue au 4° de l'article 4, dans la collectivité ou l'établissement public dans lequel ils sont affectés (...) ".
3. M. B... soutient que la commune de Villeneuve-la-Garenne a commis une faute en ne le titularisant pas alors qu'il remplissait les conditions précitées des articles 4 et 5 de la loi du 3 janvier 2001 et notamment qu'il disposait de la qualité d'agent contractuel a minima depuis le 27 avril 1988 et que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il exerçait les fonctions de directeur de l'Ecole de musique à temps plein et à titre principal. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et des écritures de l'appelant que M. B... était militaire de carrière au sein de l'Armée de l'air jusqu'à son départ à la retraite le 30 septembre 2000 et qu'il avait été autorisé le 29 octobre 1970 à cumuler ses fonctions de musicien-chef de 2ème classe avec celles de professeur et directeur des cours à l'Ecole municipale de Villeneuve-la-Garenne par le chef d'état-major de l'Armée de l'air dans le cadre de l'arrêté interministériel en date du 15 février 1965 relatif à la rémunération des personnels assurant, à titre accessoire, l'enseignement de la musique dans les cours municipaux. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il disposait de la qualité d'agent contractuel pendant une période d'au moins deux mois au cours des douze mois précédant la date du 10 juillet 2000, période antérieure à sa radiation des cadres de l'armée et ni par suite que la commune de Villeneuve-la-Garenne aurait commis une faute en refusant de le titulariser sur le fondement des dispositions précitées de la loi du 3 janvier 2001.
Sur le caractère permanent de l'emploi de directeur de l'Ecole de musique :
4. En vertu des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les communes ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel, ou indisponibles en raison de divers congés ou pour faire face temporairement à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu. Elles peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel.
5. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté en défense que, du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2010, M. B... a été irrégulièrement employé en qualité d'agent contractuel pour occuper l'emploi permanent de directeur de l'Ecole de musique. La commune de Villeneuve-la-Garenne a donc commis une faute. Toutefois, M. B... n'établit ni même n'allègue qu'il remplissait les conditions statutaires permettant d'accéder aux fonctions de directeurs d'établissements territoriaux d'enseignement artistique fixées par le décret n° 91-855 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des directeurs d'établissements territoriaux d'enseignement artistique. Il n'est pas fondé à demander une indemnisation liée à la perte de chance d'être titularisé dans l'emploi qu'il occupait en qualité de contractuel.
Sur le recrutement en qualité d'assistant territorial d'enseignement artistique de 2000 à 2007 :
6. En l'absence de dispositions législatives ou réglementaires relatives à la fixation de la rémunération des agents non titulaires, l'autorité compétente dispose d'une large marge d'appréciation pour déterminer, en tenant compte notamment des fonctions confiées à l'agent et de la qualification requise pour les exercer, le montant de la rémunération ainsi que son évolution, il appartient au juge, saisi d'une contestation en ce sens, de vérifier qu'en fixant ce montant l'administration n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
7. Il ressort des pièces du dossier par les contrats conclus du 1er octobre 2000 au 30 septembre 2007, M. B... a été employé en qualité d'adjoint d'enseignement musical faisant fonction de directeur de l'Ecole de Musique et que sa rémunération était fixée à l'indice brut 544. Les contrats conclus à compter du 1er octobre 2007 mentionnent que M. B... était employé en qualité de directeur d'établissement d'enseignement artistique, que sa rémunération était basée sur le 2ème échelon du grade de directeur à l'indice brut 593 et qu'il bénéficiait d'une indemnité de responsabilité d'un montant de 1 100,52 euros par an et d'une indemnité de sujétions spéciales de 2 821,08 euros par an.
8. M. B... soutient qu'il aurait dû être employé en qualité de directeur dès octobre 2000 et toucher les indemnités de responsabilité et de sujétions spéciales dès cette date. Toutefois, M. B... qui était auparavant autorisé par l'Armée de l'air à cumuler son emploi avec les fonctions de professeur et de directeur n'établit ni même n'allègue que ses fonctions au sein de l'Ecole de musique relevaient exclusivement de la direction et que son poste ne correspondait pas à celui d'adjoint d'enseignement musical, le cas échéant faisant fonction de directeur. Par ailleurs, la rémunération que percevait l'intéressé, fixée à l'indice brut 544, eu égard notamment aux grilles indiciaires des cadres d'emploi considérés, n'apparaît pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que la commune de Villeneuve-la-Garenne aurait méconnu le principe de loyauté des relations contractuelles et serait tenue de lui verser les indemnités de responsabilité et de sujétions spéciales dont il a bénéficié à compter de 2007.
Sur l'absence de contrat à durée indéterminée :
9. Aux termes du II de l'article 15 de la loi du 26 juillet 2005 susvisée portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l'agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : / 1° Etre âgé d'au moins cinquante ans ; / 2° Etre en fonction ou bénéficier d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée ; / 3° Justifier d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; / 4° Occuper un emploi en application des quatrième, cinquième ou sixième alinéas de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée dans une collectivité ou un établissement mentionné à l'article 2 de la même loi ".
10. M. B... soutient que la commune de Villeneuve-la-Garenne a commis une faute en ne transformant pas son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dès lors qu'il était âgé de 60 ans à la date de publication de la loi du 26 juillet 2005, qu'il occupait un emploi du niveau de la catégorie A et qu'il était employé par la commune, a minima, depuis 1988. Toutefois, M. B..., qui a été radié des cadres de l'armée le 30 septembre 2000, ne peut se prévaloir de la qualité d'agent contractuel qu'à compter du 1er octobre 2000 et ne justifie donc pas d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au 1er juin 2004.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, ni celle de la décision par laquelle la commune de Villeneuve-la-Garenne a rejeté sa demande indemnitaire.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Villeneuve-la-Garenne, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. B... une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B... la somme que demande la commune au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Villeneuve-la-Garenne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 17VE02627