La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2019 | FRANCE | N°17VE00758;17VE01467

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 19 décembre 2019, 17VE00758 et 17VE01467


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 5 juillet 2013 par laquelle le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (CHIMM) a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle, de condamner ledit centre hospitalier à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation des préjudices subis et d'enjoindre au centre hospitalier de la réintégrer à un poste relevant de sa compétence et à un niveau de rémunération équivalent à celui qu'el

le percevait avant son licenciement.

Par un jugement n°1305514 du 6 décembre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 5 juillet 2013 par laquelle le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (CHIMM) a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle, de condamner ledit centre hospitalier à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation des préjudices subis et d'enjoindre au centre hospitalier de la réintégrer à un poste relevant de sa compétence et à un niveau de rémunération équivalent à celui qu'elle percevait avant son licenciement.

Par un jugement n°1305514 du 6 décembre 2016, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision en date du 5 juillet 2013 par laquelle le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux a prononcé le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme A... et condamné le centre hospitalier à verser à Mme A... une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement n°1504377 du 14 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a condamné le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux à verser à Mme A... une somme de 23 330 euros en réparation des préjudices subis et lui a enjoint de réintégrer Mme A... dans ses fonctions ainsi que de procéder à une reconstitution de sa carrière à compter de la date de son licenciement dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée le 9 mars 2017, le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (CHIMM), représenté par Me Raynal, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Versailles ;

2° de débouter Mme A... de ses demandes ;

3° de condamner Mme A... aux entiers dépens et à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'insuffisance professionnelle de Mme A... est caractérisée ;

- Mme A... n'apporte pas la preuve du harcèlement qu'elle prétend avoir subi.

II. Par une requête enregistrée le 11 mai 2017, le centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (CHIMM), représenté par Me Raynal, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Versailles ;

2° de débouter Mme A... de ses demandes ;

3° de condamner Mme A... aux entiers dépens et à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'insuffisance professionnelle de Mme A... est caractérisée ;

- Mme A... n'apporte pas la preuve du harcèlement qu'elle prétend avoir subi.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n°91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été embauchée dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par le centre hospitalier intercommunal de Meulan Les Mureaux (CHIMM) le 4 avril 2011 en tant que journaliste-responsable de la communication. Le 5 juillet 2013 toutefois, le directeur du centre hospitalier a pris à son encontre une décision de licenciement pour insuffisance professionnelle motivée par " l'insuffisance professionnelle démontrée par Mme A... sur les deux dernières années à occuper le poste de responsable communication, caractérisée par une incapacité à s'organiser à et prioriser ses objectifs et tâches, par une maîtrise manifestement insuffisante des outils bureautiques liés à la communication et par des difficultés relationnelles croissantes avec son directeur fonctionnel ". Par deux requêtes distinctes, Mme A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de cette décision et l'indemnisation des préjudices résultant des fautes commises par le centre hospitalier. Par deux jugements en date des 6 décembre 2016 et 14 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 5 juillet 2013, a condamné le centre hospitalier à verser à Mme A... une somme de 23 330 euros en réparation des préjudices subis et lui a enjoint de réintégrer Mme A... dans ses fonctions ainsi que de procéder à une reconstitution de sa carrière à compter de la date de son licenciement dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le centre hospitalier relève appel de ces deux jugements.

2. Les requêtes n° 17VE00758 et n°17VE01467 concernent la situation d'un même agent public. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement n°1305514 :

3. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ses fonctions. Si une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées, une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.

4. Le centre hospitalier intercommunal de Meulan Les Mureaux reproche à Mme A... un certain nombre de griefs tirés de retards pris par cette dernière dans la mise à jour des supports de communication interne et externe, de dysfonctionnements dans l'organisation d'évènements placés sous sa responsabilité, de carences dans la représentation institutionnelle et la logistique assurées, dès lors, par son directeur fonctionnel, de retards pris dans le traitement des dossiers, de difficultés relationnelles rencontrées avec son directeur et d'une maîtrise insuffisante des outils liés à la communication. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, que les difficultés rencontrées par Mme A... se sont avérées à partir de l'été 2012, après une période d'essai de six mois à l'issue de laquelle Mme A... avait été reconnue comme " un agent très motivé ayant su parfaitement s'intégrer à l'équipe et apporter sa contribution aux actions de communication du CHIMM ". A partir de l'été 2012 en effet, les relations de Mme A... avec son supérieur hiérarchique, directeur chargé de la qualité, de la communication et des systèmes d'information, se sont dégradées. Ainsi, un courrier du mois de juin 2012 adressé par ce dernier à Mme A... en des termes sévères illustre un début de dégradation de leurs relations professionnelles auparavant caractérisées par une certaine courtoisie et estime professionnelle réciproques. Au cours de l'année 2012 et au début de l'année 2013, Mme A... s'est ainsi vu reprocher le retard pris dans la réalisation de supports de communication, notamment la mise à jour de l'annuaire du CHIMM et du livret d'accueil des patients à l'origine d'une redéfinition de ses missions par son supérieur hiérarchique en septembre 2012. Les pièces du dossier attestent par ailleurs d'une insatisfaction de la hiérarchie de Mme A... lors de l'organisation de la cérémonie d'inauguration du nouveau bloc obstétrical. A ce sujet, Mme A... s'est vu reprocher un défaut d'anticipation et d'organisation dans l'envoi des invitations et son refus de coopérer au projet d'un artiste peintre pour ce même bloc obstétrical. Si Mme A... ne conteste pas le retard pris dans l'actualisation de certains supports de communication et les reproches qui lui ont été faits lors de l'organisation de la cérémonie d'ouverture du nouveau bloc obstétrical, il ressort des pièces du dossier que ces carences dans l'exercice de ces fonctions ne peuvent suffire à attester de l'insuffisance professionnelle de Mme A... dès lors que, par ailleurs, et ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, Mme A... a assuré avec succès l'organisation de plusieurs autres manifestations extérieures, expositions et cérémonies de grande ampleur, notamment l'inauguration du bâtiment dit des Sept Lieues en 2011, la journée d'accueil des nouveaux agents en 2012, les cérémonies des voeux du directeur du CHIMM en janvier 2012 et en janvier 2013, la projection d'un film d'Alexandre Astier avec deux cents personnes présentes, les portes ouvertes du département de santé le 20 novembre 2012 réunissant également deux cents personnes et le colloque Ville - Hôpital en avril. Mme A... a ainsi assuré une charge de travail substantielle à l'occasion de laquelle elle a démontré une maîtrise suffisante de ses fonctions et pour laquelle elle n'a reçu qu'une aide limitée, le poste d'assistante qui lui était attribué pour l'aider dans ses fonctions, lui ayant été retiré en septembre 2012. Enfin, et ainsi que l'ont également relevé les premiers juges, le grief tiré du défaut de maîtrise des outils informatiques n'est pas établi par les pièces du dossier et les difficultés relationnelles de Mme A... avec son directeur, qui ne sauraient lui être imputées exclusivement au regard des pièces du dossier, n'attestent pas d'une incapacité à développer des relations de travail adéquates avec ses équipes et donc ne peuvent être regardées comme attestant d'une insuffisance professionnelle. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'insuffisance professionnelle reprochée à Mme A... n'était pas établie et ont, pour ce motif, annulé la décision du 5 juillet 2013.

Sur le bien-fondé du jugement n°1504377 :

5. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la responsabilité pour faute du centre hospitalier intercommunal de Meulan Les Mureaux était engagée à raison de l'illégalité de la décision du 5 juillet 2013. Si, en appel, Mme A..., au terme d'un appel incident, demande à la cour de retenir un second fondement de responsabilité, écarté par les premiers juges, et tiré du harcèlement moral dont elle aurait été victime dans le cadre de ses fonctions, il résulte de l'instruction que si le directeur de Mme A... a fait preuve, à plusieurs reprises, d'indélicatesse à l'égard de Mme A... en lui adressant des messages comminatoires la rappelant à ses obligations et critiquant son travail, cette attitude, pour regrettable qu'elle soit, ne peut suffire à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral dont Mme A... serait fondée à demander réparation. Il résulte dès lors de ce qui précède que c'est à bon droit et sans erreur d'appréciation que les premiers juges ont pu condamner le centre hospitalier intercommunal à verser à Mme A... la somme de 23 330 euros, non contestée dans son quantum par le centre hospitalier, et réparant tout à la fois le préjudice professionnel limité à six mois de salaires dont s'était prévalue Mme A... ainsi que son préjudice moral.

Sur les conclusions de Mme A... relatives à l'exécution des jugements :

6. Dès lors que Mme A..., par deux requêtes distinctes n°18VE01833 et n°18VE01834 faisant l'objet d'un arrêt de la cour du même jour que le présent arrêt, a demandé à la juridiction de pourvoir à l'exécution des jugements n°1305514 et n°1504377 du Tribunal administratif de Versailles, les conclusions présentées à cette fin par Mme A... dans la présente instance ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les dépens :

7. Aucun dépens n'a été exposé au cours de l'instance. Les conclusions présentées par le CHIMM et Mme A... à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le centre hospitalier intercommunal de Meulan les Mureaux demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Meulan les Mureaux, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... dans la présente instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n°17VE00758 et n°17VE01467 du centre hospitalier intercommunal de Meulan les Mureaux sont rejetées.

Article 2 : Le centre hospitalier intercommunal de Meulan les Mureaux versera la somme de 2 000 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel incident de Mme A... est rejeté

N°17VE00758 et 17VE01467 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00758;17VE01467
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Insuffisance professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : SELARL DAMY RAYNAL HERVE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-12-19;17ve00758 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award