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15/10/2019 | FRANCE | N°18VE02779

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 15 octobre 2019, 18VE02779


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler les décisions du 20 avril 2018 par lesquelles le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à la frontière.

Par un jugement n° 1804624 du 12 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure dev

ant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2018, M. A..., représenté par Me Dia...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler les décisions du 20 avril 2018 par lesquelles le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à la frontière.

Par un jugement n° 1804624 du 12 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2018, M. A..., représenté par Me Diallo, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, ensemble les décisions contestées ;

2° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans cette attente, de le mettre en possession d'une autorisation provisoire de séjour ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît également, à défaut que l'arrêt rendu par la CNDA le 19 décembre 2017 ne lui ait été préalablement notifié, les articles L. 742-3 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- par ailleurs, cette décision méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- enfin, elle méconnaît tant l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que l'article 33 de la convention de Genève.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant mauritanien né le 4 décembre 1991, a sollicité, le 18 mai 2017, son admission au séjour au titre de l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté la demande d'asile de l'intéressé par une décision du 31 août 2017, laquelle a été confirmée par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du

19 décembre 2017. A la suite de cette dernière décision, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, par un arrêté du 20 avril 2018, refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office à la frontière à l'expiration de ce délai. M. A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1804624 du 12 juillet 2018, dont M. A... relève appel, le magistrat désigné par le président dudit tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions contestées du 20 avril 2018 :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) ". Aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...). / La cour communique au préfet compétent et, à Paris, au préfet de police, lorsque ceux-ci en font la demande, copie de l'avis de réception (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'OFPRA ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la Cour.

3. D'autre part, aux termes du III de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent (...) au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire ".

4. A l'appui de la demande qu'il a présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil, M. A... soutenait notamment que, n'ayant pas reçu notification de l'arrêt rendu par la CNDA le 19 décembre 2017, dans les conditions rappelées au point 1, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne pouvait, par l'arrêté contesté du 20 avril 2018, lui faire obligation de quitter le territoire français sans méconnaître les dispositions précitées des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas alors produit de mémoire en défense, n'a fourni, malgré le supplément d'instruction que ledit tribunal avait diligenté en ce sens, aucune pièce, tel qu'un avis de réception postal ou un relevé des informations issues de la base de données " TelemOfpra ", laquelle recense l'état des procédures de demande d'asile et fait foi jusqu'à preuve du contraire en vertu des dispositions précitées du III de l'article R. 723-19 du même code, permettant de justifier, ainsi qu'il lui incombe, que l'arrêt de la CNDA susmentionné aurait été régulièrement notifié au requérant. Enfin, cette preuve n'est pas davantage rapportée, en cause d'appel, par le préfet, qui n'a pas produit d'observations devant la Cour. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme étant fondé à soutenir que la décision contestée du 20 avril 2018 lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions précitées des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est, pour ce motif et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contestées du 20 avril 2018 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. L'annulation des décisions contestées du 20 avril 2018 implique nécessairement, en l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait intervenu depuis leur édiction, le réexamen de la situation de M. A.... Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 500 euros que celui-ci demande en remboursement des frais qu'il a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement rendu par le Tribunal administratif de Montreuil le 12 juillet 2018 sous le n° 1804624, ensemble les décisions contestées du 20 avril 2018 faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de M. A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A... est rejeté.

4

N° 18VE02779


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02779
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : DIALLO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-10-15;18ve02779 ?
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