Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 1er décembre 2016 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de sa fille, ensemble la décision du ministre de l'intérieur du 10 mars 2017 rejetant son recours hiérarchique, d'autre part, d'enjoindre au préfet de prendre toute mesure utile pour faire venir sa fille dans le délai de deux mois suivant le jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1706679 du 13 février 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 1er décembre 2016 et rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2018, M.C..., représenté par Me B... de la Rochère, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
2° d'annuler, pour excès de pourvoir, la décision du ministre de l'intérieur du 10 mars 2017 ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation de regroupement familial partiel au profit de sa fille, Stéphanie Ndongala, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas pris en considération le moyen de légalité externe tiré de ce que le préfet n'a pas pris en compte l'état de santé de sa fille ;
- la décision de rejet de son recours hiérarchique est entachée d'erreur de droit dès lors qu'ayant demandé le regroupement familial au bénéfice de sa fille, il n'a pas à démontrer que les critères de nécessité de prise en charge et d'accès à un traitement approprié prévus au 11° de l'article L. 313-11 sont remplis ; d'ailleurs, l'article R. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif au regroupement familial partiel ne mentionne que la santé de l'enfant sans autre précision ;
- l'intérêt de sa fille mineure réside dans une prise en charge adéquate par le système de santé français et non dans le fait de rester auprès de sa mère en République démocratique du Congo ; la décision est donc entachée d'erreur d'appréciation ;
- il a droit à la prise en charge des frais médicaux de ses ayant-droits conformément aux articles L. 160-1 et L. 160-2 du code de la sécurité sociale qui ne posent pas de condition de résidence en France ; la décision méconnaît donc ces droits ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les points 10 et 11 du préambule de la constitution de 1946.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Cabon,
- les observations de Me B...de la Rochère, avocat, pour M. C...et celles de M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant de la République démocratique du Congo titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 1er décembre 2016 par laquelle le préfet de la Seine Saint-Denis a rejeté sa demande tendant au bénéfice du regroupement familial au profit de sa fille Stéphanie née le 22 décembre 1998 ainsi que la décision du 10 mars 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre cette décision. Il fait appel du jugement du 13 février 2018 en tant que le tribunal administratif, après avoir annulé la décision du préfet de la Seine Saint-Denis du 1er décembre 2016, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 10 mars 2017.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a annulé la décision du préfet de la Seine Saint-Denis du 1er décembre 2016 au motif que, ne faisant aucune mention de la situation médicale de la fille du requérant, elle était entachée d'une insuffisance de prise en compte de la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal n'aurait pas examiné ce moyen manque en fait. Au demeurant, le requérant est sans intérêt à contester le jugement en litige en tant qu'il a fait droit à ses conclusions tendant à l'annulation de la décision préfectorale du 1er décembre 2016.
Sur la légalité de la décision ministérielle :
3. Aux termes de l'article L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un regroupement partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants. ". Et aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Dans le cas où le regroupement sollicité n'est que partiel, la demande comporte en outre : 1° L'exposé des motifs, tenant notamment à la santé ou à la scolarité du ou des enfants ou aux conditions de logement de la famille, qui justifient, au regard de l'intérêt du ou des enfants, que le regroupement familial ne soit pas demandé pour l'ensemble de la famille ; 2° La liste de ceux des membres de la famille pour lesquels le regroupement familial est demandé. ".
4. En premier lieu, il ressort des termes de la décision attaquée que le ministre de l'intérieur s'est prononcé sur l'intérêt de l'enfant du requérant au regard des dispositions précitées des articles L. 411-4 et R. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, et non au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du même code, dont il n'a pas opposé les critères pour rejeter la demande dont il était saisi. Le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le ministre de l'intérieur pour n'avoir pas fait application des dispositions applicables à la demande de M. C...doit donc être écarté.
5. En deuxième lieu, M.C..., qui est le père de trois enfants nés en République démocratique du Congo le 7 septembre 1997, le 22 décembre 1998 et le 31 mai 2001 de son union avec son épouse, célébrée le 8 octobre 2014 à Kinshasa, fait valoir que l'état de santé de sa fille Stéphanie justifie qu'il soit procédé dans son intérêt à un regroupement familial partiel afin qu'elle puisse bénéficier en France auprès de son père des soins adéquats à son état de santé.
6. Il ressort toutefois des pièces du dossier et, notamment, du rapport médical du 18 décembre 2017 émanant du centre de médecine mixte et d'anémie de Kinshasa, que la drépanocytose homozygote dont est atteinte la fille du requérant a été diagnostiquée pour la première fois alors que l'intéressée était âgée de six ans et qu'elle a été prise en charge depuis lors par le centre médical mixte, au sein duquel elle a été hospitalisée à plusieurs reprises, notamment à l'âge de dix-sept ans où elle a subi une transfusion sanguine pour la deuxième fois. Il ne ressort pas de ce document, qui constate que l'état de la fille du requérant est stabilisé et ne précise pas la nature des soins nécessaires qui ne lui seraient pas prodigués, que la fille de M. C... ne bénéficierait pas d'une prise en charge adéquate en République démocratique du Congo, et qu'ainsi, son état de santé justifierait qu'il soit fait droit, dans son intérêt, à la demande de regroupement partiel présentée par le requérant.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale : " Toute personne travaillant ou, lorsqu'elle n'exerce pas d'activité professionnelle, résidant en France de manière stable et régulière bénéficie, en cas de maladie ou de maternité, de la prise en charge de ses frais de santé dans les conditions fixées au présent livre (...) ". Aux termes de l'article L. 160-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 160-1, bénéficient de la prise en charge de leurs frais de santé en tant qu'ayants droit d'un assuré social les enfants n'exerçant pas d'activité professionnelle qui sont à sa charge, à condition que la filiation, y compris adoptive, soit légalement établie ou qu'ils soient pupilles de la Nation ou enfants recueillis (...) ".
8. M. C...soutient que la décision contestée méconnaîtrait son droit à la prise en charge de sa fille sur le fondement des dispositions précitées du code de la sécurité sociale dès lors qu'il dispose d'une résidence stable et d'un travail régulier. Toutefois, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions, relatives à la prise en charge des frais de santé des ayant-droits, à l'encontre de la décision contestée qui ne se prononce que sur le droit à l'entrée sur le territoire français de sa fille au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables au regroupement familial. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 160-1 et L. 160-2 du code de la sécurité sociale est donc inopérant et doit être écarté.
9. Enfin, le dixième alinéa du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère la constitution du 4 octobre 1958 prévoit que : " La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. M.C..., qui se borne à soutenir que les dispositions précitées du préambule de la constitution de 1946 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne seraient méconnues du fait de l'état de santé de sa fille et du droit prévu par les dispositions précitées du code de la sécurité sociale à la prise en charge de ses enfants, n'apporte aucun élément susceptible d'établir que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, compte tenu de la durée de son séjour passé en France séparé de son épouse et de ses enfants et, notamment, de sa fille Stéphanie, au demeurant majeure depuis le 22 décembre 2016. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
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N° 18VE03254