La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2019 | FRANCE | N°18VE00517

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 09 avril 2019, 18VE00517


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1710698 du 8 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

t un mémoire de régularisation, enregistrés les 12 février et 15 décembre 2018, M. B..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1710698 du 8 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire de régularisation, enregistrés les 12 février et 15 décembre 2018, M. B..., représenté par Me Afsaneh Khakpour, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans le même délai sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté est irrégulier en ce qu'il a été pris à la suite de son interpellation laquelle est elle-même irrégulière ;

- il a été pris par une autorité incompétente ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale dès lors qu'il justifie d'une présence continue en France et d'une promesse d'embauche valide ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 4 et l'article 7§2 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, le délai de départ de trente jours ayant été fixé en l'absence de procédure contradictoire et sans tenir compte de sa situation personnelle.

..........................................................................................................

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2018, modifié le 5 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Deroc,

- et les observations de Me Khakpour, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 16 novembre 2017, le préfet de la Seine-Saint-Denis a obligé M.B..., ressortissant de nationalité pakistanaise, né le 22 mars 1979, à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B...fait appel du jugement du 8 janvier 2018 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

2. Si M. B...demande l'annulation de l'arrêté attaqué notamment en ce qu'il refuse de l'admettre au séjour, il ressort des termes mêmes de cet arrêté qu'il n'a pas eu pour objet de se prononcer sur une quelconque demande de titre de séjour mais seulement d'obliger l'intéressé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de fixer le pays de destination. Par suite, les moyens soulevés par l'intéressé et afférents à un supposé refus de séjour sont inopérants.

S'agissant de la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination :

En ce qui concerne les moyens de légalité externe communs aux décisions :

3. En premier lieu, si M. B...doit être regardé comme contestant les conditions de son interpellation, il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la régularité de celles-ci. Ainsi, les conditions dans lesquelles l'intéressé a été interpellé sont, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la mesure d'éloignement.

4. En deuxième lieu, par un arrêté préfectoral n° 17-3013 du 13 octobre 2017 régulièrement publié, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation de signature à MmeC..., chef du bureau de l'éloignement et du contentieux, à l'effet de signer, notamment, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, avec ou sans délai de départ volontaire, et fixant le pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté doit être rejeté.

5. En troisième lieu, l'arrêté attaqué comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Il mentionne notamment l'exercice illégal d'une activité non déclarée par l'intéressé, l'absence de démarches depuis le 25 février 2016, et le fait qu'il est célibataire sans enfant et ne démontre pas l'absence d'attaches dans son pays, permettant ainsi de s'assurer que le préfet de la Seine-Saint-Denis a pris sa décision en considération de la situation particulière de celui-ci. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté serait entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressé doivent être écartés.

En ce qui concerne les moyens devant être regardés comme dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, M.B..., en faisant valoir l'absence de prise en compte de sa présence continue en France et de son activité professionnelle, doit être regardé comme soulevant l'existence d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et familiale. Toutefois, dès lors qu'il se borne à faire valoir, sans en justifier, une ancienneté de séjour de plus de cinq années, et l'existence d'une promesse d'embauche, dont il ne peut d'ailleurs utilement se prévaloir dès lors qu'elle est postérieure à la décision contestée, il n'établit pas que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.

7. En deuxième lieu, le requérant se borne à soutenir qu'il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que ces dispositions ne prescrivent pas la délivrance d'un titre de plein droit mais laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir. Dans ces conditions, M. B...entrait dans le cas visé au 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut prononcer une obligation de quitter le territoire français et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 susmentionné ne peut qu'être écarté.

8. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a ni pour objet ni pour effet de fixer le pays dans lequel l'intéressé sera renvoyé, a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ". Si M. B...fait valoir que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen n'étant assorti d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif, il y a lieu, dès lors, de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

En ce qui concerne les moyens devant être regardés comme dirigés contre la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. En premier lieu et d'une part, si M. B... soutient que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait dû procéder, de manière contradictoire, à un examen de sa situation personnelle et recueillir son avis pour apprécier si le délai de départ volontaire d'un mois était suffisant, il ne résulte toutefois d'aucune disposition légale ou réglementaire, et notamment pas des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par lesquelles le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du délai de départ volontaire, que l'autorité administrative serait tenue d'organiser, préalablement à la fixation dudit délai de départ volontaire, une procédure contradictoire avec l'étranger concerné par cette mesure.

11. D'autre part, M. B...ne peut se prévaloir à l'encontre de l'arrêté contesté des dispositions des articles 4 et 7§2 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dès lors que cette directive a fait l'objet d'une transposition en droit interne et qu'il n'est pas même allégué que cette transposition méconnaît les objectifs de cette directive.

12. En second lieu, l'intéressé soutient qu'en se bornant à lui octroyer le délai de départ volontaire de trente jours prévu par les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'aurait pas tenu compte de sa situation personnelle. Toutefois, il ne fait pas état dans la présente instance, ni n'a fait état devant le préfet, de circonstances particulières propres à justifier une prolongation de ce délai. Notamment, ni la circonstance que l'intéressé résiderait en France depuis plus de cinq ans, à la supposée établie, ni celle qu'il bénéficierait d'une promesse d'embauche, d'ailleurs postérieure à la décision attaquée, ne caractérisent l'existence d'une situation exceptionnelle imposant qu'un délai de départ supérieur à trente jours soit accordé à l'intéressé. Par suite, en accordant un tel délai de départ à M.B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne les moyens devant être regardés comme dirigés contre la décision fixant le pays de destination :

13. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Si le requérant soutient craindre pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine, le Pakistan, en raison de l'assassinat de son épouse et de son enfant par des intégristes musulmans, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité et l'actualité des risques personnellement encourus, alors qu'il résulte, d'ailleurs, de ses propres écritures que l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides aurait rejeté, en 2014, sa demande d'asile.

14. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, en tout état de cause et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9., qu'être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

2

N° 18VE00517


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00517
Date de la décision : 09/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : DOURLEN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-04-09;18ve00517 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award