Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) INSO a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008, d'un montant en principal de 39 796 euros, ainsi que des intérêts de retard et pénalités correspondants.
Par une ordonnance du 18 mars 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'État, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a transmis au Tribunal administratif de Montreuil la requête présentée par la société INSO.
Par un jugement n° 1427538 du 23 mars 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 12 mai 2017, 5 janvier 2018 et 8 mars 2019, la société à responsabilité limitée (SARL) INSO, représentée par Me Vincent Schmitt, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge sollicitée ;
3° de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale a, à tort, remis en cause son statut de " jeune entreprise innovante " en estimant qu'elle ne remplissait pas la condition prévue au 5° de l'article
44 sexies-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, alors, d'une part, qu'il n'y a eu aucun transfert ou reprise de l'activité de la société Invarture à son profit et, d'autre part, que son activité ne constitue pas l'extension de celle de la société iTAC Software AG ;
- l'administration fiscale ne peut se prévaloir de ce que le montant des dépenses de recherche engagées au titre de l'exercice clos en 2007 n'auraient pas satisfait aux conditions prévues au 3° du même article dès lors que le litige ne porte que sur les exercices clos en 2008 et 2009.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Deroc,
- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,
- et les observations de M.A..., gérant de la société INSO.
Considérant ce qui suit :
1. La société INSO a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2007 et 2008. Dans la proposition de rectification datée du 21 décembre 2010 et reçue le 24 janvier 2011, l'administration fiscale a notamment remis en cause le statut de jeune entreprise innovante défini par l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts dont la société requérante bénéficiait conformément au rescrit fiscal qui lui avait été délivré le 14 février 2007 et l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés. L'administration fiscale ayant expressément abandonné les rectifications relatives à l'exercice clos en 2007, les cotisations supplémentaires d'impôt au titre de l'exercice clos en 2008 ont seules été mises en recouvrement le 10 février 2014, pour un montant de 39 796 euros en droits et 3 184 euros d'intérêts de retard. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 23 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
2. Aux termes de l'article 44 sexies A du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " I. - 1. Les entreprises répondant aux conditions fixées à l'article 44 sexies-0 A sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés au titre des trois premiers exercices ou périodes d'imposition bénéficiaires, cette période d'exonération totale des bénéfices réalisés ne pouvant excéder trente-six mois. / Les bénéfices réalisés au titre des deux exercices ou périodes d'imposition bénéficiaires suivant cette période d'exonération ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de leur montant. / 2. Le bénéfice de l'exonération est réservé aux entreprises qui réunissent les conditions fixées au 1 au cours de chaque exercice ou période d'imposition au titre duquel ou de laquelle l'exonération est susceptible de s'appliquer. / (....) ". Aux termes de l'article 44 sexies-0 A du même code, dans sa rédaction alors applicable, " Une entreprise est qualifiée de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement lorsque, à la clôture de l'exercice, elle remplit simultanément les conditions suivantes : / (...) / 5° elle n'est pas créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou d'une reprise de telles activités au sens du III de l'article 44 sexies. " et aux termes du III de l'article 44 sexies : " Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I. / L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance. ". En excluant du champ d'application de l'exonération instituée par l'article 44 sexies du code général des impôts, les entreprises " créées dans le cadre (...) d'une extension d'activités préexistantes ", le législateur n'a entendu refuser le bénéfice de cet avantage fiscal qu'aux entreprises qui, eu égard à la similarité ou à la complémentarité de leur objet par rapport à celui d'entreprises antérieurement créées et aux liens de dépendance qui les unissent à ces dernières, sont privées de toute autonomie réelle et constituent de simples émanations de ces entreprises préexistantes.
3. L'administration a remis en cause le bénéfice de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue à l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts dont se prévalait la société INSO au motif qu'elle ne constituait qu'une extension de l'activité de la société iTAC Software AG et ne remplissait donc pas la condition prévue au 5° de cet article.
4. D'une part, il résulte de l'instruction que l'activité de prestations de services - conseil et distribution de logiciels - à laquelle se livre la société INSO, créée le 29 septembre 2006, est une activité complémentaire de celle exercée par la société iTAC Software AG (iTAC), société allemande de génie logiciel désirant développer son activité sur le marché français et avec qui la société INSO a conclu un contrat de services le 11 octobre 2006, soit quelques jours après sa création, par lequel elle se voit chargée, à titre de sous-traitant, d'assurer les ventes, la gestion des ventes, la coordination de la prestation, le services après-vente, la gestion des comptes et toutes autres tâches nécessaires au développement de l'activité d'iTAC en France.
5. D'autre part, il résulte des stipulations de ce contrat, notamment, que celui-ci a pour objectif que la société INSO " constitue en France une personne morale en mesure de commercialiser et de promouvoir les produits et services d'iTAC en France (...) " (article 2), qu'à cette fin, la société iTAC s'engage à tout mettre en oeuvre pour aider la société INSO dans sa mission, particulièrement l'assistance technique et la prestation (article 2), que si la société INSO peut solliciter des accords, la société iTAC se réserve le droit, à sa seule discrétion, de les conclure ou de les rejeter (article 2), que la société INSO transmet à la société iTAC des rapports mensuels concernant ses activités et l'évolution du marché (article 2), que la société INSO fournit, en moyenne, au moins 18,3 journées de conseil par mois, correspondant à 220 jours par période annuelle pour cette mission, exercée par M. B...A...(article 3), que, pour l'accomplissement de cette mission, la société iTAC verse à la société INSO des honoraires pour conseil d'un montant de 15 000 euros par mois civil pendant la durée du contrat (article 4), qu'il entre en vigueur au 1er septembre 2006, pour une durée de 12 mois, automatiquement renouvelée ensuite pour des périodes successives d'un mois (article 12) et que la société INSO doit informer " dès que possible ITAC de tous travaux (y compris les programmes logiciels) et de toutes inventions (...). En outre, seule ITAC peut bénéficier des droits y afférents dans le monde entier (...) " (article 13). Il résulte également de ses stipulations que, le même jour, les sociétés iTAC, INSO et Invarture ont conclu la cession à la société INSO du contrat d'agence commerciale liant les deux autres sociétés, et notamment le statut d'Agent commercial des solutions et services d'iTAC, le droit de percevoir des commissions sur certains comptes ainsi que les responsabilités correspondantes. Il résulte de l'instruction que, pour l'application du contrat de service, il appartenait à M. B...A..., gérant, associé unique et unique salarié de la société INSO, d'assurer un volume de travail correspondant à un emploi à temps plein, que la société INSO a exclusivement travaillé pour des clients de la société iTAC, en 2007 et 2008, à l'exception de la société INSO marine, société dont elle détient 50 % du capital et dont M. A...est également gérant, et a réalisé en 2009 cinq des huit activités qu'elle mentionne, pour le compte de clients de la société iTAC, et qu'elle a, au cours de son premier exercice, réalisé 100 % de son chiffre d'affaires grâce à l'activité effectuée pour la société iTAC, plus de 78 % en 2008 et plus de 95 % en 2009. Ainsi les liens de la société INSO avec la société iTAC caractérisent un lien de dépendance entre les deux sociétés, de nature à priver la première de toute autonomie réelle et à en faire une simple émanation de la seconde. Si la société INSO fait valoir, à cet égard, que son activité a toujours été diverse et que, parallèlement à ses activités de conseil dans le domaine informatique, elle participait notamment à un projet dit " Scrambling " en lien avec le Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM), elle se borne à produire une lettre de ce dernier attestant de cette participation et estimant à " au moins 1 jour par semaine la charge de travail de la société Inso sarl sur le projet ", insuffisante à remettre en cause le constat de la situation de forte dépendance économique de la société INSO à l'égard de la société iTAC. Ne l'est pas davantage le fait qu'en application de l'article 9 du contrat de service, la société iTAC aurait établi une filiale en France, iTAC Software France Sarl, le 6 avril 2007, dont M. A...a d'ailleurs été désigné le même jour comme dirigeant. L'activité de la société INSO constituait ainsi une extension de l'activité préexistante exercée par la société iTAC Software AG. Ainsi et alors même que, comme l'a fait valoir M. A...lors de l'audience publique, son intention première aurait été seulement, par l'exercice de ces missions au profit de la société iTAC, de trouver les financements nécessaires à l'activité de recherche menée par la société INSO dans le cadre du projet dénommé " Scrambling ", la réalité des conditions d'exploitation de cette dernière, telles que définies dans le contrat de services et constatées en pratique, justifiaient la remise en cause du bénéfice, par l'intéressée, de l'exonération prévue par l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, sans qu'il soit besoin d'examiner la question d'un éventuel transfert, de la société Invarture à la société INSO, d'une activité préexistante, ni le bien-fondé du second motif invoqué en appel par l'administration pour écarter ce bénéfice et tiré de la méconnaissance du 3° de l'article 44 sexies-0 A.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société INSO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société INSO est rejetée.
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N° 17VE01500