Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 à 2009.
Par un jugement n° 1206735 du 3 novembre 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M.B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 janvier 2016, M.B..., représenté par Me Dumortier Meynier, avocat, demande à la Cour d'annuler ce jugement et de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 à 2009.
Il soutient que :
- le bien-fondé des impositions n'est pas établi ; pour les années 2007 et 2008, l'administration a procédé à une évaluation erronée du prix d'achat des stupéfiants et de leur prix de vente et n'a pas pris en compte la part de consommation personnelle du requérant ;
- l'administration n'apporte pas la preuve que les bases d'imposition retenues soient cohérentes avec son train de vie ; il finance ses dépenses par ses revenus d'ingénieur informatique ;
- ces impositions complémentaires ont un caractère confiscatoire ;
- en ce qui concerne les revenus de l'année 2009, la somme saisie à son domicile correspond au cumul de revenus de son activité illicite depuis plusieurs années ; imposer cette somme au titre de l'année 2009 revient ainsi à procéder à une double imposition ; par ailleurs, la somme de 60 000 euros saisie ne lui appartenait pas et il lui est impossible de révéler l'identité de son propriétaire ;
- l'activité illicite menée par le requérant a eu pour but de financer sa consommation personnelle et non de rechercher une activité lucrative, les biens en sa possession ayant été acquis par un emprunt ou par des revenus légaux.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.
1. Considérant que M. B...a fait l'objet d'un contrôle sur pièces, à la suite des informations transmises par le parquet de Créteil à la direction départementale des finances publiques des Yvelines, s'agissant de biens et de sommes d'argent dont le requérant aurait disposé en lien avec des infractions pénales ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration lui a notifié une proposition de rectification datée du 25 octobre 2011 et l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2007, 2008 et 2009, intérêts de retard et majorations comprises, pour un montant total de
135 262 euros ; que, par un jugement du 3 novembre 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ;
Sur les revenus de l'année 2007 et 2008 :
2. Considérant qu'en application des articles L. 73 et L. 68 du livre des procédures fiscales, l'administration a évalué d'office les revenus tirés par M. B...du trafic illicite de stupéfiants à raison duquel il a été condamné pénalement et les a imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'il incombe, par suite, au requérant, en application des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, d'établir l'exagération des impositions qu'il conteste ;
3. Considérant que, pour reconstituer le chiffre d'affaires réalisé par M. B...pour la vente de résine de cannabis, l'administration s'est fondée sur les procès-verbaux d'audition de l'intéressé et sur ceux de son fournisseur pour retenir uniquement l'achat d'un kilo de cannabis par mois, alors que son fournisseur indiquait lui fournir jusqu'à deux kilos une ou deux fois par mois depuis cinq ans, et a pris en compte un prix d'achat de 2 500 euros le kilo, assez proche de l'évaluation minimum donnée par son fournisseur à 2 800 euros le kilo ; qu'en outre, en l'absence de toute justification par l'intéressé des charges qu'il a supportées, l'administration a toutefois retenu, par souci de réalisme économique, un montant de charges, incluant entre autres ses consommations personnelles, à hauteur de 50 % des ventes ; que si le requérant soutient que le prix du cannabis est fixé selon un barème dégressif en fonction de la quantité vendue, il ne l'établit aucunement et n'apporte ainsi aucun élément de nature à remettre en cause le prix de vente moyen de 5 euros le gramme, retenu par l'administration et correspondant aux déclarations du requérant pour les ventes de petites quantités de cannabis ; que, dès lors que le requérant n'apporte aucun élément réellement probant sur les charges supportées, sur les prix d'achat et de vente de la résine de cannabis, et que l'administration s'est de surcroît fondée sur une évaluation très basse des quantités achetées au regard des déclarations faites par son fournisseur, le requérant n'établit pas que l'administration aurait procédé à une évaluation erronée du chiffre d'affaires réalisé sur la période en cause ou aurait omis de prendre en compte les quantités qu'il a utilisées au titre de sa consommation personnelle ;
4. Considérant, par ailleurs, que l'administration a retenu, au vu des différents rapports de police, de la perquisition réalisée au domicile de l'intéressé en octobre 2009 et des déclarations de l'intéressé lors de ses auditions, qu'il avait vendu une quantité estimée à 750 g de cocaïne pour chacune des deux années 2007 et 2008 au prix de vente moyen de 59,78 euros par gramme ; que le requérant, qui se borne à soutenir que cette drogue n'a fait l'objet d'une vente que dans un cadre festif entre amis et n'a généré aucun profit, n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'évaluation réalisée par l'administration ;
5. Considérant, enfin, que les rectifications litigieuses ne sont pas fondées sur les dispositions de l'article 168 du code général des impôts ; que le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que la reconstitution du chiffre d'affaires provenant de son activité de vente de stupéfiants serait contredite par son train de vie et par les dépenses détaillées dans ses relevés bancaires ; qu'il ne peut pas davantage prétendre qu'en raison de la disproportion des sommes qui lui sont réclamées avec son train de vie, cette imposition aurait pour effet de conférer à l'impôt un caractère confiscatoire ;
Sur les revenus pour l'année 2009 :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quater-0-B-bis du code général des impôts : " 1. Lorsqu'il résulte des constatations de fait opérées dans le cadre d'une des procédures prévues aux articles 53,75 et 79 du code de procédure pénale et que l'administration fiscale est informée dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101 ou L. 135 L du livre des procédures fiscales qu'une personne a eu la libre disposition d'un bien objet d'une des infractions mentionnées au 2, cette personne est présumée, sauf preuve contraire appréciée dans le cadre des procédures prévues aux articles L. 10 et L. 12 de ce même livre, avoir perçu un revenu imposable équivalent à la valeur vénale de ce bien au titre de l'année au cours de laquelle cette disposition a été constatée. La présomption peut être combattue par tout moyen et procéder notamment de l'absence de libre disposition des biens mentionnés au premier alinéa, de la déclaration des revenus ayant permis leur acquisition ou de l'acquisition desdits biens à crédit. Il en est de même des biens meubles qui ont servi à les commettre ou étaient destinés à les commettre. Lorsqu'il résulte des constatations de fait opérées dans le cadre d'une des procédures prévues aux articles 53,75 et 79 du code de procédure pénale et que l'administration fiscale est informée dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101 ou L. 135 L du livre des procédures fiscales qu'une personne a eu la libre disposition d'une somme d'argent, produit direct d'une des infractions visées au 2, cette personne est présumée, sauf preuve contraire appréciée dans le cadre des procédures prévues aux articles L. 10 et L. 12 de ce même livre, avoir perçu un revenu imposable égal au montant de cette somme au titre de l'année au cours de laquelle cette disposition a été constatée. La présomption peut être combattue par tout moyen et procéder notamment de l'absence de libre disposition des sommes mentionnées au quatrième alinéa, du caractère non imposable de ces sommes ou du fait qu'elles ont été imposées au titre d'une autre année. (...) 2. Le 1 s'applique aux infractions suivantes : a. crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-39 du code pénal (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le requérant a été condamné par le Tribunal de grande instance de Créteil par jugement du 6 juillet 2010 pour trafic de drogue, et qu'une importante somme d'argent issue de ce trafic ainsi que des quantités de cannabis et de cocaïne ont été saisies à son domicile ; qu'il se borne à soutenir, sans aucunement l'établir, que la somme de 60 000 euros saisie lors de la perquisition ne lui appartiendrait pas et que la somme de 9 405 euros résulterait d'économies personnelles ; que, dès lors, M. B...n'établit pas ne pas avoir eu la libre disposition de ces sommes ; que, par ailleurs, en se bornant à soutenir qu'il vivait uniquement des revenus tirés de son travail d'informaticien, que ses proches ne l'ont jamais vu en possession d'importantes sommes d'argent et que les fonds découverts à son domicile correspondraient au résultat de son activité illicite depuis une dizaine d'années, le requérant, qui est présumé avoir perçu un revenu imposable en 2009 équivalent à la valeur de la drogue et des sommes d'argent saisis, en application des dispositions de
l'article 1649 quater-0-B-bis susmentionné, n'apporte aucun élément probant de nature à renverser cette présomption et à établir qu'il aurait fait l'objet d'une double imposition au titre des sommes imposées pour l'année 2009 ;
8. Considérant que le requérant fait en outre valoir que les majorations mises à sa charge sont disproportionnées et confiscatoires ; que, cependant, il résulte de l'instruction que l'administration a assorti les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu des intérêts de retard et des majorations de 10 % prévues en application des dispositions des articles 1728 et 1758 A du code général des impôts et de la majoration de 80 % prévue à l'alinéa 4 de l'article 1758 du même code ; que, d'une part, l'intérêt de retard n'a pas le caractère d'une sanction et que son montant n'est pas excessif ; que, d'autre part, la majoration pour manoeuvre frauduleuse avait pour objet de sanctionner la perception d'un revenu non déclaré ayant pour origine la libre disposition de biens ou de sommes d'argent, en lien avec un trafic de stupéfiants ; que le montant de cette majoration ne peut être regardé comme manifestement disproportionné au regard des manquements commis et des objectifs poursuivis par le requérant qui s'est livré à un trafic lucratif de stupéfiants, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le requérant encourait également une majoration de 10 % pour omissions relevées dans ses déclarations, en application de l'article 1758 A du code général des impôts et une majoration de 10 % pour absence de déclaration de bénéfices industriels et commerciaux, en application de l'article 1728 du même code ;
9. Considérant que la circonstance que M. B...ait fait l'objet d'une condamnation pénale par jugement du Tribunal de grande instance de Créteil du 6 juillet 2010 pour trafic de stupéfiants et que les sommes d'argent saisies à son domicile aient été confisquées n'est pas de nature à faire obstacle à l'application des majorations prévues aux articles 1728, 1758 A et 1758 du code général des impôts ou à en justifier la modulation, dès lors que la règle " non bis in idem " n'interdit pas le prononcé de sanctions ou majorations fiscales parallèlement aux sanctions prononcées par le juge répressif ;
10. Considérant, qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N° 16VE00031