Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL LE BO'BAR a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de la décharger des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de cette période, ainsi que des cotisations de taxe sur les véhicules de transport et de contribution à l'audiovisuel public mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement n°1411490 du 20 juillet 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête de la société requérante.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2015, la SARL LE BO'BAR, représentée par la Selarl Bozetine Amnache Hallal, avocats, demande à la Cour d'annuler ce jugement et de prononcer la décharge des suppléments d'imposition et des pénalités auxquels elle a été assujettie et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant de la régularité de la procédure :
- la décision implicite de rejet de sa réclamation est entachée d'un défaut de motivation en l'absence de réponse à sa demande de communication des motifs ;
- la réponse aux observations du contribuable ne lui a pas été régulièrement notifiée dès lors que le pli n'a été signé ni par le gérant, ni par ses parents, ni par l'unique salarié ;
- il n'est pas établi que la décision d'appliquer les majorations ait été prise par un agent de catégorie A détenant au moins le grade d'inspecteur départemental ;
S'agissant du bien-fondé des impositions :
- le rejet de la comptabilité de la société n'est pas fondé au motif que l'enregistrement des recettes aurait été mensuel et non journalier et qu'aucun achat non comptabilisé n'a été retenu sur les produits de base alors que les pièces justifiant les dépenses ont été fournies conformément à l'article 54 du code général des impôts ;
- la méthode des cafés choisie par l'administration pour reconstituer le chiffre d'affaires est erronée car elle est sommaire, aléatoire et ne reflète pas la réalité de l'activité de la société alors que d'autres produits pouvaient servir de référence, comme la viande, l'administration pouvant faire usage de son droit de communication auprès des fournisseurs, ou la méthode des serviettes ; en tout état de cause, le pourcentage des pertes et offerts ne peut être inférieur à
25 % ;
- aucun rehaussement de la base imposable à l'impôt sur les sociétés relatif au compte courant d'associé ne peut être retenu dès lors que la somme de 62 856, 36 euros correspond à un report à nouveau en 2008 et que la somme restante de 18 749, 62 euros résulte de la cession de parts sociales au gérant actuel sans transfert du compte courant ;
- l'administration ne pouvait, au titre des charges, diminuer de moitié le loyer au motif que la moitié de la surface louée est à usage d'habitation dès lors que le bail commercial interdit de sous-louer la partie habitation qui n'est qu'une dépendance des locaux à usage commercial ;
S'agissant des pénalités :
- l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'intention d'éluder l'impôt ;
- la proposition de rectification ne comportait ni le nom ni le grade de son signataire.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL LE BO'BAR, qui exerce l'activité de bar et de restauration, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration, selon la procédure de rectification contradictoire, lui a assigné des rappels de TVA pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et l'a assujettie à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, au titre des exercices 2009 à 2011, en procédant à la reconstitution de ses recettes commerciales, ainsi qu'à des rappels de contribution à l'audiovisuel public et de taxe sur les véhicules de société au titre des années 2010 et 2011 ; que la SARL LE BO'BAR a demandé la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions au Tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement du 20 juillet 2015, a rejeté sa requête ;
Sur la régularité de la procédure :
2. Considérant que la société requérante soutient qu'en s'abstenant de communiquer les motifs de la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable dans le délai d'un mois, cette décision implicite de rejet serait entachée d'illégalité ; que, toutefois, si le défaut de motivation de la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques de la Seine-Saint-Denis statue sur la réclamation de la société requérante fait obstacle à ce que le délai du recours contentieux contre cette décision commence à courir, cette circonstance n'est par elle-même d'aucun effet sur la régularité de la procédure comme sur le bien fondé de l'imposition ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;
3. Considérant que lorsqu'un contribuable soutient que l'avis portant accusé de réception d'un pli recommandé, portant notification de la proposition de rectification des impositions en cause ou de la réponse aux observations du contribuable, n'a pas été signé par lui, il lui appartient d'établir que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli dont il s'agit ; que dans le cas où le contribuable n'apporte aucune précision sur l'identité de la personne signataire des avis litigieux et s'abstient de dresser la liste des personnes qui, en l'absence de toute habilitation, auraient néanmoins eu qualité pour signer de tels avis, il ne peut être regardé comme ayant démontré que le signataire de l'avis de réception n'était pas habilité à réceptionner ce pli ;
4. Considérant que l'accusé de réception du pli contenant la réponse à ses observations sur la proposition de rectification, distribué le 8 février 2013 à l'adresse de la société requérante a été retourné au service, revêtu d'une signature manuscrite ; que la société requérante n'a fourni aucune précision sur l'identité de la personne signataire de cet accusé de réception et s'est abstenu d'indiquer la liste des personnes qui, même non expressément habilitées, auraient toutefois entretenu avec elle des relations susceptibles de leur donner qualité pour réceptionner ce pli ; que, dès lors, la société requérante n'établit pas que ce pli contenant la réponse à ses observations ne lui aurait pas été régulièrement notifié ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités " ; et qu'aux termes de l'article R. 80 E-1 du même code : " La décision d'appliquer les majorations et amendes mentionnées à l'article L. 80 E est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire " ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification comporte la signature de l'agent qui l'a établie ; que si le nom de celui-ci n'y figure pas, ainsi que le soutient la société requérante, cette circonstance n'a pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition dès lors que la signature manuscrite est identique à celle apposée sur la réponse aux observations du contribuable datée du 5 février 2013, qui comportait le visa et le nom du signataire, détenant le grade d'inspecteur principal, supérieur à celui d'inspecteur divisionnaire, et permettant ainsi de l'identifier ; que, dès lors, le moyen tiré d'une irrégularité de la procédure doit être écarté ;
7. Considérant que, pour l'application des dispositions des articles L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales et, lorsque le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour l'assister dans ses relations avec l'administration ne contient aucune mention expresse habilitant le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, ce mandat n'emporte pas élection de domicile auprès de ce mandataire ; que, dans ce cas, l'administration n'entache pas la procédure d'imposition d'irrégularité en notifiant l'ensemble des actes de la procédure au contribuable, alors même que le mandat confie au mandataire le soin de répondre à toute notification de redressements, d'accepter ou de refuser tout redressement ;
8. Considérant que la société requérante n'établit aucunement qu'elle aurait élu domicile auprès de son conseil ; qu'elle ne peut ainsi utilement soutenir que la procédure d'imposition serait viciée au motif que le service n'a pas adressé à ce dernier une copie de sa réponse aux observations du contribuable ni que le service aurait méconnu les principes de loyauté et d'équité ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le rejet de sa comptabilité :
9. Considérant que la société requérante soutient qu'elle a présenté lors de la vérification de comptabilité les pièces mentionnées à l'article 54 du code général des impôts, que les recettes de la société étaient ventilées selon le mode de paiement et qu'elle a produit les factures des produits achetés auprès des commerçants du quartier ; que, toutefois, il a été relevé au cours de cette vérification de comptabilité que la caisse enregistreuse ne fonctionnait pas et ne permettait ainsi pas d'obtenir les tickets Z de recettes journalières, que les recettes n'étaient pas enregistrées quotidiennement, que les doubles de tickets de caisse n'ont pu être présentés, de même qu'aucun justificatif de l'état des stocks ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration, en raison de ces irrégularités graves, a pu écarter comme non probante la comptabilité de la société et procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires ;
En ce qui concerne la reconstitution de recettes :
10. Considérant que la vérificatrice a procédé à une reconstitution des recettes du bar et du restaurant en ayant recours à la méthode dite des " cafés ", en prenant en compte les quantités de café achetées et les achats revendus à partir de l'état des stocks et de la dose unitaire de café par tasse, sur la base des informations recueillies auprès du fournisseur dans le cadre du droit de communication, en tenant compte à hauteur de 10% des consommations du personnel, des pertes et des offerts ; que la société requérante n'établit pas que cette méthode de reconstitution aurait été inadaptée en se bornant à soutenir qu'elle était sommaire et aléatoire, au motif qu'il s'agissait du produit le plus consommé, le moins cher et le plus offert à la clientèle ; que, sur ce dernier point, elle n'apporte aucun justificatif de nature à établir que le taux d'offerts et de pertes retenu pour ce produit par la vérificatrice aurait dû être porté de 10 à 25% ; que, par ailleurs, si elle soutient que la méthode dite des " viandes " aurait été plus pertinente pour reconstituer les recettes, il résulte de l'instruction que les factures présentées par la société ne portaient pas sur la totalité des achats et que le recours au droit de communication auprès des fournisseurs de viande n'a pas permis de confirmer les quantités alléguées d'achat de viandes alors que les facturettes présentées ne permettaient pas de connaître la nature des viandes vendues ; que cette méthode ne présentait donc pas plus de fiabilité ou de pertinence que celle des " cafés " ; quant aux méthodes dites des " nappes et serviettes " ou de la " boulangerie ", la société requérante n'apporte aucun élément de nature à justifier qu'elles auraient été plus adaptées et fiables que celle du " café " pour reconstituer les recettes ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution des recettes retenue par la vérificatrice n'aurait pas été plus fiable ou pertinente qu'une autre ;
En ce qui concerne le compte courant d'associé :
11. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 de ce code : " 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs d'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminué des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées (...) 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou des erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. (...) " ; qu'il incombe au contribuable de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan ;
12. Considérant qu'ayant constaté que le compte courant d'associé n° 4550 présentait, au titre de l'année 2009, un solde créditeur injustifié de 81 606,10 euros, l'administration a procédé à la réintégration de ladite somme au résultat de la société imposable au titre de l'exercice 2009 ; que si la société requérante soutient que le rehaussement concernant le crédit de ce compte ne peut être supérieur à 18 749,62 euros dès lors que la somme de 62 856,36 euros correspondait au report à nouveau de l'année 2008, il résulte de l'instruction que lors de la vérification, le conseil de la société requérante a indiqué que ce report à nouveau ne résultait pas d'une dette de la société envers un associé mais correspondait à un compte de compensation entre l'actif et le passif ; que ce compte ne peut non plus correspondre au transfert d'un compte d'associé dès lors qu'à la date de la cession des parts au gérant en fonction lors des années en litige, aucun compte courant d'associé n'existait ; que, par suite, l'administration était fondée à rehausser la base imposable à l'impôt sur les sociétés d'un montant de 81 606,10 euros correspondant au solde créditeur de ce compte d'associé ;
En ce qui concerne les charges non déductibles :
13. Considérant que l'administration a procédé à la réintégration dans les résultats de la société requérante de certaines charges, dont notamment la moitié du loyer versé par cette société pour l'utilisation de ses locaux, au motif que la moitié de la surface louée était réservée à l'habitation et non à un usage commercial et qu'il résulte de l'instruction que cette partie, occupée par le gérant et ses parents, constitue un local distinct, et non une dépendance du local commercial ; que les dépenses de loyer consacrées à cette partie privative ne pouvaient effectivement être regardées comme engagées dans l'intérêt de la société requérante ; que, par ailleurs, la société requérante ne donne aucun élément de nature à justifier une clé de répartition différente de celle retenue par la vérificatrice ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à remettre en cause le refus de l'administration de déduire une somme supérieure à 50% du loyer versé pour l'utilisation des locaux ;
Sur la majoration pour manquement délibéré :
14. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;
15. Considérant que, pour les motifs retenus aux points 5 et 6 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision d'appliquer la majoration prévue par l'article 1729 susmentionné était irrégulière dès lors qu'elle ne comportait pas le visa d'un inspecteur départemental doit être écarté ;
16. Considérant que le moyen tiré de ce que la majoration de 40% prise en application de l'article 1729 du code général des impôts susmentionné ne serait justifiée par aucun caractère intentionnel ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif par la société requérante ; que, dès lors, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 juillet 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la même période, ainsi que des rappels de cotisations de taxe sur les véhicules de transport et de contribution à l'audiovisuel public mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011 ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL LE BO'BAR demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL LE BO'BAR est rejetée.
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N° 15VE02974