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17/10/2017 | FRANCE | N°16VE02497

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 17 octobre 2017, 16VE02497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...F...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés du 20 juin 2016, par lesquels la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE a décidé sa remise aux autorités hongroises pour l'examen de sa demande d'asile et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1604398 du 24 juin 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a fait droit à la demande de M. F...et annulé ces arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un

mémoire, enregistrés les 2 août et 21 décembre 2016, la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE demande à la Cour d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...F...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés du 20 juin 2016, par lesquels la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE a décidé sa remise aux autorités hongroises pour l'examen de sa demande d'asile et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1604398 du 24 juin 2016, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a fait droit à la demande de M. F...et annulé ces arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août et 21 décembre 2016, la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE demande à la Cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de M. F... présentée devant le Tribunal administratif de Versailles.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu l'existence de défaillances systémiques en Hongrie lors de l'examen des demandes d'asile ;

- le signataire des arrêtés contestés avait régulièrement reçu délégation à cette fin ;

- l'arrêté ordonnant son transfert vers la Hongrie est suffisamment motivé ;

- le caractère contradictoire de la procédure a été respecté ;

- M. F...s'est vu remettre le 23 novembre 2015 une brochure où figure une information complète relative aux empreintes digitales et à leur utilisation ;

- les arrêtés attaqués sont conformes aux dispositions législatives et aux conventions internationales en vigueur en particulier aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au règlement (UE) n° 604-2013 et au règlement CE 1560-2003 modifié.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n°343/2003 du Parlement européen et du Conseil du

18 février 2003 ;

- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Besson-Ledey a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.F..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 30 mars 1982, est entré en Hongrie le 4 août 2015 puis en France pour y déposer le 10 décembre 2015 une demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; que la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE a adressé aux autorités hongroises, le 14 janvier 2016, une demande de prise en charge qui a été implicitement acceptée ; que ce préfet a dès lors, par deux arrêtés du 20 juin 2016, respectivement ordonné le transfert de l'intéressé vers la Hongrie et son assignation à résidence dans le département de l'Essonne pour une durée de 45 jours ; que M. F... a demandé l'annulation de ces deux arrêtés au Tribunal administratif de Versailles ; que, par un jugement du 24 juin 2016 dont la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE relève appel, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a fait droit à la demande de

Yeni Luseke et annulé les arrêtés litigieux ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. (...) Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " (...) l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE)

n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " (....) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions citées aux points 2. et 3. que, si un État membre de l'Union européenne appliquant le règlement dit " Dublin III " est présumé respecter ses obligations découlant de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, cette présomption est susceptible d'être renversée en cas de défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'État membre en cause, exposant ceux-ci à un risque de traitement inhumain ou dégradant prohibé par les stipulations de ce même article ; qu'en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, il appartient au juge administratif de rechercher si, à la date d'édiction de la décision litigieuse et eu égard aux éléments produits devant lui et se rapportant à la procédure d'asile appliquée dans l'Etat membre initialement désigné comme responsable au sens de ces dispositions, il existait des motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de remise aux autorités de ce même Etat membre du demandeur d'asile, ce dernier n'aurait pu bénéficier d'un examen effectif de sa demande d'asile, notamment en raison d'un refus opposé à tout enregistrement des demandes d'asile ou d'une incapacité structurelle à mettre en oeuvre les règles afférentes à la procédure d'asile, ou si la situation générale du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile dans ce même Etat était telle qu'un renvoi à destination de ce pays aurait exposé l'intéressé, de ce seul fait, à un risque de traitement prohibé par l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

5. Considérant, d'une part, que M. F...s'est prévalu devant le premier juge, au soutien de son moyen tiré de l'existence de défaillances systémiques en Hongrie, de l'ouverture en 2015 par la Commission européenne d'une procédure d'infraction à l'encontre de ce pays, notamment fondée sur le motif tiré de ce que les demandeurs d'asile ne pouvaient pas présenter, à l'appui d'un recours, des faits et circonstances nouveaux, le droit d'exercer un recours effectif devant un tribunal impartial étant ainsi méconnu ; qu'il a également fait valoir, en se référant notamment aux observations du commissaire européen aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe en date du 17 décembre 2015 ainsi qu'à des rapports établis par le

Haut Commissariat pour les Réfugiés et par diverses organisations non gouvernementales qu'une loi hongroise, entrée en vigueur en juin 2016, autorise le renvoi immédiat en Serbie des migrants retrouvés sur le territoire hongrois à moins de 8 kilomètres de la frontière serbe, sans que soient prises en compte les demandes d'asile qu'ils pourraient éventuellement présenter ; qu'il a enfin fait valoir, en s'appuyant sur les mêmes rapports, que les conditions de détention dans les zones de transit situées le long de la frontière entre la Hongrie et la Serbie avaient un caractère inhumain et dégradant ; que, toutefois, ainsi que le relève la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE à l'appui de son appel, la procédure engagée au sujet de la Hongrie par la Commission européenne n'a pas donné lieu à ce stade à l'ouverture d'une procédure contentieuse devant la Cour de justice de l'Union européenne ; que les conditions appliquées aux migrants interpellés sur le territoire hongrois à proximité immédiate de la frontière serbe sont distinctes de celles qui sont appliquées aux demandeurs d'asile qui, à l'instar de M.F..., sont renvoyés en Hongrie depuis un autre Etat membre de l'Union européenne en application du règlement dit " Dublin III " ; que les positions adoptées vis-à-vis des autorités hongroises par les gouvernements de divers Etats membres de l'Union européenne, ainsi que les critiques soulevées par M. G...à l'encontre du caractère restrictif de la législation applicable en Hongrie en matière d'asile et des conditions d'accueil que ce pays réserve aux demandeurs d'asile ne sont pas, à elles seules, de nature à renverser la présomption mentionnée au point 4. , faute de manifester soit un refus qu'opposeraient les autorités hongroises à tout enregistrement des demandes d'asile, soit une incapacité structurelle de ces mêmes autorités d'examiner effectivement ces demandes, en méconnaissance de la convention de Genève de 1951 ;

6. Considérant, d'autre part, que M. F...n'apporte aucun justificatif relatif aux conditions de son séjour en Hongrie susceptible d'établir qu'il serait personnellement exposé, en cas de transfert vers ce pays, à un risque de traitement prohibé par l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ou l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que s'il soutient avoir à titre personnel fait l'objet de traitements inhumains ou dégradants de la part de la police hongroise, il ne verse au débat aucun élément susceptible de venir au soutien de ses allégations ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5. et 6. que les éléments avancés par M. F...ne sont pas de nature à faire naître de sérieuses raisons de croire qu'existeraient dans la procédure d'asile susceptible de lui être appliquée en Hongrie des défaillances systémiques, au sens du 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 mentionné

ci-dessus, de nature à renverser la présomption mentionnée au point 4. ; que, par suite, la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE est fondée à soutenir que c'est à tort que le premier juge s'est fondé sur l'existence de défaillances systémiques en Hongrie et la violation en conséquence de l'article 3 du règlement UE 604/2013 du Parlement européen et du Conseil pour annuler les arrêtés litigieux ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. F...devant le tribunal administratif ;

Quant à la légalité de la décision de transfert :

9. Considérant que, par un arrêté n° 2016-PREF-MCP-023 du 17 mai 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Essonne du même jour, la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE a donné délégation à Mme A...C..., chef du bureau de l'éloignement du territoire, signataire de la décision contestée, à l'effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la signature des arrêtés de réadmission, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme D...B..., directrice de l'immigration et de l'intégration, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas été absente ou empêchée ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision de transfert ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 212-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) " ;

11. Considérant que l'arrêté portant décision de transfert de M. F...aux autorités hongroises vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève du 28 juillet 1951, le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile notamment son article L. 742-3 et mentionne que l'intéressé, entré irrégulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être muni des documents exigés par les textes en vigueur, que les autorités hongroises ont accepté implicitement la reprise en charge de la demande d'asile de l'intéressé, que cette décision ne porte pas d'atteinte disproportionnée au respect de son droit à une vie privée et familiale et que l'intéressé n'établit pas de risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile ; que l'arrêté en litige comporte ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et est, par suite, suffisamment motivé ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; / e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. " ;

13. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les informations mentionnées au 1. de l'article 4 doivent être délivrées à l'intéressé dès l'introduction de sa demande de protection internationale, et, au plus tard, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de l'examen de sa demande d'asile, par écrit et dans une langue qu'il comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend ; que la délivrance de ces informations constitue une garantie ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. F...s'est vu remettre les brochures communes A et B dans la langue qu'il a déclaré parler et dont la délivrance est prévue par les dispositions précitées, le 10 décembre 2015, au cours de l'entretien individuel prévu à l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé, soit préalablement à la notification de la décision de transfert de l'intéressé vers la Hongrie ; qu'en l'espèce, la délivrance des informations à l'intéressé n'était donc pas tardive ; qu'en outre, les dispositions précitées prévoient que les informations relatives à Eurodac soient comprises dans les brochures communes dont il n'est pas contesté que M. F...les a reçues ; que le moyen tiré d'une communication tardive ou d'un défaut de communication des informations obligatoires prévues par les règlements (UE) n° 603/2013 et n° 604/2013 précités doit donc être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable " ; que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, conformément à l'article 7 dudit règlement ; que son article 13 prévoit : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n °603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière " ; que l'article 22 dispose : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur dans un délai de deux mois à compter de la réception de la requête. 2. Dans le cadre de la procédure de détermination de l'État membre responsable, des éléments de preuve et des indices sont utilisés. " ; que selon l'article 21 du même règlement : " L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement(UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement " ;

16. Considérant que les empreintes de M. F...ont été saisies, le 20 juillet 2015, sur le fichier européen Eurodac, par les autorités grecques et, le 5 août 2015, par les autorités hongroises ; que M. F...soutient que les dispositions précitées du règlement (UE) n° 604/2013 font obstacle à ce qu'il soit réadmis dans un pays, la Hongrie, qui n'est pas l'Etat membre de première entrée ; que, toutefois, il n'est pas contesté que les réadmissions vers la Grèce étaient, à la date de l'arrêté en litige, suspendues ; que la Hongrie, saisie en vertu du critère de l'Etat membre de première entrée alors même que l'intéressé est entré dans l'espace européen par la Grèce, a implicitement accepté sa responsabilité ; qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union Européenne, et notamment de son arrêt de grande chambre C-394/12 du 10 décembre 2013, que, dès lors qu'un Etat membre accepte la réadmission d'un demandeur d'asile en vue de l'examen de sa demande de protection internationale en vertu du critère de première entrée, l'intéressé ne peut mettre en cause le choix de ce critère qu'en invoquant l'existence de défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans cet État membre qui constitueraient des motifs sérieux et avérés de croire que ce demandeur courra un risque réel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5. que le moyen tiré de l'existence de défaillances systémiques dans le système d'asile hongrois doit être écarté ; que M. F... n'est donc pas fondé à soutenir que la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE aurait entaché sa décision d'erreur d'appréciation ou d'erreur de droit au regard des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 ;

Quant à la légalité de la décision d'assignation à résidence :

17. Considérant que l'arrêté portant assignation à résidence vise notamment les articles L. 561-2, R. 561-2 et R. 561-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne que l'intéressé, faisant l'objet d'une décision de transfert, présente des garanties propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ; " et qu'aux termes de l'article L. 744-1 dudit code : " (...) Le demandeur d'asile qui ne dispose ni d'un hébergement, au sens du 1° de l'article L. 744-3, ni d'un domicile stable bénéficie du droit d'élire domicile auprès d'une personne morale conventionnée à cet effet pour chaque département, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat " ;

19. Considérant que l'arrêté attaqué, qui assigne M. F...à résidence pour une durée de 45 jours sur le territoire du département de l'Essonne, retient pour domiciliation de l'intéressé la plateforme d'accueil pour demandeurs d'asile Coallia située 9, boulevard des Coquibus à Evry ; qu'à supposer, ainsi que le soutient M.G..., que cette adresse ne constitue pas une adresse de résidence et d'habitation mais une simple domiciliation postale, cette circonstance, eu égard aux dispositions précitées et dès lors qu'il s'agit de la seule adresse indiquée par le requérant et dont l'administration avait connaissance, n'entache pas d'illégalité l'arrêté d'assignation à résidence attaqué ; que la circonstance que M. F...n'aurait pas présenté de garantie propre à prévenir le risque de se soustraire à la décision de transfert dans l'attente de son exécution, si elle aurait pu, le cas échéant, justifier son placement en centre de rétention, est sans incidence sur la légalité de la décision préfectorale l'assignant seulement à résidence selon les règles de droit commun, laquelle ne constitue pas, eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise, une atteinte excessive à la liberté d'aller et venir de l'intéressé ; que les moyens tirés d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ne peuvent, par suite, qu'être écartés ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la PRÉFÈTE DE L'ESSONNE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé ses arrêtés du 20 juin 2016 ;

21. Considérant que, dès lors que l'Etat n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par M. F...et son conseil ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1604398 du 24 juin 2016 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. F...devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : Les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, présentées par M. F..., sont rejetées.

8

N° 16VE02497


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02497
Date de la décision : 17/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Céline GUIBÉ
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : CABINET FetB ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-10-17;16ve02497 ?
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