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28/09/2017 | FRANCE | N°13VE02636

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 28 septembre 2017, 13VE02636


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Inforad Limited a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2004 et 2005, ainsi que du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 31 mai au 31 décembre 2004.

Par un jugement n° 1006602 du 5 juin 2013, l

e Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a, d'une part, prononcé la réduction des résul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Inforad Limited a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2004 et 2005, ainsi que du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 31 mai au 31 décembre 2004.

Par un jugement n° 1006602 du 5 juin 2013, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a, d'une part, prononcé la réduction des résultats imposables de la

société Inforad Limited, au titre des exercices 2004 et 2005, du montant des bénéfices imputables à son établissement stable situé en Irlande et, en conséquence, accordé à l'intéressée la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, au titre desdits exercices, pour la part formant surtaxe à raison de la réduction de base ainsi prononcée, d'autre part, mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 6 août 2013, le MINISTRE DE L'ECONOMIE

ET DES FINANCES demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement, en tant qu'il fait partiellement droit aux conclusions de la demande présentée par la Société Inforad Limited ;

2° de rétablir les droits et pénalités déchargés par le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise à charge de la Société Inforad Limited.

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES soutient que :

- en prononçant une réduction, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés en litige pour un montant, en base ou en droits, qui n'est pas déterminé ou au moins déterminable d'après les motifs ou le dispositif du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a méconnu son office et, par suite, entaché ce jugement d'irrégularité ;

- en énonçant, au point 34 du jugement attaqué, que la société Inforad Limited n'établissait pas le caractère exagéré des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés en litige, alors qu'il prononce à ses articles 1er et 2, pour le motif exposé au point 38, la réduction, en droits et pénalités, desdits suppléments, ce jugement est également entaché d'une contradiction de motifs ;

- sur le fond et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la

société Inforad Limited a été assujettie à bon droit à l'impôt sur les sociétés, au titre des exercices en litige, sur la totalité de ses bénéfices, par application de l'article 209 du code général des impôts et de la convention franco-irlandaise du 21 mars 1968, dès lors, d'une part, qu'elle exploite son entreprise en France et, d'autre part, qu'elle ne peut être regardée comme disposant d'un établissement stable en Irlande ;

- les autres moyens que soulevait la société Inforad Limited devant le

Tribunal administratif de Cergy-Pontoise doivent être écartés pour les motifs déjà exposés par l'administration devant les premiers juges.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de MeK..., pour la société Inforad Limited.

1. Considérant que la société Inforad Limited, société de droit irlandais créée le 1er avril 2004 et ayant son siège à Shannon, exerce une activité de vente d'appareils avertisseurs de radars routiers ; qu'à la suite de procédures de visite et de saisie diligentées, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, le 27 juillet 2006, notamment dans les locaux de la société Four J's Development Tools France, locaux alors situés à Sèvres et pour partie loués à la société Inforad Limited, dans ceux de la société Electron Online, distributeur français des produits de l'intéressée, et aux domiciles de MM. L...etG..., dirigeants de cette dernière, l'administration a estimé que la société Inforad Limited exerçait, en fait, son activité commerciale en France, sans avoir souscrit les déclarations de résultats et de chiffres d'affaires y afférentes, ni davantage s'être fait connaître auprès d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce ; qu'en conséquence, le service a mis la société Inforad Limited en demeure, le 21 mars 2007, de souscrire ses déclarations de résultats au titre des exercices clos en 2004 et 2005 et, par ailleurs, informé l'intéressée, par avis du

26 mars 2007, de l'engagement à son égard d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 31 mai 2004 au 31 décembre 2005 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration, suivant la procédure de taxation d'office prévue, en cas de défaut de déclaration, aux articles

L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales, a assigné à la société Inforad Limited, par notification du 7 décembre 2007, un rappel de taxe sur la valeur ajoutée, au titre de la période du 31 mai au 31 décembre 2004, ainsi que des cotisations à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt, au titre des exercices clos en 2004 et 2005, dont paiement a été réclamé à l'intéressée par avis de mise en recouvrement émis le 23 juin 2009 ; qu'après vaine réclamation préalable, rejetée par décision du 15 avril 2010, la société Inforad Limited a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, de ces suppléments d'impositions ; que, par jugement n° 1006602 du 5 juin 2013, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, prononcé la réduction des résultats imposables de la société Inforad Limited, au titre des exercices 2004 et 2005, du montant des bénéfices imputables à son établissement stable situé en Irlande et, en conséquence, accordé à l'intéressée la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie, au titre desdits exercices, pour la part formant surtaxe à raison de cette réduction de base, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions à fin de décharge présentées par l'intéressée ; que le

MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES relève appel de ce jugement, en tant qu'il prononce la réduction susmentionnée ; que la société Inforad Limited, par voie d'appel incident, sollicite la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impositions maintenus à sa charge par ledit jugement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES à l'appel incident de la société Inforad Limited :

2. Considérant, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, que le

MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, dans son recours, ne conteste le jugement attaqué qu'en tant que celui-ci statue sur les conclusions de la société Inforad Limited tendant à la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004 et 2005 ; que si la société Inforad Limited demande notamment à la Cour, par voie d'appel incident, de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 31 mai au 31 décembre 2004, ces conclusions incidentes, présentées après l'expiration du délai dont disposait l'intéressée pour interjeter appel dudit jugement, relèvent d'un litige distinct de celui ayant fait l'objet de l'appel principal et sont, par suite, irrecevables, ainsi que l'oppose l'administration en défense ; que l'appel incident de la société Inforad Limited doit, dès lors, être rejeté dans cette mesure ;

Sur la régularité du jugement attaqué, en tant qu'il statue sur les conclusions à fin de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt :

3. Considérant que pour accorder à la société Inforad Limited la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2004 et 2005, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a seulement indiqué que cette décharge partielle procédait d'une réduction, en base, " du montant des bénéfices imputables à l'établissement de cette société situé en Irlande ", sans préciser, dans le dispositif ou les motifs du jugement attaqué, le montant ou les bases de calcul des bénéfices à extourner en conséquence ; que, ce faisant, le Tribunal a méconnu l'obligation d'épuiser sa compétence pour trancher le litige dont il était saisi, son jugement ne pouvant, au surplus, recevoir exécution ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est, dès lors, fondé à soutenir que le jugement attaqué est, pour ce motif, entaché d'irrégularité et doit, dans cette mesure, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Inforad Limited devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en tant qu'elle tend à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt auxquelles l'intéressée a été assujettie au titre des exercices 2004 et 2005 ;

Sur les conclusions à fin de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à cet impôt :

En ce qui concerne le principe de l'imposition de la société Inforad Limited en France :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des éléments recueillis à l'occasion de procédures de visite et de saisie diligentées par l'administration le 27 juillet 2006, tels qu'énumérés dans la notification susmentionnée, au point 1, du 7 décembre 2007, qu'alors qu'elle avait été créée le 1er avril 2004 à Shannon, en Irlande, où résidait M.F..., l'un de ses trois dirigeants, la société Inforad Limited a, au cours de l'ensemble de la période vérifiée, disposé en France, où vivaient MM. G...etL..., ses deux autres dirigeants, de locaux propres, situés au 20, rue Troyon, à Sèvres, et composés notamment de deux bureaux de 75 m² au total, qu'elle a pris à bail par contrat du 1er mai 2004, pour une durée de trente mois, auprès de la société Four J's Development Tools France, également dirigée par M.L... ; que, par ailleurs, la société Inforad Limited disposait également, au cours de la même période, de personnels travaillant en France, outre MM. G...etL..., tels notamment que

M. J...et Godefroy, responsables administratifs et financiers, M.N..., chargé du marketing et de la communication, et MM. A... etM..., responsables techniques ; qu'enfin, les investigations du service ont permis d'établir que les activités de la société

Inforad Limited, depuis sa création, ont été, pour l'essentiel, menées depuis la France, sous la direction et le contrôle de M.L..., son unique associé, qu'il s'agisse, en particulier, de la conclusion et du suivi des contrats avec les fournisseurs chargés d'assembler les divers composants des appareils avertisseurs de radars routiers, à savoir la société française

Thalès Microelectrics, devenue Tes, puis la société chinoise Sunkin Technology Co Ltd, de la signature des contrats commerciaux de distribution de ces appareils sur le territoire, notamment par l'intermédiaire de M.H..., agent commercial indépendant mais se présentant comme " directeur commercial " de la société Inforad Limited, des diverses opérations bancaires réalisées pour le compte de celle-ci, tels que virements, cautions et garanties, de l'embauche et de la gestion des personnels susmentionnés, ou encore de la gestion du service après-vente de retour des produits défectueux, y compris pour ceux vendus à l'étranger ; que, compte tenu du caractère de permanence et de l'autonomie dont disposait ainsi l'installation précédemment décrite, la société Inforad Limited doit être regardée comme ayant, au cours des exercices en litige, exploité un établissement en France, au sens de l'article 209 précité du code général des impôts ; que l'administration a, dès lors, pu à bon droit retenir que les bénéfices tirés par l'intéressée de cette exploitation sur le territoire devaient, en application desdites dispositions, être soumis à l'impôt sur les sociétés ; qu'enfin, ce motif suffisant à justifier le principe de l'imposition de la société Inforad Limited en France, demeurent ...par l'intermédiaire d'un représentant sans personnalité professionnelle indépendante et qu'elle réalisait, en outre, sur le territoire des opérations formant un cycle commercial complet ;

S'agissant de l'application de la convention franco-irlandaise du 21 mars 1968 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968 : " Pour application de la présente Convention : / (...) 6° Les expressions " entreprise d'un Etat contractant " et " entreprise de l'autre Etat contractant " désignent respectivement, selon le contexte, une entreprise exploitée par un résident d'un Etat contractant et une entreprise exploitée par un résident de l'autre Etat contractant. / 7° Les expressions " résident d'Irlande " et " résident de France " désignent respectivement : /Toute personne qui est résidente d'Irlande pour l'application de l'impôt irlandais et qui n'est pas résidente de France pour l'application de l'impôt français. / Et toute personne qui est résidente en France pour l'application de l'impôt français et qui n'est pas résidente d'Irlande pour l'application de l'impôt irlandais. / 8° Une société est considérée comme résidente d'Irlande lorsqu'elle est dirigée et contrôlée en Irlande. (...) / Une société est considérée comme résidente de France lorsqu'elle est dirigée et contrôlée en France. / 9° Le terme " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où une entreprise exerce tout ou partie de son activité. / a. Constituent notamment des établissements stables : / (aa) Un siège de direction ; / (bb) Une succursale ; / (cc) Un bureau ; / (dd) Une usine ; / (ee) Un atelier ; / (ff) Une mine, carrière ou autre lieu d'extraction de ressources naturelles ; / (gg) Un chantier de construction ou de montage dont la durée dépasse douze mois. / b. On ne considère pas qu'il y a établissement stable si : / (aa) Il est fait usage d'installations aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l'entreprise ; / (bb) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison ; / (cc) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de transformation par une autre entreprise ; / (dd) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'acheter des marchandises ou de réunir des informations pour l'entreprise ; / (ee) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins de publicité, de fourniture d'informations, de recherche scientifique ou d'activités analogues qui ont pour l'entreprise un caractère préparatoire ou auxiliaire. / c. Une personne agissant dans un Etat contractant pour le compte d'une entreprise de l'autre Etat contractant autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant, visé à l'alinéa d ci-après, est considérée comme " établissement stable " dans le premier Etat si elle dispose dans cet Etat de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, à moins que l'activité de cette personne ne soit limitée à l'achat de marchandises pour l'entreprise. / d. On ne considère pas qu'une entreprise d'un Etat contractant a un établissement stable dans l'autre Etat contractant du seul fait qu'elle y effectue des opérations commerciales par l'entremise d'un courtier, d'un commissionnaire général ou de tout autre intermédiaire jouissant d'un statut indépendant, à condition que ces personnes agissent dans le cadre ordinaire de leur activité (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de la même convention : " 1. Les bénéfices industriels et commerciaux d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce une activité industrielle ou commerciale dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce une telle activité, l'impôt peut être perçu dans l'autre Etat sur les bénéfices de l'entreprise, mais uniquement dans la mesure où ces bénéfices sont imputables audit établissement stable. / 2. Lorsqu'une entreprise d'un Etat contractant exerce une activité industrielle ou commerciale dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé, il est imputé, dans chacun des deux Etats, à cet établissement stable les bénéfices qu'il aurait pu réaliser s'il avait constitué une entreprise distincte et séparée exerçant des activités identiques ou analogues dans des conditions identiques ou analogues et traitant en toute indépendance avec l'entreprise dont il constitue un établissement stable. / 3. Dans le calcul des bénéfices d'un établissement stable, sont admises en déduction les dépenses exposées aux fins poursuivies par cet établissement stable, y compris les dépenses de direction et les frais généraux d'administration ainsi exposés, soit dans l'Etat où est situé cet établissement stable, soit ailleurs. / 4. S'il est d'usage, dans un Etat contractant de déterminer les bénéfices imputables à un établissement stable sur la base d'une répartition des bénéfices totaux de l'entreprise entre ses diverses parties, aucune disposition du paragraphe 2 du présent article n'empêche cet Etat contractant de déterminer les bénéfices imposables selon la répartition en usage ; la méthode de répartition adoptée doit cependant être telle que le résultat obtenu soit conforme aux principes énoncés dans le présent article. / 5. Aucun bénéfice n'est imputé à un établissement stable du fait que cet établissement stable a simplement acheté des marchandises pour l'entreprise. / 6. Aux fins des paragraphes précédents, les bénéfices à imputer à l'établissement stable sont calculés chaque année selon la même méthode, à moins qu'il n'existe des motifs valables et suffisants de procéder autrement " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des explications et pièces contradictoirement fournies, sur ce point, à l'occasion de la présente instance, que la société Inforad Limited avait, en 2004, pour siège social, en Irlande, le domicile personnel de

M.F..., adresse à laquelle était également établi le siège de la société Worldnet 21, société irlandaise dont il était aussi le dirigeant et avec laquelle la société Inforad Limited avait conclu, en mai 2004, un contrat de logistique et de services, afin de lui sous-traiter, notamment, le stockage des appareils avertisseurs de radars routiers livrés par les fournisseurs

" Thalès Microelectrics " et " Sunkin Technology Co Ltd " susmentionnés, ainsi que l'emballage et l'expédition de ces marchandises vers les distributeurs et clients, notamment français ; qu'en dehors de M.F..., la société Inforad Limited ne disposait, en 2004, d'aucun personnel en Irlande ; qu'à compter de l'année 2005, ladite société s'est dotée de locaux propres, à Shannon, composés de bureaux et d'entrepôts, ainsi que de plusieurs salariés, à savoir

M.C..., responsable financier, M.E..., informaticien, et Mmes B..., I...etD..., en charge du support téléphonique de la " hotline " destinée à la clientèle, service qui était initialement sous-traité à la société française Sérénis jusqu'en septembre 2005 ; qu'il est constant que les moyens humains et matériels ainsi déployés par la société Inforad Limited, à compter de l'année 2005, lui ont permis d'assurer dorénavant elle-même, depuis son installation irlandaise, le stockage et la livraison de ses marchandises, la saisie de sa comptabilité, ainsi que la gestion de son service de " hotline " ;

9. Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'ensemble des conditions d'exploitation de la société Inforad Limited au cours des exercices 2004 et 2005 en litige, telles qu'explicitées plus haut aux points 6 et 8, que l'intéressée, bien que créée en Irlande, était, à l'époque, dirigée et contrôlée en France, notamment par M.L..., son unique associé ; qu'ainsi, et contrairement à ce qu'elle soutient, la société Inforad Limited doit être regardée comme résidente française, par application des stipulations précitées du 8° de l'article 2 de la convention fiscale

franco-irlandaise du 21 mars 1968 ;

10. Considérant, d'autre part, que, même à admettre, comme l'oppose l'administration, que l'installation dont la société Inforad Limited a disposé en Irlande à compter de l'année 2005, telle que décrite au point 8, ne pourrait, compte tenu de son utilisation aux seules fins de stockage, de livraison de marchandises et d'activités auxiliaires telles que la saisie de la comptabilité et le service de " hotline " susmentionné, être considérée comme un établissement stable, ainsi que l'excluent expressément les stipulations précitées du b) du 9° de l'article 2 de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968, il résulte toutefois de l'instruction que ladite société disposait, dans ce pays, d'un dirigeant, en la personne de M.F..., qui ne constituait pas un intermédiaire jouissant d'un statut indépendant et qui était habilité à conclure, pour le compte de l'intéressée, des contrats autres que d'achats de marchandises ; qu'à cet égard, il ressort, notamment, des explications complémentaires fournies par la société Inforad Limited en cause d'appel, en pages 18 et suivantes de son mémoire en défense, ainsi que des pièces jointes correspondantes n° 15, 24 à 29, 70 et 71, que M. F... a exercé habituellement ce pouvoir, au cours des exercices en litige, en particulier pour le contrat de logistique et de services conclu avec la société Worldnet 21, pour le bail afférent aux locaux de Shannon, pour les contrats de transport des marchandises, depuis ces locaux vers les clients de la société

Inforad Limited et pour l'embauche de certains salariés employés en Irlande ; que, dans ces conditions, la société Inforad Limited doit être regardée comme ayant disposé, au cours des exercices 2004 et 2005 en litige, d'un établissement stable en Irlande en vertu des stipulations précitées et distinctes du c) du 9° de l'article 2 de ladite convention ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 10 que la société

Inforad Limited n'est pas fondée à soutenir que la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968 ferait obstacle au principe même de son imposition en France à l'impôt sur les sociétés, au titre des exercices 2004 et 2005 en litige, l'exagération alléguée des cotisations contestées, à raison de l'inclusion dans l'assiette de celles-ci des bénéfices imputables à son établissement stable irlandais, étant distinctement examinée ci-après au point 30 ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant de la régularité des procédures de visite et de saisie :

12. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) " ;

13. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support. / II. Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. / (...) L'ordonnance mentionnée au premier alinéa n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale (...) " ; qu'aux termes du IV de l'article 164 de la loi

n° 2008-776 du 4 août 2008 : " 1. Pour les procédures de visite et de saisie prévues à l'article

L. 16 B du livre des procédures fiscales pour lesquelles le procès-verbal ou l'inventaire mentionnés au IV de cet article a été remis ou réceptionné antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, un appel contre l'ordonnance mentionnée au II de cet article, alors même que cette ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi ayant donné lieu à cette date à une décision de rejet du juge de cassation, ou un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut, dans les délais et selon les modalités précisés au 3 du présent IV, être formé devant le premier président de la cour d'appel dans les cas suivants : / (...) d) Lorsque, à partir d'éléments obtenus par l'administration dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie, des impositions ont été établies ou des rectifications ne se traduisant pas par des impositions supplémentaires ont été effectuées et qu'elles font ou sont encore susceptibles de faire l'objet, à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, d'une réclamation ou d'un recours contentieux devant le juge, sous réserve des affaires dans lesquelles des décisions sont passées en force de chose jugée. Le juge, informé par l'auteur de l'appel ou du recours ou par l'administration, sursoit alors à statuer jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel (...) " ;

14. Considérant que, devant les premiers juges, la société Inforad Limited soutenait que les dispositions précitées de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction applicables à la date du 27 juillet 2006 à laquelle l'administration a diligenté les procédures de visite et de saisie mentionnées au point 1, méconnaissaient le droit à un procès équitable garanti par les stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'a jugé la Cour européenne des droits de l'homme dans son arrêt " Ravon et autres c./ France ", rendu le 21 février 2008 sous le

n° 18497/03 ; que, toutefois, il est constant que la société Inforad Limited a, depuis lors, été mise à même d'exercer les nouveaux recours rétroactivement institués, en vue de la mise en conformité du droit interne avec le droit conventionnel, par les dispositions précitées du IV de l'article 164 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, les recours ainsi formés par l'intéressée ayant tous, à ce jour, ayant été définitivement rejetés par les juridictions judiciaires compétentes ; que la société Inforad Limited n'est, dès lors, pas fondée à exciper de l'inconventionnalité susmentionnée pour soutenir que la procédure d'imposition suivie à son égard serait irrégulière ;

S'agissant de la régularité de la vérification de comptabilité :

15. Considérant, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, que les suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt assignés à la société Inforad Limited, au titre des exercices 2004 et 2005, ont été établis par l'administration suivant la procédure de taxation d'office prévue, en cas de défaut de déclaration de résultats, par les articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de l'instruction que cette situation de taxation d'office a été révélée par les procédures de visite et de saisies mises en oeuvre le 27 juillet 2006, à l'issue desquelles le service a estimé que l'intéressée exerçait son activité commerciale de manière occulte sur le territoire français, et non par la vérification de comptabilité ultérieurement diligentée à son égard ; que, par suite, le moyen soulevé par la société Inforad Limited devant les premiers juges et tiré de l'irrégularité de cette vérification est, en tout état de cause, inopérant ;

S'agissant de la régularité de la procédure de taxation d'office :

16. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / (...) 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction alors en vigueur : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) 3° Si le contribuable ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce (...) " ;

17. Considérant, en l'espèce, que l'administration établit, pour les motifs déjà exposés aux points 5 à 11, que la société Inforad Limited était, à raison de l'exploitation de son entreprise en France, passible de l'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2004 et 2005 en litige ; que, toutefois, il est constant que l'intéressée n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations de résultats qu'elle était tenue de souscrire au titre desdits exercices ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté que la société Inforad Limited n'a pas déféré aux mises en demeure que lui avait, à cet égard, adressées le service, le 21 mars 2007, et ne s'était, au surplus, pas davantage fait connaître auprès d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce ; que, dans ces conditions, l'intéressée pouvait être régulièrement taxée d'office à l'impôt sur les sociétés, par application des dispositions précitées des articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales ; qu'enfin, demeure sans incidence, à cet égard, la circonstance que la société

Inforad Limited avait souscrit le 28 juin 2005 en France, en qualité d'assujetti établi à l'étranger, une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible et avait, par ailleurs, déclaré ses résultats auprès de l'administration fiscale irlandaise ;

18. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) " ;

19. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par notification du 7 décembre 2007, l'administration a notamment informé la société Inforad Limited des motifs de droit et de fait pour lesquels elle estimait que l'intéressée était passible, en France, de l'impôt sur les sociétés, au titre des exercices clos en 2004 et 2005, et de ce qu'elle envisageait de la taxer d'office, pour défaut de déclaration, sur le fondement des articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales ; que ladite notification, après avoir rappelé que la société Inforad Limited n'avait pas souscrit, même tardivement, de déclarations de résultats au titre desdits exercices, et n'avait pas davantage été en mesure de produire de comptabilité, au titre de l'ensemble de la période vérifiée, précise ensuite que ses résultats seraient reconstitués conformément aux éléments figurant dans les " états financiers " dressés par le cabinet comptable irlandais Donovan, Caulfield et Lavin, fournis par l'intéressée elle-même en cours de contrôle ; qu'à cet égard, la notification susmentionnée du 7 décembre 2007 reprend expressément, pour chaque exercice, les chiffres d'affaires ressortant de ces " états financiers ", soit 1 139 517 euros pour 2004 et 4 560 159 euros pour 2005, indique également admettre, dans un souci de réalisme économique et en dépit de l'absence de production des pièces justificatives y afférentes, la déduction de l'intégralité des charges y étant portées, soit 985 161 euros pour 2004 et 3 987 721 euros pour 2005, et en déduit, par soustraction, le montant des résultats imposables, respectivement fixé à 154 356 euros pour l'exercice clos en 2004 et à 572 438 euros pour l'exercice clos en 2005 ; qu'ainsi, ladite notification indique, avec une précision suffisante, les bases ou éléments de calcul des suppléments d'impositions en litige et les modalités de leur détermination, lesquelles ne font que reprendre, à l'identique, les seules données chiffrées fournies par la société

Inforad Limited en cours de contrôle ; que cette dernière n'est, dès lors, pas fondée à soutenir, pour la première fois en cause d'appel, que la notification du 7 décembre 2007 serait insuffisamment motivée, au regard des exigences prévues par les dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; qu'enfin, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir du commentaire desdites dispositions figurant aux paragraphes n° 100 et 101 de la documentation de base 13 L-1551, ces énonciations, qui ont trait à la procédure d'imposition, n'entrant pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

20. Considérant, en troisième lieu, que si la société Inforad Limited, pour contester devant les premiers juges la procédure d'imposition d'office suivie en l'espèce, a fait grief au service d'avoir échangé des renseignements avec l'administration fiscale irlandaise, suivant la procédure prévue à cet effet, par l'article 23 de la convention fiscale franco-irlandaise du

21 mars 1968, l'intéressée n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes, notamment quant à l'exposé précis des irrégularités qui auraient, selon elle, été commises par le service, pour permettre d'en apprécier la portée ou le bien-fondé ;

21. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes, d'une part, de l'article 24 de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968 : " 1. Lorsqu'un résident d'un Etat contractant estime que les mesures prises par l'un des Etats contractants ou par chacun des deux Etats entraînent ou entraîneront pour lui une imposition non conforme à la présente Convention, il peut, indépendamment des recours prévus par la législation nationale de ces Etats, soumettre son cas à l'autorité compétente de l'Etat contractant dont il est résident. / 2. Cette autorité compétente s'efforcera, si la réclamation lui paraît fondée et si elle n'est pas elle-même en mesure d'apporter une solution satisfaisante, de régler la question par voie d'accord amiable avec l'autorité compétente de l'autre Etat contractant, en vue d'éviter une imposition à la présente Convention. / 3. Les autorités compétentes des Etats contractants s'efforcent par voie d'accord amiable de résoudre les difficultés auxquelles peut donner lieu l'application de la présente Convention. Elles peuvent aussi se concerter en vue d'éviter la double imposition dans les cas non prévus par la présente Convention. / 4. Les autorités compétentes des Etats contractants peuvent communiquer directement entre elles en vue de parvenir à un accord comme il est indiqué aux paragraphes précédents. Si des échanges de vues oraux semblent devoir faciliter cet accord, ces échanges de vues peuvent avoir lieu au sein d'une commission composée de représentants des autorités compétentes des deux Etats contractants " ; qu'aux termes, d'autre part, des dispositions alors en vigueur de l'article L. 189 A du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'à la suite d'une proposition de rectification, une procédure amiable en vue d'éliminer la double imposition est ouverte sur le fondement d'une convention fiscale bilatérale (...), le cours du délai d'établissement de l'imposition correspondante est suspendu de la date d'ouverture de la procédure amiable au terme du troisième mois qui suit la date de la notification au contribuable de l'accord ou du constat de désaccord intervenu entre les autorités compétentes " ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 189 A du livre des procédures fiscales, éclairées par leurs travaux préparatoires, qu'en prévoyant que le cours du délai d'établissement de l'imposition est suspendu de la date d'ouverture de la procédure amiable jusqu'au terme du troisième mois qui suit la date de la notification au contribuable de l'accord ou du constat de désaccord intervenu entre les autorités compétentes, le législateur a entendu prévenir les cas de double imposition d'un contribuable sur les bénéfices et prévoir également à cette fin que, sauf lorsque l'administration fait état d'éléments justifiant une mise en recouvrement immédiate de l'imposition, la mise en recouvrement des sommes litigieuses soit suspendue jusqu'à l'issue de cette procédure ;

22. Considérant, en l'espèce, que la société Inforad Limited n'établit pas, par les pièces versées aux débats, avoir sollicité auprès de l'administration l'ouverture d'une procédure amiable avec les autorités irlandaises, en application des stipulations précitées de l'article 24 de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968, procédure conventionnelle que le service n'était pas davantage tenu d'engager de lui-même ; que l'intéressée n'est, dès lors, pas fondée à soutenir, ainsi qu'elle le faisait devant les premiers juges, qu'à défaut d'ouverture d'une telle procédure amiable, l'administration aurait entaché d'irrégularité la procédure d'imposition suivie ; qu'enfin, en l'absence d'engagement de cette procédure amiable, les dispositions précitées de l'article L. 189 A du livre des procédures fiscales, à les supposer ici implicitement invoquées par la société Inforad Limited, ne faisaient pas non plus obstacle à l'établissement immédiat des suppléments de droits et pénalités en litige, par l'avis de mise en recouvrement susmentionné du 23 juin 2009 ;

S'agissant de la régularité de l'avis de mise en recouvrement :

23. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 256-6 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " La notification de l'avis de mise en recouvrement comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service des impôts ou au service des douanes et droits indirects compétent, de l'" ampliation " prévue à l'article R. 256-3 (...) " ; qu'aux termes de ce dernier article, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'avis de mise en recouvrement est rédigé en double exemplaire : / a) Le premier, dit " original ", est déposé au service des impôts ou à la recette des douanes et droits indirects chargé du recouvrement ; / b) Le second, dit "ampliation", est destiné à être notifié au redevable ou à son fondé de pouvoir " ;

24. Considérant que les sociétés qui, comme la société Inforad Limited, disposent d'un établissement en France, au sens de la législation applicable en matière d'impôt sur les sociétés, ne peuvent être regardées, alors même que leur siège social serait situé en dehors du territoire national, comme établies hors de France ; qu'elles sont, en conséquence, soumises aux mêmes formalités et doivent acquitter les impôts et taxes auxquels elles sont assujetties dans les mêmes conditions que les entreprises françaises exerçant une activité identique imposable en France ; que l'administration a, dès lors, pu régulièrement notifier l'ampliation de l'avis de mise en recouvrement susmentionné du 23 juin 2009, qui était libellé au nom de la société

Inforad Limited " pour son établissement stable en France ", à l'adresse de cet établissement situé, en France, dans les locaux de la société " Four J's Development Tools France " ; qu'en tout état de cause, la circonstance que le service n'a pas notifié l'ampliation de cet avis de mise en recouvrement à l'adresse du siège social de la société Inforad Limited à Shannon, en Irlande, n'a privé d'aucune garantie l'intéressée, cette dernière ayant pu contester utilement les suppléments de droits et pénalités ainsi établis par sa réclamation préalable du

30 septembre 2009, à laquelle était jointe copie de ladite ampliation ; que, dans ces conditions, la société Inforad Limited n'est pas fondée à soutenir, pour la première fois en cause d'appel, que ce dernier acte lui aurait été notifié en méconnaissance des dispositions précitées de l'article

R. 256-6 du livre des procédures fiscales ;

25. Considérant, en second lieu, qu'à l'appui du moyen examiné aux points 23 et 24, la société Inforad Limited invoque également les énonciations figurant aux paragraphes n° 1, 6 et 7 de la documentation de base 12 C-1212 et au paragraphe n° 2 de la documentation de base

12 C-1231, lesquels ont trait à l'action en recouvrement de l'impôt et indiquent notamment que, " 6. Lorsque le redevable, qu'il ait ou non la nationalité française, a son domicile (s'il s'agit d'une personne physique), son siège social ou son principal établissement (s'il s'agit d'une personne morale), situé à l'étranger, l'avis de mise en recouvrement est établi à son nom, dans les conditions habituelles, et notifié soit par voie postale soit, si cette façon de procéder s'avère aléatoire, par voie de signification au Parquet (...) " ; que, toutefois, la documentation de base

12 C-1212 ainsi invoquée indique également, à son paragraphe n° 8, renvoyer, pour l'application de ces principes aux sociétés étrangères, aux énonciations figurant aux paragraphes n° 20 à 27 de son appendice 12 C-14, lesquels précisent expressément que, lorsque " la société a un établissement en France (...) l'avis de mise en recouvrement et la mise en demeure sont établis au nom de la société en assignant pour siège à celle-ci celui de son principal établissement en France " ; que, dans ces conditions, la doctrine invoquée par la société Inforad Limited ne comporte aucune interprétation différente de celle résultant de l'application de la loi fiscale dont l'intéressée pourrait utilement se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé des suppléments d'impositions :

S'agissant de la charge de la preuve :

26. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ;

27. Considérant, ainsi qu'il a été dit aux points 16 et 17, que la société Inforad Limited a été régulièrement taxée d'office à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2004 et 2005 ; qu'il lui appartient, dès lors, d'établir le mal-fondé ou l'exagération des suppléments d'impositions en litige ;

S'agissant des moyens dirigés contre le principe même d'une imposition en France :

28. Considérant, en premier lieu, que si la société Inforad Limited, dans la demande qu'elle avait présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, soutenait que son imposition en France méconnaîtrait les principes communautaires de liberté du commerce et de liberté d'établissement, ces moyens, qui n'ont pas été ultérieurement explicités devant les premiers juges et n'ont pas même été repris devant la Cour de céans, ne sont pas assortis des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

29. Considérant, en second lieu, qu'eu égard aux motifs exposés aux points 5 à 11, la société Inforad Limited n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 209 du code général des impôts, ainsi que les stipulations de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968, feraient obstacle au principe même de son assujettissement, en France, à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2004 et 2005 en litige ;

S'agissant des moyens tendant à établir une exagération des impositions en litige :

Quant à la réintégration d'un profit sur le Trésor :

30. Considérant que le présent arrêt rejette, pour irrecevabilité, l'appel incident dirigé par la société Inforad Limited contre le jugement attaqué, en tant que celui-ci a rejeté les conclusions de l'intéressée tendant à obtenir la décharge, en droits et pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 31 mai au 31 décembre 2004 ; que le bien-fondé de ce rappel, de 101 525 euros en droits, doit ainsi être regardé comme confirmé, dans son principe comme dans son montant ; que la société Inforad Limited n'est, dès lors, pas fondée à contester, par voie de conséquence, la réintégration par l'administration du profit sur le Trésor correspondant à ce rappel dans ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2004 ; qu'au surplus, il résulte de l'instruction que la société Inforad Limited a bénéficié d'une déduction immédiate, à due proportion, sur les résultats imposables dudit exercice, par application du mécanisme dit de " cascade simple " prévue à l'article

L. 77 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, la contestation par l'intéressée du profit sur le Trésor susmentionné est, en tout état de cause, insusceptible d'emporter une réduction de l'assiette des suppléments d'imposition en litige ;

Quant à la reconstitution des bénéfices :

31. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration, estimant que la société Inforad Limited exploitait son activité en France sans disposer d'un établissement stable en Irlande, en a déduit que l'intéressée devait être assujettie à l'impôt sur les sociétés sur la totalité de ses bénéfices reconstitués, dans les conditions rappelées au point 19, et respectivement chiffrés à 154 356 euros, au titre de l'exercice clos en 2004, et à 572 438 euros, au titre de l'exercice clos en 2005 ; que, toutefois, il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 10 que la société Inforad Limited disposait, au cours desdits exercices, d'un établissement stable en Irlande ; que l'intéressée est, dès lors, fondée à soutenir que les stipulations précitées de

l'article 4 de la convention fiscale franco-irlandaise du 21 mars 1968 faisaient obstacle à l'imposition, en France, des bénéfices imputables à son établissement stable irlandais ; que, pour l'imputation respective des bénéfices entre ces exploitations française et irlandaise, répartition qu'exige l'application desdites stipulations, il résulte de l'instruction que la société

Inforad Limited a réalisé, en France, la totalité de son chiffre d'affaires en 2004 mais seulement 65 % de celui-ci en 2005 ; qu'à défaut de tout autre élément ou pièce justificative fourni par la société Inforad Limited, à qui incombe la charge de la preuve pour le motif exposé aux points

25 et 26, de nature à établir une exagération résultant de la méthode de répartition des bénéfices proportionnelle au chiffre d'affaires, il y a lieu d'imputer à l'activité exploitée par l'intéressée en France la totalité de ses bénéfices reconstitués au titre de l'exercice clos en 2004 et 65 % du montant de ceux-ci au titre de l'exercice clos en 2005 ; qu'il suit de là que la société

Inforad Limited est seulement fondée à obtenir une réduction de ses résultats imposables en France, au titre de ce dernier exercice, de 35 % des bénéfices reconstitués, soit une réduction, en base, de 200 353 euros ;

32. Considérant, en second lieu, qu'en vertu du 1 de l'article 39 du code général des impôts, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment les impôts à la charge de l'entreprise, mis en recouvrement au cours de l'exercice ; que, lorsqu'une entreprise industrielle ou commerciale réalise, dans un Etat étranger, des opérations dont le résultat entre dans ses bénéfices imposables en France, ce résultat doit, conformément à ces dispositions, être déterminé sous déduction de toutes charges ayant grevé la réalisation de ces opérations et que doivent, en principe, être regardées comme telles les impositions que l'entreprise a supportées, du fait de ces opérations, dans cet Etat ;

33. Considérant que, si la société Inforad Limited soutient que l'administration aurait omis, dans sa reconstitution de bénéfices, d'admettre en déduction, en tant que charges, les sommes respectives de 19 345 euros, au titre de l'exercice clos en 2004, et de 75 279 euros, au titre de l'exercice clos en 2005, correspondant aux cotisations d'impôt sur les bénéfices dues par elle en Irlande au titre desdits exercices, les pièces produites sur ce point par l'intéressée, au demeurant non traduites, ne permettent pas d'établir, ainsi qu'il lui incombe, que chacune de ces cotisations aurait été mise en recouvrement au cours de l'exercice correspondant ; qu'à défaut, la société Inforad Limited ne justifie pas, ainsi qu'il lui incombe, de la déductibilité, au titre des exercices en litige, des charges d'impôt étranger ainsi alléguées ;

34. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Inforad Limited est seulement fondée à obtenir la réduction de ses résultats imposables, au titre de l'exercice clos en 2005, d'une somme de 200 353 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

35. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Inforad Limited d'une somme de 2 000 euros en remboursement des frais que celle-ci a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement rendu par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 5 juin 2013 sous le n° 1006602 est annulé, en tant qu'il statue sur les conclusions de la société

Inforad Limited tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2004 et 2005.

Article 2 : Les résultats imposables de la société Inforad Limited, au titre de l'exercice clos en 2005, sont réduits de 200 353 euros.

Article 3 : Il est accordé à la société Inforad Limited la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, au titre de l'exercice clos en 2005, pour la part formant surtaxe à raison de la réduction de base prononcée à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : L'Etat versera à la société Inforad Limited une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du recours présenté par le MINISTRE DE L'ACTION

ET DES COMPTES PUBLICS, le surplus de la demande présentée par la société Inforad Limited devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus des conclusions présentées par l'intéressée devant la Cour de céans sont rejetés.

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N° 13VE02636


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