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01/06/2017 | FRANCE | N°15VE00510

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 01 juin 2017, 15VE00510


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- à titre principal, d'annuler la décision par laquelle le maire de Nanterre a refusé de faire droit à sa demande de requalification de son statut en celui de fonctionnaire territorial à compter du 11 avril 1972 et d'enjoindre à ce maire de lui communiquer la totalité des taux horaires appliqués et des rémunérations versées au personnel des centres de santé de la commune, en précisant leur qualité, catégorie et ancienneté,

de 1972 à septembre 2011 ;

- à titre subsidiaire, d'annuler la décision par laquel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- à titre principal, d'annuler la décision par laquelle le maire de Nanterre a refusé de faire droit à sa demande de requalification de son statut en celui de fonctionnaire territorial à compter du 11 avril 1972 et d'enjoindre à ce maire de lui communiquer la totalité des taux horaires appliqués et des rémunérations versées au personnel des centres de santé de la commune, en précisant leur qualité, catégorie et ancienneté, de 1972 à septembre 2011 ;

- à titre subsidiaire, d'annuler la décision par laquelle le maire de Nanterre a refusé de faire droit à sa demande de requalification de son statut en celui d'agent contractuel à compter du 11 avril 1972 ;

- de condamner la commune de Nanterre à lui verser la somme de 747 698 euros en réparation des préjudices subis ;

- d'enjoindre au maire de Nanterre de lui verser les sommes réclamées, de lui remettre l'ensemble des bulletins de paie conformes à l'arrêt à intervenir et de régulariser ses cotisations de retraite auprès de la CNAV et de l'IRCANTEC dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1207620 en date du 18 décembre 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné la commune de Nanterre à verser à Mme C...une indemnité de 5 000 euros au titre du préjudice moral subi par l'intéressée du fait de la précarité de sa situation, et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le

13 février et le 24 décembre 2015, MmeC..., représentée par Me Bonnet-Roumens, avocat, demande à la Cour :

1° de réformer ce jugement ;

2° à titre principal, de prononcer l'injonction de communication des dossiers mentionnés ci-dessus ;

3° à titre subsidiaire, d'annuler la décision du maire de Nanterre rejetant sa demande de requalification en fonctionnaire territorial ou en agent contractuel à compter du 11 avril 1972, et de versement des sommes sollicitées ;

4° de condamner la commune de Nanterre à lui verser l'intégralité des traitements jusqu'au 31 août 2011 sur les cinq dernières années depuis la première demande du

12 février 2000 (99 309 euros), en tenant compte de l'érosion monétaire sur ces rappels

(6 274 euros), une indemnité pour perte de traitement par suite de la non-application du taux horaire depuis 1972 (227 115 euros), une indemnité pour non-application du taux horaire à ses droits de retraite (350 000 euros) et de porter son indemnité pour préjudice moral à

65 000 euros ;

5° de mettre à la charge de la commune de Nanterre une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme C...soutient que :

- la requalification de son statut aurait dû prendre effet dès son recrutement ;

- elle a été dissuadée par son supérieur hiérarchique de se présenter au concours réservé de rééducateur territorial (session mai-juin 1997) ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé irrecevables ses conclusions tendant à l'injonction de communication de documents relatifs à la rémunération des personnels des centres de santé de la commune depuis 1972 ;

- la décision du maire de la commune de revaloriser sa rémunération avec effet au

1er mars 2008, est intervenue dans des conditions irrégulières ;

- son niveau de rémunération est constitutif d'une rupture d'égalité ;

- l'illégalité de cette décision est de nature à entraîner la responsabilité de la commune ;

- par application du taux horaire des kinésithérapeutes, son préjudice financier pour la période allant du 12 février 2008 au 31 août 2011 s'élève à la somme de 99 309 euros, augmentée de la somme de 6 274 euros au titre de l'érosion monétaire ;

- par application du même taux, il s'élève à la somme de 227 115 euros, pour la période antérieure ;

- le préjudice résultant de l'insuffisance de cotisations de retraite doit être évalué à la somme de 350 000 euros ;

- l'indemnité pour préjudice moral doit être portée à 65 000 euros.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonnet-Roumens, pour les ayants-droit de

MmeC....

1. Considérant que MmeC..., recrutée par la commune de Nanterre à compter du 11 avril 1972, pour exercer les fonctions d'orthophoniste au centre municipal de santé Maurice Thorez, a relevé appel du jugement n° 1207620 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise lui a accordé une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral découlant de son maintien en situation précaire, mais a rejeté ses autres conclusions, tendant, d'une part, à l'annulation du refus du maire de cette commune de lui accorder, avec effet à la date de son recrutement, la qualité de fonctionnaire territorial ou, à défaut, d'agent contractuel, d'autre part, au versement par la commune d'un rappel de traitement, et d'une indemnité pour préjudice moral, pour une somme totale de 742 698 euros ; que la requérante étant décédée le 21 juin 2016, après l'introduction de l'appel, ses héritiers, Mme C..., épouseB..., et MM.C..., reprennent l'instance ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

2. Considérant que si Mme C... a déploré, dans son recours préalable du

13 mai 2012, son maintien pendant de longues années en situation de vacataire, il ne ressort pas des termes de ce recours qu'elle ait demandé sa requalification rétroactive en qualité de fonctionnaire territorial ou, à défaut, d'agent contractuel ; que, dans ces conditions, en rejetant les demandes indemnitaires présentées dans ce recours, le maire de Nanterre n'a pu prendre une décision portant refus de requalification des liens qui unissaient l'agent à la commune ; que, par suite, et comme l'ont estimé les premiers juges après avoir communiqué un moyen d'ordre public à ce sujet, les conclusions en annulation contre les prétendus refus de requalification de Mme C... ne peuvent être que rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions en indemnisation :

En ce qui concerne le principe de la responsabilité :

3. Considérant, en premier lieu, qu'un agent vacataire ou non-titulaire ne tient, de ce seul fait, aucun droit à titularisation ; qu'en l'espèce, l'acquisition par Mme C... de la qualité de fonctionnaire était subordonnée à la réussite à un concours spécial ouvert lors de la création du cadre d'emploi de rééducateur territorial ; qu'il ressort des pièces versées au dossier et, notamment, de la lettre du 30 avril 1997, que la commune de Nanterre avait avisé l'intéressée des possibilités d'accès à la fonction publique territoriale qui lui étaient ouvertes par un tel concours ; que, selon ses propres déclarations, Mme C...a renoncé à s'y présenter en mai et juin 1997 ; que si la requérante soutient que le médecin-chef du centre Maurice Thorez lui aurait déconseillé de passer le concours pour éviter une perte de rémunération et une insuffisante reprise de son ancienneté en cas de réussite, elle ne l'établit pas ; qu'au demeurant, la requérante qui recherche la faute de la commune sur le terrain de l'illégalité que cette dernière aurait commise en ne la titularisant pas, ne saurait utilement invoquer les conseils erronés que lui auraient donnés ses supérieurs hiérarchiques ; que, dans ces conditions, la commune de Nanterre n'a commis aucune illégalité de nature à engager sa responsabilité en ne procédant pas à la titularisation de la requérante ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que lorsque l'emploi exercé par un agent vacataire a été reconduit sans interruption et à plusieurs reprises, il doit être regardé comme satisfaisant un besoin permanent ; que, dans ces conditions, l'agent est fondé à obtenir un contrat de la collectivité territoriale qui l'emploie ; que, pour cette raison, les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la commune était engagée du seul fait de l'absence de contrat établi en application des dispositions de l'article 3 du décret du 15 février 1988, avant la signature d'un premier contrat, le 15 avril 1997 ; que, toutefois, comme le soutient MmeC..., sa contractualisation devait intervenir avant même le 28 août 1992, date de l'adoption du statut particulier des rééducateurs territoriaux, soit dès son recrutement ; que, dans cette mesure, la requérante est fondée à soutenir qu'en tant qu'elle ne lui a proposé un contrat qu'à effet du

15 avril 1997, la commune de Nanterre a commis une illégalité fautive ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe général que les agents non titulaires posséderaient un droit à une progression indiciaire de leur rémunération ; que, par suite, si Mme C...soutient que son taux horaire n'a évolué que selon le point de la fonction publique, elle n'est pas fondée, en sa qualité d'agent non titulaire, à soutenir qu'elle devait également bénéficier d'une progression indiciaire attachée au déroulement d'une carrière ; que, d'ailleurs, il résulte de l'instruction que la commune de Nanterre a également accordé à l'orthophoniste des revalorisations de son taux horaire par délibérations du conseil municipal du 13 novembre 1974, du 3 février 1975 et du 24 octobre 1995 ; que, de plus, la requérante ne saurait utilement invoquer une rupture d'égalité dans la fixation de sa rémunération en se prévalant du niveau de rémunération de ses collègues non-titulaires du centre Maurice Thorez, kinésithérapeutes et psychologues, dès lors qu'elle exerçait la fonction d'orthophoniste ; que, d'autre part, s'il n'est pas établi que la revalorisation du taux horaire de MmeC..., le 1er mars 2008, a été décidée après délibération du conseil municipal, cette circonstance, à supposer qu'elle révèle un vice de procédure, ne constitue qu'une illégalité formelle dont le lien direct et certain avec le préjudice invoqué n'est pas établi ; qu'enfin, la commune de Nanterre soutient sans être sérieusement contredite qu'à la suite de l'augmentation de 17,64 euros à 20 euros de son taux horaire en 2008, MmeC..., quoique exerçant à temps non complet, percevait une rémunération supérieure à celle d'une rééducateur territorial à temps complet ; que, par suite, la commune de Nanterre n'a commis aucune illégalité dans la fixation de la rémunération versée à Mme C...ni, par suite, commis de faute de nature à engager sa responsabilité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que Mme C...n'établit pas davantage que sa pension de retraite aurait été fixée à un niveau insuffisant ;

En ce qui concerne les préjudices :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que la commune de Nanterre n'a commis aucune illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité et à causer les préjudices financiers que Mme C...estime avoir subis à ce titre ;

8. Considérant, en revanche, qu'en n'accordant pas à Mme C...le régime contractuel dès son recrutement, alors que son emploi répondait à un besoin permanent du centre de santé Maurice Thorez, la commune de Nanterre a fait preuve pendant 24 ans d'une carence fautive de nature à engager sa responsabilité ; qu'en allouant à ce titre la somme de 5 000 euros, les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante appréciation du préjudice moral subi de ce fait par l'intéressée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, de rejeter les conclusions tendant à ce que la Cour de céans ordonne à la commune de Nanterre la communication des taux horaires appliqués et des rémunérations versées à l'ensemble des personnels des centres de santé de la commune ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

N° 15VE00510

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00510
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : BONNET-ROUMENS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-06-01;15ve00510 ?
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