Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme (SA) IPSOS OBSERVER a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008 et l'abandon de la réintégration au résultat fiscal d'ensemble du groupe intégré IPSOS des remises consenties par elle pour un montant total de 996 000 euros au titre de l'exercice 2008.
Par un jugement n° 1400328 du 28 décembre 2015 le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 février et 26 juillet 2016,
la SA IPSOS OBSERVER, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge demandée ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SA IPSOS OBSERVER soutient que :
- S'agissant de cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, les sommes qualifiées d'abandon de créance par l'administration constituent des remises commerciales à des sociétés soeurs ; les transactions à prix coûtant sont autorisées entre sociétés du même groupe en application des dispositions de l'article 46 quater O ZG de l'annexe III du code général des impôts ; la doctrine administrative exprimée au paragraphe 70 du bulletin officiel des finances publiques-Impôts référencé BOI-IS-GPE-20-20-40-10-20120912 indique que " aucune subvention indirecte n'a donc à être constatée lorsque le (... ) prix d'une prestation de services est compris entre le prix de revient (...) de ces services et leur valeur réelle " ;
- S'agissant de cotisations supplémentaires à la contribution minimale de taxe professionnelle, les avoirs en cause constituent des remises commerciales qui doivent être déduites des produits de l'exercice 2008 en application de l'article 1647 B sexies II 2 du code général des impôts ; l'article 38 quater de l'annexe III du code général des impôts n'est pas applicable ; les montants en cause ont été enregistrés en diminution d'un compte de produit.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rollet-Perraud,
- et les conclusions de Mme Belle, rapporteur public.
1. Considérant que la société anonyme (SA) IPSOS OBSERVER membre du groupe fiscalement intégré Ipsos, dont la société mère est la SA Ipsos, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 ; qu'à l'issue de ce contrôle, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les société ont été mises à la charge de la SA Ipsos pour un montant de 66 070 euros en droits et pénalités, tandis que la SA IPSOS OBSERVER était assujettie à un supplément de cotisation minimale de taxe professionnelle d'un montant de 15 391 euros en droits et pénalités, à raison de la remise en cause de la déduction d'une somme de 996 000 euros correspondant à cinq avoirs consentis par la SA IPSOS OBSERVER au titre de l'année 2008 à cinq sociétés soeurs du groupe dont l'administration a estimé qu'ils étaient dépourvus de contrepartie ; que la
SA IPSOS OBSERVER a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008 ainsi que l'abandon de la réintégration au résultat fiscal d'ensemble du groupe intégré IPSOS de la somme susmentionnée de 996 000 euros au titre du même exercice ; qu'elle relève appel du jugement du
28 décembre 2015 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, que la SA IPSOS OBSERVER soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé au regard du moyen tiré de la méconnaissance de l'article
46 quater-0 ZG de l'annexe III au code général des impôts ; que l'argumentation ainsi soulevée par la société requérante constitue toutefois non pas un moyen mais un simple argument à l'appui du moyen tiré de ce que les avoirs en cause constituaient des remises commerciales et non des abandons de créance, auquel le tribunal n'était pas tenu de répondre ;
3. Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que la comptabilité des avoirs au compte 709 a été validée par les commissaires aux comptes étant inopérant, la société requérante ne saurait pas davantage reprocher au jugement d'être insuffisamment motivé sur ce point ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
S'agissant de l'application de la loi fiscale :
4. Considérant, d'une part, qu'il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu du I de l'article 209 du même code, que le bénéfice net est établi sous déduction des charges supportées dans l'intérêt de l'entreprise ; que ne peuvent être déduites du bénéfice net passible de l'impôt sur les sociétés les charges qui sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que c'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise qu'il doit être apprécié si des charges assumées par une société en vue d'assurer certains avantages à d'autres sociétés correspondent à des actes de gestion commerciale anormale ; que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 223 B du code général des impôts dans sa version alors applicable : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 217 bis. (...) L'abandon de créance ou la subvention directe ou indirecte consenti entre des sociétés du groupe n'est pas pris en compte pour la détermination du résultat d'ensemble. (...) La société mère est tenue de joindre à la déclaration du résultat d'ensemble de chaque exercice un état des abandons de créances ou subventions consentis à compter du 1er janvier 1992. Un décret fixe le contenu de ces obligations déclaratives.(...) " ; que l'option pour le régime dit de " l'intégration fiscale " ne dispense pas chacune des sociétés du groupe fiscal intégré de déterminer son résultat dans les conditions de droit commun, ainsi que le prévoit le premier alinéa de l'article 223 B du code général des impôts précité, sous la seule réserve des dérogations expressément autorisées par les dispositions propres à ce régime d'exception ; qu'aucune de ces dispositions n'autorise une société membre du groupe à déclarer, selon des règles différentes des règles de droit commun, un abandon de créance ou une subvention qu'elle a consenti ou dont elle a bénéficié ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du courriel daté du 9 avril 2009 émanant de M.B..., accouting manager de la société IPSOS France, que la SA IPSOS OBSERVER a réalisé un résultat supérieur de 996 000 euros par rapport à son budget et que les cinq avoirs qu'elle a accordés à ses sociétés soeurs françaises résultent de sa décision de répartir cet excédent entre ces principaux clients internes ; que la répartition de l'excédent ne s'est pas faite en fonction du chiffre d'affaire réalisé par la SA IPSOS OBSERVER avec chacune des sociétés concernées, mais en fonction, pour trois d'entre elles, dont le résultat était bénéficiaire, de leur chiffre d'affaire respectif par rapport au chiffre d'affaires du groupe et pour les deux sociétés restantes dont les résultats étaient déficitaires, d'un montant forfaitaire déterminé à partir du montant résiduel de l'enveloppe constituée par l'excèdent réalisé par la société requérante ; que si la société requérante soutient que les sociétés bénéficiaires des avoirs sont ses clients les plus importants et que les remises avaient pour objet de les fidéliser afin d'éviter une perte de parts de marché au profit d'une autre société du groupe dénommée Ipsos Interactive Services et de développer des débouchés commerciaux, il résulte des chiffres qu'elle produit qu'elle n'a bénéficié en retour d'aucune contrepartie au titre de son exercice clos en 2008 ; que, nonobstant la circonstance que les avoirs concernés aient été comptabilisés au compte 709 " Rabais, remises et ristournes accordés par l'entreprise " et non un compte exceptionnel, l'administration doit ainsi être regardée comme apportant la preuve que ces avoirs qui n'ont aucun caractère commercial, n'ont pas été accordés dans l'intérêt de la SA IPSOS OBSERVER ;
7. Considérant en second lieu, que l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au code général des impôts prévoit que : " La subvention indirecte mentionnée au sixième alinéa de l'article 223 B et au premier alinéa de l'article 223 R du code général des impôts s'entend des renonciations à recettes qui proviennent des prêts ou d'avances sans intérêt ou à un taux d'intérêt inférieur au taux du marché. Elle s'entend également de la livraison de biens ou de la prestation de services sans contrepartie ou pour un prix inférieur à leur prix de revient ou, s'agissant de biens composant l'actif immobilisé, pour un prix inférieur à leur valeur réelle. " ; que les avoirs concernés ne constituent pas des subventions indirectes au sens de ces dispositions dont la requérante ne peut ainsi utilement se prévaloir ;
S'agissant du bénéfice de la doctrine administrative :
8. Considérant que la SA IPSOS OBSERVER n'est pas fondée à se prévaloir de la doctrine exprimée dans le bulletin officiel des finances publiques-impôts référencé
BOI-IS-GPE-20-20-40-10 IS qui est postérieure à l'année d'imposition en litige et qui ne donne d'ailleurs pas une interprétation différente de la loi fiscale différente de celle qui vient d'être rappelée ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration a réintégré les avoirs en cause au résultat imposable de la SA IPSOS OBSERVER ;
En ce qui concerne la cotisation minimale de taxe professionnelle :
10. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 E du code général des impôts : " I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition. II.-Les entreprises mentionnées au I sont soumises à une cotisation minimale de taxe professionnelle. Cette cotisation est égale à la différence entre l'imposition minimale résultant du I et la cotisation de taxe professionnelle déterminée selon les règles définies au III. (...) III. Pour l'application du II, la cotisation de taxe professionnelle est déterminée conformément aux dispositions du I bis de l'article 1647 B sexies. Elle est majorée du montant de cotisation prévu à l'article 1647 D. Elle est également augmentée du montant de cotisation correspondant aux exonérations temporaires appliquées à l'entreprise ainsi que de celui correspondant aux abattements et exonérations permanents accordés à l'entreprise sur délibération des collectivités locales.(...) " ; qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts: " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II.(...) II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges mentionnées aux troisième et quatrième alinéas ainsi que les transferts de charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprise ; les stocks à la fin de l'exercice ; et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice(...)" ; qu'en vertu du principe rappelé par l'article 38 quater de l'annexe III du code général des impôts, les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ;
11. Considérant qu'il résulte du point 4 que les avoirs en cause ne constituaient pas des rabais, remises et ristournes et ne devaient donc pas être comptabilisés au compte 709 ; qu'en outre, les sommes litigieuses qui constituent des abandons de créances anormaux n'entrent pas dans la liste fixée par l'article 1647 B sexies du code général des impôts ; que, par suite l'administration était fondée à exclure du calcul de la valeur ajoutée de l'entreprise ces sommes qui ne peuvent être regardées comme déductibles de la production ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions tendant à l'abandon de la réintégration au résultat fiscal d'ensemble du groupe intégré Ipsos de la somme susmentionnée de 996 000 euros, la SA IPSOS OBSERVER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA IPSOS OBSERVER est rejetée.
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N° 16VE00565