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25/04/2017 | FRANCE | N°16VE00356

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 25 avril 2017, 16VE00356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B..., par deux instances, a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement nos 1404037 et 1404039 du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ces demandes après les avoir jointes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires e

n réplique, enregistrés le 5 février 2016, le 1er septembre 2016 et le 14 novembre 2016, M. B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B..., par deux instances, a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement nos 1404037 et 1404039 du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ces demandes après les avoir jointes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés le 5 février 2016, le 1er septembre 2016 et le 14 novembre 2016, M. B..., représenté par Me Michaud, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

- les propositions de rectification, qui fondent les revenus distribués rappelés, d'une part, au titre des loyers et charges de l'appartement de l'avenue Foch à Paris, déduits à tort par la société AECP, selon l'administration qui a regardé cet appartement comme étant à usage privé, et, d'autre part, au titre de frais de mission et de réception de l'année 2008 regardés comme non exposés pour les besoins de l'exploitation, sur les 1° et 2° du 1 de l'article 109 et sur le c) de l'article 111 du code général des impôts, sont entachées d'insuffisance de motivation au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elles ne précisent pas sur lequel de ces textes se fonde chacun de ces rappels ; les indications données en réponse aux observations du contribuable ne peuvent pallier une insuffisance de motivation d'une proposition de rectification ;

- en sa qualité de résident fiscal luxembourgeois, qui est établie depuis l'année 2004, il ne pouvait être assujetti à l'impôt sur le revenu en France ; à tout le moins, il existe une double imposition à hauteur des revenus déclarés au Luxembourg en 2008, s'agissant des revenus de capitaux mobiliers provenant de la société luxembourgeoise AECP, les sommes en cause ayant également été retenues sur son impôt sur le revenu français à titre de revenus distribués, car figurant sur les comptes de liaison ouverts à son nom dans la comptabilité de la succursale française de la société luxembourgeoise ;

- c'est à tort que l'appartement de l'avenue Foch a été regardé comme ayant été à usage privé, et que les loyers afférents versés par la société AECP ont été qualifiés de revenus distribués, dès lors qu'il est démontré qu'il était utilisé pour son activité professionnelle ; il y a lieu, à tout le moins, de considérer qu'il était utilisé à hauteur de 50 % pour son activité professionnelle, et de prononcer une décharge à due concurrence, le rappel maintenu à sa charge devant en toute hypothèse être requalifié en avantage en nature, eu égard à l'option donnée au contribuable par l'article 82 du code général des impôts ;

- il est démontré que les divers frais de mission, réception et autres, payés en 2008 par la société AECP, ont été engagés, pour lui-même ou sa compagne, administratrice de cette société, dans l'intérêt de l'exploitation ;

- il est démontré que les décaissements opérés à son profit par la succursale française de la société AECP, qui ont été régulièrement comptabilisés dans un compte de liaison dès lors que cette succursale, qui n'a ni personnalité juridique ni associés, ne peut avoir de compte courant d'associé, et qui ont été régulièrement déduits en charge par la société AECP, pour leur seule partie déductible, ne peuvent constituer des revenus distribués par la succursale ;

- dès lors qu'il était affilié à la sécurité sociale au Luxembourg au cours des deux années concernées, les contributions sociales contestées ne pouvaient être mises à sa charge en France (CJUE, 24 février 2015, C-623/13) ;

- l'intention d'éluder l'impôt n'étant pas établie, la mise en oeuvre de la majoration de 40 % prévue par le a) de l'article 1729 du code général des impôts est infondée.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune du 1er avril 1958 modifiée ;

- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 26 février 2015, Ministre de l'économie et des finances contre de Ruyter (C-623/13) ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bergeret ;

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2007 et 2008 de la succursale française de la société luxembourgeoise Agence européenne de communication publique (AECP), exerçant une activité de régie publicitaire pour le compte des collectivités territoriales, l'administration a procédé, sur ces deux années, à des rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à l'encontre de M.B..., associé majoritaire, gérant et attaché commercial de cette société ; que par jugement du 5 octobre 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté, après les avoir jointes, les deux demandes de M. B... tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ; qu'au regard de l'ensemble des termes de sa requête et de ses mémoires en réplique susvisés, M. B...doit être regardé comme demandant à la Cour l'annulation de ce jugement et la décharge de l'ensemble des rectifications d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; que si les deux propositions de rectification adressées à M. B...le 20 décembre 2010 et le 16 mars 2011 indiquaient que certains des revenus distribués que l'administration regardait comme imposables à son impôt sur le revenu des années 2007 ou 2008, étaient ainsi imposés sur le fondement des 1° et 2° du 1 de l'article 109 et du c de l'article 111 du code général des impôts, sans distinguer lequel ou lesquels de ces fondements pouvait être prioritairement retenu comme fondement de chacun des rappels concernés, cette circonstance, qui n'empêchait nullement le contribuable de discuter le bien-fondé de chacun de ces fondements légaux, n'est pas de nature à entacher ces propositions de rectification d'insuffisance de motivation, pour l'application des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu :

3. Considérant, en premier lieu, que si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu'il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale ;

S'agissant de l'application de la loi :

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes du 1. de l'article 4 B du même code : " Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques " ; que, pour l'application des dispositions du a du 1. de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ; que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ; que cependant, dès lors que le centre des intérêts économiques d'un contribuable se trouve en France, où qu'il y exerce à titre principal une activité professionnelle, son domicile fiscal, au sens de l'article 4 A du code général des impôts, se trouve en France ;

5. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le centre des intérêts économiques de M.B..., qui indique que l'essentiel de ses revenus provenait de ses activités de prospection exercées auprès des collectivités locales françaises pour le compte de la société AECP, se trouvait en France durant les années 2008 et 2009, quand bien même il aurait été associé d'autres sociétés luxembourgeoises ; qu'au surplus, il exerçait de ce fait en France une activité professionnelle non accessoire ; qu'ainsi, au sens et pour la seule application des dispositions combinées de l'article 4 A et de l'article 4 B du code général des impôts, l'administration doit être regardée comme établissant que son domicile fiscal se trouvait en France ; qu'il était donc, au regard du droit national, redevable de l'impôt sur le revenu français, grevant les revenus distribués objet du présent litige ;

S'agissant de l'application de la convention fiscale franco-luxembourgeoise :

7. Considérant qu'aux termes du 4. de l'article 2 de la convention fiscale susvisée conclue entre la France et le Luxembourg, invoqué par M.B... : " Le domicile fiscal des personnes physiques est au lieu de la résidence normale entendue dans le sens de foyer permanent d'habitation, ou, à défaut, au lieu du séjour principal " ; que l'article 18 de cette même convention prescrit que " Les revenus non mentionnés aux articles précédents ne sont imposables que dans l'Etat du domicile fiscal du bénéficiaire " ; qu'il résulte de l'instruction que M. B...disposait au cours des années litigieuses d'un foyer permanent d'habitation à Paris, dans un appartement loué par sa compagne et associée, MmeA..., dont la société AECP payait le loyer et les charges, et d'un autre foyer permanent d'habitation au Luxembourg, depuis 2004, au domicile de MmeA... ; que, dans ces conditions, il y a lieu de déterminer le lieu de séjour principal de l'intéressé au cours des deux années 2007 et 2008 ; qu'au vu de l'ensemble des pièces du dossier, et notamment de factures téléphoniques faisant apparaître une présence régulière dans l'appartement parisien, et en l'absence de production, par le contribuable qui est le seul susceptible de les détenir, de pièces de nature à établir qu'il avait effectivement résidé davantage au Luxembourg qu'en France au cours des deux années concernées, alors même qu'il indique que l'essentiel de son activité économique s'exerçait en France durant la semaine, son lieu de séjour principal doit être regardé comme ayant été en France, en l'absence d'éléments probants en sens contraire dont ne saurait notamment tenir lieu l'attestation délivrée par le bourgmestre de la ville de Luxembourg et la détention d'un permis de conduire luxembourgeois ; que, dès lors, le domicile fiscal de l'intéressé devant être regardé comme situé en France pour l'application de la convention fiscale susvisée, M. B...n'est pas fondé à soutenir que les revenus distribués objet du présent litige, qui ne sont pas mentionnés par d'autres articles que l'article 18 de la convention, ne pouvaient être imposés qu'au Luxembourg et auraient à tort été imposés en France à son impôt sur le revenu en application de cette convention bilatérale ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...soutient que les impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu porteraient, pour partie, sur des revenus d'ores et déjà déclarés et imposés au Luxembourg en 2008, s'agissant des revenus de capitaux mobiliers provenant de la société luxembourgeoise AECP, à concurrence de sommes figurant sur le compte de liaison ouvert dans la comptabilité de la succursale française de cette société, en tant que charges transférées à la société luxembourgeoise ; qu'il ne produit cependant au dossier aucun pièce probante de nature à établir l'existence, même partielle, d'une telle double imposition, en se bornant pour l'essentiel à verser au dossier, s'agissant de son impôt sur le revenu luxembourgeois, des pièces faisant état d'une modification, en juin 2011, de ses bases d'imposition de l'année 2008 à cet impôt, sans que ni la cause de cette modification ni ses incidences exactes soient précisées ;

9. Considérant, en troisième lieu, que M. B...soutient que les charges relatives à l'appartement parisien loué par sa compagne ont été déduites à bon droit par la société et ne pouvaient, par suite, donner lieu à la constatation de revenus distribués, à hauteur à tout le moins de 50 % des sommes concernées, dès lors que cet appartement avait été utilisé pour les besoins de son activité professionnelle, notamment pour de nombreux rendez-vous professionnels ; que, toutefois, à l'issue de la procédure d'imposition, près de la moitié des sommes en cause n'ont pas été retenues dans les bases des revenus distribués ; que l'appartement dont il s'agit, d'une superficie de l'ordre de 160 m², situé avenue Foch, était loué, au nom de la compagne de M. B..., en vertu d'un bail le réservant exclusivement à un usage d'habitation ; que les attestations versées au dossier par le contribuable, non corroborées par des pièces probantes, telles, par exemple, que des comptes-rendus de réunions, sont insuffisantes pour établir une utilisation professionnelle, même partielle, au cours des deux années concernées, alors qu'il est constant que la société disposait, par ailleurs, de locaux professionnels, constitués d'un entrepôt et de bureaux, à Maurepas ; que dans ces conditions, le moyen ci-dessus analysé doit être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que si M. B...soutient que, pour leur partie restée imposée à l'issue de la procédure de rectification, les revenus distribués correspondant aux sommes prises en charge par la succursale française de la société luxembourgeoise AECP pour les loyers de l'appartement parisien loué par Mme A...doivent être requalifiés en avantage en nature, il n'établit pas que ces sommes avaient été dûment inscrites, conformément à leur nature et avec l'indication de leur bénéficiaire, dans la comptabilité propre de la succursale conformément aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts ; que dans ces conditions, le moyen analysé ci-dessus doit être écarté, l'imposition de ces sommes étant légalement fondée, en tant qu'avantage occulte, sur les dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que l'administration a rejeté la comptabilisation en charges et regardé comme revenus distribués un certain nombre de dépenses, payées en 2008 à hauteur de 13 854 euros au moyen de la carte de crédit de la société AECP dont le gérant avait l'usage exclusif, à titre de " frais de mission et réception ", s'agissant de dépenses regardées comme non professionnelles et consistant en des frais de voyages familiaux ou des frais de restaurant en période estivale, et divers achats essentiellement alimentaires ; que M.B..., à cet égard, fait valoir qu'il était en rapport professionnel avec plusieurs communes situées dans le sud de la France, et que ces dépenses auraient été exposés dans ce cadre ; que, cependant, si les quelques pièces qu'il verse au dossier à cette fin établissent qu'il a effectivement été, en 2007 ou en 2010, en relation d'affaires avec trois communes du sud de la France, ces pièces, eu égard à la période à laquelle ont été exposés les dépenses litigieuses et à la nature de celles-ci, restent insuffisantes pour établir qu'elles avaient été exposées dans l'intérêt de l'entreprise et que, par suite, l'administration aurait constaté à tort, à due concurrence, des revenus distribués imposables, en tant qu'avantage occulte, à l'impôt sur le revenu du foyer fiscal de M.B... ;

12. Considérant, en sixième lieu, que M. B...soutient que dès lors que diverses sommes dont il a bénéficié en 2007 et 2008, provenant de la succursale française de la société AECP, par le moyen de virements, de retraits bancaires de sommes en liquide, ou de paiement pour son compte d'une pension alimentaire à son ex-épouse, avaient été comptabilisés dans le compte de liaison de cette succursale avec sa maison-mère luxembourgeoise, laquelle aurait elle-même comptabilisé ces sommes en charges déductibles, cette circonstance ne pouvait donner lieu à la constatation de revenus distribués par cette succursale, ainsi que l'administration l'a fait à hauteur de 45 763 euros sur l'année 2007 et 67 661 euros sur l'année 2008, sur le fondement, pour la première année, des dispositions du a) de l'article 111 du code général des impôts, et, sur la seconde année, de celles du 2° du 1 de l'article 109 de ce code ; que, cependant, d'une part, la circonstance que M. B...était associé de la société AECP et non de sa succursale, laquelle est dépourvue de personnalité morale, ne fait pas obstacle à la constatation d'une distribution opérée par cette dernière, qui est une entité fiscale distincte pour l'application du code général des impôts, et, d'autre part, les modalités de comptabilisation par la succursale, en liaison avec sa maison-mère, des sommes en cause sont sans incidence sur l'existence de distributions ; que ces éléments ne sauraient donc faire obstacle, contrairement à ce que soutient le requérant, à la taxation de ces revenus distribués à l'impôt sur le revenu de l'associé de la maison-mère, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ou sur celui du a) de l'article 111 de ce code ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à contester le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 ;

En ce qui concerne les contributions sociales :

S'agissant de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, du prélèvement social de 2 %, et de la contribution additionnelle de 0,3 % à ce prélèvement :

14. Considérant qu'aux termes de l'article 11 du règlement CE n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale : " 1. Les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu'à la législation d'un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément au présent titre. / 2. Pour l'application du présent titre, les personnes auxquelles est servie une prestation en espèces du fait ou à la suite de l'exercice de son activité salariée ou non salariée sont considérées comme exerçant cette activité (...) / 3. Sous réserve des articles 12 à 16 : a) la personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un État membre est soumise à la législation de cet État membre (...) / e) les personnes autres que celles visées aux points a) à d) sont soumises à la législation de l'État membre de résidence, sans préjudice d'autres dispositions du présent règlement qui leur garantissent des prestations en vertu de la législation d'un ou de plusieurs autres États membres (...) " ;

15. Considérant que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, dans sa décision susvisée du 26 février 2015, C-623/13, que les prélèvements fiscaux sur les revenus du patrimoine tels que la contribution sociale sur les revenus du patrimoine, la contribution pour le remboursement de la dette sociale assise sur ces mêmes revenus, le prélèvement social et la contribution additionnelle à ce prélèvement présentent un lien direct et pertinent avec certaines des branches de sécurité sociale énumérées à l'article 4 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971 et qu'ils entrent ainsi dans le champ de ce règlement ; que les dispositions de ce règlement ont été reprises dans le règlement CE n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale ; qu'il résulte ainsi de l'interprétation donnée par la Cour de justice de l'Union européenne que les prélèvements fiscaux précités, assis sur les revenus de capitaux mobiliers, entrent dans le champ du règlement du Conseil du 29 avril 2004 dès lors qu'ils participent au financement de régimes obligatoires français de sécurité sociale ; qu'il suit de là qu'ils sont soumis au principe d'unicité de législation posé par l'article 11 de ce même règlement ;

16. Considérant qu'il ressort de l'instruction que, au cours des années litigieuses, M. B..., qui disposait d'un foyer permanent d'habitation au Luxembourg, était affilié au régime de sécurité sociale de ce pays, au titre de son activité professionnelle de gérant de sociétés établies dans cet Etat ; que, dès lors, il est fondé à soutenir qu'en application du principe d'unicité de législation posé par l'article 11 du règlement précité, c'est à tort qu'il a été assujetti, sur les revenus que l'administration a regardé come lui ayant été distribués par la succursale française de la société AECP au cours des années 2007 et 2008, à la contribution sociale généralisée régie par les dispositions de l'article 1600-0 C du code général des impôts et des articles L. 136-1 et L. 136-6 du code de la sécurité sociale, à la contribution au remboursement de la dette sociale régie par l'article 1600-0 G du code général des impôts et par les articles L. 136-1 et L. 136-6 du code de la sécurité sociale, au prélèvement social de 2 % régi par le I de l'article 1600-0 F bis du code général des impôts et par les articles L. 245-14 à L. 245-16 du code de la sécurité sociale, et à la contribution additionnelle à ce prélèvement au taux de 0,3 %, édicté par l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, dès lors que ces contributions sociales présentent un lien direct et pertinent avec certaines des branches de sécurité sociale énumérées à l'article 4 du règlement du Conseil du 14 juin 1971 et qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. B...aurait, par ailleurs, été redevable en France de ces diverses contributions sociales ;

S'agissant de la contribution additionnelle de 1,1 % au prélèvement social :

17. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 : " I.- Le revenu de solidarité active est financé par le fonds national des solidarités actives (...) et les départements (...) III.- Les recettes du fonds national des solidarités actives sont, notamment, constituées par une contribution additionnelle au prélèvement social mentionnée à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale (...) Leur taux est fixé à 1,1 % (...) " ; qu'en vertu de l'article 28 de la loi précitée, le fonds national de solidarité est constitué à compter du 1er janvier 2009, et la contribution additionnelle s'applique aux revenus des années 2008 et suivantes ; que dès lors que la contribution qui a ainsi été réclamée à M. B...au titre de ses revenus de capitaux mobiliers rappelés sur la seule année 2008 est spécifiquement affectée au financement du revenu de solidarité active, et n'a aucun lien direct et pertinent avec certaines des branches de sécurité sociale énumérées à l'article 4 du règlement du Conseil du 14 juin 1971, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'en application du principe d'unicité de législation en matière de sécurité sociale posé par l'article 11 du règlement du Conseil du 14 juin 1971, tel qu'interprété par la jurisprudence précitée de la Cour de justice de l'Union européenne, cette contribution additionnelle lui aurait été réclamée à tort ;

Sur la majoration de 40 % pour manquement délibéré :

18. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

19. Considérant, d'une part, que la majoration de 40 % pour manquement délibéré, pour sa partie assise sur les cotisations supplémentaires de contributions sociales dont M.B..., ainsi qu'il a été dit ci-dessus, est fondé à demander à être déchargé, doit être déchargée par voie de conséquence, à due concurrence ;

20. Considérant, d'autre part, que, eu égard à la nature et à l'importance des avantages accordés par la succursale française de la société AECP non déclarés par M.B..., qui ne pouvait, par ailleurs, ignorer que les sommes directement prélevées par lui sur le compte de cette société constituaient une source de revenus, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'existence de manquements délibérés au sens du a. de l'article 1729 du code général des impôts ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé et répond à tous les moyens présentés par le requérant, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande, dans la mesure indiquée ci-dessus ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions par lesquelles M. B...demande l'application à son profit des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. B...est déchargé des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution pour le remboursement de la dette sociale, de prélèvement social de 2 %, et de contribution additionnelle de 0,3 % à ce prélèvement qui ont été mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil nos 1404037 et 1404039 du 5 octobre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

2

N° 16VE00356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00356
Date de la décision : 25/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SEP D'AVOCATS LAURANT ET MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-04-25;16ve00356 ?
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