La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2017 | FRANCE | N°15VE01465

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 14 mars 2017, 15VE01465


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sikia a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 11 juillet 2012 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France a ordonné le versement d'une somme totale de 7 512 euros au titre de la majoration de sa contribution au développement de la formation professionnelle continue, la restitution de la somme de

39 560 euros au titre du remboursement de sommes versées par l'organisme paritaire collecteur au cours des exercices 2008 à 2010 et correspondant à

des formations dont la réalisation n'est pas justifiée, ainsi que le versement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sikia a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 11 juillet 2012 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France a ordonné le versement d'une somme totale de 7 512 euros au titre de la majoration de sa contribution au développement de la formation professionnelle continue, la restitution de la somme de

39 560 euros au titre du remboursement de sommes versées par l'organisme paritaire collecteur au cours des exercices 2008 à 2010 et correspondant à des formations dont la réalisation n'est pas justifiée, ainsi que le versement au Trésor public de la somme totale de 39 560 euros au titre des pénalités pour manoeuvres frauduleuses.

Par un jugement n° 1207609 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 mai 2015 et le 17 octobre 2016,

la société Sikia, représentée par Me Caretto, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler la décision du préfet de la région Ile-de-France du 11 juillet 2012 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision a été prise à l'issue d'une procédure non contradictoire, l'inspecteur du travail n'ayant pas communiqué à la société la liste des pièces sur lesquelles il s'est fondé pour opérer son contrôle ;

- la décision est entachée d'erreur de fait, les actions de formation financées ayant été réellement exécutées ;

- les manoeuvres frauduleuses ne sont pas établies.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guibé,

- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,

- et les observations Me Caretto pour la société Sikia.

1. Considérant que la société Sikia a fait l'objet d'un contrôle administratif et financier sur les dépenses de formation exposées en 2008, 2009 et 2010 au titre de son obligation de participation au développement de la formation professionnelle continue ; que, par une décision du 11 juillet 2012, le préfet de la région Ile-de-France a ordonné le remboursement de la somme de 39 560 euros correspondant à des actions de formation financées par la FAFIEC, organisme paritaire collecteur agréé au motif que la réalité de ces formations n'était pas démontrée, et a mis à la charge de la société une somme de 25 200 euros pour avoir mis en oeuvre des manoeuvres frauduleuses, s'agissant des faits antérieurs au 26 novembre 2009, et une somme de 14 360 euros pour avoir établi ou utilisé des documents avec des mentions inexactes en vue d'obtenir indûment la prise en charge de ses formations, s'agissant des faits postérieurs à cette date ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 6362-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée " ; qu'aux termes de l'article R. 6362-3 du même code : " Les résultats des contrôles prévus aux articles L. 6361-1 à L. 6361-3 sont notifiés à l'intéressé avec l'indication du délai dont il dispose pour présenter des observations écrites et demander, le cas échéant, à être entendu. / Ce délai ne peut être inférieur à trente jours à compter de la date de la notification. " ; qu'aux termes de l'article R. 6362-4 du même code : " La décision du ministre chargé de la formation professionnelle ou du préfet de région ne peut être prise qu'au vu des observations écrites et après audition, le cas échéant, de l'intéressé, à moins qu'aucun document ni aucune demande d'audition n'aient été présentés avant l'expiration du délai prévu à l'article R. 6362-3. / La décision est motivée et notifiée à l'intéressé. " ; que le caractère contradictoire des contrôles menés conformément à ces dispositions impose à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de prendre connaissance du dossier le concernant ; que si l'administration entend se fonder sur des renseignements obtenus auprès de tiers, il lui incombe alors d'informer l'intéressé de l'origine et de la teneur de ces renseignements, avec une précision suffisante pour lui permettre, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander, le cas échéant, la communication des documents qui les contiennent ; qu'il revient au juge d'apprécier, au vu des échanges entre les parties et en ordonnant, s'il y a lieu, toute mesure d'instruction complémentaire, si le caractère contradictoire de la procédure a été respecté ;

3. Considérant que les résultats du contrôle ont été notifiés à la société Sikia par courrier du 14 décembre 2011, l'informant qu'elle disposait d'un délai de trente jours pour présenter ses observations écrites et, le cas échéant, une demande d'audition ; que ce rapport indique qu'une demande de renseignements a été effectuée auprès de la FAFIEC et analyse la nature et le contenu des pièces justificatives transmises par cet organisme ; qu'ainsi, la société a été mise en mesure de contester les constats effectués par les agents de contrôle et d'apporter la preuve de la réalité des formations dispensées ; que la société Sikia a présenté des observations écrites par lettre du 10 janvier 2012 ; qu'elle n'a pas présenté de demande d'audition ni réclamé la communication de documents obtenus par les agents de contrôle au cours de l'enquête et mentionnés dans leur rapport ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à soutenir que l'autorité administrative aurait méconnu le principe du contradictoire lors de l'enquête préalable à la décision contestée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 6361-1 du code du travail : " Le contrôle administratif et financier des dépenses et activités de formation porte sur l'ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l'exclusion des qualités pédagogiques, mis en oeuvre pour la formation professionnelle continue " ; que l'article

L. 6362-4 du même code prévoit que les employeurs justifient de la réalité des actions de formation qu'ils conduisent lorsqu'elles sont financées par les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue et qu'à défaut, ces actions sont réputées ne pas avoir été exécutées et donnent lieu à remboursement auprès de l'organisme ou de la collectivité qui les a financées ; que l'article R. 6332-25 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur, a prévu que le paiement des frais de formation pris en charge par les organismes collecteurs paritaires agréés est réalisé après exécution des prestations de formation et sur transmission de pièces justificatives, dont les attestations de présence des stagiaires ; que l'article R. 6332-26 a prévu que les employeurs ou les prestataires de formation adressent aux organismes collecteurs qui en font la demande une copie des feuilles d'émargement à partir desquelles sont établies les attestations de présence et que ces feuilles d'émargement font partie des documents que les organismes collecteurs sont tenus de produire aux agents chargés du contrôle des dépenses de formation ; que, par ailleurs, l'article L. 6325-2 du code du travail dispose : " Le contrat de professionnalisation associe des enseignements généraux, professionnels et technologiques dispensés dans des organismes publics ou privés de formation ou, lorsqu'elle dispose d'un service de formation, par l'entreprise, et l'acquisition d'un savoir-faire par l'exercice en entreprise d'une ou plusieurs activités professionnelles en relation avec les qualifications recherchées " ;

5. Considérant que la FAFIEC, organisme paritaire collecteur agréé, a financé au cours des années 2008, 2009 et 2010 les actions de formation entreprises au profit de six salariés de la société Sikia dans le cadre de contrats de professionnalisation ; que, pour justifier la réalité de ces actions, la société se borne à produire, outre les contrats de travail et curriculum vitae des salariés concernés, des plans de formation de caractère général, les factures adressées à la FAFIEC, des attestations établies pour les besoins de l'instance et des attestations de présence, cosignées par le gérant de la société et trois des salariés bénéficiaires des contrats de professionnalisation, attestant mensuellement du déroulement des formations et du nombre d'heures réalisées ; qu'elle ne produit pas les feuilles d'émargement des stagiaires, datées et signées par séance, dont l'établissement est prévu par l'article R. 6332-26 du code du travail ; qu'elle ne produit pas les documents précisant les objectifs, le programme et les modalités d'organisation, d'évaluation et de sanction des formations dispensées, qui devaient être annexés aux contrats de professionnalisation en vertu des dispositions de l'article D. 6325-11 du code du travail ; que si la société indique les noms des tuteurs des salariés concernés par les contrats de professionnalisation, ceux-ci sont également les personnes désignées en qualité de formateurs, et aucune pièce ne permet de justifier de l'effectivité de leur rôle ; que, par ailleurs, la société n'a communiqué aucun support pédagogique au cours du contrôle ; qu'enfin, les pièces produites, y compris pour la première fois en appel, ne permettent pas de vérifier que la société disposait des moyens financiers, techniques et pédagogiques pour mettre en oeuvre les formations alléguées ; qu'ainsi, les documents produits sont insuffisants, compte tenu de leur nature et de leur imprécision, pour établir la réalité des actions de formation litigieuses ; que, par suite, c'est à bon droit que le préfet de la région Ile-de-France a considéré que ces actions devaient être réputées ne pas avoir été exécutées et a ordonné le remboursement des sommes versées par la FAFIEC pour leur financement ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 6354-2 du code du travail, en vigueur jusqu'au 26 novembre 2009 : " En cas de manoeuvres frauduleuses relatives à l'exécution d'une prestation de formation, le ou les contractants sont assujettis à un versement d'égal montant de cette prestation au profit du Trésor. " ; qu'aux termes de l'article L. 6362-7-2 du code du travail, en vigueur à compter du 26 novembre 2009 : " Tout employeur ou prestataire de formation qui établit ou utilise intentionnellement des documents de nature à éluder l'une de ses obligations en matière de formation professionnelle ou à obtenir indûment le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle est tenu, par décision de l'autorité administrative, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit, de verser au Trésor public une somme égale aux montants imputés à tort sur l'obligation en matière de formation ou indûment reçus " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Sikia a produit à l'appui de ses demandes de prise en charge par la FAFIEC des attestations certifiant la présence d'un service interne à la formation ; que les contrôleurs ont cependant constaté l'absence de service de formation identifié dans la société et de moyens financiers, techniques et pédagogiques dédiés ; que le préfet de la région Ile-de-France a fait état du témoignage de salariés ayant déclaré avoir signé des contrats et d'autres justificatifs sans avoir suivi les actions d'enseignements généraux et technologiques qui doivent être dispensées dans le cadre de contrats de professionnalisation ; que la société Sikia n'a apporté au cours du contrôle et devant la Cour aucun élément permettant d'établir la réalité des actions de formation dont elle a demandé la prise en charge ; que la production réitérée de documents inexacts au cours de toute la période sur laquelle portait le contrôle des services de l'Etat permet de caractériser l'existence d'une pratique délibérée destinée à obtenir indûment le versement d'une aide par la FAFIEC ; que la société Sikia n'est, dès lors, pas fondée à contester les versements au Trésor public mis à sa charge en application des dispositions précédemment citées des articles L. 6354-2 et L. 6362-7-2 du code du travail ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Sikia n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Sikia est rejetée.

2

N° 15VE01465


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01465
Date de la décision : 14/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-09 Travail et emploi. Formation professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : Mme BORET
Rapporteur ?: Mme Céline GUIBÉ
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : CARETTO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-03-14;15ve01465 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award