Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du préfet de l'Essonne du 12 mai 2015 qui a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1504765 du 19 mai 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juin 2016, M.C..., représenté par Me Papi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêté ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai d'un mois sous la même astreinte ;
4° de mettre à la charge de l'État le versement au profit de Me Papi de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. C...soutient que :
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut de base légale, dès lors qu'en visant seulement le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté n'indique pas précisément la base légale de cette décision
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
..........................................................................................................
Par décision du 12 août 2016, le bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Versailles a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. C... ; le 21 novembre 2016, le président de la Cour de céans a rejeté le recours formé par celui-ci contre cette décision ; par une nouvelle décision du 1er décembre 2016, le président de la Cour de céans a cependant rapporté sa précédente décision et accordé à M. C...l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bergeret,
- et les observations de Me B...substituant Me Papi, pour M.C....
1. Considérant que M.C..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 15 février 1979, relève appel du jugement du 19 mai 2016 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le préfet de l'Essonne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;
3. Considérant qu'il appartient en principe à l'autorité administrative de délivrer, lorsqu'elle est saisie d'une demande en ce sens, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui remplit les conditions prévues par les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle ne peut opposer un refus à une telle demande que pour un motif d'ordre public suffisamment grave pour que ce refus ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du demandeur ;
4. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., entré en France en novembre 2001, a fait l'objet de condamnations du Tribunal correctionnel d'Evry le 9 février 2012 pour des faits, commis le 9 novembre 2011, de conduite de véhicule automobile sans permis et détention de faux documents, et le 7 mars 2013, pour des faits, commis le 25 janvier 2013, de conduite d'un véhicule sans permis et sans assurance, sous l'empire d'un état alcoolique ; qu'il a à nouveau été condamné, le 11 décembre 2013, pour des faits commis le 2 novembre 2013 de " violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours " et rébellion, à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis assortie d'une mise à l'épreuve pendant deux ans ; que ces éléments ont motivé l'avis défavorable au renouvellement du titre de séjour que l'intéressé détenait depuis l'année 2011, rendu le 29 janvier 2015 par la commission du titre de séjour consultée par le préfet de l'Essonne ;
5. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est pas contesté par le préfet de l'Essonne, que M. C...vit en France depuis la fin de l'année 2001 et non depuis l'année 2011 comme l'indique l'arrêté contesté, lequel mentionne également à tort que l'intéressé est entré en France à l'âge de trente-deux ans ; qu'il est le père de trois enfants nés en France respectivement en 2002, 2007 et 2012, et vit maritalement depuis l'année 2007 avec ces deux derniers et leur mère, qui est titulaire d'un titre de résident et a, par ailleurs, la charge d'un autre enfant né en 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il entretient des contacts avec son premier enfant, qui vit avec sa mère à Reims, et participe occasionnellement à son entretien au moyen d'envois d'argent ; qu'il ressort également des pièces du dossier que M. C... justifie d'une activité professionnelle régulière, sur les années 2014 et 2015, et qu'il a déféré aux modalités de la mise à l'épreuve mise à sa charge par la dernière condamnation pénale, ainsi qu'à l'injonction de soins que lui a imposée le tribunal correctionnel en raison de son addiction alcoolique, laquelle l'aurait conduit à son comportement délictuel ; qu'il indique sans être démenti, à cet égard, qu'il a combattu cette addiction avec succès, manifestant ainsi une volonté d'amendement et d'intégration, et qu'il n'a pas causé d'atteinte à l'ordre public depuis le mois de novembre 2013 ;
6. Considérant qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, le préfet de l'Essonne n'a pu estimer que le requérant ne justifiait pas en France d'une situation personnelle et familiale à laquelle son arrêté du 12 mai 2015 ne porterait pas une atteinte disproportionnée au regard de la gravité du trouble à l'ordre public dont M. C...s'est rendu responsable dans le passé ; qu'ainsi, cet arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de faire droit à la demande de renouvellement du titre de séjour de M. C..., dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
9. Considérant que M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Papi, avocat de M.C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Papi de la somme de 1 500 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1504765 du 19 mai 2016 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 12 mai 2015 du préfet de l'Essonne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à M. C...un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Papi une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Papi renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
N° 16VE01712 5