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26/01/2017 | FRANCE | N°16VE03063

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 26 janvier 2017, 16VE03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 février 2016 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et famil

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 février 2016 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 153 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1603072 du 16 septembre 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2016, M.D..., représentée par Me Langa, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pourvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 153 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en répondant aux moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige et du caractère insuffisant de la motivation de cet arrêté, le tribunal administratif a insuffisamment motivé le jugement attaqué ;

- le jugement attaqué, qui ne prend pas en compte sa situation personnelle et familiale, est entaché d'erreur de droit ;

- l'arrêté attaqué portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français a été signé par une autorité incompétente, faute de justification d'une délégation de signature à cet effet régulièrement publiée ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- en refusant son admission exceptionnelle au séjour, le préfet, qui n'a pas pris en compte sa situation personnelle et familiale, a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté attaqué portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes (ensemble une annexe), signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- l'accord franco-camerounais relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire (ensemble six annexes), signé à Yaoundé le 21 mai 2009 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. d'Haëm a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant camerounais né le 30 octobre 1959 et entré en France le 22 novembre 2002, a sollicité, le 4 juin 2015, son admission exceptionnelle au séjour ; qu'après un avis défavorable de la commission du titre de séjour du 2 décembre 2015 et par un arrêté du 19 février 2016, le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que M. D... relève appel du jugement du 16 septembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué, notamment de ses points 2 à 4, que le tribunal administratif, en répondant, pour les écarter, aux moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige et du caractère insuffisant de la motivation de cet arrêté, a suffisamment motivé sa décision ; que, par suite, le moyen tiré par M. D... de ce que le jugement entrepris serait insuffisamment motivé sur ces deux points ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, d'autre part, que si M. D...soutient que le tribunal administratif n'aurait pas pris en compte sa situation personnelle et familiale et aurait ainsi entaché le jugement attaqué d'une erreur de droit, un tel moyen se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges et est par suite, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, que M. B...A..., sous-préfet d'Antony et de Boulogne-Billancourt et signataire de l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet des Hauts-de-Seine en date du 14 septembre 2015, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département du 22 septembre 2015, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, actes et correspondances à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions portant refus de titre de séjour et celles portant obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait et doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué portant refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français, et fixant le pays de destination mentionne les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de ces décisions ; que, d'une part, la décision portant refus de titre de séjour, qui vise notamment le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. D...est célibataire et sans charge de famille et que s'il se prévaut de la présence en France d'une soeur de nationalité française, il " n'apporte pas la preuve de la réalité de liens personnels et familiaux établis en France qui seraient anciens, stables et intenses ", de sorte qu'il ne peut bénéficier d'une admission au séjour en application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 ; qu'elle fait état également de ce que l'intéressé " ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans ", de sorte qu'il ne peut prétendre à la délivrance, au titre de la vie privée et familiale, d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 ; qu'elle relève également que M.D..., " qui présente une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de manoeuvre, ne dispose d'aucun contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi " et qu'en outre, il " ne justifie d'aucune qualification ni d'une expérience professionnelle suffisante pour le métier de manoeuvre qu'il entend exercer ", de sorte qu'il ne peut prétendre à la délivrance, au titre d'une activité salariée, d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 ; qu'ainsi, cette décision est suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; que, d'autre part, l'arrêté attaqué vise également l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permet d'assortir un tel refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, l'obligation de quitter le territoire français contestée, qui, en vertu des termes mêmes de cet article L. 511-1, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, est elle-même suffisamment motivée ; qu'enfin, en indiquant que M. D... n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet des Hauts-de-Seine a également suffisamment motivé la décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé pourra être reconduit ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions en litige seraient entachées d'une insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. D..., il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué ni des autres pièces du dossier qu'avant de rejeter sa demande de délivrance de titre de séjour, le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...). " ;

8. Considérant que M. D... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le 22 novembre 2002, date de son entrée sur le territoire, et soutient que sa soeur, de nationalité française, y réside également et l'a pris en charge, qu'il y est bien intégré et qu'il n'est pas défavorablement connu des services de police ; qu'il soutient également qu'il justifie d'un diplôme de technicien de l'Ecole nationale supérieure des industries agro-alimentaires du Cameroun, obtenu le 28 juin 1986, qu'il a travaillé pour plusieurs sociétés en France et qu'il bénéfice d'une promesse d'embauche en qualité de manoeuvre ; que, toutefois, alors que la durée de son séjour sur le territoire n'est pas contestée par le préfet qui a saisi pour avis, en application des dispositions précitées, la commission du titre de séjour, le requérant, qui est célibataire et sans charge de famille en France, n'établit ni n'allègue d'ailleurs vivre auprès de sa soeur qui se borne à attester qu'elle l'a hébergé entre 2002 et 2004 ; qu'en outre, l'intéressé ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans et où il n'allègue pas être dépourvu de toute attache ; que, par ailleurs, le requérant, qui se borne à produire quatre bulletins de salaire pour les mois d'octobre 2011, décembre 2012, mars 2013 et janvier 2014 délivrés par la même société pour un emploi d'agent de service et qui n'apporte aucune autre précision sur cet emploi qu'il aurait ainsi occupé, ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle stable et ancienne en France, ni n'apporte le moindre élément sur les caractéristiques de l'emploi pour lequel il bénéficie d'une promesse d'embauche par une société spécialisée dans le secteur d'activité des travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation ; que, dans ces conditions, en estimant que M. D... ne pouvait se prévaloir d'aucune considération humanitaire ni d'aucun motif exceptionnel permettant son admission exceptionnelle au séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en lui refusant, pour ce motif, la délivrance d'un titre de séjour, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation de la situation personnelle de l'intéressée au regard de ces dispositions ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

10. Considérant que, pour les mêmes motifs énoncés au point 8 et alors que M. D..., qui est célibataire et sans charge de famille en France, ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine, le Cameroun, où il a résidé de nombreuses années et où il n'allègue pas être dépourvu de toute attache, l'arrêté attaqué portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ne peut être regardé, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions irrégulières du séjour en France de l'intéressé, comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces mesures ont été prises ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

5

N° 16VE03063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03063
Date de la décision : 26/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : LANGA

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-01-26;16ve03063 ?
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