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29/12/2016 | FRANCE | N°16VE01640

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 décembre 2016, 16VE01640


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 27 mars 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1505713 du 19 novembre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er j

uin 2016, M. A...D..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 27 mars 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1505713 du 19 novembre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2016, M. A...D..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut de procéder à un réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en faveur de son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- S'agissant du refus de séjour :

- il est entaché de l'incompétence de son signataire ;

- il n'est pas motivé ;

- il méconnaît l'article 3 de l'accord franco-tunisien dans la mesure où le préfet ne pouvait se fonder sur la fausse pièce d'identité qu'il avait produite, fait qui ne lui a valu qu'un rappel à la loi et qu'il ne pouvait être substitué à ce motif celui tiré de l'absence de visa de long séjour alors qu'il résidait déjà en France ni celui tiré de l'absence de contrat visé alors qu'il sollicitait un tel visa ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée de l'incompétence de son signataire ;

- elle n'est pas motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la désignation du pays de renvoi :

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie et le protocole relatif à la gestion concertée des migrations, signés à Tunis le

28 avril 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A...D..., de nationalité tunisienne, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou en qualité de salarié que le préfet des Hauts-de-Seine lui a refusée par un arrêté du 27 mars 2015 lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué et de l'insuffisante motivation du refus de séjour ainsi que de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien en date du 17 mars 1988 susvisé : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an minimum (...) reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié " ; qu'aux termes de l'article 2 du protocole franco-tunisien relatif à la gestion concertée des migrations : " 2.3.3. Le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi. " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé ne comporte aucune stipulation contraire aux dispositions précitées de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par les services en charge de l'emploi ;

4. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

5. Considérant que si le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé, pour refuser le titre de séjour sollicité par M. A...D...en qualité de salarié, sur la circonstance qu'il avait travaillé sous couvert d'un faux document d'identité, il a cependant invoqué, dans son mémoire en défense présenté en première instance et qui a été communiqué à M. A...D..., deux autres motifs, tirés de l'absence de justification d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet pouvait valablement se fonder sur l'absence de justification du visa de long séjour requis par les dispositions susvisées de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il résulte des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine aurait pris la même décision s'il s'était initialement fondé sur ce motif ; que, dès lors qu'elle ne prive l'intéressé d'aucune garantie procédurale, M. A...D...n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient procédé à tort à une telle substitution et que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; et qu'aux termes de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

7. Considérant que M. A...D..., qui ne justifie pas demeurer en France depuis 2006 comme il le soutient, n'ayant produit aucun document antérieur à l'année 2011, est célibataire et sans charge de famille ; que s'il se prévaut de la présence en France de sa tante et de trois cousins, il est constant qu'il n'est pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où demeure sa mère et où il a vécu jusqu'au moins l'âge de vingt-neuf ans ; que, dès lors, quand bien même le requérant a exercé de manière habituelle le métier de peintre en bâtiment depuis 2011, il n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de délivrer à M. A...D...un titre de séjour, le préfet des Hauts-de-Seine, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale du requérant dont le métier de peintre enduiseur pour lequel il a présenté une promesse d'embauche ne figure pas, contrairement à ce qu'il soutient, dans la liste des métiers du protocole susvisé ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des énonciations du point 7 que le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour litigieux aurait été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, invocables par les ressortissants tunisiens en ce qui concerne la possibilité d'obtenir un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", aux termes desquelles la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 dudit code peut être délivrée à l'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir ;

10. Considérant, en sixième lieu, que M. A...D...n'établit pas que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'illégalité ; que, par suite, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée ;

11. Considérant, en septième lieu, que pour les motifs de fait exposés aux points 7 et 8, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont la mesure d'éloignement serait entachée, doivent être écartés ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé doit également être écarté, en tout état de cause, pour les motifs exposés au point 5 ;

12. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté, en tout état de cause, pour les motifs de fait exposés au point 7 ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...D...est rejetée.

N° 16VE01640 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01640
Date de la décision : 29/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme AGIER-CABANES
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : CERF

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-12-29;16ve01640 ?
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