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29/12/2016 | FRANCE | N°15VE00560

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 décembre 2016, 15VE00560


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les cinq états exécutoires n° 19281, 19282, 19283, 19284 et 19285 émis par l'établissement public Voies navigables de France, le 27 décembre 2011, pour un montant total de 5 007,60 euros, pour le recouvrement de l'indemnité d'occupation sans autorisation du domaine public fluvial par son bateau " Black Pool" pour la période allant du 1er août au 31 décembre 2011 ;

Par un jugement n° 1206192, 1206202, 1206203, 1206204 et 1

206208 du 17 décembre 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les cinq états exécutoires n° 19281, 19282, 19283, 19284 et 19285 émis par l'établissement public Voies navigables de France, le 27 décembre 2011, pour un montant total de 5 007,60 euros, pour le recouvrement de l'indemnité d'occupation sans autorisation du domaine public fluvial par son bateau " Black Pool" pour la période allant du 1er août au 31 décembre 2011 ;

Par un jugement n° 1206192, 1206202, 1206203, 1206204 et 1206208 du 17 décembre 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés respectivement les 18 février et 10 mai 2015, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 14 avril et 19 mai 2016, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler lesdits états exécutoires ;

3° de mettre à la charge de Voies navigables de France la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

M. A...soutient que :

- les indemnités réclamées sont disproportionnées par rapport à l'utilisation et à l'usage normal des infrastructures ; l'usage des infrastructures n'est pas tarifé spécifiquement et précisément ;

- l'entretien des parcs à bateaux dans lequel son bateau de commerce était stationné, pendant peu de temps, est un service rendu aux professionnels en contrepartie du paiement des péages fluviaux et, dans ces conditions, le stationnement litigieux ne peut donner lieu à redevance puisque cette infrastructure est déjà financée par les péages fluviaux ;

- les états exécutoires litigieux ne précisent pas les bases de liquidation ;

- aucune délibération établissant les assiettes applicables au lieu de stationnement n'a été produite ;

- il n'a pas été mis en mesure de se défendre avant la notification des états exécutoires qui appliquent la majoration prévue à l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques ;

- les états exécutoires en litige sont entachés de détournement de pouvoir en l'absence de procédure de contravention de grande voirie.

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la décision n° 2013-341 QPC du Conseil constitutionnel du 27 septembre 2013 ;

- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, modifié ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli,

- et les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public.

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. " et qu'aux termes de l'article L. 2125-8 du même code : " Sans préjudice de la répression au titre des contraventions de grande voirie, le stationnement sans autorisation d'un bateau, navire, engin flottant ou établissement flottant sur le domaine public fluvial donne lieu au paiement d'une indemnité d'occupation égale à la redevance, majorée de 100 %, qui aurait été due pour un stationnement régulier à l'emplacement considéré ou à un emplacement similaire, sans application d'éventuels abattements " ;

2. Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision susvisée n° 2013-341 QPC ; que selon cette décision, le législateur a entendu, en instituant une majoration de 100 % de l'indemnité d'occupation due par un occupant sans titre du domaine public fluvial, dissuader toute personne d'occuper sans autorisation le domaine public fluvial et réprimer les éventuels manquements à cette interdiction ; que le Conseil constitutionnel a ainsi considéré que cette majoration de la redevance applicable, fixée par le législateur à 100 % du montant de la redevance due pour un stationnement régulier à l'emplacement considéré ou à un emplacement similaire, constituait une sanction ayant le caractère d'une punition qui ne méconnaissait cependant pas le principe de nécessité des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration de 1789 en ce que cette majoration proportionnelle, égale au montant de la redevance due, ne revêtait pas, en elle-même, un caractère manifestement disproportionné ; qu'enfin, le Conseil constitutionnel a écarté le grief tiré de la violation des droits de la défense tel qu'il est garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789, au motif que la majoration de 100 % prévue par l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques peut être contestée devant la juridiction administrative qui, saisie d'une demande à cette fin, peut suspendre l'exécution du titre exécutoire ou en prononcer l'annulation ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement que laquelle il est émis, à moins que ces bases n'aient été préalablement portées à la connaissance du débiteur ; que les états exécutoires litigieux font référence à un numéro de COSTU (constat d'occupation sans titre unique) correspondant au bateau du requérant et indiquent les périodes de facturation correspondant aux périodes d'occupation irrégulière, l'indice INSEE de référence et les montants mensuels dus en contrepartie de ladite occupation ; qu'il résulte de l'instruction que ces éléments sont détaillés dans un document intitulé " éléments de liquidation de l'avis de sommes à payer " signifié au requérant par huissier concomitamment aux états exécutoires litigieux, mentionnant en particulier la nature de la créance, l'identité du bateau, sa catégorie, le lieu de stationnement et le mode de calcul de l'indemnité mensuelle due en application de l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques, notamment, le tarif appliqué et le nombre de mètres carrés retenus ; que, par suite, M.A..., qui a ainsi été mis en mesure de discuter utilement les bases de liquidation des sommes mises en recouvrement par Voies navigables de France, n'est pas fondé à soutenir que les états exécutoires contestés seraient insuffisamment motivés ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'occupation sans droit ni titre d'une dépendance du domaine public constitue une faute commise par l'occupant irrégulier et que celui-ci doit réparer le dommage ainsi causé au gestionnaire du domaine par le versement d'une indemnité, calculée par référence, en l'absence de tarif applicable, au revenu, tenant compte des avantages de toute nature, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la dépendance en cause ; qu'il en résulte que le versement d'une indemnité par l'occupant irrégulier du domaine public fluvial à Voies navigables de France n'est pas subordonné à l'existence de tarifs régulièrement fixés et rendus opposables aux bénéficiaires d'autorisations d'occupation du domaine ; que, par suite, la circonstance, à la supposer avérée, que les tarifs sur lesquels Voies navigables de France s'est fondé pour fixer le montant des indemnités dues par le requérant n'auraient pas été publiés, n'est pas de nature à faire obstacle au droit du gestionnaire du domaine public fluvial de réclamer le versement de celles-ci ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'article L. 4412-1 du code des transports relatif aux péages acquittés par les transporteurs de marchandises ou de personnes et les propriétaires de certaines catégories de bateaux de plaisance à l'intérieur des limites du domaine confié à Voies navigables de France pour toute utilisation du réseau fluvial, n'ont pas pour effet de dispenser lesdits transporteurs et propriétaires ayant acquitté lesdits péages de l'indemnité d'occupation due au titre des dispositions de l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques, laquelle est perçue indépendamment de l'accès au réseau fluvial ; qu'ainsi, les circonstances que M. A...est propriétaire d'un bateau de commerce, qu'il serait amené à acquitter des péages à l'occasion de la navigation sur le domaine public fluvial et que son bateau était stationné au droit d'un garage à bateaux, dont, contrairement à ce qu'il soutient, l'entretien ne trouve pas sa contrepartie dans le paiement des péages dus uniquement en raison de la navigation sur le domaine public fluvial, et alors que le stationnement dans un tel emplacement est au demeurant limité à 21 jours par le règlement de police de la navigation de la Seine, ne sont pas de nature à l'exonérer du paiement des indemnités d'occupation litigieuses ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que si M. A...soutient n'avoir pas été mis à même de se défendre préalablement à la notification des états exécutoires litigieux, il résulte de l'instruction que Voies navigables de France l'a informé à plusieurs reprises, préalablement à la signification desdits états exécutoires, des indemnités dont il était redevable sur le fondement de l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques en raison de l'occupation par son bateau du domaine public fluvial sans autorisation ; que, par suite et en tout état de cause, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques que l'indemnité due en raison de l'occupation sans titre du domaine public fluvial est due indépendamment de la répression au titre des contraventions de grande voirie ; que, par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir dont les états exécutoires litigieux seraient entachés faute pour l'établissement public d'avoir, préalablement à leur émission, engagé des poursuites à l'encontre du contrevenant sur le fondement des dispositions de l'article L. 2132-9 dudit code ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'en se bornant à alléguer que " les indemnités réclamées sont disproportionnées par rapport à l'utilisation et l'usage normal des infrastructures utilisées et que l'usage des infrastructures n'est pas tarifé spécifiquement et précisément ", le requérant ne met pas la Cour en mesure d'apprécier le bien-fondé de son moyen qui ne peut, par suite, qu'être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Voies navigables de France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que

M. A...demande au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier la somme de 2 000 euros, en faveur de Voies navigables de France, sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera à Voies navigables de France la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 15VE00560


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00560
Date de la décision : 29/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-02-01-01-04 Domaine. Domaine public. Régime. Occupation. Utilisations privatives du domaine. Redevances.


Composition du Tribunal
Président : Mme AGIER-CABANES
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : C.J. ALAIN BOT, YANNICK NORMAND ET MARIE-PASCALE CREN ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-12-29;15ve00560 ?
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