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15/12/2016 | FRANCE | N°15VE00380

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 15 décembre 2016, 15VE00380


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'enjoindre à la commune de Mantes-la-Ville de lui garantir des conditions de travail sereines et de lui verser une indemnité de 18 300 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n°1100436 du 9 décembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 3 février 2015 e

t le 4 mars 2016, M.A..., représenté par Me Sandrine Sauzin, avocat, demande à la Cour :

1° d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'enjoindre à la commune de Mantes-la-Ville de lui garantir des conditions de travail sereines et de lui verser une indemnité de 18 300 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n°1100436 du 9 décembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 3 février 2015 et le 4 mars 2016, M.A..., représenté par Me Sandrine Sauzin, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2° de condamner la commune de Mantes-la-Ville à lui verser, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, une indemnité du 15 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, et de la capitalisation de ces intérêts à l'échéance de chaque année ;

3° de mettre à la charge de la commune de Mantes-la-Ville la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

- le jugement entrepris a omis de statuer sur ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- les faits qu'il a exposés relativement au comportement de MmeB..., la directrice des affaires culturelles, font présumer un harcèlement moral à son encontre, en vue de l'évincer de son poste ;

- le jugement est entaché d'une erreur de qualification juridique des faits de la cause ;

- le maire de la commune a commis un détournement de pouvoir en invoquant l'intérêt du service pour refuser la réaffectation de l'agent à la direction des affaires culturelles ;

- la commune a commis une faute en raison de ce harcèlement moral, du refus de protection fonctionnelle et de la mauvaise organisation du service ;

- cette faute a emporté des conséquences dommageables, notamment sur la santé du requérant, et a été à l'origine de son état dépressif et d'arrêts de maladie du 15 février 2010 au 15 février 2015.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-637 du 13 juillet 1983, notamment ses articles 6 quinquies et 11 ;

- la loi n° 84-53 du 26 juillet 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me Ansquer, avocat, pour M.A..., et de Me Bilici, avocat, pour la commune de Mantes-la-Ville.

1. Considérant que M.A..., adjoint technique territorial de 2ème classe auprès de la commune de Mantes-la-Ville, relève appel du jugement rendu par le Tribunal administratif de Versailles le 9 décembre 2014, en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à ce que cette commune soit condamnée à lui verser une indemnité du 15 000 euros, en réparation du préjudice moral, financier et de santé, qu'il estime avoir subi en raison du harcèlement moral, du refus de protection juridique et de la désorganisation du service qu'il allègue ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que l'article 1er du dispositif du jugement attaqué, aux termes duquel " la requête de M.A... est rejetée ", doit être regardé comme ayant rejeté implicitement mais nécessairement toutes les conclusions du demandeur et, notamment, celles par lesquelles il demande l'application en sa faveur de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par suite, le moyen tiré de l'omission des premiers juges à statuer sur ces conclusions, doit être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du

13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...) " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant, d'autre part, que pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;

6. Considérant que M. A...soutient que sa manière de servir à la direction des affaire culturelles était appréciée par ses supérieurs depuis son affectation dans ce service en 2002 jusqu'à ce que MmeB.... soit nommée à la tête de ce service et adopte à son égard une attitude hostile afin, selon lui, de l'évincer de ce service et d'y recruter des personnes de son choix ; qu'à cette fin, il expose qu'à compter du 16 mars 2006, ses horaires ont été alourdis, la fin de son service quotidien passant de 16 heures 30 à 17 heures 30; qu'il fait également valoir que, par un rapport daté du 15 février 2010 à l'attention du maire de la commune, Mme B...a critiqué en des termes malveillants sa manière de servir, en prétendant à tort qu'il ne venait jamais prendre ses instructions, qu'il se serait absenté lors de la préparation du spectacle de l'humoriste Fabrice Eboué, le 13 février 2010, et qu'il se serait abstenu de participer au démontage de la salle Jacques Brel ; que toutefois, le changement allégué et non établi de ses horaires est antérieur à la prise de fonctions de Mme B...; que si le requérant combat de manière étayée les griefs contenus dans le rapport du 15 février 2010, notamment l'affichage insuffisant et tardif en vue du spectacle de Fabrice Eboué, ce document, dans les termes où il est rédigé, qui ne sont ni diffamatoires ni outrageants ni injurieux, n'a pas dépassé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et n'a pas eu d'effet sur la carrière de l'intéressé et sur ses conditions de travail ; que, par ailleurs, les contre-visites médicales diligentées à la demande de la commune ne révèlent pas d'acharnement à son encontre, compte tenu de la durée des arrêts de travail du requérant, du 15 février 2010 au 15 février 2015 ; qu'il en va de même du projet de la commune, dès 2010, de lui proposer une autre affectation à la fin de son congé de maladie pour des motifs tirés de l'intérêt du service, et de l'orientation, lors de sa reprise, vers un poste de chargé d'entretien des espaces verts ; que ces seuls agissements invoqués par M. A...ne sauraient donc faire présumer de harcèlement moral de la part de MmeB..., ni de la commune de Mantes-la-Ville en général ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la loi déjà mentionnée : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) Les dispositions du présent article sont applicables aux agents publics non titulaires " ; qu'en l'absence de toute preuve du harcèlement moral allégué par

M.A..., comme il a été dit précédemment, la commune de Mantes-la-Ville n'a commis aucune faute en ne lui octroyant pas le bénéfice de la protection fonctionnelle prévue par ces dispositions et ce, à supposer, ce qui ne ressort pas des pièces du dossier, que l'intéressé en aurait sollicité le bénéfice ;

8. Considérant, en troisième lieu, que M. A...soutient que la mauvaise organisation de la direction des affaire culturelles, qui est notamment à l'origine de l'insuffisante publicité en faveur du spectacle de Fabrice Eboué, l'aurait mis dans un état de stress anxio-dépressif contre lequel lui ont été prescrits des antidépresseurs dès le début de l'année 2010, et qui a entraîné ses congés de maladie ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la direction des affaire culturelles de la commune de Mantes-la-Ville aurait fonctionné de manière défectueuse ; que, par suite, le moyen tiré de la faute commise par cette commune en raison de la mauvaise organisation de ce service doit être écarté ;

9. Considérant qu'en l'absence de faute commise par la commune, la responsabilité de cette dernière ne saurait être engagée ; qu'il s'ensuit que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Mantes-la-Ville verse à M.A..., partie perdante dans la présente instance, la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement d'une somme de 500 euros à la commune de Mantes-la-Ville au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera à la commune de Mantes-la-Ville une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Mantes-la-Ville est rejeté.

3

N° 15VE00380


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00380
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : SELAS CITYLEX AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-12-15;15ve00380 ?
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