Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C..., M. E...F..., M. et Mme B...D...et la SARL IMO-GROUP ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler, d'une part, la délibération du 25 mars 2013 du conseil municipal de la commune de Saint-Ouen désignant la société d'économie mixte de rénovation et de construction (SEMISO) en qualité de concessionnaire de la zone d'aménagement concerté (ZAC) Porte de Saint-Ouen, et approuvant la concession, d'autre part, la décision par laquelle le maire de la commune de Saint-Ouen a décidé de signer le traité de concession et ce traité lui-même, enfin la décision implicite de ce maire refusant de retirer les actes qui viennent d'être mentionnés.
Par un jugement n° 1309818 du 1er juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 2 septembre 2014 et le 27 octobre 2016, MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP, représentés par Me Leriche-Milliet, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler la délibération du 25 mars 2013 du conseil municipal de la commune de Saint-Ouen ;
3° d'annuler le traité de concession ou, à défaut, d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Ouen de saisir le juge du contrat d'une action en nullité de la convention dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 1 000 euros par jours de retard ;
4° d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Saint-Ouen a refusé de retirer les actes qui viennent d'être mentionnés ;
5° de mettre à la charge de la commune de Saint-Ouen et de la SEMISO la somme de 800 euros à verser à chacun des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que la contribution pour l'aide juridique.
Ils soutiennent que :
- le jugement a méconnu le principe du contradictoire, en se fondant sur un moyen d'ordre public sans en avoir au préalable informé les parties ;
- il est entaché d'une contradiction dans ses motifs ;
- il ne porte pas les signatures requises ;
- le maire de la commune n'ayant pas qualité pour la défendre en première instance, faute de délibération régulière du conseil municipal, les premiers juges auraient dû communiquer ce moyen d'ordre public ;
- la commune de Saint-Ouen n'établit pas avoir régulièrement convoqué les conseillers municipaux lors de la séance du conseil municipal du 25 mars 2013, notamment en ce qui concerne les mentions obligatoires ainsi que les pièces annexes utiles à leur information ;
- l'adoption de la délibération n'a pas été précédée d'un débat contradictoire ;
- la commune a méconnu l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement du
5 février 2013, en ne procédant pas à la signature du nouveau traité de concession.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Soyez,
- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,
- et les observations de Me Leriche-Millet, avocat, pour MmeC...,
M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP.
1. Considérant qu'en vue du renouvellement et de la mise en valeur du quartier de Saint-Ouen limitrophe de Paris, le conseil municipal de cette commune a désigné, par délibération du 27 juin 2011, la SEMISO concessionnaire de la ZAC de la Porte de Saint-Ouen, approuvé le futur traité de concession et sa propre participation financière à l'opération d'aménagement ; que, par un jugement n° 1111323 du 5 février 2013, le tribunal a, d'une part, annulé cette délibération, la décision de signer ce traité et le refus de retirer ces actes, d'autre part, enjoint à la commune de Saint-Ouen de procéder à la régularisation de la convention de concession d'aménagement conformément aux motifs du jugement, au plus tard dans un délai de trois mois suivant sa notification ; que, par une nouvelle délibération du 25 mars 2013, la commune a repris les actes approuvés lors de la délibération du 27 juin 2011 ; qu'après avoir en vain sollicité du maire, par une lettre du 23 mai 2013, le retrait de la délibération du 25 mars 2013 ainsi que de la décision de signer la concession d'aménagement et du traité de concession, MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler ces actes ; qu'ils relèvent appel du jugement du 1er juillet 2014 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces délibération et décisions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué " ; que si les requérants soutiennent que le tribunal administratif s'est fondé, dans le jugement attaqué en date du 1er juillet 2014, sur un moyen soulevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre la décision par laquelle le maire de la commune de Saint-Ouen a décidé de signer le traité de concession, il ressort des pièces du dossier que le tribunal s'est borné à répondre à un moyen soulevé devant lui ; qu'ainsi, les dispositions précitées n'ont pas été méconnues ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que, conformément aux dispositions de l'article R. 741-8 du code de justice administrative, celui-ci a été signé par le président-rapporteur, l'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau et le greffier d'audience ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article manque en fait ;
4. Considérant, enfin, que, lorsqu'une partie est une personne morale, il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie ; que tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen, l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier ; qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : / (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-1 du même code : " Sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2132-2 : " Le maire, en vertu de la délibération du conseil municipal, représente la commune en justice. " ; que les requérants font valoir que si la délibération du 27 juin 2011 ayant désigné la SEMISO comme concessionnaire de la ZAC a été annulée en raison de l'irrégularité de ses conditions d'adoption, la même irrégularité entachait cette délibération du conseil municipal en tant qu'elle habilitait le maire de la commune à la représenter en justice ; que, pour autant, la qualité à agir du maire au nom de la commune n'était pas contestée en première instance, qu'elle ne découlait pas nécessairement de la délibération mentionnée ci-dessus et que rien ne pouvait faire présumer aux premiers juges que le maire fût dépourvu d'une telle qualité ; que le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité, faute pour les premiers juges d'avoir invité la commune à produire une délibération habilitant son maire à agir en défense pour son compte, doit donc être écarté ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du contrat de concession conclu le 5 juillet 2011 :
5. Considérant que, dans sa décision n° 358994 du 4 avril 2014, le Conseil d'État a jugé que tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses n'est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses que si le contrat contesté a été conclu à compter du 4 avril 2014 ; que le traité de concession contesté dans la présente espèce ayant été conclu le 5 juillet 2011, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Ouen aux conclusions tendant à l'annulation de ce traité doit être accueillie ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération susvisée du 25 mars 2013 :
6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors en vigueur : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. (...) Elle est adressée par écrit, sous quelque forme que ce soit, au domicile des conseillers municipaux, sauf s'ils font le choix d'une autre adresse " ; qu'aux termes de l'article L. 2121-12 du même code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. / (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs (...) et que l'article L. 2121-13 du même code dispose : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. " ;
7. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales que les convocations aux réunions du conseil municipal doivent être envoyées aux conseillers municipaux à leur domicile personnel, sauf s'ils ont expressément fait le choix d'un envoi à une autre adresse, laquelle peut être la mairie, et qu'il doit être procédé à cet envoi dans un délai de cinq jours francs avant la réunion ; que la note explicative de synthèse doit être jointe à ces convocations ; que la méconnaissance de ces règles est de nature à entacher d'illégalité les délibérations prises par le conseil municipal alors même que les conseillers municipaux concernés auraient été présents ou représentés lors de la séance ; qu'il ne pourrait en aller différemment que dans le cas où il serait établi que les convocations irrégulièrement adressées ou distribuées et la note explicative de synthèse sont effectivement parvenues à leurs destinataires cinq jours francs au moins avant le jour de la réunion ; qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties ;
8. Considérant que MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP soutiennent qu'il n'est pas établi que les conseillers municipaux auraient été régulièrement convoqués à la séance du 25 mars 2013 du conseil municipal lors de laquelle la délibération litigieuse a été adoptée ; que, toutefois, la commune de Saint-Ouen verse au dossier un procès-verbal de constat établi le 19 mars 2013 et signé par un huissier de justice indiquant précisément que les convocations individuelles ont été adressées le 19 mars 2013 aux conseillers municipaux par voie postale à leur domicile personnel ou, pour ceux qui ont exprimé cette préférence, par un dépôt en mairie, chaque enveloppe comportant en outre un ordre du jour, le traité de concession d'aménagement de la ZAC Porte de Saint-Ouen et les rapports de présentation des délibérations du conseil municipal pour la séance concernée ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la convocation des conseillers municipaux ne peut donc qu'être écarté ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune " ; que, lors de la séance du 25 mars 2013, le rapporteur a exposé que l'objet de la délibération litigieuse était, après une convocation en bonne et due forme des membres du conseil municipal, de permettre conformément à l'injonction du tribunal administratif la régularisation de la délibération annulée du 27 juin 2011 ; qu'après l'intervention du rapporteur sur cette délibération, le maire a proposé de passer directement au vote ; que, sur les 28 suffrages exprimés, 27 étaient pour, 1 contre et 2 votants se sont abstenus ; que si les requérants soutiennent que l'adoption de la délibération litigieuse n'a pas été précédée d'un débat contradictoire, il ressort des pièces du dossier et, notamment, de l'enregistrement vidéo de la séance du 25 mars 2013 du conseil municipal, que les membres du conseil municipal n'ont pas été empêchés de débattre ou d'exposer leur point de vue lors de cette séance et qu'aucun de ces membres n'a manifesté sa volonté d'engager un débat sur cette question préalablement au vote ; que, d'ailleurs, un débat contradictoire concernant le traité de concession avait déjà eu lieu lors de la séance du conseil municipal du 27 juin 2011 ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, qui sont suffisamment circonstanciés, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement du 5 février 2013, en ne procédant pas à la signature du nouveau traité de concession ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'astreinte et d'injonction présentées par les requérants ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au remboursement de la contribution à l'aide juridique :
12. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que la somme que demande MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP soit mise à la charge de la commune de Saint-Ouen ; qu'étant partie perdante dans la présente instance, ils ne sont pas davantage fondés dans leurs conclusions relatives à la contribution à l'aide juridique ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à leur charge le versement à la commune de Saint-Ouen de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et de la SARL IMO-GROUP est rejetée.
Article 2 : MmeC..., M.F..., M. et Mme D...et la SARL IMO-GROUP verseront conjointement à la commune de Saint-Ouen une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 14VE02670