Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2008.
Par un jugement n° 1103844 et 1103845 du 5 février 2015, le Tribunal administratif de Versailles a joint ces deux demandes et les a rejetées.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 13 avril 2015 et le 12 février 2016, M.B..., représenté par Me Le Corre, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires ;
3° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme, non précisée, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative.
M. B...soutient que :
- la direction des services fiscaux des Yvelines, postérieurement au 13 novembre 2009, date de l'engagement de la vérification de comptabilité, était territorialement incompétente pour contrôler tant la SARL DES, qui depuis le mois de mars 2009, à la suite de la cession de son droit au bail de ses locaux de Paray-Douaville, n'avait plus aucune activité dans les Yvelines, que
lui-même, son propre domicile étant dans l'Essonne ;
- la proposition de rectification ne peut être regardée comme ayant été régulièrement notifiée à son foyer fiscal, dès lors que l'administration n'apporte pas la preuve de la remise d'un avis de mise en instance du pli, qui n'a pas été distribué et a été retourné à l'envoyeur ;
- la proposition de rectification n'a pas été suffisamment motivée, faute de détailler les " virements et décaissements " qui, selon ce document, auraient été effectués par la SARL DES à son profit ou à celui de son épouse ; les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen ;
- le défaut de présentation de la comptabilité de la société ne peut lui être reproché, celle-ci ayant été saisie lors de perquisitions effectuées par la gendarmerie ; l'administration ne rapporte pas la preuve qu'elle a effectué les démarches pour obtenir la comptabilité auprès des autorités judiciaires ; ainsi la méthode d'évaluation d'office retenue par l'administration est viciée ; il apporte la preuve qu'il a pour sa part demandé à l'autorité judiciaire, le
10 février 2016, la restitution des pièces saisies.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bergeret,
- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.
1. Considérant que consécutivement à la vérification de comptabilité de la SARL DES, qui a donné lieu selon la procédure d'évaluation d'office à une proposition de rectification en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos en 2007 et 2008 de cette société dont M. A...B...était gérant et associé, le foyer fiscal de celui-ci, après contrôle sur pièces, s'est vu réclamer, sur le fondement des dispositions combinées des 1° et 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et du c de l'article 111 du même code, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales sur la base d'un montant de 309 904 euros de revenus distribués au titre de l'année 2008 ; que
M. B...relève appel du jugement du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les deux demandes qu'il avait présentées aux fins de décharge de ces impositions supplémentaires ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que M. B...fait valoir que les premiers juges n'ont pas répondu à l'invocation du fait que, pour être suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la proposition de rectification qui lui a été adressée le 29 juillet 2010 aurait dû donner le détail des " virements et décaissements " dont elle faisait état, dont lui-même ou son épouse auraient profité au cours de l'année 2008 ; que, toutefois, dès lors que le jugement énonce que la proposition de rectification comprend tous les éléments requis, qu'il détaille, pour être regardée comme motivée, et que celle-ci indique notamment les diverses raisons pour lesquelles M. B...a été regardé comme ayant appréhendé les bénéfices distribués, raisons parmi lesquelles figurent les " virements et décaissements " litigieux, les premiers juges doivent être regardés comme ayant implicitement mais nécessairement répondu sur le point évoqué, le jugement n'étant pas ainsi entaché de l'insuffisance de motivation invoquée ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, applicable à l'espèce : " (...) / II. Les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I peuvent exercer les attributions que ces dispositions leur confèrent à l'égard des personnes physiques ou morales ou groupements de personne de droit ou de fait qui ont déposé ou auraient dû déposer dans le ressort territorial du service déconcentré ou du service à compétence nationale dans lequel ils sont affectés une déclaration, un acte ou tout autre document ainsi qu'à l'égard des personnes ou groupements qui, en l'absence d'obligation déclarative, y ont été ou auraient dû y être imposés ou qui y ont leur résidence principale, leur siège ou leur principal établissement. / III. Les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I et compétents territorialement pour procéder aux contrôles visés à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales d'une personne physique ou morale ou d'un groupement peuvent exercer les attributions définies à cet alinéa pour l'ensemble des impositions, taxes et redevances, dues par ce contribuable, quel que soit le lieu d'imposition ou de dépôt des déclarations ou actes relatifs à ces impositions, taxes et redevances (...) / V. Sans préjudice des dispositions des II, III et IV, les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I peuvent exercer leurs attributions à l'égard des personnes physiques ou morales et des groupements liés aux personnes ou groupements qui relèvent de leur compétence. / Les liens existant entre les personnes ou groupements s'entendent de l'appartenance ou du rattachement à un même foyer fiscal, de l'exercice d'un rôle de direction de droit ou de fait, d'une relation d'association, de subordination ou d'interposition, ou de l'appartenance à un même groupe d'intérêts (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 45-0 A du livre des procédures fiscales : " Sans préjudice des dispositions de l'article 11 du code général des impôts, lorsque le lieu de déclaration ou d'imposition d'un contribuable a été ou aurait dû être modifié, les agents des impôts compétents à l'issue de ce changement peuvent également assurer l'assiette et le contrôle de l'ensemble des impôts ou taxes non atteints par la prescription " ;
4. Considérant que si M. B...fait valoir qu'en novembre 2009, date de l'engagement des opérations de contrôle, la SARL DES avait cédé depuis huit mois le bail commercial qu'elle détenait sur des locaux sis à Paray-Douaville, dans les Yvelines, où elle exerçait son activité, il n'en reste pas moins qu'en application des dispositions précitées du II de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, la deuxième brigade départementale de vérification de la direction des services fiscaux des Yvelines, dans le ressort de laquelle la SARL DES devait déposer ses déclarations au cours des années 2007 et 2008, était compétente pour contrôler cette société au titre de ces années ; que, par suite, en application du V de ce même article, elle était également compétente pour contrôler M. B..., alors même que son foyer fiscal se trouvait dans le département de l'Essonne, dès lors qu'il ne conteste pas avoir exercé au cours de ces années un rôle de direction de droit ou de fait de cette société ; que la circonstance qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 45-0 A du livre des procédures fiscales, les agents d'une autre direction des services fiscaux auraient été également compétents pour contrôler M. B... est à cet égard sans aucune incidence ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en cas de retour à l'administration du pli contenant la proposition de rectification, la preuve de sa notification régulière peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste ; que doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes, suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière, le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel figure la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis, même dans le cas où n'y figure pas la mention "avisé" ;
6. Considérant qu'il ressort de l'instruction que le pli contenant la proposition de rectification du 29 juillet 2010, envoyé à l'adresse personnelle de M.B..., a été présenté le 31 juillet 2010, puis retourné au service avec l'indication, sur l'avis de réception, de la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ; que ces mentions établissent suffisamment que le destinataire a été régulièrement avisé de la disponibilité du pli au bureau de poste, ce que confirme, au demeurant, la mention manuscrite " AARA 31/07 " portée sur l'avis de réception, dont l'intéressé soutient, à tort, qu'elle est illisible et qu'elle n'a aucune signification ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées " ;
8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer de manière suffisamment explicite et détaillée les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, afin de permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ;
9. Considérant que la proposition de rectification du 29 juillet 2010 adressée à M. B... désigne l'imposition concernée, la période et la base d'imposition, constituée pour l'année 2008, à hauteur de 309 904 euros, par le supplément de bénéfice imposable résultant de la vérification de comptabilité de la SARL DES ; qu'elle se réfère à la proposition de rectification du 28 juillet 2010 adressée à celle-ci, dont elle joint une copie ; que cette dernière proposition de rectification indique l'origine et la teneur des renseignements obtenus par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, utilisés pour évaluer d'office le chiffre d'affaires et le résultat imposable de la SARL DES, et récapitule clairement et précisément ces divers éléments aboutissant à la constatation de revenus distribués, en application des dispositions combinées du 1° et 2° de l'article 109 et du c de l'article 111 du code général des impôts ; qu'elle mentionne, de même, que la proposition de rectification adressée à M. B... indique les éléments de fait au vu desquels ce dernier doit être regardé comme ayant appréhendé ces revenus distribués, en qualité de maître de l'affaire ; qu'ainsi, la proposition de rectification du 29 juillet 2010, accompagnée d'une copie de celle du 28 juillet 2010, était suffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales, sans qu'y fasse obstacle la circonstance, invoquée par M.B..., que parmi ces éléments de fait étaient mentionnés, sans qu'ils soient détaillés, des " virements et décaissements " constatés à son profit ou au profit de son épouse en provenance de la SARL, dès lors que l'indication du détail de ces virements et décaissements, mis en avant par le vérificateur uniquement pour démontrer que M. B... avait la qualité de maître de l'affaire, n'était nullement nécessaire pour mettre le contribuable à même de présenter utilement des observations en réponse ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition au regard des dispositions des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
10. Considérant que pour contester le " quantum des distributions ", M. B...se borne, après avoir cité un extrait du jugement attaqué concluant qu'il ne fait état d'aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé de la méthode d'évaluation utilisée par l'administration et n'apporte pas la preuve de l'exagération des impositions contestées, à indiquer " qu'il confirme les moyens qu'il a soutenus sur ce point devant le TA " ; qu'il ne met pas ainsi le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les erreurs qu'auraient commis les premiers juges en écartant ces moyens ;
11. Considérant, enfin, que si M. B...soutient, dans le dernier état de ses écritures, que l'absence de présentation de la comptabilité de la SARL DES ne peut lui être reprochée dès lors que celle-ci aurait été saisie lors de l'instruction judiciaire suivie à son encontre en 2008 pour travail dissimulé et emploi de salariés étrangers non munis d'autorisation de travail salarié, et s'il justifie avoir adressé à l'autorité judiciaire, le 10 février 2016, une demande de restitution de ces pièces saisies dans le cadre de cette instruction, qui a donné lieu le 9 novembre 2010 à une condamnation devenue définitive, il n'a pas informé la Cour des suites données à cette demande formulée plusieurs années après la saisie et seulement en cause d'appel, et ne précise pas, en tout état de cause, en quoi la production des pièces concernées, eu égard à leur nature exacte qu'il ne précise pas davantage, serait réellement utile à la solution du présent litige, alors qu'il avait déclaré lors de son audition par les services de police qu'il ne tenait pas de réelle comptabilité ; que dans ces conditions, M. B...n'apporte pas la preuve qui lui incombe, en application de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales du fait de l'acceptation tacite des redressements, de l'exagération des impositions supplémentaires mises à sa charge ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, la somme que M. B...sollicite au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N°15VE01149