La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2016 | FRANCE | N°14VE02149

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 05 juillet 2016, 14VE02149


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 3 juin 2014 par laquelle le PRÉFET DES YVELINES l'a placé en rétention administrative.

Par un jugement n° 1404010 du 6 juin 2014, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2014, le PRÉFET DES YVELINES demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2

° de rejeter la demande présentée par M. B...A...devant le Tribunal administratif de Versailles.

Le PRÉFET ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 3 juin 2014 par laquelle le PRÉFET DES YVELINES l'a placé en rétention administrative.

Par un jugement n° 1404010 du 6 juin 2014, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2014, le PRÉFET DES YVELINES demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par M. B...A...devant le Tribunal administratif de Versailles.

Le PRÉFET DES YVELINES soutient que :

- le jugement est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il a été pris sur le fondement du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui concerne les obligations de quitter le territoire français sans délai, et non sur le fondement juridique adéquat constitué par les dispositions du même code régissant les placements en rétention administrative ;

- le placement en rétention n'est pas entaché de l'erreur d'appréciation retenue par le jugement quant aux garanties de représentation de l'intéressé ; en effet, M.A..., dépourvu de passeport, avait fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement auxquelles il s'est soustrait, et avait déclaré lors de son interpellation qu'il n'accepterait pas de repartir volontairement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2016, M.A..., représenté par

Me Boiardi, avocat, conclut au rejet de la requête, et à ce que soit mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. A...soutient que :

- le préfet a lui-même fondé, à bon droit, sa décision de placement en rétention sur les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'agissant de l'appréciation du risque de soustraction à l'obligation de quitter le territoire français et des garanties de représentation ;

- le tribunal a estimé, à juste titre, qu'il justifiait de garanties de représentation suffisantes, dès lors qu'il est domicilié... ; par ailleurs, il vit en France avec sa fratrie et, dans ces conditions, l'absence de passeport est sans incidence ; il ne s'oppose pas formellement au retour dans son pays d'origine si sa sécurité était garantie et s'il bénéficiait d'une aide au retour, comme il l'a indiqué au cours de son audition par les services de police le 3 juin 2014 ; l'arrêté de placement en rétention est donc entaché de l'erreur d'appréciation retenue par le tribunal ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bergeret a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le PRÉFET DES YVELINES relève appel du jugement du

6 juin 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé sa décision du 3 juin 2014 plaçant M.A..., de nationalité mauritanienne, en rétention administrative ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui a été placé en rétention administrative le 3 juin 2014 à la suite de son interpellation le même jour dans les transports en commun, avait fait l'objet le 31 octobre 2013 d'un précédent arrêté portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, qui lui avait été notifié le 5 novembre 2013, et s'était soustrait à l'exécution de deux autres décisions d'éloignement prises après plusieurs décisions rejetant les demandes d'asile qu'il avait présentées devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission nationale du droit d'asile ; qu'il en ressort également qu'il n'a pu justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, et que s'il a soutenu qu'il vivait de façon stable au domicile d'une personne présentée comme son frère, il n'a pu établir le caractère stable et permanent de cette résidence chez un tiers ; que, dans ces conditions, l'arrêté annulé indiquait sans erreur d'appréciation que l'intéressé ne présentait pas de garanties suffisantes de représentation, au sens des dispositions précitées du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables en l'espèce en application des dispositions combinées et précitées des articles L. 551-1 et L. 561-2 du même code, et pouvait, par suite, être placé en rétention dans un centre ou local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; qu'ainsi, le PRÉFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté précité, le jugement attaqué a retenu que cet arrêté était entaché d'une erreur d'appréciation dans l'application de ces dispositions ;

4. Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les moyens présentés en première instance et en appel à l'encontre de la décision le plaçant en rétention administrative ;

5. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2013329-0002 du

25 novembre 2013 versé au dossier de première instance et publié au recueil des actes administratifs de l'État dans le département des Yvelines, le PRÉFET DES YVELINES a donné délégation à MmeC..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration, à l'effet de signer, notamment, les arrêtés de refus de délivrance de titre de séjour et les décisions de placement en rétention administrative ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté par lequel le PRÉFET DES YVELINES a placé en rétention M. A...comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que ce dernier n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que cette décision serait insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

7. Considérant, en troisième lieu, que M. A...soutient que l'arrêté de placement en rétention administrative est illégal en conséquence de l'illégalité de la décision du

31 octobre 2013 par laquelle le PRÉFET DES YVELINES l'avait obligé à quitter le territoire français ; que, cependant, il soutient à cet égard en vain, en tout état de cause, dès lors qu'une telle décision ne fixe pas le pays de renvoi en cas d'inexécution de l'obligation de quitter le territoire français, qu'il serait exposé en cas de retour en Mauritanie, du fait de son orientation sexuelle, à des persécutions assimilables à des traitements inhumains au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'au demeurant, alors que le statut de réfugié et la protection subsidiaire lui ont été refusés à plusieurs reprises par les juridictions spécialisées, il ne présente pas à la Cour d'éléments personnalisés de nature à établir de façon probante qu'en cas de retour forcé en Mauritanie, il serait effectivement et personnellement exposé à un risque sérieux de traitements tels que mentionnés à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 3 juin 2014 plaçant

M. A...en rétention administrative ; que, par voie de conséquence, les conclusions que M. A... présente devant la Cour sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1404010 du Tribunal administratif de Versailles en date du 6 juin 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Versailles et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

''

''

''

''

N° 14VE02149 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02149
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : BOIARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-07-05;14ve02149 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award