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23/06/2016 | FRANCE | N°14VE01428

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 23 juin 2016, 14VE01428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2012, M. A...D...et M. B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

1° d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 octobre 2012 par laquelle le maire de Seugy a rejeté leur demande de raccordement aux réseaux d'eau et d'électricité de deux parcelles sises 29 bis rue de Viarmes à Seugy ;

2° d'enjoindre à la commune d'autoriser dans les plus brefs délais ledit raccordement sous astreinte de 100 euros par jour ou, à d

faut, de l'enjoindre de statuer à nouveau sur leurs demandes de raccordement ;

3° de mett...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2012, M. A...D...et M. B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

1° d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 octobre 2012 par laquelle le maire de Seugy a rejeté leur demande de raccordement aux réseaux d'eau et d'électricité de deux parcelles sises 29 bis rue de Viarmes à Seugy ;

2° d'enjoindre à la commune d'autoriser dans les plus brefs délais ledit raccordement sous astreinte de 100 euros par jour ou, à défaut, de l'enjoindre de statuer à nouveau sur leurs demandes de raccordement ;

3° de mettre à la charge de la commune de Seugy une somme s'élevant à 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Par un jugement n°1209883 du 17 mars 2014 le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 12 mai 2014 et le 27 avril 2016, M. A...D...et M. B...D...demandent à la Cour de céans :

1° d'annuler le jugement n°1209883 du 17 mars 2014 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2° d'annuler la décision du 25 octobre 2012 du maire de Seugy ;

3° d'enjoindre à la commune de Seugy d'autoriser dans les plus brefs délais le raccordement des deux parcelles aux réseaux d'eau potable et électrique sous astreinte de

100 euros par jour ou à défaut de l'enjoindre de statuer à nouveau sur les demandes de raccordement ;

4° de condamner ladite commune à verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte pas le procès-verbal d'infraction du 28 octobre 2009 sur lequel elle se fonde ;

S'agissant de la parcelle B 1401 :

- les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ne sont opposables qu'aux constructions et non aux terrains tels que la parcelle B 1401 ;

- subsidiairement, les conditions d'application de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ne sont pas réunies dès lors que la parcelle B 1401 supporte une construction conforme à la règlementation d'urbanisme ;

- le refus de raccordement de la parcelle B 1401 porte une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnait les principes d'égalité de traitement des usagers et du droit d'accès aux services publics, à l'eau et à l'électricité ;

S'agissant de la parcelle B 1402 :

- les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ne peuvent s'appliquer à une parcelle non construite telle que la parcelle B 1402 ;

- l'interdiction de raccordement de la parcelle B 1401 ne peut être étendue à la parcelle voisine B 1402 ;

- il appartient à la commune d'établir qu'ils auraient l'intention de méconnaître l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme ;

- le jugement attaqué fait une lecture inexacte de l'arrêt n°10VE00861 du 31 mars 2011 de la Cour Administrative d'Appel de Versailles ;

- la circonstance que les époux F...n'ont pas demandé le raccordement de la parcelle B 1402 est inopérante dans le présent litige ;

- le refus de raccordement de la parcelle B 1402 méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et les principes d'égalité de traitement des usagers et du droit d'accès aux services publics, à l'eau et à l'électricité ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative ;

- le code de l'urbanisme.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Agier-Cabanes,

- et les observations de Me C...substituant Me E...pour MM. D....

1. Considérant que MM. A...et B...D...sont propriétaires des parcelles

B 1401 et B 1402 sises 29 bis rue de Viarmes à Seugy (Val-d'Oise) ; que la parcelle B 1401, qui supporte une construction, n'est accessible que par la parcelle B 1402 dont les consorts D...sont copropriétaires indivis avec les époux F...qui habitent la parcelle mitoyenne B 1400 ; que les consorts D...ont demandé, par un courrier du 22 mars 2010, le raccordement à l'eau et à l'électricité des parcelles B 1401 et B 1402 au maire de Seugy qui a rejeté leur demande par un arrêté du 25 octobre 2012 ; que, par un jugement n°1209883 du 17 mars 2014 dont les consorts D...relèvent appel, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la légalité externe de la décision attaquée :

2. Considérant que les appelants soutiennent que la décision attaquée est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte pas le procès-verbal d'infraction du

28 octobre 2009 sur laquelle elle se fonde ; que, toutefois, l'arrêté du 25 octobre 2012 n'est pas un acte motivé par référence à un autre acte mais comporte ses motifs propres dont la lecture permettait aux consorts D...de comprendre et de contester utilement le refus de raccordement qui leur était opposé ; que, par suite, l'arrêté du 25 octobre 2012, auquel la commune n'était pas tenue de joindre le procès-verbal d'infraction du 28 octobre 2009, est suffisamment motivé ;

S'agissant de la légalité interne de la décision attaquée en tant qu'elle concerne la parcelle B 1401 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d'affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités. " ;

4. Considérant que les consorts D...soutiennent que les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, qui s'appliquent à des constructions, ne peuvent être opposées à leur demande de raccordement d'un terrain ; que, toutefois, il ressort de l'instruction que la parcelle B 1401 supporte une construction non raccordée aux réseaux d'eau et d'électricité et qu'il n'est pas allégué que le raccordement demandé serait motivé par l'exercice d'une activité autre que l'habitation ; qu'ainsi les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme sont applicables à la demande de raccordement présentée par les consorts D...dont le but est manifestement de rendre habitable la construction sise sur la parcelle B 1401 ;

5. Considérant qu'il ressort de l'instruction, notamment des déclarations des consorts D...inscrites dans les procès-verbaux des 7 mai et 24 juin 2010, que les consorts D...ont procédé à des travaux, qui ont consisté en la surélévation du toit de la construction sise sur la parcelle B 1401 et en l'ajout de trois fenêtres, sans avoir déposé de permis de construire ; que, par suite, la construction sise sur la parcelle B 1401, qui au demeurant est située dans une zone non constructible, n'est pas conforme à la règlementation d'urbanisme ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, qui sont notamment applicables aux constructions irrégulièrement édifiées pour lesquelles l'infraction est prescrite, le maire était fondé à rejeter la demande de raccordement de la parcelle B 1401 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que la décision par laquelle le maire refuse, sur le fondement de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, un raccordement d'une construction à usage d'habitation irrégulièrement implantée aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone a le caractère d'une ingérence d'une autorité publique dans le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, si une telle ingérence peut être justifiée par le but légitime que constituent le respect des règles d'urbanisme et de sécurité ainsi que la protection de l'environnement, il appartient, dans chaque cas, à l'administration de s'assurer et au juge de vérifier que l'ingérence qui découle d'un refus de raccordement est, compte tenu de l'ensemble des données de l'espèce, proportionnée au but légitime poursuivi ;

8. Considérant que les consorts D...n'établissent pas que le centre de leur vie privée et familiale se trouve dans la maison sise sur la parcelle B 1401, qui n'est pas leur résidence principale ; que les consorts D...ne démontrent pas, ni même n'allèguent que leur choix d'établir sur cette parcelle leur lieu de résidence secondaire ait été dicté par des motifs impérieux dont l'importance excèderait celle imposant aux administrés de se conformer au respect des règles d'urbanisme ; que, par suite, le refus de raccordement opposé par le maire ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant que les moyens tirés de l'atteinte au principe d'égalité de traitement des usagers du service public et au droit d'accès aux services publics, à l'eau et à l'électricité ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé et doivent, par suite, être rejetés ;

S'agissant de la légalité interne de la décision attaquée en tant qu'elle concerne la parcelle B 1402 :

10. Considérant qu'il ressort de l'instruction que la parcelle B 1402 est le seul accès à la rue des parcelles B 1401 et B 1400, que les stipulations du contrat de vente du 10 mars 2006 en interdisent l'occupation privative par les consortsD..., et que sa superficie modeste en bordure de rue la rend inapte à recevoir toute construction en application de l'article Ub6 du règlement du Plan Local d'Urbanisme de Seugy alors en vigueur ; que, par suite, le maire, saisi d'une demande de raccordement aux réseaux d'eau et d'électricité de la parcelle B 1402 qui n'a vocation à recevoir aucune activité justifiant un tel raccordement, pouvait légalement refuser le raccordement de cette parcelle pour le seul motif tiré de la bonne gestion et de la préservation de la qualité du service de distribution d'eau et d'électricité ; que, par suite, les consorts D...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2012 ;

11. Considérant que, pour les raisons exposées ci-dessus, les moyens tirés de ce que l'interdiction de raccordement de la parcelle B 1401 ne pourrait être étendue à la parcelle voisine B 1402, de ce qu'il appartient à la commune d'établir que les consorts D...auraient l'intention de méconnaître l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, de ce que la circonstance que les époux F...n'ont pas demandé le raccordement de la parcelle

B 1402 est sans incidence sur le présent litige, de l'inapplicabilité de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme aux terrains nus et de la lecture erronée faite par les premiers juges de l'arrêt n°10VE00861 du 31 mars 2011 de la Cour administrative d'appel de Versailles doivent être écartés ;

12. Considérant que les consorts D...soutiennent que le refus de raccordement de la parcelle B 1402 méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnait les principes d'égalité de traitement des usagers et du droit d'accès aux services publics, à l'eau et à l'électricité ; que ces moyens, déjà soulevés concernant la parcelle B 1401, doivent être écartés pour les raisons exposées aux points 6 à 9 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application des articles L. 761-1 et R.761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Seugy, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts D...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il y a lieu de mettre à la charge des consorts D...la somme de 3 000 euros que la commune de Seugy réclame au titre des mêmes dispositions ;

16. Considérant qu'aucun dépens n'ayant été exposé par la commune de Seugy dans la présente instance, les conclusions tendant au paiement de tels frais ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de MM. D...est rejetée.

Article 2 : M. A...D...et M. B...D...sont condamnés solidairement à verser à la commune de Seugy la somme de 3 000 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Seugy est rejeté.

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14VE01428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01428
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Polices spéciales - Police de l'utilisation des sols.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation des installations et travaux divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Isabelle AGIER-CABANES
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : NOUGARET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-06-23;14ve01428 ?
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