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12/04/2016 | FRANCE | N°15VE03381

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 avril 2016, 15VE03381


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions en date du 10 avril 2015 par lesquelles le PREFET

DES HAUTS-DE-SEINE a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dans lequel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1504069 du 6 octobre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande.

Procédure devant

la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2015, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions en date du 10 avril 2015 par lesquelles le PREFET

DES HAUTS-DE-SEINE a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dans lequel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1504069 du 6 octobre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2015, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la requête de M.C....

Il soutient que :

- il n'a pas commis d'erreur de droit au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne s'est pas fondé, pour rejeter la demande de M.C..., sur la circonstance que le métier qu'il exerçait ne figurait pas sur la liste des métiers sous tension en Ile-de-France prévu par l'arrêté mentionné dans les dispositions de cet article en vigueur antérieurement à la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, arrêté qu'il n'a au demeurant pas visé, mais qu'il a seulement relevé dans le cadre de l'examen des motifs exceptionnels invoqués par l'intéressé que ce métier n'était pas caractérisé par des difficultés de recrutement et qu'il a également examiné les autres motifs invoqués par M. C...;

- le refus de séjour est suffisamment motivé ;

- il a procédé à un examen particulier de la demande ;

- le requérant ne peut se prévaloir de la circulaire NOR INTK1229185C

du 28 novembre 2012 qui est dépourvue de caractère règlementaire ;

- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le moyen tiré de l'illégalité du refus de titre invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bruno-Salel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande l'annulation du jugement en date du 6 octobre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé les décisions du 10 avril 2015 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à

M.C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dans lequel il pourra être reconduit ;

S'agissant de la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 27 de la loi n° 2011-672

du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. " ;

3. Considérant, il est vrai, qu'en supprimant à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10 du même code, le législateur a entendu, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 16 juin 2011, ne plus limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, alors annexée à un arrêté interministériel ;

4. Considérant, toutefois, que pour refuser l'admission exceptionnelle de M. C...au séjour, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ne s'est pas fondé sur la circonstance que son activité ne figurait pas sur la liste des métiers sous tension en Ile-de-France prévue par l'arrêté susmentionné qu'il n'a d'ailleurs pas visé, mais a simplement relevé, ainsi qu'il lui était loisible de le faire dans le cadre de son examen des motifs exceptionnels invoqués par le requérant, que le métier de palefrenier auquel ce dernier postulait n'était pas caractérisé par des difficultés de recrutement ; qu'en outre, et en tout état de cause, le préfet a par ailleurs mentionné que M.C..., qui déclare être célibataire avec trois enfants dans son pays d'origine et se maintient irrégulièrement en France, ne justifiait pas du bien-fondé d'une admission au séjour pour des considérations humanitaires ou au regard de motifs exceptionnels ; qu'ainsi, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont jugé qu'il avait commis une erreur de droit en opposant à M. C...l'absence de difficultés de recrutement dans l'activité professionnelle sollicitée pour estimer qu'il ne justifiait pas de motifs exceptionnels et ont, pour ce motif et sans examiner les autres moyens, fait droit à la demande de M. C...;

5. Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le requérant devant le tribunal administratif ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;

7. Considérant que le refus de séjour attaqué mentionne que la demande de

M.C..., qui a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut être regardée comme justifiée par des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels dès lors que le métier de palefrenier qu'il souhaite exercer ne se caractérise pas par des difficultés de recrutement et que l'intéressé est célibataire, avec trois enfants dans son pays d'origine et réside irrégulièrement en France ; qu'il indique, enfin, que l'intéressé ne peut prétendre au bénéfice des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 de ce code faute de justifier de l'ancienneté, de l'intensité et de la stabilité des liens personnels et familiaux dont il pourrait se prévaloir ; qu'ainsi, cette décision, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation professionnelle du requérant, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ; qu'en outre, et contrairement à ce qui est soutenu, il ressort de cette motivation que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE s'est livré à un examen particulier de la demande de M.C... ;

8. Considérant, en second lieu, qu'à supposer même que M. C...résiderait habituellement en France depuis 2010 et y aurait travaillé sous couvert de l'identité de

M. B...A...en tant que manoeuvre puis sous sa propre identité en tant que palefrenier, il ne justifie d'aucune attache en France alors que ses trois enfants vivent dans son pays d'origine ; que ces circonstances ne constituent pas un motif exceptionnel ou des circonstances humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 précité ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M.C..., qui n'a aucun droit à l'admission exceptionnelle au séjour, ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets, par la circulaire du 28 novembre 2012, pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

S'agissant de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la décision refusant à M. C...la délivrance d'un titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors,

M. C...n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de ladite décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

12. Considérant que, pour les motifs de fait évoqués au point 8., le requérant n'est pas fondé à soutenir que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et qu'il a de ce fait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'eu égard aux éléments de fait évoqués au point 8., il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de M.C... ;

S'agissant de la légalité des autres décisions attaquées :

14. Considérant que le requérant n'invoque aucun moyen à l'encontre des décisions

fixant à trente jours le délai de son départ volontaire et le pays dans lequel il pourra être renvoyé ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1504069 du 6 octobre 2015 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...est rejetée.

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N° 15VE03381

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03381
Date de la décision : 12/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. NICOLET
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme BELLE VANDERCRUYSSEN
Avocat(s) : CABINET HUG et ABOUKHATER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-04-12;15ve03381 ?
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