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29/03/2016 | FRANCE | N°15VE03975

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 29 mars 2016, 15VE03975


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2015 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1505899 du 3 décembre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédur

e devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2015, M.A..., représenté par Me W...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2015 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1505899 du 3 décembre 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2015, M.A..., représenté par Me Wak-Hanna, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jours de retard, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

-la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ; en effet, il justifie d'une présence de plus de cinq ans et d'une insertion sociale et professionnelle avérée et dispose de l'expérience nécessaire pour exercer le métier d'employé polyvalent dans la restauration qui figure sur la liste des métiers ouverts aux ressortissants tunisiens sans opposition de la situation de l'emploi ; à cet égard, le préfet ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 lui faire grief d'avoir travaillé sous une fausse identité pour refuser de tenir compte de son expérience professionnelle ;

- le préfet ne pouvait rejeter sa demande au motif qu'il aurait adopté un comportement frauduleux dès lors qu'il ne s'est livré à aucune manoeuvre de nature à tromper l'administration ; en outre, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le préfet n'aurait pas nécessairement pris la même décision s'il s'était fondé sur les autres motifs de la décision attaquée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à son degré d'intégration en France, son frère étant, en outre, engagé dans l'armée française ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- ladite décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 modifié entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- l'accord cadre relatif à la gestion concertée des migrations entre la France et la Tunisie en date du 28 avril 2008 publié le 24 juillet 2009 ;

- le protocole portant sur la gestion concertée des migrations annexé à l'accord cadre franco-tunisien relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne signé le 28 avril 2008 et publié par décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Huon,

- et les observations de MeB..., substituant Me Wak-Hanna, pour M.A....

1. Considérant que M.A..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du

3 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2015 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 juin 1988 en matière de séjour et de travail : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1erdu présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " "; que le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, à son point 2.3.3, que : " le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auquel ne déroge pas l'accord franco-tunisien : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que la délivrance aux ressortissants tunisiens d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est subordonnée à la présentation d'un visa de long séjour et d'un contrat de travail visé par les services en charge de l'emploi ;

3. Considérant, d'une part, que, si M. A...fait valoir que le métier d'employé polyvalent dans la restauration, pour lequel il a présenté un contrat de travail, figure dans la liste annexée au protocole susmentionné, il ne conteste pas, ainsi que le relève la décision attaquée, qu'il ne dispose ni d'un visa de long séjour ni d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, pour ces motifs, le préfet des Hauts-de-Seine pouvait légalement lui refuser la délivrance d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement des stipulations et dispositions rappelées ci-dessus ;

4. Considérant, d'autre part, que le requérant fait grief au préfet d'avoir, par ailleurs, indiqué qu'il ne pouvait être tenu compte de son expérience professionnelle dès lors qu'elle avait été acquise sous couvert d'une fausse identité ; que, toutefois, il résulte de l'instruction, ainsi que l'a d'ailleurs fait valoir l'administration en défense, que le préfet aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur les deux motifs cités au point 2., lesquels étaient, à eux seuls, de nature à justifier la décision contestée ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et 2.3.3 du protocole du 28 avril 2008 prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens un titre de séjour en qualité de salarié ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont le même objet ; que, par suite, M. A... ne saurait utilement soutenir que, compte tenu de son expérience professionnelle, le préfet aurait méconnu ces dispositions en refusant de lui délivrer un titre de séjour " salarié " ; que l'intéressé ne peut davantage utilement invoquer la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 dès lors que cette circulaire est dépourvue de caractère réglementaire ;

6. Considérant, en troisième lieu, que M. A...fait valoir qu'entré en France en décembre 2009, il travaille depuis le mois de novembre 2010 comme employé polyvalent dans le secteur de la restauration, qu'il dispose d'un logement et s'acquitte de ses obligations fiscales ; que, toutefois, l'intéressé, qui, pour l'essentiel, n'a travaillé qu'à temps partiel, ne peut être regardé comme justifiant ainsi d'une insertion professionnelle ou sociale particulièrement ancienne, d'autant que son maintien délibéré sur le territoire national en dépit d'un précédent refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement en date du 24 mai 2013, ainsi que l'usage, non contesté, d'une fausse identité en vue d'exercer une activité professionnelle ne sauraient constituer des gages d'une bonne intégration ; qu'en outre, le requérant, âgé de trente ans et célibataire, n'invoque aucune circonstance précise qui ferait obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que, si M. A...fait valoir que l'un de ses frères sert au sein de la Légion étrangère, l'intéressé est célibataire et sans charges de famille et, ainsi qu'il vient d'être dit, ne fait état d'aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie en Tunisie qu'il n'a quittée qu'à l'âge de vingt-cinq ans et où, de surcroît, il n'est pas contesté que résident encore ses parents et deux de ses frères, de sorte qu'il y dispose de fortes attaches familiales ; que, dans ces conditions, la décision attaquée ne peut être regardée comme portant une atteinte disproportionnée au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire dans un délai d'un mois :

9. Considérant, en premier lieu, que M. A...n'établit pas que la décision portant refus de séjour qui lui a été opposée serait entachée d'illégalité ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que cette prétendue illégalité entraînerait par voie de conséquence celle de la mesure d'éloignement en litige ;

10. Considérant, en second lieu, qu'il convient, pour les mêmes motifs de fait que ceux énoncés au point 7. de rejeter le moyen tiré de ce que cette mesure méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

11. Considérant que le requérant n'établissant pas que les décisions portant refus de renouvellement de séjour et obligation de quitter le territoire français seraient illégales, M. A...n'est pas fondé à soutenir que, par voie de conséquence de cette illégalité, la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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N°15VE03975


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03975
Date de la décision : 29/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : WAK-HANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-03-29;15ve03975 ?
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