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10/11/2015 | FRANCE | N°14VE00757

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 10 novembre 2015, 14VE00757


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite du préfet de l'Essonne rejetant sa demande tendant à ce que l'État soit condamné à lui payer une indemnité de 132 134 euros en réparation des préjudices subis à raison d'un refus d'agrément pour l'exercice de la profession d'agent de sécurité, de condamner l'État à lui verser cette somme, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2011, et de mettre à la charge de l'État les dépens ains

i qu'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite du préfet de l'Essonne rejetant sa demande tendant à ce que l'État soit condamné à lui payer une indemnité de 132 134 euros en réparation des préjudices subis à raison d'un refus d'agrément pour l'exercice de la profession d'agent de sécurité, de condamner l'État à lui verser cette somme, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2011, et de mettre à la charge de l'État les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1101122 du 30 décembre 2013, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2014, M.A..., représenté par

Me Bel Lakhdar, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner l'État à lui verser la somme de 132 134 euros, augmentée des intérêts au taux légal ;

3° de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de l'Essonne a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'État en prenant à son encontre une décision illégale de refus d'agrément pour l'exercice de la profession d'agent de sécurité, dès lors que ce refus est entaché d'erreur de fait, M. A...ne s'étant pas rendu coupable d'actes visés par le 4° de l'article 6 de la loi du 12 juillet 1983 ;

- il a subi des préjudices patrimoniaux correspondant à des pertes de gains professionnels d'un montant de 12 134 euros et un préjudice moral à hauteur de 120 000 euros.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guibé,

- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.

1. Considérant que M. A...a travaillé en qualité d'agent de sécurité sur le site du Centre national de la recherche scientifique à Villejuif pour le compte de diverses sociétés à compter du 12 octobre 2001 ; que le marché de surveillance du site ayant été repris par la société Bodyguard le 23 novembre 2005, cette société a présenté au préfet de l'Essonne une demande d'agrément de M. A... en application de l'article 6 de la loi du 12 juillet 1983 ; que le préfet de l'Essonne a, par une lettre du 6 janvier 2006, indiqué que l'intéressé faisait l'objet de renseignements défavorables incompatibles avec l'activité d'agent de sécurité ; que M. A... a été licencié par son employeur pour faute grave par lettre du 28 février 2006 ; que le requérant relève appel du jugement du 30 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'État à lui verser une somme de 132 134 euros en réparation du préjudice subi à raison de ce refus d'agrément ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 12 juillet 1983 dans sa rédaction applicable au litige : " nul ne peut être employé pour participer à une activité mentionnée à l'article 1er (...) 4° s'il a commis des actes, éventuellement mentionnés dans les traitements automatisés de données personnelles gérées par les autorités de police, contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ou de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sureté de l'Etat (...) La conclusion du contrat de travail est subordonnée à la transmission par le préfet de ses observations relatives aux obligations visées aux 2°, 3° et 4°. Le contrat de travail conclu en violation des dispositions des 2° à 5° est nul. " ;

3. Considérant que, pour refuser l'autorisation sollicitée, le préfet de l'Essonne s'est fondé sur la circonstance que M. A...était inscrit dans le système de traitement des infractions constatées (STIC) pour des actes de violence sur la personne de son épouse ; que si l'épouse du requérant a déposé plainte au commissariat d'Athis-Mons le 19 novembre 2002 pour des actes de violences volontaires par conjoint, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à établir la réalité des faits ; que M. A...n'a fait l'objet d'aucune poursuite pénale ; que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient le préfet de l'Essonne, le requérant n'a reconnu l'exactitude des mentions figurant dans le fichier STIC ni dans sa lettre au procureur de la République du 1er mars 2006, dans laquelle il reconnaît seulement avoir " élevé la voix " au cours d'une dispute mais précise n'avoir jamais exercé de violences physiques envers sa femme, ni dans sa lettre au préfet de l'Essonne qui se borne à indiquer que les faits qui lui sont reprochés remontent à novembre 2002 ; qu'ainsi, en indiquant à l'employeur de M. A...que

celui-ci ne remplissait pas les conditions prévues par l'article 6 de la loi du 12 juillet 1983 pour exercer l'activité d'agent de sécurité alors que les faits qui lui étaient reprochés n'étaient pas établis, l'administration a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'État ; que, par suite, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur le préjudice :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la faute commise par l'État en refusant d'agréer M. A...en qualité d'agent de sécurité a eu pour conséquence directe sa mise à pied à titre conservatoire à compter du 13 février 2006 et son licenciement par la société Bodyguard à compter du 2 mars 2006 ; que M. A...n'a retrouvé un emploi en qualité d'agent de sécurité que le 1er février 2007, sans bénéfice d'ancienneté ; que, compte tenu de l'ensemble des bulletins de paie et des attestations de versement de l'allocation de retour à l'emploi produits, M. A... est fondé à demander une indemnité correspondant à ses pertes de revenus professionnels à hauteur de 6 076,39 euros ; qu'en revanche, aucun préjudice ne saurait être retenu au titre de l'absence d'acquisition de congés payés au cours de la période d'inactivité de M. A... ;

5. Considérant qu'aucun lien de causalité n'est établi entre la faute commise par l'administration et les difficultés conjugales de M.A... ; qu'il en est de même en ce qui concerne l'état dépressif de l'intéressé, alors qu'il n'a sollicité une prise en charge médicale pour cette affection qu'en mars 2010, soit plus de quatre ans après son licenciement ; que M. A... n'est donc pas fondé à demander une indemnisation à ce titre ;

Sur les intérêts :

6. Considérant que M. A...a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 6 076,39 euros à compter du 2 mars 2011 ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1101122 du 30 décembre 2013 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : L'État est condamné à verser à M. A...la somme de 6 076,39 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2011.

Article 3 : L'État versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

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N° 14VE00757


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00757
Date de la décision : 10/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-05 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Céline GUIBÉ
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : BEL LAKHDAR

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-11-10;14ve00757 ?
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