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13/10/2015 | FRANCE | N°14VE01909

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 13 octobre 2015, 14VE01909


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 à 2009 et des suppléments d'imposition aux contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1208460 du 24 avril 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a constaté qu'il n'y avait pas lieu de

statuer sur cette demande à hauteur du dégrèvement de la somme de 12 248 euros prononcé en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 à 2009 et des suppléments d'imposition aux contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1208460 du 24 avril 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette demande à hauteur du dégrèvement de la somme de 12 248 euros prononcé en cours d'instance, et a rejeté le surplus de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 juin 2014 et un mémoire enregistré le

8 septembre 2015, M. B...C..., représenté par Me Hoin, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a rejeté le surplus de sa requête ;

2° de prononcer la décharge des impositions et pénalités correspondantes restant à sa charge.

Il soutient que :

- les opérations de vérification de comptabilité, qui ont débuté à la réception de l'avis de vérification du 6 avril 2010 et se sont terminées à la réception de la proposition de rectification du 14 décembre 2010, ont excédé la durée maximale de trois mois ou six mois fixée par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;

- la vérification de comptabilité n'est régulière qu'à l'encontre des membres de l'indivision successorale qui ont été destinataires des courriers relatifs à ce contrôle ;

- une double vérification de comptabilité de la même entreprise a été faite, en violation de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales, un avis de vérification lui ayant été adressé ainsi qu'à son père pour une prétendue exploitation unique en société de fait ;

- la procédure d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle mise en oeuvre à son encontre sur les années 2007 et 2008 a été irrégulière, d'une part, dès lors que la proposition de rectification du 17 décembre 2010 a été adressée avant l'expiration du délai de deux mois fixé par l'article L. 16 A pour répondre à une demande de justification qui n'a pu lui être remise avant le 18 novembre 2010, et, d'autre part, dès lors que sa réponse apportée le

27 novembre 2010 à une précédente demande du 30 septembre 2010 ne pouvait être assimilée à un défaut de réponse et aurait donc dû être suivie d'une mise en demeure ;

- les rappels litigieux sont intervenus à l'issue d'une procédure irrégulière, et sont au moins pour partie dépourvus de base légale dès lors que l'administration a omis de prendre en compte le contexte particulier lié à l'existence d'une indivision familiale, qui était propriétaire de l'immeuble où le vérificateur a cru devoir relever une activité hôtelière occulte au cours des années 2006 à 2009, alors qu'il ne pouvait bénéficier des bénéfices de l'indivision qu'à proportion des droits que son père M. A...C...détenait dans celle-ci ;

- l'administration, qui n'a relevé à cette fin que des éléments non probants, ne démontre pas, comme il le lui incombe, l'exercice d'une exploitation commerciale occulte au cours des années 2006 à 2009, et indique, à tort, que celle-ci aurait été admise par les intéressés en cours de vérification ou avant même celle-ci ; l'immeuble en cause, s'il avait jusqu'en 1997 été exploité comme bar-hôtel-restaurant, a ensuite, jusqu'à la reprise d'une exploitation commerciale par une SARL créée à la fin de l'année 2009, fait l'objet d'une simple gestion patrimoniale pour le compte de l'indivision, les recettes des chambres louées au mois ne pouvant constituer que des revenus fonciers ; aucune prestation de nature hôtelière n'était fournie aux occupants ; un relevé de situation du répertoire Sirene révèle que l'établissement " Le Viking " est actif depuis 2003 ;

- elle ne démontre pas davantage que cette prétendue activité occulte aurait été exercée par la société de fait constituée par lui-même et son père M. A...C..., faute de prouver l'existence d'un apport en industrie de sa part, alors qu'il n'a aucune compétence en matière administrative et comptable ; notamment, le fait qu'une comptabilité a été établie en la forme commerciale, sur la demande de l'administrateur judiciaire, ne démontre rien, de même que le fait que, dans ce même cadre, des comptes bancaires joints ont été ouverts, pour les besoins de cette gestion immobilière civile et la répartition de ses recettes ;

- la reconstitution de comptabilité, qui était sans objet pour une activité de nature civile, se fonde sur une méthode radicalement viciée, voire excessivement sommaire, aboutissant à une surestimation considérable des recettes, en retenant un taux de remplissage de 100 % irréaliste, un nombre de chambres offertes à la location supérieur à la réalité, et des tarifs de location trop élevés, reprenant simplement ceux pratiqués en 2010 par la nouvelle SARL ; il ne s'agissait en aucun cas d'une activité de " marchand de sommeil ", comme soutenu par le vérificateur, les tarifs pratiqués étant raisonnables, ainsi que le confirment les pièces comptables, probantes à cet égard, et les propriétaires habitant d'ailleurs eux-mêmes dans l'immeuble, sans fournir aucune prestation de type hôtelier ; il y aurait lieu, le cas échéant, de retenir une méthode plus pertinente, fondée sur la moyenne des chiffres d'affaires figurant sur les pièces comptables des années 2006 et 2009 et sur le chiffre d'affaires réalisé par la SARL en 2010, ce qui aboutirait, après déduction des charges figurant sur ces mêmes pièces, à un résultat annuel de 35 971 euros sur chacune de ces quatre années ;

- il est justifié par des attestations l'origine d'une somme de 6 879 euros, pour l'année 2007, et d'une somme de 1 300 euros, pour l'année 2008, lesquelles doivent donc être retirées des revenus taxés comme d'origine indéterminée ;

- en l'absence de démonstration de l'existence d'une activité occulte, la pénalité de 80 % appliquée aux bénéfices industriels et commerciaux résultant d'une telle prétendue activité occulte est dépourvue de base légale ;

- en outre, du fait de l'existence d'une déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises révélée par le relevé de situation au répertoire Sirene, le délai de reprise de droit commun de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales est seul applicable.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bergeret,

- les conclusions de M. Coudert, rapporteur public,

- et les observations orales de Me Hoin, pour M. C....

1. Considérant qu'à l'issue d'une procédure de vérification de comptabilité et d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a réintégré d'office au revenu imposable de M. C... pour les années 2006 à 2009, des bénéfices industriels et commerciaux et, pour les années 2007 et 2008, des revenus d'origine indéterminée ; que M. C... relève appel du jugement en date du 24 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 12 248 euros, a rejeté le surplus de sa demande aux fins de décharge de ces cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes ;

En ce qui concerne la procédure d'imposition :

S'agissant de la vérification de comptabilité :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...) " ;

3. Considérant, toutefois, que lorsque le litige porte sur des impositions établies d'office, la circonstance que des irrégularités puissent entacher la vérification de comptabilité dont le contribuable a pu faire l'objet sont sans incidence sur la validité de ces impositions, sauf lorsque la situation d'imposition d'office a été révélée au cours des opérations de contrôle ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C...a fait l'objet dès le 20 février 2009 d'une demande d'information du centre des impôts de Clichy, suspectant une exploitation de fait non déclarée de l'ancien hôtel restaurant " Le Viking ", sur les conditions d'occupation de l'immeuble, à laquelle il a répondu le 2 mars 2009 ; qu'à défaut d'avoir déclaré les bénéfices industriels et commerciaux et la taxe sur la valeur ajoutée due, selon l'administration, en conséquence de cette exploitation occulte, il se trouvait en situation de taxation et d'évaluation d'office avant le début de la vérification de comptabilité dont il a en conséquence fait l'objet à compter du 6 avril 2010, date à laquelle lui a été adressé, outre un avis de vérification de comptabilité, une mise en demeure de déclarer les bénéfices industriels et commerciaux et la taxe sur la valeur ajoutée provenant de l'activité occulte suspectée par l'administration ; que la situation d'imposition d'office n'a ainsi pas été révélée par la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet ; que la circonstance que cette situation d'imposition d'office serait née à l'expiration du délai de déclaration de deux mois imparti par les mises en demeure précitées, donc après le début des opérations de vérification, est à cet égard sans incidence, dès lors que cette situation a été révélée par les éléments dont disposait l'administration auparavant ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la vérification de comptabilité serait irrégulière au regard des dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales est, en tout état de cause, inopérant ; que, pour le même motif, est également inopérant le moyen tiré de ce que cette vérification ne serait régulière qu'à l'encontre des membres de l'indivision successorale destinataires des courriers relatifs à ce contrôle, les membres autres que M. A...C...n'ayant, au demeurant, fait l'objet d'aucun redressement ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 51 du même livre : " Lorsque la vérification de comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période (...) " ;

6. Considérant que l'administration fiscale a adressé le 6 avril 2010 à

M. B... C...et, à la même date, à son père M. A...C..., ancien exploitant, un avis de vérification de la comptabilité de l'établissement " Le Viking ", au vu des éléments dont elle disposait à cette date, qui pouvaient laisser penser que chacun d'eux était l'exploitant de cet établissement ; que l'administration ayant, durant les opérations de vérification, estimé que l'exploitation avait été réalisée, au cours des années 2006 à 2009, par une société de fait constituée par les deux intéressés, a, par suite, adressé une proposition de rectification à cette société ; que ces circonstances ne révèlent pas que les impositions contestées auraient été établies à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des dispositions précitées du livre des procédures fiscales ;

S'agissant de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de manière insuffisante aux demandes d'éclaircissements et de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite " ; qu'enfin aux termes de l'article L. 69 dudit livre : " (...) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (...) de justifications prévues à l'article L. 16 " ; qu'il ressort de ces dispositions que le contribuable qui répond à une demande de justifications après expiration du délai imparti doit être regardé comme s'étant abstenu de répondre et que l'administration est alors en droit de le taxer d'office, sans mise en demeure préalable, dès l'expiration dudit délai ; qu'il en est de même lorsque la réponse fournie en temps utile contient des informations invérifiables ou qui, par leur imprécision, équivalent à un défaut de réponse ;

8. Considérant, en premier lieu, que le requérant, dans sa réponse du 27 novembre 2010 à la demande de justifications datée du 30 septembre 2010 concernant des revenus d'origine indéterminée de l'année 2007, a indiqué qu'il ne se souvenait pas de l'origine de certains crédits, ou qu'il s'agissait " d'économies que j'ai faites ", de prêts amicaux ou d'encaissements d'un salaire pour le compte d'un tiers ; que devant le tribunal, un dégrèvement a été accordé sur le dernier de ces encaissements, d'un montant de 2 619 euros, qui n'est donc plus en litige ; que s'agissant des autres encaissements, dès lors que M.C... n'avait fourni que des informations imprécises et invérifiables, sans produire aucune pièce justificative, l'administration a, à bon droit, relevé que cette réponse était assimilable à une absence de réponse sur ces divers points ; qu'elle n'était ainsi pas tenue de le mettre en demeure d'avoir à compléter cette réponse sur le fondement de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales avant de lui adresser, le 17 décembre 2010, une proposition de rectification taxant d'office ces revenus d'origine indéterminée ;

9. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. C...a porté, sur la seconde demande de justifications, datée du 11 octobre 2010 et concernant des revenus d'origine indéterminée de l'année 2008, la mention " remis en main propre ce jour par l'inspecteur ", sans y porter aucune autre date ; qu'il soutient cependant que cette remise n'a pu intervenir avant le 18 novembre 2010, date du plus proche entretien avec le vérificateur selon les indications portées sur la proposition de rectification établie le 17 décembre 2010, et que cette dernière est ainsi intervenue avant l'expiration du délai de deux mois imparti pour répondre à la demande de justifications, entachant la procédure d'irrégularité ; que toutefois, et dès lors qu'aucun élément probant ne vient remettre en cause la présomption, créée par l'indication manuscrite précitée, de remise du document à la date du 11 octobre 2010, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de la régularité de la procédure sur le point litigieux ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de l'existence d'une activité commerciale :

10. Considérant que M. C... soutient que l'immeuble sis au 27 rue du Bac d'Asnières à Clichy, où avait été exploité un fonds de commerce de bar-hôtel-restaurant sous l'enseigne " Le Viking ", qui au cours des années concernées était propriété de l'indivision successorale résultant du décès, en 1971, de l'ancien propriétaire, l'un de ses oncles, a fait l'objet d'une gestion purement patrimoniale au cours de ces années, n'ayant pu générer que des revenus fonciers et non des bénéfices industriels et commerciaux ;

11. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le fonds de commerce précité avait été légalement exploité par M. A...C..., père du requérant, jusqu'en décembre 1997, date de sa radiation du registre du commerce et des sociétés ; que les actes successoraux, tels que le protocole transactionnel du 28 décembre 2001, l'arrêt de la

Cour d'appel de Paris du 11 décembre 2008 et l'acte de partage du 23 avril 2009, distinguent l'immeuble situé 27 rue du Bac d'Asnières à Clichy, et le fonds de commerce indivis exploité dans le même immeuble ; que l'acte de partage précité indique que " l'exploitation du fonds de commerce est devenue une exploitation de fait " ; qu'ayant exercé son droit de communication, le service a obtenu de la commission communale de Clichy pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public, un compte-rendu et un procès-verbal de visite du 6 octobre 2003, rendant un avis favorable à la poursuite de l'exploitation de l'établissement " Le Viking ", et un compte-rendu et un

procès-verbal de visite du 15 décembre 2008, rendant un avis défavorable en raison d'anomalies en matière de sécurité incendie ; que l'entreprise APEI Boucles de Seine, entreprise de blanchissage de linge, a attesté le 7 janvier 2010 avoir eu pour client l'établissement

" Le Viking " au cours des années 2004 à 2008, de même que la SAS Metro cash and carry France, fournisseur de cet établissement sur les années 2007 et 2008 ; que deux comptes bancaires joints ont été ouverts le 5 octobre 2006 au noms de MM. A...et B...C...pour le paiement des charges et l'encaissement des recettes de l'établissement ; que les intéressés ont reconnu le caractère professionnel de ces comptes, dans leurs déclarations au vérificateur reprises dans les propositions de rectification, qui ne sont pas démenties de façon plausible devant la Cour ; que, de même, il résulte suffisamment de l'instruction, et notamment des procès-verbaux et comptes-rendus précités de la commission de sécurité, que l'enseigne

" Le Viking Hôtel Bar Restaurant " avait été maintenue, au cours des années concernées, sur le mur extérieur de l'immeuble, et que le ou les exploitants avaient continué à utiliser, notamment pour les commandes de l'établissement ou lors du dépôt, en mai 2009, d'un dossier de demande d'autorisation de travaux d'aménagement en vue de la mise en conformité de l'exploitation au regard des règles de sécurité, le tampon encreur " café bar restaurant - Le Viking bar - propriétaire Aït Dahmane - RCS 82 A 00156 ", correspondant à l'ancien numéro du registre du commerce et des sociétés attribué à M. A...C..., exploitant individuel de 1982 à 1997 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments et, en outre, de la circonstance, s'agissant des années 2006 à 2009, qu'une comptabilité commerciale a été tenue, que, contrairement à ce que soutient M.C..., la gestion de l'établissement " Le Viking " avait, sur les années concernées, un but commercial et non exclusivement patrimonial ; que, dès lors, les bénéfices générés par cette activité commerciale non déclarée étaient imposables en tant que bénéfices industriels et commerciaux et non en tant que revenus fonciers ainsi que le soutient le requérant ;

S'agissant de l'existence d'une exploitation en société de fait :

12. Considérant qu'en vertu de l'article 34 du code général des impôts, sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux pour l'application de l'impôt sur le revenu les bénéfices réalisés par les associés d'une société de fait ; que l'existence d'une société de fait pour l'exploitation d'une entreprise résulte à la fois des apports faits à cette dernière par au moins deux personnes et de la participation de celles-ci tant à l'administration et au contrôle de l'affaire qu'aux bénéfices et aux pertes ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction et des éléments mentionnés au point 11

ci-dessus que M. A... C..., qui avait continué l'exploitation à titre individuel, sans la déclarer, après la liquidation de celle-ci en 1997, a été regardé à juste titre par l'administration comme ayant apporté à l'entreprise exploitée son droit indivis sur le fonds de commerce

d'hôtel-restaurant-bar, à compter de l'année 2006, les autres membres de l'indivision, alors constituée de lui-même et de ses deux frères survivants, ne s'y étant pas opposés ; qu'il a, par ailleurs, déclaré avoir continué jusqu'en 2009 à y exercer un certain nombre de tâches, telles que l'accueil des clients, et donc avoir ainsi participé à l'administration et au contrôle de l'affaire ; que, de même, il résulte de l'instruction que l'établissement a également été géré par

M. B... C...à compter de l'année 2006, comme l'attestent, notamment, les explications données par ce dernier au vérificateur, dont il ressort qu'il s'occupait régulièrement des tâches administratives et comptables, établissant ainsi, outre sa participation à l'administration et au contrôle de l'affaire, l'existence d'un apport en industrie au sens de l'article 1382 du code civil par une participation active à la gestion de l'entreprise qui, indépendamment de sa formation initiale, excède un simple concours à la marche de celle-ci, eu égard aux modalités particulières de l'exploitation de fait de l'hôtel alors exercée sans respect des règles applicables notamment en matière fiscale ou comptable ; qu'enfin, l'ouverture des deux comptes bancaires joints précités, ayant servi au règlement des dépenses de l'établissement et à l'encaissement d'une partie des recettes de l'exploitation, atteste que les deux titulaires, qui ont reconnu le caractère professionnel de ces comptes, participaient aux charges et recettes et donc aux résultats de l'entreprise ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que l'exploitation commerciale occulte avait été réalisée, au cours des années 2006 à 2009, par la société de fait constituée par MM. A...et B...C... ;

S'agissant de l'incidence de l'existence d'une indivision successorale :

14. Considérant que, pour soutenir que les rappels litigieux sont, au moins pour partie, dépourvus de base légale, M. C...fait valoir que l'administration a omis de prendre en compte le contexte particulier lié à l'existence d'une indivision familiale, laquelle était propriétaire de l'immeuble où l'existence d'une exploitation commerciale occulte en société de fait a été décelée, alors que les associés de cette dernière n'auraient pu prétendre aux bénéfices de l'exploitation qu'à proportion des droits que son père M. A...C...détenait dans cette indivision ;

15. Considérant, toutefois, que si le copropriétaire indivis de biens affectés à une exploitation acquiert, du fait même de cette qualité, celle de co-exploitant au regard de la loi fiscale, il est cependant assujetti à l'impôt sur le revenu, pour les bénéfices de cette exploitation, à hauteur de la fraction des bénéfices de cette exploitation qui a été effectivement mise à sa disposition ; que dans le cas où une société de fait a été constituée pour une telle exploitation, les membres de cette société de fait sont, conformément à l'article 8 du code général des impôts, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans cette société ; qu'il suit de là que la circonstance alléguée ci-dessus, tirée de ce qu'une indivision était propriétaire de l'immeuble et du fonds de commerce associé à celui-ci, et de ce que la société de fait n'aurait pu bénéficier d'un apport de ce fonds de commerce qu'à proportion des droits détenus dans l'indivision par l'un des membres de cette société de fait, est sans incidence sur la base légale des impositions contestées en l'absence de toute implication des autres indivisaires dans l'exploitation commerciale et dans l'appréhension des bénéfices en découlant ;

S'agissant de la charge de la preuve :

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : " (...) Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (...) de justifications prévues à l'article L. 16 " ; qu'aux termes de l'article L. 73 du même livre : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; que suivant l'article R. 193-1 de ce livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ; qu'il appartient dès lors à M. C..., qui a fait l'objet de procédures d'évaluation et taxation d'office en application des dispositions précitées du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des bases imposables retenues par l'administration ;

S'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires :

17. Considérant que pour soutenir que l'administration, après avoir écarté comme non probante - ce qui n'est pas discuté - la comptabilité présentée portant sur les années 2006 à 2009, a retenu des bases de taxation exagérées, à l'issue d'une méthode de reconstitution radicalement viciée voire excessivement sommaire, M. C... fait valoir qu'elle a pris en compte une période non pertinente, en novembre et décembre 2009, et qu'elle s'est basée sur un nombre de chambres offertes à la location supérieur à la réalité, sur un taux de remplissage de 100 % irréaliste, et sur des tarifs de location trop élevés, reprenant simplement ceux pratiqués par la nouvelle société créée en novembre 2009 pour reprendre l'exploitation hôtelière ;

18. Considérant, d'une part, que M. C...n'est pas fondé, dès lors qu'il ressort de l'instruction que la SARL " Le Viking ", créée en novembre 2009 pour reprendre l'exploitation de l'hôtel, n'a commencé son activité qu'en octobre 2010, à soutenir que l'administration ne pouvait inclure dans les bases rectifiées des bénéfices réalisés par la société de fait les recettes des mois de novembre et décembre 2009 ;

19. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de la décision d'admission partielle prise le 3 août 2012 sur la réclamation de M.C..., l'administration a accepté, pour tenir compte de ce qu'un nombre de chambres plus élevé que celui constaté par le vérificateur n'étaient pas offertes à la location, du fait notamment du logement dans l'immeuble de divers membres de la famille C...et de ce que le taux d'occupation initialement retenu, de 100 %, était trop élevé, d'extourner des bases initialement rectifiées les recettes équivalant à la location de cinq chambres, sur les trente-trois retenues dans un premier temps, l'hôtel comprenant au total trente-sept chambres ; qu'il n'est pas établi, eu égard aux caractéristiques de la clientèle de l'hôtel, constituée par des occupants de longue ou très longue durée, que les bases ainsi réduites, correspondant à un taux d'occupation équivalant à 85 % des trente-trois chambres susceptibles d'être offertes à la location, seraient exagérées ; qu'il n'est pas davantage démontré que l'application, sur ces bases, d'un tarif de 280 euros mensuels pour les chambres simples et 370 euros pour les chambres doubles, tarifs mentionnés sur les reçus des loyers présentés lors des opérations de contrôle, aboutirait à une exagération du résultat reconstitué de l'exploitation hôtelière ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'établit pas l'exagération des bases taxables retenues par l'administration à l'issue d'une méthode utilisant des éléments propres à l'entreprise concernée, qui n'apparaît ni radicalement viciée ni excessivement sommaire ; que s'il propose de fonder la reconstitution du résultat taxable sur une autre méthode, partant de la moyenne des bénéfices résultant des encaissements et charges figurant sur les pièces comptables des années 2006 à 2009 présentées au contrôle, avec prise en compte du résultat de l'hôtel géré par la SARL en 2010, une telle méthode, qui se fonde sur la comptabilité qui a été écartée comme non probante, sans que ce caractère non probant soit

lui-même contesté, et sur la gestion de l'hôtel mise en place postérieurement, à partir du mois d'octobre 2010, ne peut être regardée comme aboutissant à un résultat plus exact ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à contester la reconstitution de chiffre d'affaires opérée par l'administration pour déterminer le montant des bénéfices industriels et commerciaux imposables au titre de son impôt sur le revenu des années 2006 à 2009 ;

S'agissant des revenus d'origine indéterminée :

22. Considérant que M. C...soutient que les crédits bancaires restant imposés au titre de l'année 2007 dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée correspondent à l'encaissement de chèques de salaire de 2 619 euros et de 560 euros pour le compte de deux de ses locataires qui ne disposaient pas de compte bancaire, et à deux prêts amicaux à hauteur de 1 000 euros et 2 700 euros ; que les attestations des auteurs des chèques et des prêts amicaux invoqués, qu'il présente à la Cour, ne sont pas assorties de pièces justificatives telles que contrat de prêt ou échéancier de remboursement, et ne suffisent pas, en l'état, à établir l'origine et la nature des crédits bancaires précités ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus au point 8 la somme de 2 619 euros qui a donné lieu à un dégrèvement devant les premiers juges n'est plus en litige ; que des justificatifs probants ne sont pas davantage produits pour l'année 2008, s'agissant des crédits bancaires restant en litige, à hauteur de 300 euros et de 1 000 euros, qui correspondraient à un encaissement de chèque de salaire pour le compte d'un tiers et au remboursement d'un prêt accordé à une autre personne que celles ayant accordé des prêts en 2007, selon les attestations produites devant la Cour, qui restent insuffisamment probantes en l'absence de toute autre pièce de nature à les corroborer ;

S'agissant du droit de reprise :

23. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce ;

24. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et de ce qui a été dit aux points 10 à 13

ci-dessus, que l'établissement anciennement dénommé " Le Viking " a été exploité par

M. A... C..., à partir de l'année 1997, puis par la société de fait constituée par lui et son fils M. B...C..., à compter de l'année 2006, sans avoir donné lieu à aucune déclaration fiscale ; qu'il n'est pas allégué qu'une déclaration aurait été faite auprès du greffe du tribunal de commerce ; que si l'appelant verse au dossier un avis de situation extrait du répertoire Sirene, édité le 3 septembre 2015 et faisant état de ce que l'établissement " Le Vicking " situé au 27 rue du Bac à Asnières est " actif au répertoire Sirene depuis le

1er janvier 2003 ", ce document, qui ne mentionne ni la date ni l'auteur de la déclaration au vu de laquelle il a pu être établi, ne suffit pas en l'espèce à établir, comme il incombe au contribuable, que l'activité commerciale avait été déclarée au centre de formalités des entreprises, par l'exploitant et en temps utile ; qu'en outre, ce document ne fait, en tout état de cause, aucune mention de la société de fait, contribuable distinct de M. A...C... qui y est seul mentionné ; que le caractère occulte de l'exploitation doit ainsi être reconnu, rendant applicable le délai de reprise de dix ans édicté par les dispositions de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales ; qu'en conséquence, le droit de reprise de l'administration n'était pas prescrit le

30 juin 2011, date à laquelle les avis d'imposition supplémentaire au titre de l'impôt sur le revenu des années 2006 à 2009 ont été émis à l'encontre de M. C... ;

En ce qui concerne les pénalités :

25. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de (...) c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte (...) " ;

26. Considérant que pour l'interprétation de la notion d'activité occulte, il convient de se référer à la définition qui en est donnée à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, comme désignant la situation du contribuable qui n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations prévues par la loi et n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce ; qu'il incombe à l'administration d'apporter la preuve de l'exercice occulte de l'activité professionnelle ;

27. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit notamment aux points 10 à 13 et 24 ci-dessus, l'hôtel à l'enseigne " Le Viking " a été exploité au cours des années 2006 à 2009 sous la forme d'une société de fait composée de MM. B... et A...C..., sans déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises et sans qu'aient été déposées dans le délai légal les déclarations prévues par la loi ; qu'ainsi, la preuve de l'exercice d'une activité occulte doit être regardée comme apportée par l'administration, qui, par suite, a, à bon droit, majoré les impositions dues au titre de cette exploitation de la pénalité de 80 % prévue en cas d'activité occulte par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts ;

28. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté le surplus de sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

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N° 14VE01909


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01909
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Questions communes - Personnes imposables - Sociétés de fait.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Taxation d'office.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : CABINET CONDORCET AVOCATS - A.A.R.P.I

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-10-13;14ve01909 ?
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