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15/09/2015 | FRANCE | N°14VE02218

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 15 septembre 2015, 14VE02218


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de les décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1001821 du 24 juin 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2014, et un mémoire enregistr

le 13 avril 2015, M. et Mme B...A..., représentés par Me Madrid, avocat, demandent à la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de les décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1001821 du 24 juin 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2014, et un mémoire enregistré le 13 avril 2015, M. et Mme B...A..., représentés par Me Madrid, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement du 23 juillet 2014 du Tribunal administratif de Versailles ;

2° de prononcer la décharge demandée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance, ainsi que le versement d'une somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure a été viciée par le fait qu'ils n'ont pas été mis en mesure de répondre aux différentes demandes de justifications envoyées en vue d'une taxation d'office, dès lors que les relevés de compte et autres pièces financières remises au vérificateur par leur mandataire, lequel a, à cette occasion, excédé ses pouvoirs, ont été irrégulièrement conservés par l'administration ;

- la procédure de rectification menée à leur encontre a été irrégulière dès lors qu'aucune suite n'a été donnée à leur demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, formulée oralement au vu de la réponse aux observations du contribuable puis par écrit le 22 mai 2009 ; aucune forclusion n'est opposable à une telle demande dès lors qu'elle est, comme en l'espèce, formée avant la mise en recouvrement ; la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 10 du livre de procédures fiscales n'évoque en effet aucun délai ; si un délai de trente jours est prévu à l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales, ce texte ajoute à la loi - article L. 59 du livre des procédures fiscales -, qui n'en prévoit aucun ; ce délai ne peut en toute hypothèse leur être opposé dès lors que les rectifications envisagées à l'issue de la réponse aux observations du contribuable reçue le 16 février 2009 ont été modifiées par la décision de l'interlocuteur départemental du 5 mars 2009 ;

- en tant que fonctionnaire de nationalité saoudienne, secrétaire à l'ambassade du Royaume d'Arabie Saoudite, M. A...doit bénéficier d'une exonération de l'impôt sur le revenu, soit au titre des dispositions de l'article 11 de la convention fiscale signée entre la France et l'Arabie Saoudite, soit au titre de l'article 5-3 du code général des impôts ;

- l'origine et la nature des revenus que l'administration persiste à regarder comme des revenus d'origine indéterminée sont, dans le contexte particulier de l'affaire, suffisamment justifiées par les pièces et attestations produites, à tout le moins à hauteur des sommes de 7 000, 137 000, 39 950 et 10 000 euros, qui constituent des remboursements par le prince et la princesse Fawaz Bin Abdelaziz Al Saoud des dépenses engagées par M. et Mme A...à l'occasion de voyages en France effectués par des membres de la famille royale saoudienne ;

- l'administration aurait dû, avant de procéder à la taxation d'office en revenus d'origine indéterminée, les mettre en demeure de produire une déclaration de revenu catégoriel.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 ;

- la convention fiscale signée entre la France et l'Arabie Saoudite le 18 février 1982, modifiée le 2 octobre 1991 et le 18 février 2011 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bergeret, président assesseur,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant que M. et Mme A...ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2004 et 2005, à l'issue duquel l'administration leur a notifié des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant, notamment, de la réintégration de revenus d'origine indéterminée, imposés selon la procédure de taxation d'office prévue par les articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales ; que par leur requête susvisée, M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 24 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ;

S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : " (...) L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.C..., mandaté le 30 avril 2007 par M. et Mme A...pour les représenter à la procédure d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, et, dans ce cadre, pour " délivrer copie de documents justificatifs ", a communiqué au vérificateur, sur la demande de celui-ci, des relevés de compte bancaire et d'autres pièces justificatives, le 3 mai et le 16 juin 2007 ; que les bordereaux d'accusé de production et d'accusé de réception de ces documents, signés par le vérificateur et par le mandataire des contribuables, mentionnent expressément que " les documents remis énumérés au verso sont des photocopies spécialement établies à l'intention de l'administration qui peut les conserver " ; que dès lors, M. et MmeA..., qui avaient nécessairement conservé les originaux des copies des pièces ainsi remises par leur mandataire, soutiennent à tort que ce dernier aurait excédé ses pouvoirs en communiquant les originaux de ces pièces, et ne sont pas davantage fondés à soutenir que la procédure aurait été également viciée du fait qu'ils n'auraient pu, faute de disposer de ces pièces, répondre utilement aux demandes de justifications et mises en demeure que le vérificateur leur a par la suite adressées, le 21 août 2007 et le

8 novembre 2007 ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l'article 667 du même code (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 59-1 du même livre : " Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter la demande prévue au premier alinéa de l'article L. 59 (...) " ; que l'article L. 11 du même livre dispose : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification " ;

5. Considérant que M. et Mme A...font valoir que la procédure a été substantiellement viciée par le refus opposé par l'administration de faire droit aux deux demandes successives de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qu'ils auraient formulées, d'une part, verbalement, après réception

le 16 février 2009 de la réponse aux observations du contribuable, et, d'autre part, par un courrier du 22 mai 2009 ; que toutefois, l'existence de la demande verbale alléguée, niée par l'administration, n'est aucunement établie par les intéressés, qui ne produisent à cette fin aucune pièce ni ne mentionnent aucun indice probant en ce sens ; que le ministre des finances et des comptes publics, devant la Cour, déclare n'avoir trouvé aucune trace d'une demande écrite de saisine de la commission ; qu'en réplique, M. et Mme A...ne produisent ni la copie de leur courrier invoqué du 22 mai 2009, ni un accusé de réception d'un courrier qui aurait été adressé à cette date à l'administration fiscale, ni aucun autre élément de nature à établir qu'ils avaient effectivement demandé la saisine de la commission, à une date au demeurant tardive au regard des dispositions précitées de l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales fixant un délai de trente jours, qui peuvent être regardées, en tant que de besoin, comme trouvant leur fondement légal dans celles de l'article L. 11 du même livre ; que, dans ces conditions, la procédure d'imposition n'a pas été viciée par l'absence de consultation de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. et Mme A...soutiennent que l'administration aurait dû, avant d'imposer entre leurs mains, selon la procédure de taxation d'office, des revenus d'origine indéterminée, les mettre en demeure de produire une déclaration de revenu catégoriel, ils n'assortissent pas ce moyen des précisions de nature à mettre la Cour en mesure d'y statuer utilement ;

S'agissant du bien-fondé de l'imposition :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 4-A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus " ; qu'aux termes des dispositions de l'article 5 du même code : " Sont affranchis de l'impôt sur le revenu : (...) / 3° Les ambassadeurs et agents diplomatiques, les consuls et agents consulaires de nationalité étrangère, mais seulement dans la mesure où les pays qu'ils représentent concèdent des avantages analogues aux agents diplomatiques et consulaires français " ;

8. Considérant que M.A..., ressortissant saoudien qui ne conteste pas que son domicile fiscal est en France, ne peut se prévaloir des dispositions précitées de l'article 5 du code général des impôts pour demander à être exonéré des impositions objet du présent litige, dès lors qu'il ressort de l'instruction, et notamment d'une attestation de l'ambassade du Royaume d'Arabie Saoudite en France en date du 23 juin 2008 indiquant qu'il est fonctionnaire de cette ambassade depuis 1964, dont les termes sont confirmés par ceux d'une attestation de fonctions du ministère français des affaires étrangères qui mentionne qu'il ne bénéficie pas de l'immunité statutaire de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, qu'il n'avait pas, sur les années concernées, la qualité d'ambassadeur, agent diplomatique, consul ou agent consulaire ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 11 de la convention franco-saoudienne du 18 février 1982 : " Les rémunérations et pensions payées par un Etat contractant (...) à une personne physique, au titre de services rendus à cet Etat (...) ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que les services ne soient rendus dans le cadre d'une activité industrielle ou commerciale exercée par un Etat contractant (...) " ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas sérieusement soutenu par l'intéressé, qui fait valoir que les sommes taxées d'office en revenus d'origine indéterminée correspondent à des remboursements ou à des avances sur des frais de voyages exposés sur ses deniers personnels pour le compte d'un tiers, que ces sommes pourraient effectivement constituer des rémunérations qui, aux termes des stipulations précitées de

l'article 11 de la convention fiscale signée par la France et l'Arabie Saoudite, ne seraient pas imposable en France ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré " ; que dès lors que M. et Mme A...contestent les rectifications établies par l'administration selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales en matière de revenus d'origine indéterminée, il leur incombe d'apporter la preuve de l'origine et de la nature des crédits ainsi taxés ainsi que celle, le cas échéant, du caractère non imposable des sommes concernées ;

12. Considérant que M. et Mme A...font valoir que les crédits bancaires taxés en revenus d'origine indéterminée, pour des montants de 196 473 euros au titre de l'année 2004 et de 31 205 euros au titre de l'année 2005, constituent des remboursements des dépenses effectuées par eux pour le compte du prince Fawaz bin Abdelaziz al Saoud et de son épouse lors de leurs déplacements en France, à tout le moins pour les montants crédités le 17 juin 2004 pour 39 950 euros, le 4 octobre 2004 pour 7 000 euros et pour 137 000 euros, et le 1er juin 2005 pour 10 000 euros, ; que si les pièces qu'ils versent au dossier établissent que les chèques et le virement bancaire correspondant à ces quatre dernières sommes provenaient en effet des comptes bancaires du prince ou de son épouse, l'ensemble des pièces qu'ils ont versées au dossier ne suffisent pas, en l'état, à établir, en l'absence d'un minimum de concordance de date et de montant entre les crédits bancaires litigieux et les dépenses que M. A...justifie avoir exposées, pour un total de 127 982,17 euros, inférieur à celui des montants précisés ci-dessus, que les crédits bancaires regardés par l'administration comme des revenus d'origine indéterminée étaient des avances ou des remboursements de frais de voyage exposés par M. A... ou son épouse pour le compte du couple princier ; qu'ainsi, dès lors que les appelants n'apportent pas la preuve, par l'attestation précitée et l'invocation du " contexte ", de la nature des crédits bancaires litigieux, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'administration n'était pas en droit d'imposer ceux-ci en tant que revenus d'origine indéterminée dans leur revenu global au titre des années 2004 et 2005 ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ; que par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'enfin, en l'absence de dépens dans la présente instance, leurs conclusions tendant à ce que ceux-ci soient mis à la charge de l'Etat ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

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N° 14VE02218


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02218
Date de la décision : 15/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SELARL ANDRE MADRID

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-09-15;14ve02218 ?
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