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12/05/2015 | FRANCE | N°14VE02229

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 12 mai 2015, 14VE02229


Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2014, présentée pour la société IL CASTELLO, par Me Rieutord, avocat ; la société IL CASTELLO demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0902559 en date du 27 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, aux contributions additionnelles assises sur cet impôt et à la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue auxquelles elle a été assujettie au titre des anné

es 2004 et 2005, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été ass...

Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2014, présentée pour la société IL CASTELLO, par Me Rieutord, avocat ; la société IL CASTELLO demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0902559 en date du 27 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, aux contributions additionnelles assises sur cet impôt et à la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période allant du 1er janvier 2004 au

31 décembre 2005, et du rappel de taxe professionnelle mis à sa charge au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2° de prononcer la décharge des impositions supplémentaires en litige ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société IL CASTELLO soutient que :

- elle n'a pas été informée en temps utile, en méconnaissance de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, de la date de report de la première intervention sur place qui avait été fixée par le vérificateur dans un courrier rectificatif du 25 janvier 2007, au

" mardi 29 janvier 2007 à 9 heures " ; en effet, alors qu'il était attendu par elle et son conseil, le lundi 29 janvier, le vérificateur ne s'est présenté que le lendemain, mardi 30 janvier, ne lui laissant pas un délai suffisant pour se faire assister de son conseil ; il ne lui appartenait pas de relever l'incohérence de date dont était entaché le courrier précité ; contrairement à ce que juge le tribunal, elle a été informée téléphoniquement par le vérificateur que l'intervention se déroulerait le 29 janvier et non le 30 ; enfin, une lecture attentive du mandat du 29 janvier 2007, confiant à Mme A...la mission de la représenter dans le cadre de la vérification de comptabilité " au rendez-vous d'aujourd'hui, 30.01.2007 " confirme ses dires ; en réalité, le mandat a été rédigé postérieurement et antidaté afin d'être remis au vérificateur, à sa demande, lors de sa seconde intervention ;

- lors de l'intervention du 26 mars 2007, le vérificateur a tenté de remettre dans les pièces comptables un document sorti de sa sacoche ; face au questionnement du gérant, le vérificateur a répondu qu'il souhaitait restituer un document relatif à l'inventaire des immobilisations en précisant que ce document lui avait été remis lors de l'intervention du 13 février précédent ; or, dès lors qu'aucun document de cette sorte n'avait été remis au vérificateur le 13 février, un tel emport, sans autorisation écrite du contribuable, est irrégulier ; l'incident intervenu devant plusieurs témoins a été relaté dans un courrier du 26 mars 2007 ; si comme le fait valoir le vérificateur, ce dernier aurait simplement présenté au gérant le 26 mars 2007 une copie du tableau des immobilisations " scanné " lors de l'intervention du 13 février précédent au motif qu'il souhaitait que le dirigeant atteste de la conformité de la copie à l'original, il n'y avait pas lieu de le restituer, sauf à considérer qu'il ne s'agissait pas d'une simple copie mais de l'original ; quant au scanner prétendument utilisé par le vérificateur, au demeurant à son insu, de telles explications sont dénuées de vraisemblance ; la procédure d'imposition est par suite entachée d'une irrégularité substantielle ;

- enfin, en dépit de sa demande écrite du 28 avril 2008, l'administration ne lui a pas communiqué avant la mise en recouvrement des impositions, les documents qu'elle avait obtenus dans le cadre de l'exercice du droit de communication, notamment auprès de diverses banques ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 2015 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société

IL CASTELLO, qui exploite un restaurant sous l'enseigne " Au fou du Roy " à Versailles, l'administration fiscale lui a notifié des suppléments d'impôt sur les sociétés, de contributions additionnelles assises sur cet impôt et de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue au titre des années 2004 et 2005, un rappel de taxe professionnelle au titre de l'année 2005, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, ainsi que les pénalités correspondantes ; que la société IL CASTELLO relève appel du jugement du 27 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix (...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil " ;

3. Considérant que, lorsqu'un contribuable a été régulièrement informé de l'engagement d'une procédure de vérification par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification, en application des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration, lorsqu'elle décide de reporter la date qui avait été initialement prévue pour la première intervention sur place du vérificateur, d'envoyer ou de remettre au contribuable un avis de vérification rectificatif ; que l'administration est en revanche tenue d'informer le contribuable en temps utile par tous moyens de la date à laquelle est reporté le début des opérations de vérification, afin de lui permettre de se faire assister du conseil de son choix ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'après que la société IL CASTELLO a, le 23 janvier 2007, retiré l'avis de vérification de comptabilité du 2 janvier 2007 l'informant que les opérations de contrôle débuteraient le 25 janvier suivant, le vérificateur, afin de lui laisser un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil, a décidé, en accord avec elle, de reporter la première intervention sur place au 30 janvier ; qu'après un entretien téléphonique pour convenir de cette date de report, le vérificateur a adressé à la société IL CASTELLO, le même jour, un courrier confirmatif de ce que la première intervention aurait lieu le " mardi 29 janvier 2007 à

9 heures " ; que si la société soutient que la venue du vérificateur, le mardi 30 janvier, au lieu du lundi 29 janvier, doit être regardée comme un report inopiné du rendez-vous fixé la veille, ne lui ayant pas laissé le temps de se faire assister d'un conseil, il résulte toutefois de l'instruction que Mme A...était dûment mandatée pour représenter la contribuable, le 30 janvier, en vertu d'un mandat du gérant daté et signé de la veille ; que, par ailleurs, il ne ressort d'aucun élément de l'instruction que Mme A...a fait part au vérificateur, lors de la première intervention, de la difficulté de la société à se faire assister d'un conseil, ni de sa volonté de la reporter à une date ultérieure afin de remédier à cette difficulté ; que, de plus, la société IL CASTELLO n'allègue, ni a fortiori ne soutient, que le gérant et son conseil auraient vainement attendu le vérificateur le lundi 29 janvier ou qu'ils se seraient enquis de son absence, ce même jour, auprès du service des impôts ; que, dans ces conditions, ni l'erreur de plume, sur le seul chiffre, du courrier du

25 janvier 2007, de surcroît purement confirmatif de l'entretien téléphonique du même jour, ni la thèse selon laquelle le mandat de représentation n'aurait été présenté au vérificateur que lors de sa seconde intervention, et aurait été antidaté du 29 janvier précédent, ne suffisent, dans les circonstances de l'espèce, à établir que la société n'a pas disposé d'un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que, toutefois, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les bureaux de l'administration, qui en devient ainsi dépositaire ; qu'en ce cas, il doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées ; qu'en outre, cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la copie de " capture d'écran " joint par le ministre au dossier, que le vérificateur était muni, lors du contrôle, d'un appareil lui permettant de " scanner " les documents comptables qu'il consultait, au nombre desquels figurait notamment un tableau d'inventaire des immobilisations de la société

IL CASTELLO ; que cet indice sérieux apporté par l'administration est de nature à infirmer l'affirmation de la contribuable selon laquelle le vérificateur aurait irrégulièrement emporté l'original de ce document ; qu'ainsi, au vu de l'ensemble des éléments ressortant de l'instruction, il se déduit que le tableau présenté le 26 mars 2007 au gérant afin que celui-ci en certifie la conformité était une simple copie de l'original, dont la société, à aucun moment, n'a été privé ; que la circonstance, à la supposer même établie, que ce document a été " scanné " par le vérificateur à l'insu du gérant est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition, dès lors que l'inventaire des immobilisations figure au nombre des pièces comptables que le contribuable est tenu de présenter à toute réquisition de l'administration en application des articles 54 du code général des impôts et L. 85 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le vérificateur aurait irrégulièrement emporté un document original hors des locaux du contribuable, sans l'accord de celui-ci, et sans délivrance de reçu, doit être écarté comme manquant en fait ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'il incombe à l'administration d'informer le contribuable dont elle envisage de rectifier les bases d'imposition de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux rectifications, avec une précision suffisante, afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;

8. Considérant que la société IL CASTELLO soutient qu'elle a sollicité en vain la communication des documents obtenus par le service dans l'exercice du droit de communication et utilisés pour fonder les rappels litigieux ; qu'à l'appui de cette allégation, la requérante se borne à produire l'accusé de réception d'un pli envoyé le 28 avril 2008, au 12 rue de l'Ecole des Postes à Versailles, alors que la brigade de vérification était installée depuis septembre 2007 à Guyancourt, ce que la société ne pouvait ignorer pour en avoir été informée par la proposition de rectification du 3 septembre 2007 et, surtout, pour avoir envoyé plusieurs correspondances à cette adresse, en particulier son courrier du 10 octobre 2007, aux termes duquel elle demandait la saisine de la commission départementale des impôts et le bénéfice des voies de recours hiérarchique ; que, dans ces conditions, et faute de mentionner l'objet du pli du 28 avril 2008 - adressé en toute connaissance de cause à un autre service de l'administration - l'accusé de réception correspondant, ne saurait, par lui-même, attester du contenu de ce pli, dont la société ne produit d'ailleurs aucune copie ; que, compte tenu du contexte sus-décrit, le moyen - d'ailleurs présenté pour la première fois en appel, soit six ans après les faits - tiré de ce qu'en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'administration se serait irrégulièrement abstenue de transmettre une copie des documents obtenus de tiers et exploités dans le cadre du contrôle, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société IL CASTELLO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société IL CASTELLO est rejetée.

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N° 14VE02229 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02229
Date de la décision : 12/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02-01-02-02 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Rectification (ou redressement). Généralités.


Composition du Tribunal
Président : M. BERGERET
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : CABINET RENAUD-RIEUTORD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-05-12;14ve02229 ?
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