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04/12/2014 | FRANCE | N°12VE02998

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 04 décembre 2014, 12VE02998


Vu la requête, enregistrée le 7 août 2012, présentée pour la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE dont le siège social est 35, boulevard des Capucines à Paris (75002), par Me Zamour, avocat ;

La société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902996 en date du 7 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution à l'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été as

sujettie au titre des exercices clos

les 31 octobre 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer...

Vu la requête, enregistrée le 7 août 2012, présentée pour la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE dont le siège social est 35, boulevard des Capucines à Paris (75002), par Me Zamour, avocat ;

La société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902996 en date du 7 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution à l'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos

les 31 octobre 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le régime des amortissements de caducité s'applique à toutes les sociétés titulaires d'une délégation de service public et pas seulement aux concessionnaires de services publics ; les travaux litigieux ne concernent pas de simples travaux d'entretien mais d'importants travaux d'agencements et de réaménagements dans le but d'embellir et d'améliorer le casino ; que ces travaux ont conduit à une augmentation de la valeur du bien immobilisé et ont eu pour effet de prolonger d'une manière notable sa durée probable d'utilisation ; qu'à ce titre, l'amortissement de caducité est justifié ;

- le principe de l'indépendance des exercices fait obstacle à ce que les provisions constituées au titre de l'exercice 2002 et des exercices antérieurs fassent l'objet d'un redressement sur l'exercice de 2003 ;

- la question de la nature des travaux effectués par sa filiale rend nécessaire la désignation d'un expert judiciaire aux fins d'apprécier si les travaux en litige sont éligibles à la constitution d'une provision de caducité ; elle demande ainsi à la cour d'ordonner la désignation d'un expert en application des dispositions des articles R. 621-1 et suivants du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2014:

- le rapport de M. Chayvialle, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE ;

Et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 20 novembre 2014, présentée pour la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE ;

1. Considérant que la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude, qui exploite un casino à Dinard, dans le cadre d'un cahier des charges d'exploitation et d'un contrat de bail conclus avec la commune de Dinard le 6 mars 1987, dont le renouvellement jusqu'au 30 avril 2005 a été autorisé par délibération du conseil municipal de Dinard du 10 août 1993, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2002, 2003 et 2004 ; que le service vérificateur a remis en cause la déduction de provisions dites de caducité inscrites par la société au bilan de ces exercices pour un montant total de 709 633 euros ; que la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE relève appel du jugement du 7 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution à l'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 octobre 2003 et 2004, en sa qualité de société mère du groupe fiscal intégré, au sens des articles 223 A et suivant du code général des impôts, auquel appartient la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que par une proposition de rectifications du 25 juillet 2006, le service vérificateur a réintégré les dotations litigieuses au résultat de l'exercice clos en 2003 à hauteur de 505 641 euros et à celui de l'exercice clos en 2004 à hauteur de 203 992 euros ; que les impositions litigieuses procèdent de cette proposition du 25 juillet 2006, date à laquelle le service vérificateur était en droit, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, d'exercer son droit de reprise sur les impositions litigieuses dues au titre des exercices clos en 2003 et en 2004 ; que la circonstance qu'une proposition de rectification est intervenue antérieurement le 20 décembre 2005 pour l'exercice clos en 2004 portant sur la réintégration des dotations litigieuses pour un montant de 709 633 euros est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors qu'elle n'a pas fondé les impositions et alors même que la proposition de rectification du 25 juillet 2006 a été qualifiée de " complémentaire " ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectifications du 20 décembre 2005 est inopérant ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans la rédaction applicable, résultant du décret 2004-1469 du 23 décembre 2004 : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. / Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document. (...)" ;

4. Considérant que les mentions que doit contenir l'avis de mise en recouvrement ont pour objet de donner au contribuable les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; que si c'est avec chacune des sociétés d'un groupe soumis au régime de l'intégration fiscale prévu par les articles 223 A et suivants du code général des impôts que l'administration mène la procédure de vérification de comptabilité et de rectification, dans les conditions prévues aux articles L. 13,L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales, le seul document retraçant le montant des impôts, des pénalités et des intérêts de retard qui seront mis en recouvrement, au nom de la société mère de ce groupe, est le document prévu par le troisième alinéa des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ; que, dans ces conditions, la circonstance que l'avis de mise en recouvrement adressé à la société mère d'un groupe fiscalement intégré, en sa qualité de seule redevable de l'impôt dû par l'ensemble des sociétés du groupe, ne fasse pas référence aux propositions de rectification adressées aux sociétés ayant fait l'objet des procédures de rectification n'a pas pour effet d'entacher cet avis d'irrégularité ; qu'ainsi le moyen invoqué par la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE et tiré de l'absence de référence faite par l'avis de mise en recouvrement litigieux à la proposition de rectifications notifiée à la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Considérant que la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE conteste la réintégration au résultat imposable de la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude au titre des exercices clos en 2003 et 2004 de provisions pour caducité correspondant à des dépenses de travaux afférentes au casino dont l'exploitation lui a été confiée ;

En ce qui concerne la déduction d'amortissements de caducité :

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude a constitué des provisions au titre de la caducité des équipements litigieux ; que toutefois, eu égard à l'objet et au mode de calcul des dotations en cause, la société ne peut être regardée, quel que fût le libellé du compte utilisé, que comme ayant constitué des amortissements de caducité, ayant pour objet de récupérer, au terme prévu par le cahier des charges d'exploitation du casino, l'intégralité des capitaux investis pour la réalisation des équipements destinés à être abandonnés à la collectivité publique à cette date, et comme demandant la déduction d'un tel amortissement ;

7. Considérant, qu'aux termes du 2. de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. " ; qu'aux termes du 1. de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...), notamment : (...) / 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) " ;

8. Considérant que, si une entreprise titulaire d'une délégation de service public, qui est dans l'obligation d'abandonner sans indemnité ses équipements et installations à la collectivité délégante à l'expiration de la durée de la délégation peut pratiquer des amortissements de caducité, cette faculté n'est pas ouverte à une société liée à la collectivité publique par un tel contrat à raison des dépenses donnant lieu à immobilisations qu'elle expose au seul titre de son obligation d'entretien des installations que la collectivité propriétaire met à sa disposition alors même que ces immobilisations ne seraient pas totalement amorties avant l'échéance de ce contrat ;

9. Considérant que le contrat de bail, en date du 6 mars 1987, stipule, au titre des obligations du preneur des immeubles, soit la Société Nouvelle du Palais de l'Emeraude, s'agissant de l'entretien et de la réparation : " il les entretiendra en bon état de réparations locatives ou de menu entretien et les rendra à sa sortie en bon état de réparation collective. Il supportera toutes les réparations qui deviendraient nécessaires par suite soit de défaut d'exécution des réparations locatives, soit de dégradations résultant de son fait ou de celui de son personnel ou de sa clientèle (...) " ; que le cahier des charges pour l'exploitation du casino en date du même jour stipule à son article 11 que " le maintien en parfait état des lieux et du matériel du casino devra être assuré en permanence, ce qui implique pour le locataire l'obligation de remédier à toute détérioration ou défectuosité immédiatement et sans délai. (...) " ;

10. Considérant que la société demande la déduction d'amortissements pour caducité au titre de dépenses inscrites à son actif et correspondant à des travaux réalisés sur l'immeuble du casino dont l'exploitation lui a été confiée, dans le cadre du bail et du cahier des charges d'exploitation précités, lesquels s'analysent comme portant délégation de service public ; que pour justifier la nature des dépenses litigieuses, la société se borne à produire un document mentionnant des dépenses de travaux par corps de métier, sans aucune précision d'ailleurs de l'unité monétaire utilisée, ainsi qu'un tableau des immobilisations et des amortissements au titre de l'exercice clos 2005, postérieur aux impositions en litige ; qu'eu égard à l'imprécision des documents ainsi produits, la société n'établit pas que ces travaux excéderaient ceux qu'en vertu des stipulations précitées du bail et du cahier des charges d'exploitation du casino conclus avec la commune de Dinard, il lui incombait de supporter au titre de son obligation d'entretien de l'immeuble dans lequel elle exerçait son activité et relèveraient des embellissements, améliorations ou changement apportés par l'exploitant et devant devenir la propriété de la commune sans indemnité en fin d'exploitation ; qu'ainsi les travaux litigieux ne sont pas de la nature de ceux qui justifient de pratiquer un amortissement de caducité, nonobstant la circonstance qu'ils aient été inscrits à l'actif de la société comme immobilisations ;

En ce qui concerne la réintégration au résultat de l'exercice clos en 2003 des amortissements constitués au cours des exercices clos en 2002 et antérieurement :

11. Considérant que la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE conteste la réintégration au résultat imposable de l'exercice clos en 2003 des dotations constituées au cours des exercices clos en 2002 et antérieurement ; qu'en se prévalant de la règle d'indépendance des exercices, elle soutient que ces amortissements auraient dû être réintégrés au résultat imposable de l'exercice clos en 2002 lequel constituait, selon elle, le premier exercice non prescrit à la date de l'intervention du service vérificateur ;

12. Considérant qu'aux termes du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, dans la version, résultant de l'article 43 de la loi n°2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificatives pour 2004, applicable aux impositions établies à compter du 1er janvier 2005 en vertu du III de l'article 43 précité : " Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. " ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans la rédaction applicable : " Pour (...) l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun. " ;

13. Considérant qu'à la date de la proposition de rectifications du 25 juillet 2006, le délai prévu par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales pour l'exercice du droit de reprise était expiré s'agissant de l'exercice clos en 2002 ; qu'en effet, contrairement à ce que fait valoir la société requérante, la prescription du droit de reprise de l'administration au titre du résultat de cet exercice n'a été interrompue ni par l'avis de vérification en date du 25 octobre 2005, lequel n'est pas au nombre des actes interruptifs prévus par l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, ni par la proposition de rectifications en date du 20 décembre 2005, laquelle ainsi que le relève d'ailleurs la société requérante, ne portait pas sur l'exercice 2002 ; qu'ainsi les dotations litigieuses, qui étaient inscrites au bilan de l'exercice clos en 2003 et qui n'étaient pas justifiées ainsi qu'il a été dit au point 10, ont pu, en application des dispositions précitées du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, être réintégrées au résultat de l'exercice clos en 2003, premier exercice non prescrit à la date de la proposition de rectifications du 25 juillet 2006, alors même qu'elles avaient été constituées au titre d'exercices antérieurs, sans méconnaissance du principe de spécialité des exercices ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise en application de l'article R. 621-1 du code de justice administrative, que la société SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS GROUPE LUCIEN BARRIERE est rejetée.

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N°12VE02998


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02998
Date de la décision : 04/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Amortissement.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas CHAYVIALLE
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : SELARL ZAMOUR ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-12-04;12ve02998 ?
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