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02/10/2014 | FRANCE | N°12VE02119

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 02 octobre 2014, 12VE02119


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juin 2012 et 9 novembre 2012, présentés pour la société COVEA RISKS, société anonyme dont le siège est 19-21 allée de l'Europe à Clichy (92616), par Me B... et Me A..., avocats ;

La société COVEA RISKS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1008768 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 401 580,34 euros avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la

demande préalable du 29 juin 2010 et capitalisation des intérêts, en réparation du pr...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juin 2012 et 9 novembre 2012, présentés pour la société COVEA RISKS, société anonyme dont le siège est 19-21 allée de l'Europe à Clichy (92616), par Me B... et Me A..., avocats ;

La société COVEA RISKS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1008768 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 401 580,34 euros avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable du 29 juin 2010 et capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice résultant pour elle, en sa qualité d'assureur, subrogée dans les droits de la SA Petillon Auto, de l'incendie le 26 novembre 2007 du garage situé au 6 avenue des Erables à Villiers-le-Bel, exploité par la SA Petillon Auto ;

2° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 401 580,34 euros avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable du 29 juin 2010 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en droit et en fait ; au surplus les premiers juges n'ont pas pris en compte l'ensemble des écritures et notamment le mémoire enregistré le 17 mars 2012 par lequel elle a porté le montant réclamé à la somme de 2 401 580,34 euros ;

- les dommages résultant de violences dans les secteurs urbains en difficulté constituent un domaine privilégié d'application de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; l'enchaînement des événements démontre que les faits délictuels à l'origine du sinistre en cause, qui se sont déroulés une heure après le décès de deux jeunes à moto percutés par un véhicule de police, hors d'un contexte de violences urbaines, n'ont pas été prémédités et que le sinistre a pour cause directe ce rassemblement comme il résulte des rapports d'expertise et de l'intervention du 27 novembre 2007 du Premier ministre à l'Assemblée nationale ; les bandes ne sont devenues organisées que postérieurement à l'incendie du garage ;

- le préjudice constitué des montants qu'elle a versés pour indemniser le bâtiment, le matériel, les marchandises et la perte d'exploitation s'élève à ce jour à 2 401 580,34 euros ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public,

- les observations de Me A...pour la société COVEA RISKS et les observations de Mme C...représentant le préfet du Val-d'Oise ;

Et pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 22 septembre 2014, présentée par le préfet du Val-d'Oise ;

1. Considérant que la société COVEA RISKS fait appel du jugement du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 401 580,34 euros, somme majorée des intérêts au taux légal à compter de la demande préalable du 29 juin 2010, en réparation des préjudices résultant pour elle, en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de la SA Petillon et de la SCI Petillon, des dommages causés par l'incendie d'un garage automobile sis 6 avenue des Erables à Villiers-le-Bel, le 26 novembre 2007 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, d'une part, si la société COVEA RISKS soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier la portée ; que, d'autre part, l'omission d'actualiser dans les visas du jugement le montant de l'indemnité réclamée par la société requérante à l'Etat, qui a été sans incidence sur le sens du jugement, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité ledit jugement ;

Sur la responsabilité de l'Etat du fait des dommages causés par les attroupements et rassemblements :

3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales alors en vigueur, aujourd'hui reprises à l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure : " L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. Il peut exercer une action récursoire contre la commune lorsque la responsabilité de celle-ci se trouve engagée " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport du

20 février 2012 du colonel Delannoy, directeur du service départemental d'incendie et de secours, et n'est pas contesté par le préfet du Val-d'Oise, que le 26 novembre 2007 le garage automobile appartenant à la SCI Petillon, exploité par la SA Petillon Auto, 6 avenue des Erables à Villiers-le-Bel, a été incendié vers dix-neuf heures par un groupe d'individus qui ont lancé des engins incendiaires ; que si la destruction du garage par cet incendie a eu lieu à la suite du décès vers dix-sept heures le même jour de deux adolescents de la commune, il résulte de l'instruction, notamment d'un jugement du Tribunal de grande instance de Pontoise du 17 juillet 2009 et de l'arrêt de la Cour d'assises du Val-d'Oise du 4 juillet 2010 relatifs aux mêmes évènements, que dès la survenue de l'accident dans lequel était impliqué un véhicule de police, des individus présents sur les lieux de cet accident ont organisé les projets d'attaque notamment contre les forces de l'ordre et ont, en utilisant des moyens de communication, notamment une radio de police, constitué des groupes d'individus mobiles qui ont pu préparer leur tenue et leurs moyens d'attaque, notamment des battes de base-ball et des cocktails Molotov, en se rendant préalablement dans leur quartier proche du lieu de l'accident ; qu'ainsi, nonobstant le délai bref qui s'est écoulé entre l'accident et l'incendie et la proximité du garage avec le lieu de l'accident déclencheur des violences urbaines, l'action à l'origine des dommages en cause qui a visé d'abord, à quelques centaines de mètres du garage, la caserne des sapeurs pompiers où les corps des deux jeunes avaient été transportés, et qui présentait un caractère suffisamment prémédité et organisé comme le démontre notamment l'importance des moyens mis en oeuvre, ne peut être regardée comme ayant été commise de manière spontanée alors, d'ailleurs, que le restaurant Mac Donald's de la même commune avait fait l'objet d'une attaque du même type une heure avant l'accident à l'origine de la mort des deux adolescents ; que, par suite, les dommages en cause n'ont pas été commis par un attroupement ou un rassemblement au sens de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société COVEA RISKS n'est pas fondée à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société COVEA RISKS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société COVEA RISKS est rejetée.

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N° 12VE02119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02119
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-05-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Responsabilité régie par des textes spéciaux. Attroupements et rassemblements (art. L. 2216-3 du CGCT).


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : MIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-10-02;12ve02119 ?
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